lundi 10 février 2020

A couteaux tirés

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Knives Out" de Rian Johnson. 2019. U.S.A. 2h10. Avec Daniel Craig, Chris Evans, Ana de Armas, Jamie Lee Curtis, Toni Collette, Don Johnson, Michael Shannon.

Sortie salles France: 27 Novembre 2019

FILMOGRAPHIE: Rian Johnson est un scénariste et réalisateur américain, né le 17 décembre 1973 à Silver Spring (Maryland). 2002 : The Psychology of Dream Analysis. 2005 : Brick. 2008 : Une arnaque presque parfaite. 2012 : Looper. 2017 : Star Wars, épisode VIII : Les Derniers Jedi. 2019: À couteaux tirés.


Satire féroce contre la cupidité et l'hypocrisie du point de vue d'une classe aristocrate, A couteaux Tirés demeure un excellent whodunit sous l'impulsion d'un cast aux p'tits oignons. Qui plus est, derrière son intrigue charpentée rondement menée; on se prend d'empathie pour le joli portrait de femme candide imparti à la domestique en proie au terrible dilemme. Celui d'y trafiquer la vérité afin de taire sa fausse culpabilité, en concertation avec la victime. Le récit se divisant en 2 parties. D'une part, Martha tente de cacher les preuves de sa mise en scène. De l'autre, elle se résigne à dévoiler la vérité à la police au profit du détective fin limier. Et bien que certains rebondissements soient prévisibles (la lègue du testament) et que l'intrigue ne soit pas si subtile qu'escomptée, A couteaux tirés remplit honorablement le cahier des charges sous le moule d'un divertissement hollywoodien fringant (humour sarcastique à l'appui au sein d'un climat familial discordant davantage tempétueux).

*Bruno

vendredi 7 février 2020

L'Oeil du Labyrinthe

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"L'occhio nel labirinto"de  Mario Caiano. 1972. Italie/Allemagne de l'Ouest. 1h35. Avec Rosemary Dexter, Adolfo Celi, Alida Valli, Horst Frank, Sybil Danning, Franco Resse.

Sortie salles Italie: 24 Mars 1972

FILMOGRAPHIEMario Caiano, né le 13 février 1933 à Rome, décédé le 20 septembre 2015 dans la même ville, est un réalisateur italien. 1961 : Ulysse contre Hercule. 1963 : Goliath et l'esclave rebelle. 1963 : Le Signe de Zorro. 1964 : La Griffe du coyote. 1964 : Maciste et les 100 gladiateurs. 1964 : La Fureur des gladiateurs. 1964 : Mon colt fait la loi. 1965 : Les Amants d'outre-tombe. 1965 : Erik, le Viking. 1967 : Ombres sur le Liban. 1968 : Un train pour Durango. 1968 : Son nom crie vengeance. 1972 : Shangaï Joe. 1972 : L'Œil du labyrinthe. 1973 : I racconti di Viterbury - Le più allegre storie del '300. 1975 : ...a tutte le auto della polizia...1976 : Milano violenta. 1977 : Assaut sur la ville. 1977 : Antigang. 1977 : Nazi Love Camp 27. 1980 : Ombre. 1988 : Nosferatu à Venise. 1993: Moscacieca (téléfilm). 1999 : Il presepe napoletano. 2000: Per amore per vendetta (téléfilm).


Une belle surprise que ce curieux Whodunit tropical aussi magnétique qu'attachant !
Que voici un intéressant Giallo plutôt méconnu dans nos contrées, tant et si bien qu'il reste à ce jour inédit sous support numérique au grand dam des fans indéfectibles. Réalisé par l'habile artisan Mario Caiano (Assaut sur la ville, Shangaï Joe et surtout les Amants d'outre-tombe, excusez du peu !), l'Oeil du Labyrinthe opte pour le Whodunit à travers la houleuse investigation de Julie à la recherche de son amant disparu lors de circonstances inexpliquées. Car à la suite d'un cauchemar morbide au cours duquel Lucas est assassiné de sang froid par un mystérieux assassin, Julie décide de se laisser guider par l'agenda de celui-ci avant de rencontrer le directeur d'un orphelinat lui conseillant de visiter une villa côtière fréquentée par des convives interlopes. Amorçant son intrigue par un meurtre graphique assez croquignolet, l'Oeil du Labyrinthe reste ensuite bien sage au niveau des homicides qui tâchent, tant et si bien qu'il faudra patienter jusqu'au dernier quart d'heure afin de retrouver ce goût frelaté pour une violence malsaine de par sa complaisance assumée typiquement transalpine. Vous voilà donc prévenus amateurs de gore faisandé ! Pour autant, et avant de faire grise mine, laissez vous plutôt guider par la belle Julie jouant les investigatrices en y fréquentant des machistes pervers, des femmes rancunières, des drogués et autre déficient afin de lever le voile sur le mystère "lucas" que toute l'assemblée fréquentait paradoxalement !


Thriller à suspense donc aussi bien attachant que fascinant de par son climat d'étrangeté solaire que Caiano exploite habilement à travers le cadre exigu d'une villa implantée auprès d'un cadre exotique, l'Oeil du Labyrinthe s'avère magnétique sous l'impulsion d'un casting perfectible pour autant sincère à travers leurs profils indicibles. L'intérêt du récit résidant bien évidemment auprès de notre interrogation du fameux coupable tout en s'efforçant de saisir les agissements (si) naïfs d'une gourde facilement influençable. La ravissante Rosemary Dexter (au teint basané !) endossant le rôle de Julie avec une mine chétive sensiblement lascive auprès d'un tempérament (trop) vulnérable. D'ailleurs, de par son jeu gentiment discret et ses rebondissements équivoques parfois un tantinet tirés par les cheveux, on redoute que son épilogue soit rapidement bâclée au profit d'un argument éculé. Que nenni ! Le réalisateur ayant pris soin de bien planifier son récit jusqu'à l'ultime quart-d'heure révélateur démontrant de manière aussi limpide qu'explicative les mobiles de l'assassin et ses tenants et aboutissants cérébraux.


Histoire d'amour passionnelle efficacement contée autour d'un cadre côtier sensiblement envoûtant auquel évolue une galerie de personnages suspicieux assez portés sur la luxure (le réalisateur multipliant de manière autonome les cadrages alambiqués ou géométriques, notamment pour tenir compte de la fragilité névrosée de l'héroïne), l'Oeil du Labyrinthe ne déçoit pas pour qui apprécie les thrillers horrifiques spécialement transalpins à travers leur parfum de souffre morbide. 

*Bruno

mercredi 5 février 2020

Uncut Gems

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Joshua et Ben Safdie. 2019. U.S.A. 2h15. Avec Adam Sandler, Eric Bogosian, Lakeith Stanfield, Idina Menzel, Judd Hirsch.

Diffusion Netflix: 31 Janvier 2019

FILMOGRAPHIE: Les frères Joshua Safdie et Ben Safdie sont des réalisateurs américains. 2008 : The Pleasure of Being Robbed. 2009 : Lenny and the Kids. 2014 : Mad Love in New York. 2017 : Good Time. 2019 : Uncut Gems.


Coup double pour les frères Safdie car après s'être fait révélé par l'électrisant Good Time, les voici à nouveau réunis pour y parfaire 2 ans plus tard un nouvel uppercut expérimental, Uncut Gems  estampillé Netflix. Tant et si bien qu'à la sortie de la projo, on reste aussi bien démuni qu'estomaqué par son dénouement escarpé en se questionnant sur pareille audace narrative. Et pourtant, tout semble après tout fatal lorsqu'un joueur invétéré multiplie une ultime fois les risques inconsidérés afin d'emporter la mise. Mais à quel prix ? Transcendé du jeu viscéral d'Adam Sandler quasi méconnaissable en loser à la fois instable et paumé, ce dernier donne chair à ce personnage vulnérable avec une vérité humaine névralgique. Dans la mesure où son épreuve de force moral perpétuellement impitoyable se répercute sur notre psyché surmenée de par l'avalanche de bévues qu'il encaisse pour l'enjeu d'une opale à grande valeur. Car délibéré à empocher la somme d'1 million dollars après l'avoir consignée auprès d'une vente aux enchères, Kevin Garnett tentera de récupérer son bien passé entre les mains d'un éminent basketteur fasciné par l'objet natif d'Ethiopie. Mais pour corser la donne, le beau-frère de Garnett et ses acolytes mafieux sont également sur le qui vive à s'approprier le magot en suivant les faits et gestes de Garnett.


Quand bien même son ex en instance de divorce et sa nouvelle petite amie ont bien du mal à gérer son instabilité en roue libre au fil d'un périple vertigineux filmé à la manière d'un thriller épileptique. Car filmé dans un sentiment d'urgence au sein d'une métropole new-yorkaise dpcumentée, Uncut Gems irrite, grise, enivre, surmène, palpite nos nerfs avec un brio technique étourdissant (notamment auprès de ses travellings circulaires pour y autopsier les réactions des truands d'un charisme strié). Car véritable vortex émotionnel autour des déambulations de ce jouailler endetté, Uncut Gems nous hypnotise l'attention avec une intensité difficilement gérable. Si bien qu'à certaines occasions de stress généralisé, nous éprouvons un malaise cérébral à contempler ses récurrentes prises de tête entre rivaux vénaux; notamment lorsque son entourage ne cesse de le dénigrer et de le railler sans clémence. Les frères Safdie explosant les codes pour mieux nous ébranler (impossible d'anticiper l'action prochaine !) au sein d'une disparité des genres (thriller, policier, drame psychologique, humour et enfin romance s'entrechoquent en toute autonomie). Et à ce niveau expérimental, on reste autant ébaubi par l'emploi de sa bande-son dissonante. Une partition électro souvent en décalage avec l'action illustrée mais pour autant assortie des personnalités inusitées des cinéastes parvenant à imprimer leur marque avec un goût pour la provocation gouailleuse et l'absurdité. Et ce tout en faisant preuve d'une belle humanité pour ce loser influent, ballotté tous azimuts par un entourage fébrile corrompu par le gain.


Expérience de cinéma autre en proie à un ultra-réalisme parfois difficilement supportable (pour l'expression faussement avenante du jouailler borderline en quête désespérée d'aspiration et d'évasion); Uncut Gems triture nos nerfs, nos attentes et nos réflexions à l'aide d'une dramaturgie bipolaire. Un vrai film Mad dont on sort lessivé et aphone.  

*Bruno

Defendor

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Peter Stebbings. 2009. U.S.A/Canada/Angleterre. 1h41. Avec Woody Harrelson, Elias Koteas, Michael Kelly, Sandra Oh, Kat Dennings, Clark Johnson, Lisa Ray.

Sortie en Dvd France: 11 Mai 2010. Salle limitée U.S: 26 Février 2010

FILMOGRAPHIEPeter Stebbings est un acteur, réalisateur et scénariste canadien, né le 28 février 1971 à Vancouver, en Colombie Britannique. 2010 : Defendor. 2013 : Empire of Dirt.


Modeste série B passée inaperçue à sa sortie si bien qu'en France il est directement commercialisé en Dvd, Defendor aborde les codes du film de super-héros sous couvert thérapeutique eu égard des déficiences d'Arthur Poppington interrogé par sa psychiatre durant sa détention en prison. C'est de cette manière dépouillée que le récit débute avant de nous illustrer ses bravoures punitives puisque délibéré à appréhender un éminent trafiquant de drogue qu'il surnomme le "capitaine entreprise" et qu'il accuse commanditaire de la mort de sa mère. D'ailleurs, le réalisateur en profitera via flash-back d'évoquer son enfance meurtrie, faute de démission maternelle. Sans jamais daigner transcender le genre, Peter Stebbings opte donc pour un parti-pris humaniste en la solide présence de Woody Harrelson plutôt sans fard à nous attacher à son personnage d'olibrius fermement convaincu de nettoyer la délinquance urbaine dans le corps pugnace du Defendor.


Tout du moins, et pour se donner une raison d'exister en y aidant son prochain, c'est sa ferme conviction d'endosser cette double personnalité dans sa risible panoplie de super-héros ébène (il est affublé de vêtements noirs et d'un casque protecteur) arpentant les quartiers malfamés à l'aide de gadgets de fortune (projectiles de billes ou de guêpes après s'être échappées d'un verre et batte de baseball qu'il empoigne pour intimider ses adversaires à défaut d'arme à feu qu'il répugne). Ainsi, sans jamais céder à une action homérique (raison probable pour laquelle il fut banni des salles dans divers pays), l'intrigue nous retranscrit avec facétie ses tentatives infructueuses d'alpaguer cette sphère criminelle avec l'aide amiteuse d'une junky qui parvint plus tôt à le sauver lors d'une altercation avec un flic ripou et ses complices. Et c'est bien là le point le plus intense de l'intrigue quant à leur relation amicale fondée sur la simplicité des sentiments de par leur solitude commune à se confier sur leurs tourments parentaux. Et donc, à travers le thème de la démission parentale,  Defendor parvient à faire vibrer la corde sensible avec une modeste émotion empathique. Et ce même si le dénouement tranché s'avère très émouvant dans la retranscription de leurs sentiments à la fois torturés et éplorés sous l'impulsion d'un jeu d'acteurs modérément affecté.


Divertissement bonnard modestement attachant grâce à la complémentarité du duo Woody Harrelson / Elias Koteas, Defendor y retranscrit avec simplicité, tendresse, humour, émotion puis une certaine gravité ces profils marginaux en quête de catharsis de par leur trauma infantile destitué de pivot familial. 

*Bruno
2èx

vendredi 31 janvier 2020

6 Femmes pour l'Assassin / Sei Donne per l'Assassino / Blood and Black Lace

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Mario Bava. 1964. Italie. 1h29. Avec Cameron Mitchell, Eva Bartok, Tomas Reiner, Ariana Gorini, Dante Di Paolo, Mary Arden, Franco Ressel, Luciano Pigozzi, Massimo Righi, Lea Lander, Francesca Ungaro.

Sortie salles France: 30 Décembre 1964

FILMOGRAPHIE:  Mario Bava est un réalisateur, directeur de la photographie et scénariste italien, né le 31 juillet 1914 à Sanremo, et décédé d'un infarctus du myocarde le 27 avril 1980 à Rome (Italie). Il est considéré comme le maître du cinéma fantastique italien et le créateur du genre dit giallo. 1946 : L'orecchio, 1947 : Santa notte, 1947 : Legenda sinfonica, 1947 : Anfiteatro Flavio, 1949 : Variazioni sinfoniche, 1954 : Ulysse (non crédité),1956 : Les Vampires (non crédité),1959 : Caltiki, le monstre immortel (non crédité),1959 : La Bataille de Marathon (non crédité),1960 : Le Masque du démon,1961 : Le Dernier des Vikings (non crédité),1961 : Les Mille et Une Nuits,1961 : Hercule contre les vampires,1961 : La Ruée des Vikings, 1963 : La Fille qui en savait trop,1963 : Les Trois Visages de la peur, 1963 : Le Corps et le Fouet, 1964 : Six femmes pour l'assassin, 1964 : La strada per Fort Alamo, 1965 : La Planète des vampires, 1966 : Les Dollars du Nebraska (non cédité), 1966 : Duel au couteau,1966 : Opération peur 1966 : L'Espion qui venait du surgelé, 1968 : Danger : Diabolik ! , 1970 : L'Île de l'épouvante ,1970 : Une hache pour la lune de miel ,1970 : Roy Colt e Winchester Jack, 1971 : La Baie sanglante, 1972 : Baron vampire , 1972 : Quante volte... quella notte, 1973 : La Maison de l'exorcisme, 1974 : Les Chiens enragés,1977 : Les Démons de la nuit (Schock),1979 : La Venere di Ille (TV).
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Un an après La fille qui en savait trop, thriller néophyte posant les fondations du Giallo, Mario Bava récidive avec Six Femmes pour l’Assassin, en esthète novateur, à travers une palette de couleurs rutilantes. À rebours de la photo monochrome de son premier essai, il emploie ici le rouge sang pour exalter une facture visuelle à la fois baroque et surréaliste. Ce joyau gothique s’impose alors dans une épure somptueuse, révélant au public un nouveau genre fétichiste, à la croisée du polar criminel et du fantastique.

Le pitch : À Rome, dans les ateliers feutrés d’une célèbre maison de couture, un mystérieux assassin décime une à une les employées vulnérables. Depuis que le journal intime de la première victime a dévoilé des révélations compromettantes, les jeunes mannequins deviennent des proies désignées. La police piétine, désarmée, tandis que le meurtrier poursuit son œuvre, impuni, implacable.

Dès le préambule — un plan rapproché sur une fontaine de jouvence sertie de sculptures — le climat d’étrangeté onirique est posé. L’œuvre, somptueuse, oscille sans cesse entre la rêverie et la fantasmagorie baroque. Cinq minutes plus tard, un meurtre brutal est perpétré dans une forêt crépusculaire échappée d’un conte de fées. Le crime, sauvage, est exécuté par un tueur ganté, masqué, d’une violence inouïe, encore aujourd’hui stupéfiante dans son absence totale de concession.

Dans cette scénographie criminelle et fantasque, un massif de fleurs caressé par le vent nocturne veille le cadavre encore chaud. Six Femmes pour l’Assassin regorge ainsi de visions lumineuses et funestes, d’un florilège de détails insolites au pouvoir pictural foudroyant. Les demoiselles tourmentées y errent entre des demeures gothiques hérissées de sculptures ornementales. Rien n’est laissé au hasard chez Bava : chaque meurtre, chaque ombre, chaque éclat de lumière, participe à l’édification d’un théâtre macabre d’un réalisme frontal. Atmosphère opaque, éclats criards, angoisse flottante, meurtres sadiques d’un sadisme inouï (et hardi pour l’époque) : tout converge vers un suspense cauchemardesque.

Et pourtant, on se laisse happer, envoûter, par la richesse narrative, cynique, retorse, hérissée de fausses pistes qui nous étourdissent jusqu’au vertige.

Au-delà de la sobriété glaçante des comédiens (Cameron Mitchell, formidable de rigidité austère, Eva Bartok, ténébreuse et troublante dans son mutisme), un cortège galant d’actrices italiennes magnifie l’écran avant d’être happé par le tueur, toujours aux aguets. Le criminel, spectre sans nom, silhouette en pardessus noir corbeau, dissimule son visage sous un bas blanc — comme une créature de cauchemar jouant au fantôme dans le réel.


Et la mort apporta la douleur.
Porté par une musique jazzy de Carlo Rustichelli, inattendue mais étrangement adéquate, Six Femmes pour l’Assassin incarne l’archétype du Giallo expressionniste. Sa fulgurance baroque, son inventivité millimétrée, son magnétisme irréel, et la tension organique entre virilité brutale et fragilité féminine, composent une mécanique de suspense au tranchant diabolique. La machination déployée ici fera école, inspirant Argento dans Les Frissons de l’Angoisse, chef-d’œuvre en miroir basé sur le faux-semblant et l’illusion.

Deux monuments inoxydables, d’une puissance esthétique et cérébrale exclusivement italienne. Inégalés, selon mon propre jugement viscéral.

* Bruno
31.01.20. 5èx
14.12.10. 505 v


NOTE:  Six Femmes pour l'assassin a été monté avec l'aide de compagnies française et surtout allemandes puisqu'il s'agit d'une coproduction avec l'Allemagne de l'Ouest.




jeudi 30 janvier 2020

Centre terre, septième continent

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com 

"At the Earth's Core" de Kevin Connor. 1976. Angleterre/U.S.A. 1h30. Avec Doug McClure, Peter Cushing, Caroline Munro, Cy Grant, Godfrey James, Keith Barron, Sean Lynch.

Sortie salles France:  ?  U.S: Juillet 1976.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Kevin Connor est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né en 1937 à Londres (Royaume-Uni). 1973: Frissons d'outre-tombe. 1975: Le 6è Continent. 1976: Trial by combat. 1976: Centre Terre, septième continent. 1977: Le Continent Oublié. 1978: Les 7 cités d'Atlantis. 1979: Le Trésor de la Montagne Sacrée. 1980: Nuits de Cauchemar. 1982: La Maison des Spectres.


Spécialiste du Fantastique mythologique (Le 6è Continent, Le Continent Oublié, Les 7 cités d'Atlantis, Le Trésor de la Montagne Sacrée) et de l'horreur (le génial Nuits de Cauchemar, l'excellent Frissons d'outre-tombe, la Maison des Spectres) sous une facture de série B low-cost, Kevin Connor a su séduire 2 générations de spectateurs à travers les années 70 et 80. Et ce en dépit d'une filmographie aussi pléthorique qu'inégale (notamment à travers des téléfilms et séries TV), comme le démontre ce faiblard Centre terre, 7è continent. La faute incombant à une intrigue ultra linéaire (un chercheur et son adjoint confinés sous la terre vont libérer de l'esclavage un peuple primitif des griffes des Mahars) palliant ses carences par une action échevelée quasi permanente.


Si bien que l'on finit hélas par se lasser de ces morceaux de bravoure redondants alternant confrontations musclées entre héros et monstres caoutchouteux avec les corps à corps contre leurs antagonistes primitifs affublés de peau de bêtes. Pour autant, avec indulgence, le spectacle ultra ringard fait parfois mouche à travers son intégrité de mettre en exergue un spectacle débridé haut en couleurs (criardes !) sous l'impulsion du trio facétieux Doug McClure, Peter Cushing, Caroline Munro très investis dans leur fonction héroïque à la fois badine et bon enfant. Qui plus est, à travers son génial prélude illustrant l'expédition du professeur Perry et de son assistant David creusant l'écorce terrestre avec leur foreuse pour y rejoindre le centre de la terre, on se surprend de s'évader dans leur improbable aventure de par son réalisme étonnamment probant (notamment grâce à l'habileté du montage souvent épileptique). Mais ce sera hélas l'unique moment fantastique véritablement immersif dans sa capacité à nous faire croire à pareille absurdité à l'aide d'effets-spéciaux artisanaux très efficaces.


Divertissement mineur (très) inégal faisant office de curiosité à redécouvrir d'un oeil distrait, Centre Terre, 7è continent nous livre le minimum syndical en terme d'intensité, de souffle épique, d'action inventive, faute d'enjeux étiques soumis à une surenchère infructueuse. Pour autant, avec indulgence, il saura probablement encore séduire une frange de spectateurs nostalgiques de cette époque révolue, notamment grâce aux postures parfois attachantes de Doug McClure, Peter Cushing et de la vertueuse Caroline Munro mutuellement complices afin de ne pas se prendre au sérieux. 

*Bruno
3èx

mardi 28 janvier 2020

Le Mans 66

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Ford v Ferrari" de James Mangold. 2019. U.S.A. 2h32. Avec Christian Bale, Matt Damon, Caitriona Balfe, Jon Bernthal, J. J. Feild, Noah Jupe, Josh Lucas.

Sortie salles France: 13 Novembre 2019

FILMOGRAPHIEJames Mangold est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain né le 16 décembre 1963 à New York, dans l'État de New York, aux États-Unis. 1995 : Heavy. 1997 : Copland. 1999 : Une vie volée. 2001 : Kate et Léopold. 2003 : Identity. 2005 : Walk the Line. 2007 : 3 h 10 pour Yuma. 2010 : Night and Day. 2013 : Wolverine : Le Combat de l'immortel. 2017 : Logan. 2019 : Le Mans 66.


Spectacle plus vrai que nature de courses automobiles pour l'enjeu d'une rivalité entre les entreprises Ford et Ferrarri (US vs Italia !), Le Mans 66 nous laisse groggy sitôt le générique de fin écoulé ! James Mangold s'épaulant du duo clinquant Christian Bale / Matt Damon au gré d'une intensité émotionnelle davantage éprouvée. Notamment eu égard de sa conclusion draconienne pour qui ignore l'improbable destinée du champion britannique Ken Miles réputé pour son franc parler et son caractère obtus. Transi de passion pour l'adrénaline de la vitesse et sa ferveur à relever les défis les plus burnés, Christian Bale crève l'écran de par sa force tranquille et de sûreté à défier ses adversaires autour de circuits à nous donner le tournis. Ainsi, doit-on souligner l'intensité des poursuites capiteuses s'enchaînant à un rythme effréné au point de nous plaquer au siège durant sa seconde partie ?! Mais à travers la rigueur du regard à la fois impassible et déterminé (en tous cas durant les courses de compétition filmées de manière lisible sur toutes les coutures et en dépit des aléas météorologiques !), Christian Bale nous interroge en filigrane sur la nécessité de se transcender pour l'enjeu d'une gageure professionnelle impartie à la passion. En somme, doit-on se sacrifier pour dépasser nos limites et ainsi laisser une trace identitaire dans l'histoire ? Et bien que son épilogue en demi-teinte nous laisse un goût inévitablement amer et mélancolique dans la bouche, on se rassure un peu des conséquences fructueuses des travaux de Ken Miles et de son acolyte Carroll Shelby communément victorieux d'avoir remportés les victoires à Daytona Beach et au Mans (même si Ken arriva second, faute d'un détail technique ubuesque).


Tant auprès de ce dernier intronisé au temple de la renommée américaine du sport automobile, que de Shelby devenant l'un des concepteurs automobiles les plus respectés et accomplis de l'histoire. Quand bien même la Ford GT 40 qu'ils eurent inventés gagna 4 victoires consécutives au Mans de 1966 à 1969. Et bien que le récit estampillé "fait divers" soit parfois romancé à des fins ludiques (notamment l'inimitié jubilatoire entre Ken et un des hauts dirigeants de Ford !), Le Mans 66 parvient à exister par lui même afin d'offrir au spectateur un moment de cinéma épique en apesanteur. Et ce sans se livrer à des démonstrations de force opportunistes quant à la sobriété de sa mise en scène éludée de fioriture car privilégiant l'ultra réalisme documenté. Qui plus est, James Mangold se permet d'étaler son intrigue sur une durée longiligne de 2h32 que le spectateur entérine sans jamais cligner de l'oeil sur sa montre. Car outre la digne complémentarité amicale de Ken / Shelby dénuée de bons sentiments (d'ailleurs sa conclusion concise - pour autant bouleversante - s'avère remarquable de pudeur humaine !), la réalisation virtuose de Mangold nous ensorcelle la vue (celle des courses à répétition) et la raison (ses réflexions sur l'élitisme, le profit des plus hauts commanditaires, l'ardeur de la passion et le dépassement de nos limites). Tant auprès de sa reconstitution historique issue des années 60, de ses seconds-rôles amiteux endossant sans complaisance une fraternité conjugale (les liens amoureux entre Ken et son épouse sont d'une vibrante sobriété, quand bien même leur fils s'écarquille des exploits de son père sans outrance expressive !) que de nos deux héros casse-cous communément en proie à la rage de vaincre les insultes italiennes à travers leur esprit d'émulation. 


Un grand moment de cinéma épuré, aussi tendre et poignant que furieusement tonique et palpitant, dépassant ainsi le cadre standard du divertissement grand public.

*Bruno

lundi 27 janvier 2020

New-York Blackout

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinebisart.blogspot.com

de Eddy Matalon. 1978. France/Québec. 1h32. Avec Jim Mitchum, Robert Carradine, Belinda Montgomery, Ray Milland, June Allyson, Jean-Pierre Aumont, Don Granberry.

Sortie salles France: 28 Juin 1978

FILMOGRAPHIE: Eddy Matalon est un producteur, réalisateur et scénariste français, né le 11 septembre 1934 à Marseille. 1954 : À propos d'une star. 1966 : Le Chien fou. 1968 : Quand la liberté venait du ciel. 1968 : Spécial Bardot. 1970 : L'Île aux coquelicots. 1970 : Trop petit mon ami. 1975 : La Bête à Plaisir. 1977 : Une si gentille petite fille. 1978 : Teenage Teasers. 1978 : New York blackout. 1979 : Brigade mondaine: La secte de Marrakech. 1980 : T'inquiète pas, ça se soigne. 1983 : Prends ton passe-montagne, on va à la plage. 1993 : Deux doigts de meurtre. 1994 : De Serge Gainsbourg à Gainsbarre de 1958 - 1991.


"Toutes les lumières s'éteignent... Et la terreur commence !"
Bien connu de la génération 80 grâce à sa sortie VHS éditée par VIP, New-york Blackout fit son petit effet de fascination de par l'originalité de son pitch tiré d'un fait divers survenu 1 an avant sa sortie salles. La ville de New-york ayant plongée dans l'obscurité le 13 et 14 juillet 1977 à la suite d'un violent orage. Ce qui engendra un millier d'incendies, des pillages et émeutes tous azimuts (coût estimé des pertes à 150 millions de dollars) si bien que 4000 personnes furent arrêtées pour ces méfaits. Co-produit entre la France et le Québec, New-York Blackout ne possède pas le budget adéquat pour concourir à la vérité historique d'une moisson d'incidents épiques rendus ingérables.  Eddy Matalon (Une si gentille petite fille était d'ailleurs sa 1ère expérience horrifique !) mise donc simplement sur le divertissement du samedi soir à travers un cheminement narratif fertile en incidents qu'une poignée de criminels opèrent dans l'impunité au sein d'un immeuble. Car évadés de leur fourgon à la suite d'une gigantesque panne d'électricité, ces derniers s'autoriseront toutes les exactions en s'en prenant aux résidents confinés dans l'obscurité.


Mais un flic débonnaire aux aguets compte bien les appréhender tout en s'efforçant d'y secourir chaque locataire. Baignant dans un climat nocturne sensiblement envoûtant sous l'impulsion d'un cast cabotin plaisamment attachant (Jim Mitchum menant la danse en preux flic) ou (autrement) grisant (mention spéciale à l'expression outrée de Don Granberry en truand décervelé), New-York Blackout parvient efficacement à nous immerger au coeur de ce chaos improbable eu égard des méfaits sans vergogne de 4 péquenots n'hésitant pas à saccager et tuer en toute gratuité. Ce qui nous vaut par l'occasion deux petites séquences chocs assez malsaines quant à l'agonie d'une victime ou à sa violence explicite. Or, si cette série B au montage approximatif ne nous délivre que le minimum syndical en matière de tension, suspense et rebondissements inventifs, elle ne manque ni de charme ni de dynamisme pour l'enjeu de survie de ces occupants sévèrement mis à mal avec ces délinquants sardoniques. Eddy Matalon n'hésitant par à recourir à un humour bête et méchant lorsque ces derniers se raillent de leurs victimes non sans perversité. Notamment auprès du leader jouant insidieusement avec la survie de ces otages avec provocation outrageante.


Série B agréablement troussée et parfaitement rythmée autour d'une unité de lieu et de temps en perdition, New-York Blackout possède ce charme bisseux propre aux années 70 et 80 dans sa modeste volonté d'évader le spectateur dans un cauchemar urbain aux frontières de l'horreur. Efficace. 

*Bruno
2èx

vendredi 24 janvier 2020

Les Rescapés du Futur. Prix de la meilleure actrice, Blythe Danner, 1977

                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site vignette.wikia.nocookie.net

"Futureworld" de Richard T. Heffron. 1976. U.S.A. 1h48. Avec Peter Fonda, Blythe Danner, Arthur Hill, Yul Brynner, John P. Ryan

Sortie salles France: 19 Janvier 1977. U.S: 13 Août 1976

FILMOGRAPHIE PARTIELLERichard T. Heffron est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur américain né le 6 octobre 1930 à Chicago, décédé le 27 août 2007 à Seattle. 1971 : Prenez mon nom, ma femme, mon héritage (TV). 1972 : Fillmore. 1972 : Banacek (série TV). 1973 : Toma (TV). 1976 : Les Rescapés du futur. 1977: Un couple en fuite. 1980 : Mister gaffes. 1981 : A Whale for the Killing (TV). 1982 : J'aurai ta peau. 1984 : V : La Bataille finale (Série TV). 1984 : Anatomy of an Illness (TV). 1984 : The Mystic Warrior (TV). 1985 : Nord et sud. 1989 : La Révolution française (seconde partie : Les Années terribles). 1991 : Tagget (en) (TV). 1995 : Une petite ville bien tranquille (TV). 1996 : Danielle Steel: Un si grand amour (No Greater Love) (TV). 1996 : Le Baron (Série TV).


Faisant suite à Mondwest, classique d'anticipation des Seventies, les Rescapés du Futur fut réalisé 3 ans plus tard sous la houlette d'un spécialiste de téléfilms et séries TV, Richard T. Heffron. Tant et si bien que cela se ressent à travers sa réalisation à la fois académique et maladroite parvenant difficilement à instaurer un suspense ciselé au fil d'une investigation poussive que Peter Fonda et Blythe Danner élaborent en s'égarant (beaucoup trop) dans les sous-sols industriels. Car à la suite de la mort d'un ouvrier, Chuck Browning, journaliste renommé, enquête sur son étrange disparition en embarquant dans le monde du futur créé par la compagnie Delos. Si bien que l'entreprise vient de rouvrir leur parc 2 ans après les tragiques évènements en ayant pour le coup perfectionné leurs humanoïdes. Or, les destinées de Chuck et de son adjointe Tracy finissent par se ternir à la suite d'une improbable découverte aux intentions machiavéliques. Séquelle ludique agréablement menée, de par la complémentarité amiteuse du couple Fonda / Danner plongés dans une sombre énigme aux situations (hélas) parfois ennuyeuses, les Rescapés du Futur ne manquait pas d'argument solide à travers son ingénieux concept d'y substituer les humains par des robots afin d'y régir un monde sans violence.


Tout du moins c'est ce que prétend le docteur Duffy aux 2 reporters si bien qu'en ayant remplacé de hauts dignitaires internationaux par leurs avatars, on peut très bien concevoir que les nouvelles ambitions de Delos étaient autrement délétères à travers leur asservissement planétaire. Mais pour en revenir à l'intrigue aussi inachevée que bâclée, Richard T. Heffron s'égare donc maladroitement à privilégier l'enquête policière que nos 2 journalistes s'efforcent de résoudre avec une motivation routinière. Et ce en dépit de l'amicale intrusion d'un ouvrier épaulé de son fidèle robot (auquel il voue une grande affection !) et d'un d'un final un peu plus dynamique car légèrement palpitant quant à l'enjeu de survie de nos héros poursuivis par leur duplicata. On peut également souligner l'efficacité de certaines idées à la fois finaudes et débridées. A l'instar de jeux futuristes, du combat de boxe télécommandé en passant par le jeu d'échec virtuel. Ou encore lors de la séquence insensée du rêve imprimé sur vidéo que Tracy s'accorde à expérimenter en fantasmant Yul Brynner ! Assurément le moment onirique le plus fascinant, notamment grâce à son efficacité visuelle particulièrement inventive et convaincante.


Frustré à l'idée d'avoir assisté à une séquelle dégingandée beaucoup trop inégale pour nous contenter, les Rescapés du Futur se suit toutefois d'un oeil aussi fureteur que clément eu égard des aimables présences de Peter Fonda (particulièrement convaincant lorsqu'il se confronte à son double !) et de Blythe Danner (toute à fait charmante en reporter spontanée parfois audacieuse) démantelant naïvement un réseau technologique sous l'impulsion d'une partition musicale étonnamment idoine afin d'y accentuer appréhension, fougue et mystère. 

Pour rappel, la chronique de Mondwesthttp://brunomatei.blogspot.fr/2012/…/mondwest-westworld.html

*Bruno
2èx 

Récompense:
Prix de la meilleure actrice pour Blythe Danner et nomination au prix du meilleur film de science-fiction, par l'Académie des films de science-fiction, fantastique et horreur en 1977.

jeudi 23 janvier 2020

Tropique du Cancer

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Al tropico del cancro" de Gian Paolo Lomi et Edoardo Mulargia. 1972. Italie. 1h34. Avec Anthony Steffen, Anita Strindberg, Gabriele Tinti, Umberto Raho, Alfio Nicolosi, Stelio Candelli.

Sortie salles Italie: 30 Septembre 1972

FILMOGRAPHIEEdoardo Mulargia, né le 10 décembre 1925 à Torpè en Sardaigne et mort le 7 septembre 2005 à Rome, est un réalisateur, scénariste et producteur de cinéma italien. Il utilise parfois les pseudonymes Tony Moore ou encore Edward G. Muller.1962 : Le due leggi. 1966 : Vaya con dios gringo. 1967 : Le Courageux, le traître et le sans-pitié. 1967 : Cjamango. 1967 : Non aspettare Django, spara. 1968 : Prie et creuse ta tombe. 1969 : Lesbos, l'amour au soleil. 1969 : El Puro, la rançon est pour toi. 1970 : Un amore oggi. 1970 : Shango, la pistola infallibile. 1971 : Creuse ta fosse, j'aurai ta peau. 1971 : W Django! 1972 : Tropique du Cancer. 1976 : La Figliastra. 1980 : Les Évadées du camp d'amour. 1980 : Hôtel du paradis. 


Giallo singulier exhumé de sa torpeur grâce à l'éditeur Le Chat qui Fume, Tropique du Cancer ne ressemble à nul autre métrage à travers son cocktail de suspense, d'érotisme torride, de meurtres cruels et de rites vaudous. Sur ce dernier point, on peut d'ailleurs souligner l'aspect documenté d'une authentique séance de transe prise sur le vif auprès d'une populace haïtienne extatique. Le Pitch: un couple de touristes passent leur villégiature à Haïti au moment d'y retrouver une connaissance amicale quant au profil du docteur Williams. Ce dernier exerçant un trafic de drogue hallucinogène, son entourage s'efforce de se l'approprier en dépit d'un mystérieux tueur sévissant aux alentours. Peu à peu, l'amie de Fred tombe sous le charme du docteur Williams grâce aux effets hallucinatoires de la drogue libérant nos fantasmes les plus inavouables. Bien que personnellement je préfère l'estampiller "thriller tropical" agréablement marginal, Tropique du Cancer ne passionne guère à travers son intrigue tortueuse desservie d'un montage elliptique et de la présence de quelques seconds-rôles peu convaincants. 


Pour autant, grâce à la caractérisation insidieuse de ces protagonistes peu recommandables et à sa forme flamboyante, ce p'tit métrage interlope séduit et intrigue constamment à travers leurs postures équivoques. Surtout si je me réfère au triangle amoureux en bien mauvaise posture de par leur destinée galvaudée, et à certains seconds-rôles au charisme extravagant. Qui plus est, scandé d'un climat solaire étouffant autour des va et vient d'une population endossant l'improvisation, Tropique du Cancer attise implacablement notre curiosité jusqu'au mot fin à travers sa moisson de séquences impromptues qu'il est impossible d'anticiper. Cependant, on peut également déplorer le caractère dérangeant des sacrifices animaliers. Ttant auprès de la séance vaudou, d'une injection sur une araignée que des labeurs quotidiennes commises dans un abattoir. Ce qui insuffle à l'ensemble un drôle sentiment de malaise et de futile fascination quant à la présence invisible du tueur décimant ses victimes de manière abrupte. Les décors insolites rehaussant l'attrait stylisée de la procession criminelle à défaut de nous délivrer des moments inoubliables (bien qu'une séquence gore s'avère plutôt probante quant à son effet de répulsion viscéral). 


Série B mineure au sein du Giallo hétérodoxe, Tropique du Cancer parvient sensiblement à nous évader dans l'état Haïtien chargé d'occultisme et d'homicides sauvages. Et ce en compagnie de la sublime Anita Strindberg déambulant dans les ruelles ensoleillées au rythme d'une influence concupiscente. A l'instar d'une rutilante fantasmagorie faisant presque écho au Venin de la peur de Fulci. Un sympathique thriller transalpin donc, à défaut de nous laisser une trace indélébile, même si on y préserve un étrange goût âcre dans la bouche. 

*Bruno

mercredi 22 janvier 2020

Resurrection. Prix Spécial du Jury, Avoriaz 81.

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site 

de Daniel Petrie. U.S.A. 1h43. Avec Ellen Burstyn, Sam Shepard, Richard Farnsworth, Roberts Blossom, Clifford David, Pamela Payton-Wright, Jeffrey DeMunn, Eva Le Gallienne, Lois Smith...

Sortie U.S.A: 26 Septembre 1980.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Daniel Petrie est un producteur, réalisateur et scénariste canadien, né le 26 novembre 1920 à Glace Bay (Canada), et décédé le 22 août 2004 à Los Angeles, en Californie (États-Unis). 1962: The Main Attraction. 1978: The Betsy. 1980: Resurrection. 1981: Le Policeman. 1988: Cocoon, le retour. 1997: The Assistant.

 
"Résurrection : poème d’un au-delà humain".
Couronné du Prix Spécial du Jury à Avoriaz un an après sa sortie, Résurrection est le prototype du film maudit, oublié de tous, alors qu’il s’agit d’une œuvre lumineuse, d’une profondeur humaine exaltante. On y célèbre le jeu fragile d’Ellen Burstyn, portant le film à bout de bras avec une intensité dramatique à vif, et celui de seconds rôles et figurants habités d’une vérité plus vraie que nature. À ce titre, on peut vanter les mérites d’une réalisation modeste, signée Daniel Petrie, qui donne chair à chacun avec un vérisme naturaliste — à l’image d’une scénographie bucolique que n’aurait pas reniée le scrupuleux Terrence Malick, tant elle épouse le souffle romanesque de La Balade Sauvage ou des Moissons du ciel.

Le pitch : menant une existence paisible aux côtés de son époux, Edna voit sa vie fracassée lorsqu’un accident de voiture les précipite en bas d’une falaise (séquence choc d’un réalisme abrupt et foudroyant !). Miraculeusement rescapée, au grand dam de son mari défunt, elle revient de cette épreuve avec un don de guérison — transmis par le seul pouvoir de ses mains. Débordante de sagesse, d’amour et d’amitié pour les souffrants, elle se lance dans une mission de rémission, malgré les voix discordantes qui voient en elle une nouvelle incarnation du "Malin".

Drame intimiste transplanté dans un Fantastique placide, Résurrection honore le genre avec une dignité humaine teintée d’une pudeur fragile. Daniel Petrie sublime le portrait d’une guérisseuse aussi optimiste que lucide, marquée par l’expérience d’avoir franchi le fameux tunnel incandescent où surgissent nos chers disparus. Certaines séquences crépusculaires, d’un onirisme sensoriel, traduisent sans fard l’émerveillement d’un au-delà rassurant — porté par l’accueil bienveillant de visages familiers. Mais jamais Petrie ne verse dans le prêche : il justifie les pouvoirs inexpliqués d’Edna au nom de l’Amour (avec un grand "A" !), non d’un Dieu messianique. Il en profite, au contraire, pour dénoncer le fanatisme, l’intolérance, voire la folie meurtrière de métayers rétrogrades ou intégristes, aveuglés par l’incompréhension du surnaturel et terrifiés par un trépas dont ils ne veulent que la version divine.

En structurant avec une scrupuleuse attention le parcours moral d’Edna — tendue vers l’amour et la renaissance malgré un père psycho-rigide et un amant davantage effrayé qu’épris — Daniel Petrie nous livre le plus bouleversant des poèmes existentiels. Il y suggère que la vie après la mort est peut-être possible... par la seule puissance d’un amour rédempteur.

 
"Résurrection ou l'Amour au-delà".
Poignant, bouleversant (sa conclusion élégiaque pourrait bien faire couler les larmes des plus endurcis), beau, candide et intense à la fois — à l’image des impressionnantes scènes de guérison entourées d’une foule saisie — Résurrection traite de l’après-vie avec l’humilité pure d’Ellen Burstyn, transie d’une expressivité vertueuse, plus maternelle que démiurgique. Une référence du genre, inextinguible, aussi méconnue qu’infortunée, gardant intact son pouvoir émotionnel et profondément philanthrope.

*Bruno
3èx
22.01.20
28.03.11. 261 v

mardi 21 janvier 2020

Doctor Sleep

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Mike Flanagan. 2019. U.S.A. 2h32 (version longue: 3h00). Avec Ewan McGregor, Roger Dale Floyd, Rebecca Ferguson, Kyliegh Curran, Cliff Curtis, Bruce Greenwood.

Sortie salles France: 30 Octobre 2019. U.S: 8 Novembre 2019.

FILMOGRAPHIE: Mike Flanagan est un réalisateur, scénariste, producteur et monteur américain, né le 20 mai 1978 à Salem dans le Massachusetts. 2000 : Makebelieve. 2001 : Still Life. 2003 : Ghosts of Hamilton Street. 2011 : Absentia. 2013 : The Mirror. 2016 : Pas un bruit. 2016 : Ne t'endors pas. 2016 : Ouija : les origines. 2017 : Jessie. 2019 : Doctor Sleep.


"On est tous entrain de mourir. Le monde est un hospice à ciel ouvert."
Il fallait oser entreprendre la séquelle d'un des plus grands films d'horreur des années 80 pour la transposer sur pellicule 39 ans plus tard; et ce après que Stephen King se soit (à priori) planté sur le papier si je me réfère à la grande majorité des fans renfrognés. En ce qui me concerne, je n'établirai aucune comparaison entre l'oeuvre et le roman si bien que je me suis refusé à le lire par simple appréhension (intuitive) de la déception. Qu'en est-il donc de cette séquelle fleuve d'une durée longiligne de 2h32 ? Sans compter sa version longue de 3h00 que nous pourrons juger à point nommé par l'entremise de sa sortie Blu-ray. Après nous avoir étonnamment conquis (pour ne pas dire comblé) avec sa série TV; The Haunting (vibrant et subtil hommage à la Maison du Diable et autres références les plus notables) et agréablement surpris avec le thriller psychologique Jessie, produit par Netflix, Mike Flanagan ne prend pas le spectateur pour un imbécile avec Doctor Sleep. Tant et si bien que durant l'intimité de ma projo j'ai eu l'impression d'assister à un authentique film d'horreur à l'ancienne surgit des années 80 ! Dans la mesure où le cinéaste prend son sujet au sérieux tout en respectant au possible les fans de la première oeuvre de Kubrick à travers des références fructueuses et clins d'oeil ironiques (notamment auprès de l'inversion de rôles) eu égard de son intelligence à ne pas verser dans la gratuité, le racolage ou la fioriture. Et ce même si on est en droit de contester son (grandiose) final perfectible se déroulant dans les corridors de l'hôtel poussiéreux d'Overlook à travers une confrontation diabolique pas si intense et épique qu'escomptée (même si beaucoup de forces occultes s'agitent autour de nos héros). Pour autant, le soin circonspect de la sobriété de sa mise en scène (rien n'est laissé au hasard au fil d'une trajectoire narrative pleine de suspense et de subtile tension), son remarquable travail sur la bande-son (en écho à Shining !) et le talent (aussi mesuré) de son casting irréprochable (notamment les rapports solidaires entre Danny et Abra aux forces de caractères chevronnées, et la beauté azur de l'électrisante Rose) permettent d'y pallier ses menus défauts au gré d'une fluidité émotionnelle souvent payante.


Car si Doctor Sleep séduit et envoûte 2h32 durant sans jamais perdre de son intérêt narratif, c'est en parti grâce à ses rebondissements modérés, à son climat onirique de toute beauté et à la caractérisation de ses personnages (ceux atteints du pouvoir du Shining) en proie à une commune volonté de combattre des démons à visage humain étonnamment charismatiques, à défaut de nous effrayer (mention évidente à la matrone au chapeau noir, Rose, car plus le méchant est réussi, meilleur le film sera !). Car dans Doctor Sleep; l'intérêt n'est pas de nous foutre les pétoches comme à su le parfaire Stanley Kubrick (bien que personnellement je n'ai jamais vraiment été effrayé par les expressions psychotiques d'un Jack Nicholson trop sardonique pour me torturer les méninges lors de mes cauchemars nocturnes). Non, l'intérêt est de nous conter avec application et fulgurance visuelle un conte horrifique où le Bien et le Mal s'y combattent sous l'impulsion à la fois fragile et tourmentée de personnages convaincus d'une vie après la mort. Car comme le suggérait Kubrick pour justifier la présence surnaturelle des fantômes au sein de l'hôtel Overlook, Shining était un film optimiste sur l'existence de la vie après la mort. Ainsi, Flanagan poursuit intelligemment cette thématique spirituelle à travers les thèmes de la peur de souffrir et de mourir (je songe aux malades alités en fin de vie) et de la perte de l'être cher (les victimes des êtres disparus tentant difficilement de tourner la page dans leur questionnement spirituel). Quand bien même Danny Torrance, aujourd'hui alcoolique invétéré, tente de combattre ses démons internes en y repoussant de nouvelles forces maléfiques. Doctor Sleep n'étant au final qu'une passionnante métaphore sur notre dualité intrinsèque du Bien contre le Mal, avec au sein de cette confrontation "fantastique" des "méchants" hyper crédibles dans leur intensité d'expression aussi bien sournoise que subtilement vénéneuse à y absorber les fluides énergétiques des victimes du "Shining" ! Sur ce dernier point, et j'insiste à nouveau, Rebecca Ferguson transperce l'écran en reine maléfique au pouvoir d'envoûtement sépulcral ! Tant auprès de sa beauté indicible à la fois lascive et charnue que de ses exactions couardes à sacrifier l'innocence la plus démunie en guise de longévité. Et ce en compagnie de sa troupe noctambule aussi viciée.


Rose red.
Film d'horreur à suspense remarquablement structuré sur une durée substantielle jamais laborieuse (on prend le temps qu'il faut à développer l'intrigue et ses personnages en initiation sereine !), Doctor Sleep créé l'inespérée surprise dans sa capacité d'y créer (ou tout du moins d'y remodeler) un univers délétère aussi capiteux que fascinant à travers la clairvoyance du Shining. Les acteurs et comédiennes se fondant dans la fiction avec aplomb ou spontanéité dépouillés, de manière à ce que le spectateur parvienne à s'immerger dans leurs épreuves morales avec une fascination lestement vertigineuse. Quand bien même Docteur Sleep relativise, dédramatise, apaise et nous réconforte autour de la peur de l'inconnu: celui du trépas.  

*Bruno

lundi 20 janvier 2020

Cut Throats Nine

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site wipfilms.net

"Condenados a vivir" de Joaquín Luis Romero Marchent. 1972. Espagne. 1h30. Avec Robert Hundar, Emma Cohen, Alberto Dalbés, Antonio Iranzo

Sortie salles U.S: 5 Octobre 1973. Espagne: 10 Juillet 1972

FILMOGRAPHIEJoaquín Luis Romero Marchent est un réalisateur et scénariste espagnol, né le 26 Août 1921 à Madrid, décédé le 16 Août 2012. 1984: Las fantasías de Cuny. 1980 Despido improcedente. 1975: El clan de los Nazarenos. 1973 El juego del adulterio. 1972 Condenados a vivir (as Joaquin Romero Marchent). 1968 Pas de pardon, je tue. 1966 Gringo jette ton fusil. 1966 Cent mille dollars pour Lassiter. 1965 Sept heures de feu. 1964 Sept du Texas. 1964 Les trois implacables. 1963 Trois cavaliers noirs. 1962 L'ombre de Zorro. 1962 Zorro le vengeur. 1958 El hombre del paraguas blanco. 1957 Fulano y Mengano. 1957 El hombre que viajaba despacito. 1956 La justicia del Coyote. 1955 El coyote. 1954 Soeur Angelica. 1953 Juzgado permanente.


Réputé pour être le western le plus extrême du cinéma, Cut Throats Nine demeure une intéressante curiosité pour qui apprécie les bisseries ibériques aussi bien insalubres que mal élevées. Car en conjuguant le western (paella) avec l'horreur crapoteuse (gros plans sur les chairs entaillées façon Fulci), Cut Thorats Nine dégage un charme vénéneux probant auprès de son sentiment de déréliction qu'une poignée de bagnards nous communique à l'aide de leur charisme patibulaire. L'intrigue se focalisant essentiellement sur leur épreuve de survie qu'un sergent s'efforce de diriger en compagnie de sa soeur en pleine nature enneigée. Ses derniers ayant été libérés de leur chaîne à la suite d'un braquage. Ainsi, à travers son climat montagneux réfrigérant, Cut Throats Nine dépayse avec un certain réalisme fétide sous l'impulsion d'une poignée d'antagonistes tous plus couards et cyniques les uns les autres. Car il faut bien avouer qu'ici le spectateur a bien du mal à s'identifier aux personnages mesquins, à moins d'éprouver une certaine empathie pour la jeune fille timorée que le sergent trimbale avec une certaine ambiguïté.


Mais nous n'en saurons pas plus quant à leurs rapports familiaux parfois tendus, quand bien même le réalisateur s'attache en intermittence à nous décrire le passé morbide de chacun d'eux à l'aide de flash-back concis communément filmés au ralentis. Quant à son extrême violence tant décriée lors de sa sortie, elle s'avère surtout bien sanglante, notamment lorsque Joaquín Luis Romero Marchent ne s'embarrasse d'aucun complexe pour la filmer avec complaisance comme seuls les italiens osaient s'y adonner lors des décennies 70/80. Certaines séquences couillues (les tripes à l'air de certaines victimes) provoquant un réel dégoût viscéral quant à leur réalisme cracra. Bien que sans surprise, dénué d'intensité et réalisé sans génie particulier (une plus-value quant à l'attrait de son charme désuet); Cut Throats Nine parvient pour autant modestement à nous immerger dans ce périple macabre semé de rencontres impromptues auprès d'étrangers aussi primitifs. Quand bien même on appréciera également en guise de cerise sur le gâteau nécrosé son final nihiliste dénué de clarté et de rédemption.


Tableau peu reluisant de la nature humaine victime de son ego et de sa cupidité, Cut Throats Nine est à découvrir pour qui apprécie les raretés hybrides aussi marginales qu'hétérodoxes. 

*Bruno