Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com
de Sam Levinson. 2018. U.S.A. 1h48. Avec Odessa Young, Suki Waterhouse, Hari Nef, Abra, Bill Skarsgård, Maude Apatow, Cody Christian, Joel McHale.
Sortie salles France: 5 Décembre 2018
FILMOGRAPHIE: Sam Levinson est un réalisateur, scénariste et producteur américain. 2018: Assassination Nation. 2011: Another Happy Day.
Dead Boys can't Fly.
Sentiments à chaud après avoir subi de plein fouet l'une des claques de l'année 2018 si bien que, à l'instar de son homologue infructueux, The Purge, je redoutais pour autant le pétard mouillé dans sa caractérisation graphique d'une Amérique anarchique livrée à la violence la plus expéditive ! Que nenni, Assassination Nation demeure une claque (c'est parfois bon de se réitérer !), un coup de boule inextinguible via sa descente aux enfers immorale, une oeuvre indépendante qu'est parvenu à imprimer avec stylisme Sam Levinson (magnifique plan séquence circulaire à l'appui rappelant à moindre échelle le fameux Ténèbres d'Argento). Et ce sans livrer à une démonstration de force opportuniste ou à des effets de manche complaisants, notamment pour y satisfaire les bas instincts du spectateur lambda croyant assister à une série B univoquement ludique. Dans la mesure où Sam Levinson s'avère un auteur consciencieux prenant malin plaisir à triturer nos sentiments doucement mis à mal de par son malstroem d'images dérangeantes parce que iconiquement si proches de notre réalité contemporaine ! C'est là où l'oeuvre (déjà) maudite fait très mal ! Elle est en prise direct avec notre conscience (Lily s'adressent directement à nous de manière assez récurrente). Car elle nous pousse à réfléchir sur notre situation personnelle quotidiennement soumise à l'outil informatique déversant esclandres tous azimuts, et ce jusqu'au harcèlement moral pour les proies les plus vulnérables !
Ainsi, et avec une étonnante inventivité, tant auprès de ses images à la fois arc-en-ciel et charnelles que du bouleversement temporel que nous subissons en live (du moins c'est l'impression que j'ai eu !), Assassination Nation se décline comme une montée en puissance de règlements de compte sexistes bâtis sur les préjugés, le sensationnalisme, le voyeurisme, les effets diaboliquement pervers des fake news, les hackers de Facebook et Twitter, plateformes diabolisées par ces esprits médiocres ou chétifs avides de notoriété et de "lol" pour se donner un but (ici nonsensique quand on connaît le véritable coupable de l'intrigue !). Flop commercial chez nous et aux States, Assassination Nation ne pouvait que miner le public ado sevré aux pop corn et aux pétards édulcorés genre The Purge ! Car objet subversif d'une violence psycho et corporelle ardues, Assassination Nation nous balance à la gueule nos quatre vérités depuis que les réseaux sociaux s'efforcent d'y violer notre vie privée. Et ce en asservissant notre façon de penser pour mieux nous isoler et nous soumettre à leur déontologie typiquement conservatrice. Diatribe cinglante contre le fanatisme de masse, la misogynie et le machisme à travers le spectre d'idéologies maximalistes, Assassination Nation dilue au fil de son cheminement tragique une aigre mélancolie, de par ses cruelles humiliations qu'une anti-héroïne endure avec un désespoir bouleversant. L'émotion contenue, dépouillée, ne s'avérant jamais démonstrative pour alpaguer le spectateur. Sam Levinson recourant avec une rare maîtrise à la subtilité de la suggestion à travers les états d'âme de Lily en remise en question identitaire et initiation rebelle. C'est que nous offrira sa dernière partie, baroud d'honneur féministe aux allures d'apocalypse sociétale fustigeant la révolte d'un peuple misogyne abrutie par la résurgence de l'ultra conservatisme. Et le plus terrifiant à travers cette sarabande infernale, c'est que la nouvelle chasse aux sorcières est juste devant nos portes et ne demande qu'à propager sa violence primitive de par cette foule aliénante aveuglée de fiel !
Les Sorcières de Salem
Hypnotique et envoûtant sous l'impulsion d'une BO électro tantôt cosmique (avec en sus un clin d'oeil synergique à l'Oiseau au plumage de Cristal), furieusement contestataire, terrifiant, dérangeant, malsain et perturbant, Assassination Nation emploie avec autant de diabolique maîtrise (cadrages alambiqués dynamités du montage véloce !) que de dextérité la satire engagée pour dresser un tragique constat sur les nouvelles mentalités rétrogrades adeptes de la délation, de l'auto-justice et de l'intolérance. Mélancolique et finalement bouleversant, il demeure un témoignage résolument lucide sur les ravages d'une célébrité pailletée via l'ère du net (et son déversoir de haine) et du tout numérique. Film culte ou chef-d'oeuvre à l'âme fragile, il est pour moi cette (inopinée) mosaïque grâce à sa personnalité corrosive bâtie sur le pessimisme afin de mieux réveiller les consciences.
* Bruno
Utopiales 2018 : Grand prix du jury
Bonjour, excellent article, fan de montage et de mixage je viens de me rendre compte un peu par hasard (je voulais coller la musique de Ténèbres sur l'attaque de la villa...) qu'en fait ils ont tourné toute la séquence "en musique" (celle de Ténèbres donc) et l'ont enlevé ensuite pour une raison inconnue (problème de droits ?), si ça vous intéresse voilà le remixage que j'ai effectué (le tout début et la fin sont "muets" car j'ai enlevé la bande-son du film), au centième près, ça colle parfaitement c'est assez incroyable, quel dommage qu'ils ne l'aient pas conservé : https://vimeo.com/307439521
RépondreSupprimerMerci. Et merci beaucoup pour le lien de la video, c'est effectivement assez bluffant l'interaction
RépondreSupprimerMerci, n'hésitez pas à le voir plusieurs fois on se rend compte progressivement de plein de détails : la vitre que le type devait briser sur la musique, mais qu'il rate (et le refait donc une deuxième fois...), les mouvements de caméras et même les persos qui suivent aussi la musique (la blonde qui se retourne deux fois en rythme, quand elle tourne la poignée de la fenêtre, et quand il sort de la douche par exemple, ou les quatre types qui arrivent vers la fin...), et bien sûr la durée globale (c'est la même comme par hasard et c'est ça qui m'a fait définitivement capter, j'ai juste galéré un peu pour ajuster la musique mais j'ai trouvé le bon point de montage - un mouvement de caméra au début - qui fait qu'ensuite tout était calé...), il y a un bouton pour télécharger en 1080p (ça saccade sur Viméo la musique "bouge" un peu...), j'espère qu'ils vont révéler le truc un de ces quatre, j'en ai parlé sur le forum Mad Movies (topic du film et celui d'Argento) et ça n'a intéressé personne, dommage... Cordialement.
RépondreSupprimerMerci pour ton commentaire et tes infos. ^^
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