lundi 20 octobre 2025

Le Pacte des Loups de Christophe Gans. 2001. France. 2h30.

                      (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)                 

"Christophe Gans ou la furie du romanesque."

Héritier flamboyant du cinéma d’aventures d’antan, Le Pacte des loups ressuscite l’esprit bisseux des années 60, celui des cinémas de quartier où l’imaginaire vibrait à pleins poumons. Christophe Gans y convoque un univers baroque et ésotérique, un kaléidoscope de genres - horreur, fantastique, romance, aventure et film en costume - qu’il mêle avec une maîtrise visuelle éblouissante. Saturé de couleurs flamboyantes, le film s’impose comme un opéra d’images, un festin sensoriel où chaque plan semble ciselé à la lame.


L’impact sonore des scènes d’action, magnifiquement chorégraphiées, participe de cette démesure spectaculaire : chaque coup, chaque souffle, chaque cri semble jaillir de l’écran avec une intensité tellurique dans une édition 4K qui laisse pantois. Les séquences d’arts martiaux, portées par la grâce fauve de Mark Dacascos, possèdent un souffle épique rare, entre élégance et sauvagerie pure. Le corps devient danse, la violence un rituel. Et quand l’horreur s’invite, elle lacère sans détour : les scènes sanglantes, d’une brutalité inouïe, rappellent combien Gans aime repousser les limites du spectaculaire pour mieux raviver le frisson d’un cinéma total, généreux, forcené, démesuré.


Au cœur du tumulte, la romance entre Samuel Le Bihan et Émilie Dequenne se tisse en filigrane, douce parenthèse d’humanité dans un monde de complots et de griffes. Leurs regards échangés au milieu des tempêtes confèrent au film une mélancolie presque mythologique, à l'instar de sa magnifique conclusion non dénuée d'émotions mélancoliques. Le choc des générations d’acteurs - anciens visages et jeunes recrues - nourrit cette alchimie singulière, entre tradition et modernité. Le Bihan, viril et ténébreux, s’impose en chevalier preux, habité d’une ferveur intérieure. Dacascos, taiseux et hiératique, incarne la noblesse du geste, le dévouement muet du guerrier. À l’inverse, Vincent Cassel, en traître arrogant et sans vergogne, livre une composition détestable - dans le meilleur sens du terme -, son vice rongeant l’écran à chaque apparition.


La musique envoûtante parachève cette démesure : elle retrouve la majesté des grands spectacles populaires d’autrefois, où l’orchestre et la passion s’unissaient pour exalter le mythe. Christophe Gans, artisan habité par l’amour du travail bien fait, tisse deux heures trente de pur divertissement sans jamais trahir l’élégance du cinéma. Son art du référentiel digéré, sa science du cadre et du rythme, font de Le Pacte des loups un bijou de stylisme et de générosité.


Un film fun, jouissif, démesuré, qui nous laisse ivres de cinéma renouant avec son essence essentielle: divertir dans l'artisanat. Si bien que rarement le divertissement français aura atteint un tel sommet de virtuosité et de ferveur visuelle. Un chef-d’œuvre du genre, oui, précieux parce que trop rare, voir aussi digne pour son discours émouvant sur la protection des loups et la maltraitance animale. Or, à travers cette cause essentielle, son éclat baroque et ses vertiges d’action, Le Pacte des loups y dévoile la face sombre du fanatisme religieux, ce pouvoir criminel drapé de foi, où le clergé manipule la peur pour régner sur les âmes. Une lutte des pouvoirs où la bête véritable n’est pas celle qu’on traque au fond des bois, mais celle qui sommeille dans le cœur des hommes.


A revoir d'urgence, de préférence dans son édition 4K insensée.

— le cinéphile du cœur noir
3èx

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