mercredi 15 avril 2015

May. Prix "Première", Gérardmer 2003.

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site kinobomba.net

de Lucky Mc Kee. 2002. U.S.A. 1h34. Avec Angela Bettis, Jeremy Sisto, Anna Faris, James Duval, Nichole Hiltz, Kevin Gage, Merle Kennedy, Chandler Hecht, Norwood Cheek, Rachel David, Roxanne Day...

Sortie en salles en France le 10 Mars 2004. U.S: 6 Juin 2003.

FILMOGRAPHIELucky Mc Kee est un réalisateur américain né le 1er Novembre 1975 à Jenny Lind (Californie). 2002: All Cheerleaders Die (court). May. 2006: Master of Horror (un épisode). The Woods. 2008: Red. Blue Like You. 2011: The Woman.

« La tristesse assèche le cœur de qui n'a plus de larmes pour pleurer. »
Première réalisation et coup de maître du débutant Lucky McKee, May n’aura laissé personne indemne dans les festivals où il fut projeté, malgré une sortie confidentielle en salles. May est une infirmière introvertie, employée dans un cabinet vétérinaire. Solitaire et refoulée dès l’enfance à cause d’un léger strabisme, elle n’a pour seule compagne qu’une poupée. Confinée dans une boîte de verre, cette confidente muette recueille chaque jour les aveux de May : ses élans, ses colères, ses désirs tus. À la tendresse qu’elle offre à de jeunes enfants aveugles, répond sa vie figée, jusqu’au jour où le hasard place sur son chemin un charmant inconnu.

Outre le brio technique d’un cinéaste attentif à sublimer, non sans onirisme (meurtres stylisés à l’appui !), le lent glissement schizophrène d’une âme noyée dans la solitude, May vibre d’un magnétisme trouble. Angela Bettis y irradie une fragilité saisissante, creusée au cœur même du scénario. Un portrait magnifique de femme meurtrie, traversé par l’exutoire de l’automutilation, que l’actrice habite de son corps filiforme, avide d’amour et de reconnaissance.

D’abord timide, presque espiègle face à la promesse d’un amour naissant, May se métamorphose en plaie vive lorsque cette illusion sentimentale lui renvoie l’injustice de sa différence — fétichisme pour les mains, relation intime avec sa poupée, goût prononcé pour le macabre, et ce lien étrange à la mort, comme indifférente. Elle incarne, dans sa simple présence, les souffre-douleur de l’exclusion, de la marginalité, de la solitude chronique. La trahison d’une amie lesbienne et la déchirure de sa poupée disloquée l’enfoncent un peu plus dans une rancœur punitive, jusqu’à fabriquer elle-même un compagnon de chair et de sang.

Variation contemporaine de Frankenstein, où la fiancée, rongée de douleur, devient le Docteur, May est un plaidoyer halluciné pour le droit à la différence, dans un corps de femme isolée, brisée par l’abandon parental et la carence d’amour. Derrière les poupées figées de sa chambre, c’est l’enfant abandonnée qui cherche un regard. May transcende alors, avec une douloureuse sensibilité, une histoire d’amour fou où seule la mort semble pouvoir éclipser la souffrance. 

 
"May ou l’amour en pièces détachées".
Superbe portrait d’une âme désabusée, broyée entre solitude inexorable et échec amoureux, May emprunte peu à peu les détours ténébreux du psycho-killer. Il confronte la passion d’un cinéphile — son compagnon est un adorateur d’Argento — à l’effondrement d’une asociale trop vulnérable pour être aimée. Il en émerge un drame psychologique d’une âpreté rare, un bouleversant poème funèbre sur l’isolement intérieur et la quête éperdue du besoin d’être aimé.

*Bruno 
07.06.25. 4èx. Vost
14/06/10. 
15/04/15. 

Récompenses: Prix du Meilleur Scénario et Meilleure Actrice (Angela Bettis) au Festival du film de Catalogne 2002. Corbeau d'Argent de la meilleure actrice (Angela Bettis) au Festival du film Fantastique de Bruxelles en 2003. Prix Première au festival de Gérardmer en 2003. Prix du Meilleur Film, Meilleur Scénario et Meilleure Actrice (Angela Bettis) au cours de la semaine du film Fantastique de Malaga en 2003.


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