jeudi 8 août 2024

8 MM / Eight Millimeter

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Joel Schumacher. 1999. U.S.A/Allemagne. 2h03. Avec Nicolas Cage, Joaquin Phoenix, James Gandolfini, Peter Stormare, Anthony Heald, Chris Bauer.

Sortie salles France: 10 Mars 1999 (Int - 18 ans). U.S: 26 Février 1999

FILMOGRAPHIE: Joel Schumacher est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 29 Août 1939 à New-York, décédé le 22 juin 2020. 1981: The Incredible Shrinking Woman. 1983: SOS Taxi. 1985: St Elmo's Fire. 1987: Génération Perdue. 1989: Cousins. 1990: l'Expérience Interdite. 1991: Le Choix d'Aimer. 1993: Chute Libre. 1994: Le Client. 1995: Batman Forever. 1996: Le Droit de Tuer ? 1997: Batman et Robin. 1999: 8 mm. 1999: Personne n'est parfait(e). 2000: Tigerland. 2002: Bad Company. 2002: Phone Game. 2003: Veronica Guerin. 2004: Le Fantôme de l'Opéra. 2007: Le Nombre 23. 2009: Blood Creek. 2010: Twelve. 2011: Effraction. 2013: House of Cards (2 épisodes). 

"A chaque fois que je fais un long-métrage où le héros se salit les mains, les Français me qualifient de fasciste ou de républicain. Mais comment un libéral hippie comme moi peut-il être vu de la sorte ? C’est bizarre, parce que j’ai toujours imaginé les Français comme des gens sophistiqués ! C’est comme s’ils taxaient le personnage de Hamlet de fasciste !"
Joel Schumacher – Interview, Mad Movies n°250, Mars 2012

"Lorsque ton regard pénètre longtemps au fond d'un abîme, l'abîme, lui aussi, pénètre en toi"
C'est l'histoire d'un type qui va perdre son âme à force de fréquenter et de jouer avec le diable. 
Voilà ce que résume le controversé 8MM comme souvent auprès d'oeuvres tabous osant aborder les thématiques de la pédophilie et du Snuf movie comme l'eurent illustrés le remarquable Sound of Freedom, le scandaleux A Serbian Film ou encore (le perfectible) Hardcore de Paul Schrader dans toutes les mémoires. Baignant dans un climat ultra malsain de sexualité sordide lorsqu'on y lève le voile de la pornographie underground, 8MM est une expérience extrême aussi fascinante que répugnante eu égard du réalisme fuligineux qui se dégage de ce thriller horrifique impeccablement réalisé et interprété par des comédiens habités par leur déchéance (im)morale. Nicolas Cage demeurant magnétique, concentré, absorbé, tendu puis enfin déstabilisant (jusqu'au malaise cérébral quant au final à contre-emploi si décrié) en enquêteur privé délibéré à retrouver la trace d'une mineure de 16 ans potentiellement assassinée face caméra après que l'on eu retrouvé un film dans le coffre-fort d'un milliardaire. Quant au néophyte Joaquin Phoenix, il joue aimablement le faire-valoir en commerçant lunaire de sex-shop avec une spontanéité si désinhibée qu'il nous suscite perplexité, réserve, suspicion en dépit de son intelligence et sa collaboration à entraîner le détective dans les bas-fonds new-yorkais les plus insalubres, ad nauseam. 


Sur ce point, Joel Schumacher parvient à faire naître une incroyable ambiance d'insécurité étrangement fascinante, perverse, méphitique au fil de rencontres avec des marginaux sans vergogne nous suscitant gêne et dégoût. Et donc chapeau bas aux prestations littéralement ordurières de James Gandolfini en margoulin sournois, Peter Stormare en gourou désaxé et Chris Bauer en violeur SM, mastard affublé d'un masque de latex au rictus contracté. 8MM se déclinant, non sans une certaine suggestion (tout du moins 1h30 durant), en véritable descente aux enfers que le spectateur ne parvient pas à s'extraire sous l'impulsion d'un Nicolas Cage peu à peu vampirisé par le Mal alors qu'il fut à deux doigts de se rétracter quelques secondes plus tôt. D'où la controverse impartie à cette fameuse ultime demi-heure lorsque son personnage sombre dans la corruption d'une justice expéditive à la fois ordurière (son 1er meurtre primal quasi insoutenable nous invoque isolement et désillusion) et putassière (le second meurtre autrement complaisant et putassier dans sa plus simple gratuité). Et si sa première victime parvient à nous invoquer avec crédibilité malaise moral et écoeurement auprès de ses exactions barbares, la seconde se vautre dans la facilité des conventions comme si Joel Schumacher sombrait également dans une idéologie bassement immorale qu'il dénonça avec force et (une certaine sobriété) durant tout le long de son intrigue. Et c'est franchement dommageable car en dépit de ses 3 minutes racoleuses assez indigestes puisque quelque peu contradictoires, 8MM confinait au modèle du genre tant il passionne, envoûte et nous questionne quant à notre instinct meurtrier pouvant basculer aux moments les plus tendus. 


En tout état de cause ce thriller vertigineux à la fois implacable, ensorcelant (jusqu'au  malaise psychologique avec le désir d'y faire une pause ou de prendre une douche sitôt le générique clôt) et extrêmement dérangeant nous laisse dans un état d'amertume et d'impuissance contre l'industrie du X underground impossible à éradiquer, déchiffré, dénoué auprès du duo bourreaux / voyeurs dénués d'identité. A réhabiliter donc si bien que ce pur film d'ambiance crépusculaire ne lâchera pas d'une semelle votre conscience sévèrement rudoyée. 
Pour public averti.

*Bruno
3èx. Vostfr. 

"Je crois que tout cela est lié à la notion d’auteur, très forte en Europe […] Quand je raconte une histoire, elle n’est pas arrachée à ma vie. C’est une histoire ! Mais, oui, je peux comprendre que l’on puisse faire la confusion entre le point de vue du réalisateur et celui du personnage. Comme l’a dit Mike Nichols, les gens confondent souvent le contenu et l’intention. Ce n’est pas parce que vous mettez quelque chose dans votre film que vous le cautionnez. A ce moment-là, ne pensez-vous pas que Roméo et Juliette fasse la promo du suicide adolescent ? A une époque, on acceptait beaucoup mieux l’ambiguïté du cinéma […] Après avoir vu 8 mm, un de mes amis m’a dit : « Tu as eu assez de courage pour faire un film des années 70, et ils vont te tuer pour ça »"
Joel Schumacher – Interview, Première n°318, Août 2003

Récompenses:

Golden Trailer Awards 1999 :

Prix de la Toison d'Or,

Prix de la bande-annonce dorée pour Une nuit sombre et orageuse

Box Office France: 621 074 entrées

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