"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
mercredi 1 juillet 2015
IL ETAIT UNE FOIS UN MEURTRE. Prix du Jury au Festival du film Policier de Beaune, 2011
mardi 30 juin 2015
Les Proies / The Beguiled
de Don Siegel. 1971. U.S.A. 1h44. Avec Clint Eastwood, Geraldine Page, Elizabeth Hartman, Jo Ann Harris, Darleen Carr, Mae Mercer.
Sortie salles France: 18 Août 1971. U.S: 31 Mars 1971
FILMOGRAPHIE: Don Siegel (Donald Siegel) est un réalisateur et producteur américain, né le 26 Octobre 1912 à Chicago en Illinois, décédé le 20 Avril 1991 à Nipoma, en Californie.
1956: l'Invasion des Profanateurs de Sépultures. 1962: l'Enfer est pour les Héros. 1964: A bout portant. 1968: Police sur la ville. 1968: Un Shérif à New-York. 1970: Sierra Torride. 1971: Les Proies. 1971: l'Inspecteur Harry. 1973: Tuez Charley Varrick ! 1974: Contre une poignée de diamants. 1976: Le Dernier des Géants. 1977: Un Espion de trop. 1979: l'Evadé d'Alcatraz. 1980: Le Lion sort ses griffes. 1982: Jinxed.
En dépit de ses affiches — française comme américaine — qui promettent un western classique, Les Proies détourne les conventions du genre pour glisser vers un huis clos trouble, où le malaise suinte à chaque regard. Isolé au cœur de cette sororité confinée, McBurney devient lentement l’objet d’un piège dont la tension monte en spirale. Guerre des sexes inégale (l’élément perturbateur est ici seul contre toutes), le film dévoile, à travers le regard féminin, la montée d’une défiance sourde, puis d’une trahison foudroyante. Don Siegel y explore avec une finesse venimeuse les thèmes du désir et de l’éveil sexuel, de la jalousie et de la possession, de l’infidélité et de la manipulation — autant de passions fondées sur l’illusion, et condamnées à dégénérer. La descente aux enfers de McBurney devient alors la juste conséquence d’une stratégie de survie fondée sur la flatterie, la luxure, l’avidité sensuelle.
Dans ce jeu de séduction et de duperie, où les jeunes pensionnaires, victimes et prédatrices, libèrent leurs pulsions avant de s’effondrer sous le poids de la rancune, Siegel insuffle un malaise persistant. Tous ici sont marqués par une chute morale : le passé incestueux de Martha avec son frère, la tentative de séduction d’une fillette de 12 ans par McBurney (qu’il embrasse sur la bouche !), l’esclavage et le viol tapis dans le passé de la domestique… Autant de failles qui nourrissent une vendetta sanglante, irrespirable, où l’amour trahi devient poison, et la tendresse, arme blanche.
Bruno
4èx
lundi 29 juin 2015
MESSIAH OF EVIL (le messie du mal)
de Willard Huyck et Gloria Katz. 1971. U.S.A. 1h30. Avec Marianna Hill, Michael Greer, Anitra Ford, Joy Bang, Elisha Cook Jr, Royal Dano.
FILMOGRAPHIE: Willard Huyck est un réalisateur, scénariste producteur et acteur américain, né le 8 Septembre 1945 à Los Angeles, Californie, U.S.A. 1971: Messiah of Evil. 1979: French Postcards. 1984: Une Défense Canon. 1986: Howard le canard. Gloria Katz est une réalisatrice, productrice et actrice américaine, née le 25 Octobre 1942 à Los Angeles, Californie, U.S.A. 1971: Messiah of Evil.
Inédit en salles en France, Messiah of Evil est enfin exhumé de l'oubli grâce à l'étendard Artus Films ayant eu l'aubaine de l'éditer en Dvd en 2010. Film culte au sens étymologique du terme alors qu'il s'agit à la base d'une oeuvre de commande, cette série B au budget dérisoire tire parti de son pouvoir de fascination grâce à son ambiance crépusculaire particulièrement éthérée et grâce à la posture mutique d'antagonistes cannibales. Après avoir été alerté par une lettre, Arletty part rejoindre son père, artiste peintre, au sein du village de Point Dune. Sur place, elle constate chez lui son absence mais se retrouve rapidement interloquée par l'intrusion d'un trio d'individus aux motivations suspicieuses. Dans la ville, les évènements inquiétants se déchaînent au rythme d'exactions cannibales de citadins contaminés par un étrange mal. Ovni indépendant alliant le cinéma d'auteur et le film d'exploitation, Messahiah of Evil frappe d'emblée le spectateur de par son esthétisme baroque, les teintes dominantes de rouge et de bleu nous rappelant les fulgurances stylisées d'un certain Mario Bava.
Tourné en Techniscope (le parent pauvre du cinémascope nous évoquera Alain Petit dans le bonus Dvd d'Artus !) avec des comédiens pour la plupart méconnus (si on excepte l'héroïne et deux illustres apparitions secondaires); Messiah of Evil aborde une intrigue insolite assez déroutante auprès de l'errance nocturne de protagonistes en phase de questionnements. Celle de retrouver la trace d'un artiste peintre impliqué dans un fléau de grande ampleur et celle de saisir les aboutissants d'une communauté occulte de partisans se regroupant autour d'une plage pour escompter la venue d'un oracle un soir de lune rouge. Tout le film se focalisant sur les va-et-vient récurrents d'Arletty et de ses compagnons égarés dans une bourgade fantôme, quand bien même les rares habitants qui y résident sont atteints d'une étrange contamination depuis la prophétie d'un pasteur s'étant juré de revenir imposer sa malédiction tous les 100 ans. Avec une volonté d'égarer le spectateur à l'instar du fantasme irrationnel, Willard Huyck et Gloria Katz multiplie les séquences insolites par l'entremise d'un parti-pris pictural, poétique et atmosphérique. De par les décors baroques d'un design d'ameublement où des personnages politiques sont peints sur les murs, et l'atmosphère anxiogène irriguant les pores d'une plage ou du centre urbain. En prime, son rythme languissant et le comportement volontairement incohérent des personnages renforcent le propos du réalisateur délibéré à expérimenter une ambiance hermétique derrière l'ombre planante de Carnival of Souls !
Soutenu d'une envoûtante partition électro rappelant l'acoustique d'un Carpenter, Messiah of Evil se décline en plongée fantasmagorique de par le parcours indécis que l'héroïne arpente sous l'autorité indolente de fantômes inscrits dans l'aigreur (ils versent des larmes de sang à travers leur condition contagieuse). Rehaussé de la présence magnétique de la troublante Marianna Hill (l'Homme des hautes plaines, Le Parrain 2), cette expérience avec l'étrange puise sa densité et son impact émotionnel dans sa création formelle d'un univers cauchemardesque résolument tangible.
Bruno Matéï
2èx
29.06.15
21.09.10 (222 vues)
vendredi 26 juin 2015
PENSIONE PAURA
de Francesco Barilli. 1977. Italie/Espagne. 1h32. Avec Luc Merenda, Leonora Fani, Francisco Rabal, Jole Fierro, José Maria Prada, Lidia Biondi, Maximo Valverde, Wolfango Soldati.
FILMOGRAPHIE: Francesco Barilli est un acteur, réalisateur et scénariste italien, né à Parme en 1943 (Italie). Comme réalisateur: 1968 : Nardino sul Po, 1974 : Il Profumo della signora in nero, 1977 : Pensione paura, 1987 : Cinecittà 50, 1991 : Le Dimanche de préférence,1997 : Casa Barilli (vidéo),1998 : Erberto Carboni (vidéo),2000 : Giuseppe Verdi (vidéo), 2002 : Giorni da Leone (feuilleton TV), 2005 : Il Palazzo ducale e il Bertoja a Parma (vidéo).
Comme scénariste: 1972 : Qui l'a vue mourir ? (Chi l'ha vista morire?), 1972 : Au pays de l'exorcisme, 1974 : Il Profumo della signora in nero, 1977 : Pensione paura, 2002 : Giorni da Leone (feuilleton TV).

Drame psychologique à la croisée du giallo et du polar, Pensione Paura s'avère un ovni délicieusement insolite dans la galerie impartie à ces seconds-rôles rustres ne songeant la plupart du temps qu'à forniquer au sein d'un hôtel lugubre, quand bien même un mystérieux tueur rode aux alentours. A la fin de la seconde guerre mondiale, la jeune Rosa attend impatiemment l'arrivée de son père parti au front depuis des années. Gérante d'un hôtel avec l'appui de sa mère, elle est contrainte de tolérer une clientèle peu recommandable dans leur goût pour la luxure et le voyeurisme. Alors que la mère de Rosa planque un amant dans un placard, cette dernière est retrouvée morte en bas de l'escalier, la nuque brisée. Livrée à elle même malgré la bonhomie sournoise du jules, la jeune fille se confronte aux provocations lubriques de sa clientèle. En particulier, un machiste ne cessant de la harceler avant de daigner dérober les diamants de sa vieille maîtresse.
Trois ans après le Parfum de la dame en noir, superbe introspection psychanalytique d'un trauma infantile, Francesco Barilli renoue avec le même thème dans ce drame schizophrène pour mettre en exergue le portrait fragile d'une adolescente livrée à une inépuisable inquiétude depuis la mort de sa mère et l'absence paternelle. Métaphore sur le fascisme dans le profil alloué à une clientèle vile, collabo et expéditive, poème sur l'incapacité d'assumer le deuil et sur la perte de l'innocence, initiation à la maturité et à l'éveil sexuel, Pensione Paura se pare d'une aura singulière pour traiter ses thèmes sous l'impulsion d'une adolescente prise à parti avec l'arrogance d'une salace clientèle. Principalement un gigolo obsédé sexuel capable d'en déflorer l'innocence, quand bien même deux gangsters viennent s'inviter dans l'établissement dans le but de dérober les diamants d'une rombière parmi sa complicité. Immersif en diable, de par son atmosphère ensorcelante régie au sein d'un hôtel baroque (notamment l'aspect expressionniste des extérieurs rappelant l'architecture picturale de la Maison aux Fenêtres qui rient !), et l'interprétation incandescente de Leonora Fani (l'expression de sa pudeur crève l'écran à chacune de ses apparitions !), l'intrigue hermétique ne cesse de bousculer les habitudes du spectateurs impliqué dans une énigme criminelle assez nébuleuse, à l'instar de la posture extravagante de chacun des protagonistes. Entre film auteurisant et thriller horrifique, Francesco Barilli parvient à consolider ces éléments contradictoires par le biais d'une structure narrative fortuite et d'un lot de rebondissements à la limite du grotesque ! Mais sans toutefois verser dans le ridicule, et grâce à la présence angélique de Leonara Fani, le film ne cesse d'irriguer un pouvoir de fascination dans la déambulation fantasmagorique de l'héroïne sur le fil du rasoir (Alice n'est pas loin !). Le comportement incohérent, déficient ou excentrique des témoins de l'hôtel renforçant l'aspect indicible d'un climat diaphane irrésistiblement magnétique où perversion, débauche et voyeurisme font bon ménage.
Alice et les songes de la perversion
Soutenu par la partition gracile de Adolfo Waitzman et par l'aplomb d'une galerie de comédiens inscrits dans une dépravation insidieuse, Pensione Paura décuple son pouvoir d'envoûtement sous l'impulsion traumatique d'une adolescente livrée à leur déchéance sexuelle. Il en émane un magnifique drame sur le trouble identitaire où l'ombre du Giallo titille l'intérêt du spectateur parmi l'alchimie ambitieuse d'un auteur féru d'ambiance ésotérique (avec l'appui contraire d'un environnement naturel onirique) et de réalisme cru (la scène de viol et les corps dénudés sont filmés sans tabou et les meurtres transmettent une violence morbide). A découvrir d'urgence du fait de sa rareté car il s'agit d'une relique transalpine peu reconnue !
Remerciement à la Caverne des Introuvables.
Bruno Matéï
26.06.15
09.05.11 (376 vues)
jeudi 25 juin 2015
Les Jours et les Nuits de China Blue / Crimes of Passion
Sortie salles France: 19 juin 1985. U.S.A: 19 octobre 1984
FILMOGRAPHIE: Ken Russell est un réalisateur, scénariste, acteur, producteur, monteur et directeur de la photographie britannique né le 3 juillet 1927 à Southampton. 1967 : Un cerveau d'un milliard de dollars, 1969 : Love , 1970 : The Music Lovers, 1971 : Les Diables, 1971 : The Boy Friend, 1972 : Savage Messiah essiah, 1974 : Mahler, 1975 : Tommy, 1975 : Lisztomania,
1977 : Valentino, 1980 : Au-delà du réel, 1984: Les Jours et les nuits de China Blue.1986 : Gothic, 1988 : Salome's Last Dance , 1988 : Le Repaire du ver blanc ,1989 : The Rainbow ,1991 : La Putain, 2002 : The Fall of the Louse of Usher, 2006 : Trapped Ashes segment "The Girl with Golden Breasts".
Quatre ans après son trip métaphysique Au dela du réel, le sorcier fou Ken Russel continue de surfer sur la provocation avec Les jours et les Nuits de China Blue, drame psychanalytique où l'érotisme torride se mêle à une flamboyance sadomaso. Réunissant à l'écran deux illustres comédiens au parcours distinct (Anthony Perkins et Kathleen Turner s'opposant ici dans une guerres des sexes jusqu'au-boutiste !), le cinéaste aborde les thèmes de l'intégrisme, du refoulement et de la frustration sexuelle pour mettre en exergue les rapports équivoques de personnages en quête de rédemption amoureuse. Le Pitch: Bobby Grady est un détective fuyant sa vie conjugale depuis sa frustration avec son épouse asexuée. C'est dans les bras de China Blue qu'il tente de trouver réconfort, une prostituée comblant sans retenue les fantasmes de sa gente masculine. Or, sous son apparence charnelle et sulfureuse, China Blue occupe le jour un poste de stylisme sous le patronyme de Joanna Crane. Bobby tente en désespoir de cause de la courtiser malgré le harcèlement d'un pasteur désaxé, délibéré à repentir la vie débauchée de China. Provocateur en diable spécialiste des ambiances baroques et débridées où l'aura malsaine s'y dilue de manière reptilienne (les Diables), Ken Russel cultive ici un goût pour l'ironie dérangeante afin de dépeindre la frustration sexuelle au sein du couple. Particulièrement du point de vue investigateur de Donny Hopper en quête éperdue de désir sexuel depuis que sa femme frigide se noie dans la désillusion. Pour évoquer la déréliction du célibat et la crainte d'aimer et d'être aimé, Ken Russel brosse à travers le personnage ambivalent de China Blue un magnifique portrait de femme contrainte d'endosser la défroque d'une prostituée pour assouvir ses pulsions fantasmatiques, et par la même occasion, se venger du machisme de l'homme lors de séances de sadomasochisme.
Bafouée par des années de déception amoureuse et faute d'un passé incestueux, elle se répugne à amorcer une relation sentimentale durable avec un amant par peur de routine et de tourment. Or, en guise d'expiation métaphorique, un prêtre psychotique s'incruste dans son quotidien salace afin de la repentir et apaiser son propre refoulement à travers son refus d'accomplir ses pulsions sexuelles. Et donc, auprès des thèmes de la perversion, de la débauche et du désir, Ken Russel dresse le constat d'échec d'une détresse humaine s'isolant dans la sexualité de consommation afin d'anesthésier leur frustration. Dans sa fonction schizophrène de prostituée en perdition, Kathleen Turner se porte garante avec une spontanéité impétueuse et un sens de provocation qui laisse pantois ! Lascive, sexy, dominatrice, effrontée car provocatrice en diable, elle magnétise l'écran parmi l'audace de ses loisirs lubriques et avec la complicité masculine d'une clientèle infortunée. En tenue d'Eve et de jarretelles compromise aux excès en tous genres, l'actrice s'avère d'ailleurs vaillante d'avoir accepté un rôle aussi subversif alors qu'elle venait de triompher sur les écrans dans l'aventure familiale A la poursuite du diamant vert. Dans son dernier grand rôle, Anthony Perkins lui partage la vedette dans une posture extravagante de pasteur intégriste obsédé par le pêché de la luxure ! Il faut le voir accourir avec son godemiché afin de tourmenter China Blue et lui énoncer d'innombrables versets religieux à l'idéologie prohibitive. D'autre part, durant son parcours psychotique en chute libre on peut également évoquer l'ironie sardonique de son final oppressant pour le rapport du double entretenu avec China Blue alors que Ken Russel se permet d'offrir un clin d'oeil au célèbre Psychose dans la composante du travestissement.
Soutenu d'une partition dissonante électrisante, Les Jours et les nuits de China Blue invoque le délire visuel baroque autant qu'une tendresse affligée pour cette satire féministe impartie à la sexualité névrosée et à l'assouvissement du couple. Par le biais de ses personnages frustrés, refoulés, schizos et psychotiques, le réalisateur transcende un poème sulfureux sur la passion du désir, l'acceptation de l'échec et la rédemption amoureuse (vecteurs indissociables pour l'harmonie conjugale) quand bien même Kathleen Turner et Anthony Perkins se disputent l'autorité dans un anthologique rapport destructeur de discorde misogyne.
19.01.23. 5èx
18.02.11 (594 vues)
mardi 23 juin 2015
LE LOUP-GAROU DE LONDRES. Oscar des Meilleurs Maquillages, 1982.
"An American werewolf in London" de John Landis. 1981. U.S.A. 1h37. Avec David Naughton, Jenny Agutter, Griffin Dunne, John Woodvine, Don McKillop, Paul Kember.
Sortie salles France: 4 Novembre 1981. U.S: 21 Août 1981
FILMOGRAPHIE: John Landis est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur américain, né le 3 Août 1950 à Chicago (Illinois, Etats-Unis).
1973: Schlock. 1977: Hamburger Film Sandwich. 1978: American College. 1980: The Blues Brothers. 1981: Le Loup-garou de Londres. 1983: Un Fauteuil pour deux. 1983: La Quatrième Dimension. 1985: Série noire pour une nuit blanche. 1985: Drôles d'espions. 1986: Trois amigos ! 1986: Cheeseburger film sandwich. 1988: Un Prince à New-York. 1991: l'Embrouille est dans le sac. 1992:Innocent Blood. 1994: Le Flic de Beverly Hills 3. 1996: Les Stupides. 1998: Blues Brothers 2000. 1998: Susan a un plan. 2010: Cadavres à la pelle.
Sorti aux Etats-Unis quatre mois après la sortie du tout aussi novateur Hurlements, Le Loup-Garou de Londres révolutionna le genre horrifique grâce en priorité à une séquence de transformation restée inégalée depuis le talent perfectionniste de Rick Barker. Couronné d'un Oscar pour la rigueur de ses effets-spéciaux, ce moment d'anthologie au réalisme saisissant s'avère d'une intensité émotionnelle proprement hypnotique. John Landis filmant au plus près des parties corporelles cette dégénérescence monstrueuse en insistant notamment sur l'impuissance de la victime hurlant sa détresse de ne pouvoir résister à la mutation ! Et à ce niveau, on peut autant saluer le jeu viscéral de David Naughton affligé par la sueur et les larmes pour contempler avec stupeur horrifiée sa déchéance animale ! En parvenant à agencer la comédie et l'horreur, John Landis accomplit le tour de force d'amuser (les facéties espiègles du héros retrouvé nu dans un quartier zoologique de Londres) et de nous terrifier (l'incroyable balade nocturne que nos deux touristes arpentent prudemment dans la campagne brumeuse des Landes) malgré le classicisme de son intrigue centrée sur une malédiction lycanthropique.
Avec une efficacité imparable dans sa charpente narrative et une maîtrise assidue en terme de réalisation, John Landis réexploite le mythe du loup-garou dans le contexte contemporain d'un Londres hanté par les anciennes traditions. Reprenant les clichés usuels au genre, il parvient donc à renouveler le thème grâce au judicieux dosage réalisme horrifique (meurtres particulièrement sauvages) et fantaisie extravagante (sens burlesque du gag inventif), à point tel que rarement un film dit d'horreur n'aura su aussi bien combiner le brassage des genres. Qui plus est, outre la fonction en roue libre des seconds-rôles pleins de charisme dans leur témoignage ubuesque (le couple d'enquêteurs en perpétuelle discorde), apeuré (toute la clientèle de l'auberge) ou au contraire prévenant (Griffin Dunne endossant la posture putrescente du zombie altruiste, John Woodvine campant avec autorité un patricien loyal) le Loup-garou de Londres n'oublie pas de provoquer l'empathie parmi le couple David Naughton (féru de ferveur spontanée !), Jenny Agutter (succulente de sensualité timorée !). Notamment la condition torturée impartie à David puisque harcelé par son acolyte d'outre-tombe de devoir se plier au suicide salvateur au moment même où il s'éprend d'une jeune infirmière. Enfin, par l'entremise iconique du zombie tourné ici en mode parodique, John Landis parvient encore à détourner le concept canonique du loup-garou avec inventivité (les morts reviennent à la vie tant que la malédiction n'est pas levée !) et sens burlesque payant, quand bien même son point d'orgue catastrophique nous laisse les mains moites par son intensité cuisante !
Multipliant avec générosité les séquences d'anthologie au rythme d'une BO tantôt entraînante, tantôt envoûtante,(les rêves cauchemardesques de David prenant pas sur la réalité de son quotidien, l'exhibition au parc zoologique, la poursuite dans les sous-sols du métro, la panique urbaine empruntée au mode catastrophe et la fameuse transformation animale) Le Loup-Garou de Londres a réussi à renouveler le genre pour s'imposer comme la quintessence moderne du film de loup-garou que seul son homologue Hurlements est parvenu à émuler.
Bruno Matéï
lundi 22 juin 2015
Frissons d'horreur / Macchie Solari/Autopsy
de Armando Crispino. 1975. Italie. 1h40. Avec Mimsy Farmer, Barry Primus, Ray Lovelock, Carlo Cattaneo, Angela Goodwin, Gaby Wagner, Massimo Serato, Ernesto Colli.
Sortie salles France: 3 Octobre 1979
FILMOGRAPHIE: Armando Crispino est un réalisateur et scénariste italien, né le 18 Octobre 1924 à Biella, Italie, décédé le 6 Octobre 2003 à Rome.
1966: Le Piacevoli notti. 1967: Johnny le bâtard. 1968: Commandos. 1970: Faccia da Schiaffi. 1972: L'Etrusco uccide ancora. 1974: La Badessa di Castro. 1975: Frissons d'Horreur. 1975: Plus moche que Frankenstein tu meurs.
Thriller un peu trop méconnu en dépit d'une certaine renommée auprès de cinéphiles aguerris, Frissons d'Horreur s'engage dans la voie du thriller (je préfère bannir le terme Giallo) avec maîtrise, efficacité et subversion pour tenir en haleine le spectateur jusqu'à la révélation du coupable.
Ainsi, en alliant les meurtres en série d'un mystérieux assassin avec les suicides de quidams en détresse influencés par un climat tropical, Armando Crispino façonne une ambiance d'étrangeté magnétique que la posture équivoque de chacun des personnages accentuera à travers leur névrose interne. A l'instar de ce curé irascible à peine remis de sa convalescence psychiatrique et de Simona, femme médecin plongée dans la névrose depuis la disparition inexpliquée de ses proches et depuis une volonté de lui nuire par la déraison. Si bien que par l'entremise d'une sombre conjuration où suspects et faux coupables font bon ménage, le cinéaste réussit à implanter un suspense graduel en dépit d'une intrigue un peu confuse. Notamment dans sa structure narrative désordonnée d'un montage elliptique et pour l'éventuelle incohérence de certains protagonistes (volontairement outranciers ou au contraire mutiques). On ne manquera pas d'ailleurs de souligner également le caractère inopinément psychotique de certaines confrontations musclées (Simona s'en prenant brutalement à l'un de ses adjoints après une tentative de viol, le curé s'égosillant avec les poings à résonner un voisin de palier) ajoutant à l'ensemble une atmosphère paranoïaque aussi inquiétante que fascinante. Outre la présence charnelle et dénudée d'une Mimsy Farmer pleine d'intensité érotique, et le charisme inquiétant des seconds-rôles masculins, Frissons d'Horreur se permet en outre une sublime partition mélancolique composée par l'illustre Ennio Morricone afin de renforcer cette douce ambiance d'étrangeté "romantisée" que les protagonistes influencent dans leur posture interrogative, équivoque, suspicieuse ou décomplexée (le compagnon de Simona).
Tour à tour glauque et étrange, trouble et déroutant, Frissons d'Horreur pâti peut-être d'un manque de clarté dans l'ossature sporadique du scénario mais déborde de suspense et d'audace (les visions d'effroi de cadavres d'enfants nus lors du prologue psychotique) à distiller un climat interlope où se mêlent sans complexe sexualité et déviances macabres. Un excellent thriller donc toujours plus magnétique, notamment auprès de son charme à la fois mélancolique et vénéneux symptomatique du thriller transalpin.
*Bruno
14.04.25. 4èx. vf
vendredi 19 juin 2015
Frère de Sang / Basket Case
Sortie salles U.S: Avril 1982
FILMOGRAPHIE: Frank Henenlotter est un réalisateur américain de films d'horreur né le 29 août 1950 à New-York. 1982: Frères de sang. 1988: Elmer, le remue-méninges. 1990: Frères de sang 2. 1990: Frankenhooker. 1992: Frères de Sang 3. 2008: Sex Addict.
Ovni culte des années 80 célébré dans les vidéos-clubs en vogue, Frère de Sang fut également la révélation du cinéaste underground Frank Henenlotter, petit maître de la provocation et du mauvais goût dans sa conception d'une improbable amitié morbide entre deux frères siamois. A la croisée d'Elephant Man pour sa plaidoirie sur le droit à la différence et des films gores d'Herschell Gordon Lewis pour son outrance démesurée, Frère de Sang réussit l'exploit d'y communier drôlerie, horreur, dramaturgie par le biais d'exactions vindicatives de Duane et Belial .
Tourné avec les moyens du bord dans les bas-fonds sinistrés de New-york et en toute illégalité, incarnée par des comédiens amateurs surjouant sans complexe leur prestance extravagante, Frère de sang transpire la série B bisseuse, notamment par le biais d'une photo aussi blafarde que granuleuse. Récit horrifique principalement dédié au gore révulsif et à l'humour sardonique, Frères de sang se complaît à émailler l'intrigue de séquences-chocs redoutablement percutantes (bande-son stridente à l'appui !), tout en parodiant en toile de fond la posture dégénérée d'une foule de marginaux reclus dans un hôtel sordide. Cadre d'aménagement précaire auquel Duane et Belial s'y sont réfugiés le temps de parfaire leur besogne punitive. De par son réalisme crapuleux où les gerbes de sang sont auscultées en gros plan et l'intensité des exactions cruelles d'une créature s'égosillant à tout va sa cruelle condition, Frères de Sang oppose horreur et émotion avec une surprenante empathie. A l'instar de ce flash-back remémorant la tragédie familiale des frères siamois et leur infaillible tendresse impartie l'un pour l'autre. Ainsi, dans le reflet de sa haine meurtrière et par la détresse de son regard habité par la rancoeur de l'injustice, Belial s'avère le véritable pilier émotif, quand bien même la modestie adroite des effets spéciaux parviennent à le crédibiliser dans sa mobilité étriquée, dégingandée. Outre l'aspect spectaculaire des séquences chocs souvent impressionnantes, les ressorts dramatiques impartis à la jalousie possessive de Belial n'hésitent pas à verser dans la cruauté pour les rapports de divergence (et télépathiques) entrepris avec son frère depuis une liaison amoureuse entamée avec une réceptionniste.
Ultra gore, glauque et malsain en diable, drôle, tendre et émouvant, Frères de Sang idéalise l'objet culte de déviance pour l'effronterie du scénario débridé alliant éclairs de violence et bouffées de tendresse parmi l'amour impossible de deux frères infortunés. Du gore underground aussi trash qu'incroyablement dégénéré, à revoir sans modération aucune.
*Bruno
6èx
jeudi 18 juin 2015
Grace. Prix du Jury, Gerardmer 2010.
de Paul Solet. 2009. U.S.A. 1h25. Avec Jordan Ladd, Stephen Park, Gabrielle Rose, Serge Houde, Samantha Ferris, Kate Herriot, Troy Skog.
Sortie salles U.S: 4 Août 2010
FILMOGRAPHIE: Paul Solet est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur américain.
2009: Grace. 2015: Dark Summer.
Le Pitch: Enceinte et sur le point d’accoucher, Madeline voit son monde s’effondrer lorsque son mari périt dans un accident de voiture. Rescapée in extremis, elle donne naissance à un bébé mort-né... qu’elle parvient, contre toute attente, à ramener à la vie. Mais l’enfant a un besoin vital...
Dans la lignée du Monstre est vivant et de Répulsion, Grace revisite le mythe du bébé tueur avec un réalisme oppressant, presque paranoïaque, en s’appuyant sur la dérive psychique d’une mère accablée par la tragédie : celle de nourrir son enfant d’hémoglobine. Jusqu’à se faire saigner elle-même, livrant son sein à une bouche vorace plus qu’affamée. Le quotidien devient cauchemar. L’atmosphère se fait fétide, saturée d’odeurs de chair, de sang, de pourriture — un maelström sensoriel où même les mouches viennent harceler le sommeil du nourrisson, l’une d’elles s’infiltrant jusque dans sa narine.
Entre drame psychologique (Madeline, déchirée, se perd dans une errance mentale sans retour) et horreur organique (détails macabres, putrescence rampante, corps martyrisés), le film s’enferme dans un huis clos suffocant, où une mère en deuil, hantée par ses fausses couches passées, tente de préserver ce qui reste de sa maternité. Grace explore les confins de l’obsession maternelle, le deuil infantile, et cette irrépressible nécessité de nourrir, quitte à basculer dans la folie — quitte à tuer.
Par une mise en scène clinique, sans concession, Solet ose mêler une sensualité trouble à une imagerie morbide, installant un malaise diffus sous une photographie pastel qui tranche avec la crudité du propos. Lentement, inéluctablement, Grace nous entraîne dans une descente aux enfers — jusqu’à la confrontation ultime. Jusqu’au sang.
"Le Sang des Innocentes".
Éprouvant, sordide, sensoriel et viscéralement dérangeant, Grace est une œuvre malsaine qui brouille les lignes entre instinct maternel et pulsion meurtrière. Une expérience extrême où l’innocence se drape de sang, où l’amour devient sacrifice, et où la chair — même la plus douce — finit par pourrir. À ne pas mettre entre toutes les mains.
*Bruno
3èx. Vost
mercredi 17 juin 2015
Piranhas
de Joe Dante. 1978. U.S.A. 1h34. Avec Bradford Dillman, Heather Menzies, Kevin McCarthy, Keenan Wynn, Barbara Steele, Shannon Collins.
Sortie salles France: 15 Novembre 1978. U.S: 3 Août 1978
FILMOGRAPHIE: Joe Dante (né le 28 novembre 1946 à Middletown, New Jersey) est un critique, scénariste, monteur, producteur et réalisateur américain. Son plus grand succès populaire est, à ce jour, Gremlins (1984). 1966-1975 : The Movie Orgy 1976 : Hollywood Boulevard, co-réalisé avec Allan Arkush 1978: Piranhas. 1981 : Hurlements. 1983 : La Quatrième Dimension, troisième épisode, Its a Good Life 1984 : Gremlins 1985 : Explorers 1987 : Cheeseburger film sandwich, 5 sketchs .1987 : L'Aventure Intérieure. 1989 : Les Banlieusards. 1990 : Gremlins 2, la nouvelle génération . 1993 : Panic sur Florida Beach . 1998 : Small Soldiers 2003 : Les Looney Tunes passent à l'action . 2006 : Trapped Ashes , premier segment, Wraparound. 2009 : The Hole.
Bruno
La Chronique de Piranha 3D: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/02/piranha.html
mardi 16 juin 2015
L'Antre de la Folie / In the mouth of madness. Prix de la Critique, Fantasporto 96.
de John Carpenter. 1994. U.S.A. 1h35. Avec Sam Neil, Jürgen Prochnow, David Warner, Charlton Heston, Julie Carmen, John Glover, Frances Bay.
Sortie salles France: 8 Février 1995. U.S: 3 Février 1995
FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 :The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible, 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward.
Ultime volet de sa trilogie de l'apocalypse initiée par The Thing et Prince des Ténèbres, l'Antre de la Folie est l'un des rares films d'avoir su traiter du thème de la folie avec autant de puissance d'évocation, de par son imagerie paranoïde héritée de l'univers de Lovecraft. Si le scénario n'est en rien le prototype d'un des romans de l'écrivain, John Carpenter lui rend dignement hommage à travers un récit tortueux suggérant plus qu'il ne montre l'ascension du Mal, entre fiction et réalité jusqu'à la conjonction. D'une étonnante subtilité pour le cheminement schizophrène d'un assureur rationnel peu à peu gagné par la perplexité, l'Antre de la folie transcende son investigation parano à travers l'influence d'un écrivain porté disparu. Ce dernier s'avérant le maître de cérémonie de la folie progressive après s'être laissé inspiré par des créatures tapies dans l'ombre des enfers.
Truffé de séquences anxiogènes irrésistiblement effrayantes ou déstabilisantes à travers leur facture baroque particulièrement sardonique, l'Antre de la Folie est entièrement dédié à la singularité d'un scénario retors littéralement ensorcelant. Le Mal étant le pilier d'une malédiction conçue pour annihiler l'espèce humaine. Rien que ça ! Car par l'entremise des écrits diaboliques d'un roman d'horreur prenant forme dans la réalité de notre quotidien et possédant un à un les esprits du lectorat (avec en filigrane une réflexion sur les dangers du fanatisme éprouvant plus d'intérêt à se tailler une raison existentielle au sein de la fiction), les forces du Mal ont décidé de parachever leur dessein afin de matérialiser l'apocalypse sur terre. Leur suprématie, leur arme infaillible pour duper l'ennemi: l'extension de la folie du point de vue d'un public fanatique addicte aux romans d'horreur ! Cette mise en abyme, l'enchâssement insinueux de la fiction au sein de notre quotidennieté, John Carpenter la maîtrise à la perfection par le biais d'une réalisation vertigineuse renouvelant sans cesse l'angoisse des situations inédites. A l'instar de son final espiègle désireux de railler cette fois-ci l'esprit du spectateur pour le contaminer à son tour dans une folie contagieuse. Cette ironie mordante cultivé par un venin reptilien est également une des forces du métrage afin de mettre en exergue l'esprit sarcastique de son thème principal: la paranoïa collective engendrant l'hystérie meurtrière tout en nous interrogeant sur notre réalité potentiellement créée/manipulée par un alchimiste, un créateur, un apprenti sorcier apatride,
Une expérience schizo douée d'organisme.
Réflexion sur l'identité, la paranoïa et le fanatisme, méditation sur le pouvoir de persuasion à travers l'autorité d'un auteur mais aussi du point de vue visionnaire d'un cinéaste, l'Antre de la Folie semble avoir été écrit par un diable ricaneur tant la puissance de ses images dérangeantes nous transfigure l'avènement de l'apocalypse. Chef-d'oeuvre schizo s'il en est, (dans) l'Antre de la Folie (titre on ne peut mieux approprié) est également un jubilatoire exorcisme à nos pire frayeurs pour sa parabole impartie à l'influence du Mal et à notre attrait irrésistible pour la fiction conçue pour nous ensorceler.
*Bruno
28.08.24. 4èx. Vostfr
lundi 15 juin 2015
L'Incroyable Alligator
"Alligator" de Lewis Teague. 1980. U.S.A. 1h31. Avec Robert Forster, Robin Riker, Michael V. Gazzo, Dean Jagger, Sydney Lassick, Jack Carter, Perry Lang, Henry Silva.
Sortie salles France: 16 Juin 1982. U.S: 2 Juillet 1980
FILMOGRAPHIE: Lewis Teague (né le 8 mars 1938 à Brooklyn, New-York, Etats-Unis) est un réalisateur, monteur, acteur et directeur de la photographie américain. 1974: Dirty O'Neil. 1979: The Lady in red. 1980: L'Incroyable Alligator. 1982: Fighting Back. 1983:Cujo. 1985: Cat's Eye. 1985: Le Diamant du Nil. 1989: Collision Course. 1990: Navy Seals: les meilleurs. 1991: Wedlock.
Un formidable B movie parvenant avec des moyens modestes à nous faire croire à l'improbable en la présence incongrue d'un alligator géant !
Arpentant sans succès les égouts parmi une escorte de spécialistes, David Madison est également compromis par l'accueil impromptu d'un chasseur mégalo avant de se réconforter dans les bras de sa collègue. Si sa structure narrative conventionnelle (massacres, enquête, idylle amoureuse, traque en règle) fait preuve de paresse pour renouveler son concept horrifique, la bonhomie attachante du couple de héros formé par Robert Foster et Robin Riker, et l'aspect fascinant de la créature disproportionnée cultivent une constante efficacité à l'ensemble purement divertissant. Notamment par le biais de deux séquences aussi spectaculaires qu'audacieuses dans leur schéma catastrophique, témoignage de masse d'une population en panique à l'appui ! L'alligator ayant parvenu à rejoindre les ruelles de la ville, particulièrement celle où une réception bat son plein parmi l'élite d'invités mondains. Avec modestie, et afin de renforcer son degré de réalisme, le cinéaste combine astucieusement la qualité d'effets mécaniques avec l'authenticité d'un saurien déambulant autour de maquettes très réussies. Ainsi, en dépit de son aspect bricolé pour autant pétri de charme, ses séquences jouissives parviennent autant à amuser qu'à provoquer frisson et fascination, effets gores soignés en sus.
Si l'Incroyable Alligator pâti d'un manque de densité à travers sa structure narrative et d'une absence de psychologie du point de vue de nos héros bonnards, la décontraction amusée de l'excellent Robert Foster, ses seconds rôles tous aussi charismatiques (Henry Silva en tête !), ses touches d'humour fantaisistes (l'intrusion grotesque du poseur de bombe dans le commissariat, le merchandising autour de la célébrité de l'alligator), son savoir-faire technique, comme le souligne la présence surdimensionnée du caïman, parviennent à élever cette attrayante série B au rang de classique du Monster movie.
*Bruno Matéï
11/03/22.