de Saul Bass. 1974. U.S.A. 1h24. Avec Michael Murphy, Nigel Davenport, Lynne Frederick, Alan Gifford, Robert Henderson.
Sortie salles France: 1 Septembre 1975. Box Office France: 745 779 entrées
Récompense: Prix Spécial du Jury au Festival d'Avoriaz, 1974.
FILMOGRAPHIE: Saul Bass est un graphiste et réalisateur américain, né le 8 Mai 1920 à New-York, décédé le 25 Avril 1996 à Los Angeles.
1974: Phase 4.
Grand classique de la science-fiction des années 70, Phase IV reste l'unique réalisation de Saul Bass, graphiste attitré d'Otto Preminger et d'Hitchcock (c'est à lui que l'on doit le générique de Psychose ainsi que la conception de la fameuse séquence de la douche). Dans la mouvance des invasions d'insectes mutants parfois atteints de gigantisme (les Insectes de feu, Ants, The Savages Bees, l'Empire des fourmis géantes), Phase IV joue la carte de sobriété à valeur pédagogique avec refus d'esbroufe grand-guignolesque. Car ici prime l'aspect scientifique d'un duo de savants observant à l'aide d'ordinateurs les différentes colonies de fourmis prochainement aptes à envahir notre civilisation. Réfugiés dans leur laboratoire au milieu d'un désert, ils tentent d'entrer en contact avec elles afin d'établir en amont une communication pacifiste. Mais par le biais d'une entité extra-terrestre, les fourmis éprises d'égotisme n'ont comme seul dessein de vouloir nous dominer afin de régir un nouveau monde. C'est donc une lutte sans merci que doivent se livrer l'homme et l'insecte avant que la catastrophe annoncée n'entre en phase IV !
Dépourvu du moindre effet-spécial afin de caractériser la morphologie des fourmis (elles se révèlent authentiques dans leur apparence minuscule mais amplifiées par une vision microscopique afin de mieux cerner leur évolution et diverses stratégies), Saul Bass nous décrit avec souci documentaire un scénario catastrophe aussi fascinant qu'inquiétant. Durant 1h20, nous sommes reclus en interne d'un labo scientifique où deux savants paranos ainsi qu'une jeune rescapée vont pratiquer toutes sortes d'expériences afin d'étudier la nouvelle déontologie des fourmis et avant d'essayer de les anéantir. Toujours plus nombreuses, coriaces et combatives, car dirigées par une reine redoutablement perfide, ces insectes n'auront de cesse de surmonter les obstacles et défier la volonté de l'homme grâce à leur redoutable intelligence. Avec peu de moyens mais des idées retorses et formelles ainsi que l'atout de rendre réaliste un scénario catastrophe à la limite du plausible, Phase IV déroute notre inconscient et trouble notre imaginaire à observer cette guerre d'un nouveau genre où l'insecte semble beaucoup plus érudit que l'homme afin de le remplacer. SPOIL!!! Ou tout du moins fonder la nouvelle race d'une symbiose homme/insecte (sans en connaître le véritable but !) comme le laisse sous-entendre son étonnante chute finale ! Fin du SPOIL.
Fascinant et passionnant par son caractère scientifique où l'aspect documentaire prend le pas sur la fiction, baroque et insolite dans ses plages de poésie métaphysique, Phase IV préconise le pouvoir de suggestion avec l'entremise d'un microcosme où l'infiniment petit est apte à nous conquérir. Avec son atmosphère solaire presque surnaturelle d'où plane la sensation d'une fin d'un monde, Saul Bass nous interpelle sur la hiérarchie des fourmis, leur nombre surélevé (il y aurait plus de 12000 espèces dans le monde), leur sens de communication et leur capacité à déchiffrer les énigmes.
Bruno Matéï
3èx