jeudi 14 février 2013

La Rose Ecorchée

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site reeldistraction.com

"Devil's Maniac / The Blood Rose" de Claude Mulot. 1969. France. 1h32. Avec Philippe Lemaire, Annie Duperey, Elizabeth Teissier, Olivia Robin, Michèle Perello, Valérie Boisgel, Jean-Pierre Honoré, Gérard Antoine Huart, Howard Vernon.

FILMOGRAPHIE: Claude Mulot (Frédéric Lansac) est un réalisateur et scénariste français, né le 21 août 1942 à Paris, décédé le 13 Octobre 1986 à Saint-Tropez. 1968: Sexyrella. 1969: La Rose Ecorchée. 1971: La Saignée. 1973: Profession : Aventuriers. 1974: Les Charnelles. 1975: Le Sexe qui parle. 1976: La Rage de jouir. 1977: Suprêmes jouissances. 1977: La Grande Baise. 1977: Belles d'un soir. 1978: Le Sexe qui parle 2. 1980: La Femme Objet. 1980: l'Immorale. 1980: Les Petites écolières. 1981: Le jour se lève et les conneries commencent. 1983: Black Venus. 1986: Le Couteau sous la gorge.


Claude Mulot, spécialiste du porno durant les années 70, réalise avec son second long-métrage un fleuron bisseux du fantastique français. L'une des rares incursions dans le gothisme flamboyant hérité des cinéastes transalpins Bava / Freda. Le casting étant constitué de comédiens hétérogènes parmi lesquels Annie Duperey (plus belle et gracile que jamais), notre future voyante astrale Elizabeth Tessier (!?), le vétéran Howard VernonPhilippe Lemaire, puis enfin les deux nabots Roberto et Johnny Cacao. Sans occulter à moindre échelle le charme de demoiselles dénudées d'une beauté particulièrement lascive (Olivia Robin en tête pour son physique particulièrement longiligne et ensorcelant). Ainsi, la trame de la Rose Ecorchée est une déclinaison à peine voilé des Yeux sans Visages de Franju. Si bien que la femme d'un riche peintre se retrouve défigurée suite à un accident volontairement perpétré par la maîtresse jalouse. Éperdument amoureux mais anéanti par le chagrin, Frédéric se calfeutre à l'intérieur de son château parmi la présence monstrueuse de son épouse. Jusqu'au jour où l'un de ses amis botaniques, ancien chirurgien, lui offre l'opportunité de tenter une greffe de visage afin qu'Anne puisse retrouver sa beauté d'antan. Or, ils ont besoin de kidnapper une jeune pèlerine afin de pouvoir lui prélever des tissus vivants.


Esthétiquement splendide dans tous les coins de chaque cadre, la Rose Ecorchée s'avère de prime abord un régal formel tant Mulot s'attarde à fignoler ses cadrages, ses éclairages baroques à travers des décors d'architecture aux nuances polychromes. Le tout filmé en interne d'un château ancestral (comme le souligne le générique liminaire). Baignant constamment dans une ambiance mélancolique, le film est une élégie romantique auprès de deux amants maudits séparés par la jalousie d'une mégère capricieuse. Les protagonistes principaux qui évoluent durant le récit (Frédéric, Anne et le docteur Romer) se caractérisant par des individus meurtries et égoïstes davantage gagnés par le désagrément du remord. Spoiler ! C'est d'ailleurs avec la remise en question du docteur Romer (incarné par Howard Vernon étonnamment sobre dans sa posture carrée), épris de contrition, que l'opération tant escomptée convergera vers une débâcle familiale. Fin du Spoiler. D'un érotisme timoré pour contempler la présence suave de filles déshabillées, et frileux en terme d'effusions gores, la Rose Ecorchée déploie pour autant en de brèves occasions une certaine violence impudente auprès des altercations commises sur des femmes démunies. L'ambition de Claude Mulot n'est donc pas de nous façonner un film d'exploitation plagiant sans vergogne les thèmes chers à Georges Franju mais de nous narrer avec lyrisme prude une cruelle histoire d'amour. La présence saugrenue des deux nains peut parfois prêter à sourire dans leur jeu quelque peu inexpressif mais ils réussissent néanmoins à véhiculer une présence insolite autour des agissements d'antagonistes altiers.


Le château des amants maudits
Oublié de tous mais défendu bec et ongle par une poignée de fantasticophiles puristes, La Rose Ecorchée est l'une des rares réussites françaises à avoir su faire preuve d'ambition formelle en empruntant le patrimoine du gothisme italien. Le soin alloué à la mise en scène, la sincérité des comédiens et surtout l'esthétisme stylisé émanant des intérieurs du château convergent au conte aussi scintillant qu'infortuné. A revoir d'urgence. 

*Bruno
14.02.13. 
30.04.24. 
25.09.24. 4èx

mercredi 13 février 2013

LE LOCATAIRE (The Tenant)



                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinecube.wordpress.com
de Roman Polanski. 1976. France. 2h05. Avec Roman Polanski, Isabelle Adjani, Melvin Douglas, Shelley Winters, Bernard Fresson, Claude Dauphin, Jo Van Fleet, Rufus, Josiane Balasko, Michel Blanc, Gérard Jugnot, Bernard Pierre Donnadieu.

Sortie salles France: 26 Mai 1976 (interdit - de 18 ans). U.S: 11 Juin 1976

FILMOGRAPHIERoman Polanski (né le 18 août 1933 à Paris) est un comédien, metteur en scène de théâtre et d'opéra puis un producteur, scénariste et réalisateur de cinéma franco-polonais
1962 : Le Couteau dans l'eau , 1965 : Répulsion, 1966 : Cul-de-sac, 1967 : Le Bal des vampires, 1968 : Rosemary’s baby, 1971 : Macbeth, 1972 : Quoi ?, 1974 : Chinatown, 1976 : Le Locataire ,1979 : Tess, 1986 : Pirates, 1988 : Frantic, 1992 : Lunes de fiel ,1994 : La Jeune Fille et la Mort , 1999 : La Neuvième Porte ,2002 : Le Pianiste,2005 : Oliver Twist, 2010 : The Ghost Writer 2011 : Le Dieu du carnage.


Troisième film consacré au cycle des appartements, le Locataire est la dernière denrée du fantastique paranoïaque dominée par la prestance (erratique) du réalisateur himself, Roman Polanski. D'après le roman Le Locataire chimérique écrit par Roland Topor en 1964, cette descente aux enfers d'un résident gagné par la folie ne cesse d'interroger le spectateur par son ambiguïté rationnelle et surnaturelle. Alors que l'ancienne locataire s'est défenestrée du 3è étage, un jeune célibataire timoré loue son appartement malgré l'exigence du voisinage réfractaire au moindre potin. Peu à peu, l'homme constamment épié et réprimandé par ses occupants sombre dans une paranoïa schizophrène. Ambiance feutrée au sein d'un immeuble hermétique rempli de vieillards acariâtres, le Locataire nous plonge dans la lente dégénérescence paranoïaque d'un locataire introverti, incessamment persécuté par son entourage. En dehors du suicide inexpliqué de Madame Choule et du harcèlement quotidien de ces occupants, la découverte d'une dent encastrée dans la brèche d'un mur, la réception d'une carte postale et l'inscription de symboles égyptiens sur le muret des toilettes vont être les éléments déclencheurs pour la dérive schizophrène de Trelkovsky.


De prime abord, Roman Polanski utilise la dérision pittoresque afin de brimer son locataire, constamment critiqué par des sexagénaires renfrognés incapables de supporter tout vacarme. A cause de sa timidité et de son absence d'aplomb, Trelkovsky sera notamment contraint de supporter l'impertinence de ces amis (la fiesta improvisée au sein de son appartement) au péril de sa bonne foi à daigner respecter la tranquillité des voisins. Par le biais d'une photo désaturée et d'une mise en scène avisée, le réalisateur entretient un climat d'étrangeté particulièrement insolite au sein d'un bâtiment archaïque où des silhouettes de vieillards semblent figées par derrière leur fenêtre ! Au fil de ces contrariétés grandissantes, davantage angoissé par le comportement étrange et l'intolérance drastique de certains voisins (sans compter l'influence du tenancier lui suggérant de boire un chocolat et fumer des marlboros comme Madame Choule l'eut sollicité chaque matin !), Trelkovsky finit par se convaincre qu'il est victime d'un complot meurtrier. Peu à peu, l'angoisse et la terreur vont finalement intenter à sa psychologie régressive !


Chargé d'inquiétude et d'étrangeté dans son climat de claustration, la densité psychologique du Locataire réside par ailleurs dans cette faculté que Polanski, réalisateur, entreprend pour nous faire douter de la pathologie mentale de son protagoniste. S'agit-il de l'influence (diabolique) de l'ancienne locataire suicidée, ou celle, tyrannique, des voisins bourrus ? L'appartement est-il maudit par une malédiction égyptienne lors d'un voyage entrepris par Mme Choule ? Ou n'est-ce que la simple dérive paranoïde d'un homme esseulé, incapable de réfréner ses névroses et obsessions ? Par le truchement d'hallucinations, le réalisateur improvise des séquences cauchemardesques particulièrement délirantes et cruelles afin de mettre en exergue la folie aliénante de son locataire (les voisins sont caractérisés par des reptiles démoniaques et organisent un spectacle théâtral afin de prôner sa future mort !). Une victime martyrisée par l'affres de la frayeur, littéralement envoûtée par la personnalité trouble de Mme Choule, et donc contraint de se travestir en femme Spoiler !!! pour éventuellement finir par se jeter par la fenêtre ! Fin du Spoil.


Effrayant par son réalisme obscur mais aussi débridé par son caractère sardonique, le Locataire fait presque office de documentaire pour ausculter l'introspection mentale d'un schizophrène rongé par sa paranoïa. En tant qu'acteur, Roman Polanski détonne et réussit à donner chair à son personnage torturé avec une dimension humaine toute en pudeur. Tandis que l'ambiance opaque qui émane des parois de cet immeuble sclérosé laisse en suspens une énigme aussi indécise qu'irrésolue !

13.02.13. 4èx
Bruno Matéï

mardi 12 février 2013

L'EVADE D'ALCATRAZ (Escape from Alcatraz)

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site pariscine.com

de Don Siegel. 1979. U.S.A. 1h52. Avec Clint Eastwood, Patrick McGoohan, Roberts Blossom, Jack Thibeau, Fred Ward, Paul Benjamin, Larry Hankin.

Sortie salles France: 31 Octobre 1979. U.S: 22 Juin 1979

FILMOGRAPHIE: Don Siegel (Donald Siegel) est un réalisateur et producteur américain, né le 26 Octobre 1912 à Chicago en Illinois, décédé le 20 Avril 1991 à Nipoma, en Californie.
1956: l'Invasion des Profanateurs de Sépultures. 1962: l'Enfer est pour les Héros. 1964: A bout portant. 1968: Police sur la ville. 1968: Un Shérif à New-York. 1970: Sierra Torride. 1971: Les Proies. 1971: l'Inspecteur Harry. 1973: Tuez Charley Varrick ! 1974: Contre une poignée de diamants. 1976: Le Dernier des Géants. 1977: Un Espion de trop. 1979: l'Evadé d'Alcatraz. 1980: Le Lion sort ses griffes. 1982: Jinxed.


Pour la 5 fois, la collaboration Eastwood/Siegel converge au chef-d'oeuvre pour un suspense carcéral d'une intensité rarement égalée. Récit véridique de trois taulards ayant réussi à s'échapper d'une forteresse blindée, l'Evadé d'Alcatraz nous retranscrit leur exploit avec une science du suspense incisive !


Dans une mise en scène affûtée à l'efficacité inébranlable, ce modèle du film de prison nous illustre une tentative d'évasion qui relève de l'improbabilité tant le nombre de risques encourues pour chacun des détenus laisse présager la déroute. La manière documenté dont Don Siegel fait preuve pour retranscrire cette escapade charpentée nous immerge de plein fouet dans l'enceinte d'un pénitencier insulaire réputé inviolable. De prime abord, le réalisateur s'attache à nous décrire la condition de vie totalitaire que chaque détenu est contraint de subir sous l'allégeance d'un directeur pointilleux incapable d'indulgence. C'est le notable Patrick McGoohan qui incarne tout en magnétisme le rôle d'un dirigeant impassible auquel son intransigeance ordonne une discipline de fer chez les surveillants. Dans celui du prisonnier rusé et flegmatique, Clint Eastwood impose une posture inflexible afin de se mesurer aux provocations incessantes d'un taulard méprisable et de son directeur impérieux. Loyal et tolérant, il insuffle par ailleurs une dimension humaniste lorsqu'il se prend d'empathie pour un peintre désabusé et qu'il se lie d'amitié avec un archiviste noir condamné pour sa couleur de peau. Enfin, avec sagacité et patience, il détermine une dimension héroïque pour concrétiser un plan d'évasion où aucun détail n'est laissé au hasard (c'est avec un cure ongle que sa stratégie peut de prime abord aboutir !). Pour exacerber cette tension permanente qui émane des agissements frauduleux de prisonniers occasionnant des risques insensés, le score monocorde de Jerry Fielding est constitué d'une partition quasi insonore. Enfin, le point d'orgue impartie à l'insoluble escapade est un moment d'anthologie échevelé où les nerfs du spectateur sont mis à rude épreuve.


Passionnant et éprouvant, l'Evadé d'Alcatraz est un gros morceau de cinéma d'une puissance émotionnelle et d'une rigueur technique infaillible. Le récit authentique d'une seule évasion entreprise avec succès par des détenus utopistes (même si nous ne saurons jamais s'ils s'en sont sortis vivants !) au sein d'une île pénitentiaire intangible. C'est d'ailleurs après cette impensable défaite qu'Alcatraz clôturera définitivement ses portes pour se reconvertir en site historique !

12.02.13. 4èx
Bruno Dussart

lundi 11 février 2013

Citadel. Prix du Public à South by Southwest.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Ciaran Foy. 2012. Irlande/Angleterre. 1h24. Avec Aneurin Barnard, James Cosmo, Wunmi Mosaku.

Sortie salles U.S: 9 Novembre 2012

FILMOGRAPHIE: Ciaran Foy est un réalisateur, scénariste, monteur, acteur et producteur anglais.
2001: 1902. 2001: Wired. 2002: The Puppet. 2006: The Faeries of Blackheath Woods. 2007: Scumbot. 2009: Hotel Darklight (segment directeur). 2012: Citadel.


Dans la lignée des Révoltés de l'an 2000 pour son thème alloué à l'enfant martyr, cette modeste série B co-produite entre l'Irlande et la Grande Bretagne privilégie à point nommé un ton désenchanté pour établir un constat social sur la déliquescence des laissés pour compte. Le PitchSuite à l'agression mortelle de son amie par des enfants sauvages, un jeune père de famille sombre dans l'agoraphobie. Epié et menacé par ses meurtriers infantiles, il va tenter de transcender sa frayeur pour sauver sa vie ainsi que celle de son bambin. Imprégné d'une atmosphère à la fois anxiogène et dépressive, et renforcé de l'esthétisme blafard de ghettos défavorisés, Citadel est une oeuvre étrange d'une sensibilité prégnante. Un cauchemar urbain au cours duquel nous suivons l'introspection fébrile d'un jeune veuf traumatisé par la mort de sa compagne lors d'une violente altercation avec de jeunes agresseurs. Souffrant d'agoraphobie et totalement replié au sein de son appartement, Tommy sombre dans une grave paranoïa à force de daigner prémunir coûte que coûte l'existence de son enfant. Sa brève thérapie dans un centre spécialisé et l'aide amicale d'une amie de longue date lui apportent toutefois un frêle soutien, d'autant plus que les sauvageons semblent déterminés à l'appréhender. Mais ce n'est qu'avec l'entremise d'un prêtre accompagné d'un enfant aveugle que Tommy va pouvoir amorcer bravoure et courage afin de réprimer son inévitable frayeur.


Dominé par la prestance chétive de Aneurin Barnard habité par son expression névralgique, il parvient avec beaucoup d'humanisme désarmé à nous insuffler ces lourdes contrariétés au sein de sa solitude meurtrie. Cette ambiance dépressive émanant de sa psyché névrosée engendrant une inévitable empathie chez le spectateur, d'autant plus intrigué par l'hostilité meurtrière d'une bande organisée. En effet, nous ne saurons jamais dans quel but les enfants encapuchonnés atteints de cécité (on pense d'ailleurs aux mutants défigurés de Chromosome 3, tant pour leur apparence infiniment hostile que leur vocalité éraillée !) décident d'assassiner tous les adultes. Si ce n'est que seuls les quidams dominés par leur propre peur sont systématiquement identifiés et battus à mort. Spoil ! La cause de leur déficience mentale ainsi que leurs pulsions erratiques proviendraient d'une maladie infectieuse d'origine inconnue transmise par la mère de deux jumeaux Fin du Spoil. Sans fioriture, le film réussit avec réalisme cafardeux à y dépeindre un climat de peur palpable au sein d'une banlieue déserté de citadins, d'où seule plane la présence primitive d'enfants martyrs livrés à l'abandon. Son final particulièrement poignant véhiculant également une vibrante émotion pour la destinée précaire de nos héros, mais aussi celle des antagonistes infantiles, victimes malgré eux d'une société individualiste dénuée d'empathie.


Les Enfants du Silence
Réalisé avec autonomie au sein d'un climat malsain constamment éprouvant et dominé par une poignée de comédiens chargés d'humanisme torturé (ou altruiste), Citadel conjugue à travers son récit initiatique désespoir, angoisse et terreur quasi viscérales autour d'un constat social sur la délinquance juvénile. Y découle une oeuvre indépendante aussi fragile qu'austère, d'une efficacité constante (notamment pour l'habileté du réalisateur d'y entretenir le mystère jusqu'à mi-parcours du récit) et à la violence rugueuse, exacerbée d'une force émotionnelle désespérée. Un véritable must du genre, à réserver toutefois à un public averti de par son vérisme éprouvant imparti à l'innocence galvaudée.

*Eric Binford
24.12.21
11.02.13

RécompensesPrix du Public (Midnight Audience) à South by Southwest, 2012
Prix Narcisse au Festival de Neuchâtel, 2012
Méliès d'Argent au Festival de Neuchâtel, 2012
Meilleur réalisateur au Festival du film fantastique de Puchon, 2012
Meilleur son aux Irish Film and Television Awards, 2013

jeudi 7 février 2013

FARGO. Prix de la mise en scène, Cannes 1996

                          Photo emprunté sur Google, appartenant au site blogaudessusducinema.over-blog.fr

de Joel et Ethan Cohen. 1996. U.S.A/Angleterre. 1h38. Avec Frances McDormand, William H. Macy, Steve Buscemi, Peter Stormare, Harve Presnell, John Carroll Lynch.

Sortie salles France: 4 Septembre 1996. U.S: 8 Mars 1996

Récompenses: Prix de la mise en scène, Cannes 1996
Meilleure Actrice (Frances McDormand) et Meilleur Scénario Original (Ethan et Joel Cohen) aux Oscars en 1997.
Meilleur Film Etranger: Australian Film Institute Awards 1996

FILMOGRAPHIEJoel Coen (né le 29 novembre 1954) et Ethan Coen (né le 21 Septembre 1957) sont deux frères réalisateurs, scénaristes, monteurs, acteurs et producteurs américains.
1984: Sang pour Sang, 1987: Arizona Junior, 1990: Miller's Crossing, 1991: Barton Fink, 1994: Le Grand Saut, 1996: Fargo, 1998: The Big Lebowski, 2000: O'Brother, 2001: The Barber, 2003: Intolérable Cruauté, 2004: Ladykillers, 2006: Paris, je t'aime (tuileries), 2007: No country for old men, Chacun son cinéma (sktech: world cinema), 2008: Burn After Reading, 2009: A Serious Man, 2010: True Grit.


                                                    CECI EST UNE HISTOIRE VRAIE
Elle s'est déroulée dans le Minnesota en 1987.
A la demande des survivants, les noms ont été changés.
Par respect pour les morts, tout le reste a été conservé.

Glaçant de savoir que cette histoire d'enlèvement relève d'un fait divers macabre, rehaussé en l'occurrence d'un humour noir grinçant sous la houlette des frères Cohen ! Polar noir illustrant l'équipée risible d'une bande de pieds nickelés appâtés par le gain, Fargo est une peinture acide de la médiocrité humaine. Un vendeur de voitures endetté décide de faire enlever sa femme par deux malfrats pour la somme de 80 000 dollars qu'ils se partageront à part égale ! Ce compromis perfide négocié avec deux nigauds incultes va déboucher sur une sordide hécatombe meurtrière !



Sous le climat enneigé d'une paisible bourgade du Minnesota, les frères Cohen redoublent de sagacité pour nous élaborer un scénario machiavélique au cynisme décapant ! La manigance maladroite impartie à un entrepreneur raté, affilié à deux malfrats rétrogrades, débouche sur une succession de bévues irréversibles ! Sous l'égide d'une chef de police sereine menant son enquête avec aplomb, Fargo dépeint son portrait avec un humanisme payant, en totale décalage avec l'irresponsabilité d'individus cupides englués dans leur paresse. Sous l'oeil finaud de cette policière, les frères Cohen nous illustrent une descente aux enfers implacable où tous les antagonistes se vautrent dans une indolence régressive alors que les témoins innocents périront de leur lâcheté impudente. Si l'étonnante Frances McDormand insuffle une aisance naturelle pour interpréter le rôle flegmatique d'une femme flic intègre, William H. Macy impose un jeu insidieux pour endosser celui d'un père de famille de classe moyenne progressivement avili par sa cupidité. Sans doute le personnage le plus dérisoire, couard et négligent du film, ultime responsable de cette déchéance meurtrière. Enfin, Steve Buscemi et Peter Stormare forment l'improbable tandem de pieds nickelés lunatiques, abêtis par la pop-culture ricaine des soap-opera et de la malbouffe standard.


Bénéficiant d'un scénario charpenté complètement imprévisible et d'une mise en scène formelle fignolant sa nature réfrigérante, Fargo est une perle noire d'une drôlerie macabre particulièrement tragique. Sa peinture peu reluisante d'une Amérique profonde déshumanisée par son inculture laisse en exergue une satire au vitriol de la bassesse humaine. 

07.02.13
Bruno Matéï

mercredi 6 février 2013

JACK LE TUEUR DE GEANTS (Jack the Giant Killer)

                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinefantastiqueonline.com

de Nathan Juran. 1961. U.S.A. 1h34. Avec Kerwin Mathews, Judi Meredith, Torin Thatcher, Walter Burke, Don Beddoe, Barry Kelley.

Sortie salles U.S: 13 Juin 1962

FILMOGRAPHIE: Nathan Juran est un réalisateur, scénariste et directeur artistique américain, né le 1er Septembre 1907 à Bucovine (Roumanie), décédé de mort naturelle le 23 Octobre 2002 à Paolos Verdes Estates (Etats-Unis). 1953: La Légende de l'Epée Magique. 1957: La Chose surgie des Ténèbres. A des Millions de kms de la Terre. Le Cerveau de la Planère Arous. 1958: L'Attaque de la Femme à 50 Pieds. Le 7è Voyage de Sinbad. 1961: Jack, le Tueur de Géants. 1964: Les premiers Hommes dans la lune. 1966: The Deadly Mantis. 1967: Billy the Kid. Les Trompettes de Jéricho. Les Aventuriers de l'Espace. 1969: Land Raiders. 1973: The Boy who Cried Werewolf.


Trois ans après l'immense succès du 7è Voyage de Sinbad, Nathan Juran est à nouveau recruté par le  producteur Edward Small pour entreprendre un conte fantastique dans la plus pure tradition féerique ! D'après un roman d'Orville H. Hampton, Jack le tueur de géants est un film d'aventures haut en couleurs parmi ses traditionnelles créatures monstrueuses uniquement animées en stop motion ! A l'instar de Ray Harryhausen, les responsables des effets spéciaux Howard A. Anderson et Jim Danforth s'inspirent ici de son talent inimitable pour nous façonner une palette de monstres exubérants (un cyclope, un géant à deux têtes, un serpent de mer et un dragon hybride !). L'histoire intelligible est un prétexte pour nous confiner dans un univers de magie et d'aventures. Celle de Jack, modeste fermier, qui réussit in extremis à sauver la princesse Elaine des griffes du sorcier Pendragon et de son monstre géant. Seulement, l'alchimiste doué de pouvoirs maléfiques réussit à nouveau à enlever la jeune femme afin de l'embrigader au sein de son château. Déterminé à la libérer, Jack va user de vaillance et bravoure pour s'opposer à Pendragon épaulé de ses sbires diaboliques ! Sur sa route, notre aventurier rencontrera un viking et un garçonnet, mais aussi un gnome enfermé dans une bouteille. C'est grâce aux prestiges magiques du lutin que Jack va ainsi pouvoir déjouer les maléfices du sorcier lors d'un florilège de revirements rocambolesques.


Si Jack, le tueur de Géants accuse le poids des années par ses effets spéciaux archaïques moins perfectionnistes que ceux de Ray Harryhausen, il n'en demeure pas moins un spectacle aussi exaltant qu'enchanteur propre à émerveiller son public de 7 à 77 ans. Le caractère attachant des personnages, la mesquinerie perfide de Pendragon, sa fantasmagorie attractive (l'apparition du petit monstre dans la boite à musique et la danse qui s'ensuit, le premier combat de Jack contre le Cyclope, les facéties du génie) et son rythme haletant continuent de nous enthousiasmer avec une naïveté attendrissante. A titre nostalgique, l'ancienne génération n'oubliera pas de se remémorer sa toute première projection TV diffusée un mardi soir dans le cadre de l'émission d'Eddie Mitchel: la Dernière séance !


A noter que le film est ressorti plus tard dans une version musicale et qu'il fut interdit de projection en Angleterre durant 7 ans, faute de certaines séquences jugées impressionnantes ! En prime, il écopa à travers le monde d'une interdiction au moins de 13 ans !

06.02.13. 3èx
Bruno Matéï

mardi 5 février 2013

The Bay


                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site cineheroes.net

de Barry Levinson. 2012. 1h24. Avec Will Rogers, Kristen Connoly, Kether Donohue, Frank Deal, Stephen Kunken, Christopher Denham.

Sortie salles U.S: 2 Novembre 2012. Belgique: 21 Novembre 2012

FILMOGRAPHIEBarry Levinson est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 6 Avril 1942 à Baltimore. 1982: Diner. 1984: Le Meilleur. 1985: Le secret de la Pyramide. 1987: Les Filous. 1987: Good morning Vietnam. 1988: Rain Man. 1990: Avalon. 1991: Bugsy. 1992: Toys. 1994: Jimmy Hollywood. 1994: Harcèlement. 1996: Sleepers. 1997: Des Hommes d'influence. 1998: Sphère. 1999: Liberty Heights. 2000: An Everlasting Piece. 2001: Bandits. 2004: Envy. 2006: Man of the Year. 2008: Panique à Hollywood. 2009: PoliWood (documentaire). 2012: The Bay. Prochainement: Gotti: in the shadow of my father.


Et un de plus ! Profitant du filon éculé du found footage, le réalisateur Barry Levinson s'essaie au concept documenteur avec une efficacité inespérée. Car illustrant avec souci d'authenticité la lente propagation d'un parasite chez les citadins d'une côte balnéaire, The Bay adopte l'unité de temps réel pour mieux nous convaincre du péril progressif. Avec l'appui de données scientifiques énoncés par des chercheurs indécis et l'impuissance des médecins de pouvoir dénicher un vaccin afin de déjouer la pandémie, The Bay provoque fatalement une anxiété extensive chez le spectateur. Sans faire preuve de complaisance, Barry Levinson réussit à provoquer une terreur viscérale par le biais des plaies purulentes figurants sur la peau des victimes contaminées (gestation de pustules, cloques et furoncles nauséeux).  L'aspect gluant du parasite, ressemblant au départ à une larve stéroïde, éclot de prime abord dans le ventre des poissons puis grossit rapidement pour muter en une forme de crustacé isopode (à l'instar de Frissons de Cronenberg !). 


C'est donc par l'eau salée de la baie empoisonnée par les ruissellements agricoles et les excréments de poulet, que les baigneurs vont se transmettre communément la bactérie à une vitesse grand V ! Un parasite se nourrissant d'abord de la langue de ces victimes avant de s'empresser de dévorer la chair humaine de l'intérieur du corps (on peut aussi suggérer les effets carnassiers du virus évoqué dans Cabin Fever). Avec une profusion d'images d'archives plutôt glauques et de reportages chocs retransmis par une journaliste scrupuleuse, The Bay nous entraîne dans un cauchemar catastrophiste dont l'homme impuissant ne peut avoir aucun recours pour enrayer la menace. C'est ce sentiment prégnant de réalisme docu illustrant avec une certaine verdeur l'affluence dégénérative des victimes infectées, agonisants dans d'horribles souffrances, qui nous suscite désarroi mais aussi malaise palpable face à l'imagerie gore déployée, même si la dernière demi-heure s'essouffle un tantinet.


Film d'horreur écolo dénonçant les méfaits pernicieux de la pollution et du nucléaire, tout en suggérant ironiquement le terrorisme biologique, The Bay aurait été une banale série B d'horreur s'il n'eut été conçu sous le principe du Found Footage. S'il se révèle sans surprise et inévitablement répétitif, son efficacité émane de la véracité des faits exposés face à une menace bactériologique épouvantablement délétère. Là où Soderbergh échoua de manière pompeuse à daigner nous terrifier avec son virus MEV-1 dans ContagionBarry Levinson s'en tire honorablement en jouant sans compromis la carte du démonstratif épidermique. Et cela fonctionne plutôt efficacement durant une bonne heure de métrage. 

Dédicace à François Most

*Bruno
16.07.22
05.02.13

GRABBERS. Prix du Public au Festival de Neuchâtel.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site tumblr.com

de John Wright. 2012. Angleterre/Irlande. 1h34. Avec Richard Coyle, Ruth Bradley, Russell Tovey, Lalor Roddy, David Pearse, Bronagh Gallagher

Sortie salles U.S: 23 Janvier 2012. Irlande: 10 Août 2012

Récompense: Prix du Public au Festival du film Fantastique de Neuchatel.

FILMOGRAPHIE: John Wright est un réalisateur et scénariste né le 2 mars 1971 à Belfast, en Irlande du Nord.
2009: Tormented. 2012: Grabbers



Récompensé du Prix du Public à Neuchatel et présenté hors compétition à Gérardmer, le second long métrage de l'irlandais John Wright est une comédie burlesque alliée au monster movie trépidant !
Sur une île côtière de l'Irlande, un poulpe géant et ses nouveaux-nés sèment la terreur parmi les citadins réfugiés à l'intérieur d'un pub. 


A partir d'un argument simpliste particulièrement éculé, le réalisateur novice John Wright réussit à tirer son épingle du jeu par un adroit sens de la dérision et du délire borderline ! L'idée majeure de cette fantaisie bougrement sympathique résulte de la manière dont les citadins vont devoir se prémunir de l'hostilité des poulpes extra-terrestres ! Se nourrissant d'eau et de sang humain, ces créatures venues d'une météorite ont la particularité de régurgiter l'alcool des clients éméchées ! Connaissant cette faille, un flic solitaire et une jeune recrue fraîchement débarquée sur l'île décident d'inviter toute la population au pub du coin afin de les inciter à participer à une beuverie improvisée !  Au départ réticents mais rapidement convaincus que l'alcool coulera gratuitement à volonté, les habitants s'empressent d'accourir vers l'établissement. Seulement, à l'extérieur, les créatures belliqueuses décident d'encercler l'open bar pour s'approvisionner en sang humain ! S'ensuit une multitude de quiproquos pittoresques où les clients atteints d'ébriété vont devoir se défendre d'une manière tantôt vaillante, tantôt erratique, faute du whisky ingurgité ! En dépit de son caractère débridé particulièrement cocasse, cette comédie insuffle notamment une sensibilité candide dans la personnalité affable des habitants irlandais ainsi que dans la romance impartie aux deux policiers, O'Shea et Lisa. Dans celui du flic dépité d'une rupture conjugale, Richard Coyle dégage avec une sympathique bonhomie un tempérament loyal de héros malgré lui. Sa collègue Lisa Nolan, incarnée par la pétillante  Ruth Bradley, véhicule de prime abord un charme innocent pour ensuite imposer une extravagance irrésistible quand la jeune fille se voit contrainte de supporter un taux d'alcool disproportionné ! Son aisance naturelle à se comporter comme une héroïne fantasque provoquant divers risques et catastrophes renforce le côté décalé de l'ambiance alarmiste.


Outre l'efficacité du récit mené sur un rythme soutenu, le soin apporté aux FX numériques, la verve des dialogues et la bonne humeur impartie à chaque protagoniste, John Wright se permet notamment de soigner son décor d'archipel en surplombant la splendeur de sa nature irlandaise ! En résulte une excellente comédie fantaisiste tirant justement son charme attractif par sa simplicité candide !

05.02.13
Bruno Matéï

lundi 4 février 2013

Universal Soldier: Le Jour du Jugement / Universal Soldier: Day of Reckoning

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site partage-ddl.com

de John Hyams. 2012. U.S.A. 1h55. Avec Scott Adkins, Jean Claude Van Damme, Dolph Lundgren, Kristopher Van Varenberg, Andrei Arlovski, Mariah Bonner.

Sortie DTV France: 23 Janvier 2013. Sortie salles U.S: 30 Novembre 2012. Russie et Malaisie: 4 Octobre 2012

FILMOGRAPHIE: John Hyams est un réalisateur, scénariste et producteur américain.
1997: One dog Day. 2002: The Smashing Machine. 2003: Fight Day (télé-film). 2006: Rank. 2006: Bull Sessions: The Making of Rank. 2009: The Razzle Dazzle. 2009: Universal Soldier: régénération. 2012: Universal Soldier: le jour du jugement. 2012: Dragon Eyes.


Après une sympathique série B matricielle initiée par Roland Emmerich et deux suites mercantiles en demi-teinte (le 3è épisode plus sombre et violent se révélait plus ambitieux que l'antécédent), Universial Soldier: le jour du jugement continue de s'opposer au caractère docile et pittoresque de son modèle. Déjà responsable du 3è volet, John Hyams nous livre ici un film d'action aussi étrange que furibond, déployant à intervalle régulier des séquences homériques d'une barbarie jusqu'au- boutiste ! Ca démarre sec avec un prologue meurtrier d'une rare brutalité pour le massacre d'une famille prise en otage par une bande de malfrats encagoulés. Passage à tabac du père de famille avec le fer d'un tisonnier puis exécutions de la mère et sa fille, sommairement assassinées d'une balle dans la tête ! Passé cette séquence choc particulièrement crapuleuse, on continue dans la même veine cinglante avec l'entrée en scène d'un barbu renfrogné au sein d'un hôtel de passe en rut ! Coups de chevrotine fugaces envoyés sur chacun des clients alors que certaines de leur partenaire vont se retrouver projetées contre les murs par l'impact des balles assénées.


D'une sauvagerie inouïe dans son ultra-violence pourfendeuse et extrêmement spectaculaire dans ses combats chorégraphiés, le long métrage de John Hyams est une série B d'une audace subversive pour illustrer sans concession la quête identitaire d'une ancienne machine à tuer, délibéré à retrouver ses assaillants. Sans faire preuve d'originalité pour son scénario quelque peu décousu (voir parfois aussi expérimental dans les liens télépathiques qu'entretiennent les UniSol), Universal Soldier: le jour du jugement est suffisamment bien troussé et efficace pour prémunir l'intérêt du spectateur, constamment ébranlé par sa puissance épique ! Course poursuite endiablée contre véhicules, baston interminable entre deux antagonistes au sein d'un foyer délabré ou dans l'enceinte d'un commerce sportif et échanges de tirs méthodiques contre un groupe de mercenaires centralisés en camp militaire. Si l'interprétation reste tout juste honorable et que Scott Adkins tente comme il peut d'insuffler une certaine densité dans sa rancune vindicative, Jean Claude Vandamme véhicule une présence glaçante pour endosser l'icone mystique d'un leader aussi mutique qu'impassible. Alors que son fidèle allié campé par le vétéran Dolph Lundgren fait preuve d'un sarcasme mêlé de mépris afin d'intimider ses adversaires.


D'une férocité aussi incongrue que rigoureuse, Universal Soldier: le jour du jugement est une série B effrontée déployant sans répit des séquences homériques à l'impact foudroyant ! Si son scénario indécis et mal structuré l'empêche de dépasser le stade conventionnel du film d'action, son caractère trouble lié à la quête identitaire et au rapport émotif de nos réminiscences survole notamment une certaine réflexion existentielle. A découvrir sans préjugés pour les amateurs  d'action frontale !

04.02.13
Bruno Matéï

mardi 29 janvier 2013

LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE (The Thing from another world)

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de Christian Nyby et Howard Hawks. 1951. U.S.A. 1h27. Avec Margaret Sheridan, Kenneth Tobey, Robert Cornthwaite, Douglas Spencer, James R. Young, Robert Nichols.

Sortie salles France: 14 Décembre 1951. U.S: 6 Avril 1951 / 29 Avril 1951

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Christian Nyby est un monteur et réalisateur américain, né le 1er Septembre 1913 à Los Angeles (Californie), décédé le 17 Septembre 1993 à Temecula.
1951: La Chose d'un autre Monde. 1957: Hell on Devil's Island. 1962: Elfego Baca: Six gun Law. 1965: Furie sur le Nouveau-Mexique. 1965: Operation C.I.A. 1967: First to fight.
Howard Hawks est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 30 Mai 1896 à Goshen dans l'Indiana, décédé le 26 Décembre 1977 à Palm Springs en Californie.
1930: La Patrouille de l'aube. 1932: Scarface. 1933: Après nous le déluge. 1936: Brumes. 1936: Les Chemins de la Gloire. 1938: l'Impossible Monsieur Bébé. 1939: Seuls les anges ont des ailes. 1941: Sergent York. 1944: Le Port de l'Angoisse. 1946: Le Grand Sommeil. 1948: La Rivière Rouge. 1951: La Chose d'un autre Monde. 1952: La Captive aux Yeux clairs. 1952: Chéri, je me sens rajeunir. 1953: Les Hommes préfèrent les Blondes. 1955: La Terre des Pharaons. 1959: Rio Bravo. 1962: Hatari. 1966: El Dorado. 1970: Rio Lobo.


Bien avant The Thing de Carpenter, deux réalisateurs s'étaient appropriés du roman de John W. Campbell, Who Goes There ?, afin d'innover dans l'anticipation alarmiste. Car même si Howard Hawks est crédité au poste de producteur, il aurait été en partie responsable de la réalisation prodiguée à Christian Nyby.

Dans une région polaire de l'arctique, des chercheurs vont établir la stupéfiante découverte d'un vaisseau spatiale échoué sur la banquise. Après l'avoir fait explosé, les hommes ramènent à leur base militaire le corps congelé d'un extra-terrestre. Rapidement, la créature en éveil s'échappe et sème la terreur parmi le groupe. 


Ce qui frappe d'emblée en revoyant ce classique de la science-fiction mâtinée d'épouvante, c'est la modernité de sa mise en scène rigoureuse, filmée à la manière d'un reportage pris sur le vif. D'ailleurs, d'illustres réalisateurs comme Ridley Scott et John Carpenter appliqueront plus tard la même recette pour façonner avec véracité leur terreur diffuse d'une menace extra-terrestre (Alien et bien entendu le démarquage The Thing).
Avec un sens habile du suspense sous-jacent, la Chose d'un autre monde est une formidable machine anxiogène privilégiant l'effet de suggestion avec une belle efficacité. L'originalité de son récit confiné au sein d'un décor hivernal réfrigérant et l'aspect hybride de sa créature végétale (en gros, une carotte vivante se régénérant grâce au sang humain), confronte le spectateur à une menace inédite irrémédiablement fascinante. En prime, la dextérité à laquelle les réalisateurs retardent ses furtives apparitions afin de véhiculer l'angoisse, déploie par intermittence des séquences d'agressions particulièrement cinglantes ! Pour preuve, l'altercation avec la chose prise dans les mailles d'un grand incendie se révèle bougrement impressionnante lorsque le feu a décidé de se propager aux alentours de la pièce cloisonnée, pour intenter notamment à la vie de nos équipiers.
La sobriété d'interprétation allouée à chacun des comédiens renforce largement son aspect documenté auquel l'esprit de cohésion va leur permettre avec courage de se mesurer à la menace singulière. Et pour renforcer le caractère épineux de l'enjeu de survie, un scientifique renfrogné a décidé de bafouer sa discipline hiérarchique pour préserver la survie d'une race inconnue !


Irrésistiblement fascinant et inquiétant, La Chose d'un autre monde n'a en l'occurrence rien perdu de sa rigueur technique d'une réalisation novatrice privilégiant un suspense méthodique. Un modèle du genre étonnamment pragmatique et stimulant ! 

29.01.13. 3èx
Bruno Matéï 


lundi 28 janvier 2013

THE COLLECTION

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site geektyrant.com

de Marcus Dunstan. 2012. U.S.A. 1h22. Avec Josh Stewart, Lee Tergesen, Christopher McDonald, Emma Fitzpatrick, Courtney Lauren Cumming.

Inédit en salles en France. Sortie salles U.S: 30 Novembre 2012

FILMOGRAPHIE: Marcus Dunstan est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 9 Septembre 1975 à Macomb dans l'Illinois.
2009: The Collector
2011: The Collection

Une déclinaison inutile de son modèle. A force de tout miser sur l'efficacité de l'action à grosse dose de surenchère et d'esbroufe, on finit par en être lasser. La faute en incombe un peu aussi au scénario éculé multipliant (comme dans le précédent) les invraisemblances. Quand au final vindicatif, il sombre dans le ridicule, comme la  plupart des vicissitudes allouées aux protagonistes. 

Distrayant au second degré pour les indulgents alors que la nouvelle génération sevrée à Saw applaudira une fois de plus !

P.S: le film ne dure qu'1H10 (non générique compris) !



vendredi 25 janvier 2013

THE MAN FROM EARTH (Jerome Bixby's The Man from Earth). Prix du Meilleur Film à Rhode Island, 2007

                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site aeriesguard.com

de Richard Schenkman. 2007. U.S.A. 1h27. Avec David Lee Smith, John Billingsley, Ellen Crawford, William Katt, Annika Peterson, Richard Riehle, Alexis Thorpe.

Sortie dvd et blu-ray en France: 5 Juillet 2011. Sortie salles U.S: 13 Novembre 2007

Récompenses: Premier Prix du Meilleur Film, Grand Prix du Meilleur Scénario au Festival de Rhode Island en Août 2007.

FILMOGRAPHIE: Richard Schenkman est un réalisateur, scénariste et acteur américain, né le 6 Mars 1958 à New-York.
2000: A Diva's Christmas Carol (télé-film)
2006: Muckraker ! (télé-film)
2007: The Man from Earth
2007: And then came Love


Inédit en salles en France mais distribué en dvd et blu-ray, The Man From Earth est le genre de perle rare honteusement occultée mais favorisée par un bouche à oreille particulièrement expansif. Notamment grâce à son téléchargement illégal pratiqué à travers le monde mais approuvé par le réalisateur lui même.
Récit de science-fiction spéculatif sur les origines de l'univers et de la religion, The Man From Earth est un passionnant cours d'histoire et de philosophie inculqué par l'entremise d'un divin (affabulateur ?).

Sur le point de quitter ses amis, un professeur leur confesse qu'il était un homme de Croc- Magnon ayant survécu depuis des millénaires. Au cours des discussions enflammées, ses camarades dubitatifs et intrigués commencent à douter de son état mental. L'un des leurs fait donc appel à un psychologue pour tenter de définir s'il est saint d'esprit, mythomane ou tout simplement dérangé. En prime, au moment où l'un des thèmes abordés se focalise sur le thème religieux, l'homme prétend être Jésus en personne !


Avec des moyens dérisoires essentiellement établis autour d'un huis-clos intime, le réalisateur nous convie à un aparté symbolisé par un oracle venu de nulle part, délibéré à avouer son éthique auprès de ses fidèles amis ! Au fil de ses discussions passionnelles sur l'intérêt de l'existence (en gros, prodiguer tout simplement le Bien !) et de la foi, le film remet en cause nos valeurs spirituelles sur l'idéologie d'un quelconque Dieu, pointe du doigt le fanatisme religieux et théorise sur la fatalité de la réincarnation. Autour de cet entretien passionnant chargé de mystère insondable, le réalisateur met en évidence le rapport philosophique du bouddhisme auquel l'enseignement du christianisme se serait largement inspiré pour exalter l'humanité. Nos grands philosophes, prosélytes et poètes nous auraient alors inventé des paraboles et des mythes extravagants pour mieux nous orienter vers une sagesse mystique.
A travers cette idée improbable qu'un homme de 35 ans aurait survécu depuis plus de 14 000 ans, le réalisateur aborde notamment une réflexion sur le pouvoir de persuasion et d'imagination. Sur notre inévitable curiosité à tenter de déceler la véracité de propos fantaisistes mais aussi d'y croire fermement si le narrateur en question était réellement céleste. Etrange mais irrésistiblement captivant, le discours théorique de John nous énonce finalement que l'homme est destiné à apprendre, aimer son prochain et respecter les lois de la nature. Notamment que le paradis tant idéalisé s'est érigé sur notre terre (la bonté est ici là où elle doit être !), et que nous ne formons peut-être qu'une seule et unique personne, à moins d'être voué à renaître indéfiniment !


La vie de Jésus
Science-fiction cérébrale bourrée de réflexions passionnantes sur les thèmes de l'existence et la religion, la fatalité de la vieillesse et la peur de la mort, The Man From Earth est une allégorie agnostique sur une forme d'incarnation surnaturelle. Avec des moyens minimaliste érigés sur une unité de lieu, Richard Schenkman réalise une oeuvre universelle, originale, studieuse et sensible, culminant son épilogue vers un coup de théâtre particulièrement poignant. Là où l'amour implore de laisser deux amants en étreinte...

Dédicace à O du Moulin
26.01.13
Bruno Matéï

LE LAC DES MORTS-VIVANTS (Zombie Lake)

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site cult-labs.com

de Julian de Laserna (Jésus Franco) et Jean Rollin. 1981. France/Espagne. 1h29. Avec Howard Vernon, Pierre-Marie Escourrou, Anouchka Lesoeur, Antonio Mayans, Nadine Pascal, Youri Radionow, Burt Altman, Gilda Arancio, Marcia Sharif, Yvonne Dany, Jean-René Bleu.

Sortie salles France: 13 Mai 1981

FILMOGRAPHIE: Jean Rollin (Jean Michel Rollin Roth Le Gentil) est un réalisateur, producteur, scénariste et écrivain français, né le 3 novembre 1938 à Neuilly-sur-Seine (Seine), décédé le 15 Décembre 2010. 1958: Les Amours Jaunes. 1961: Ciel de cuivre. 1963: l'Itinéraire marin. 1964: Vivre en Espagne. 1965: Les Pays loin. 1968: Le Viol du Vampire. 1969: La Vampire Nue. 1970: Le Frisson des Vampires. 1971: Requiem pour un vampire. 1973: La Rose de fer. 1973: Jeunes filles impudiques. 1973: Christina chez les morts-vivants (une séquence, non crédité). 1974: Les Démoniaques. 1974: Tout le monde il en a deux. 1975: Lèvres de sang. 1975: Phantasmes. 1976: La Romancière Lubrique. 1976: La comtesse Ixe. 1977: Saute moi dessus. 1977: Hard Penetration. 1977: Vibrations sexuelles. 1977: Positions danoises. 1978: Remplissez moi les trois trous. 1978: Petites pensionnaires impudiques. 1978: Lèvres entrouvertes pour sexes chauds. 1978: Hyperpénétrations. 1978: Les Raisins de la mort. 1978: Discosex. 1979: Fascination. 1979: Gamines en chaleur. 1979: Bouches lascives et pornos. 1979: Pénétrations Vicieuses. 1980: Le Nuit des Traqués. 1981: Fugues mineures. 1981: Le Lac des Morts-vivants (sous le pseudonyme de J. A. Lazer). 1982: Rêves de sexes. 1982: La Morte-vivante. 1983: Sodomanie. 1983: Folies anales. 1984: Les Trottoirs de Bangkok. 1985: Ne prends pas les poulets pour des pigeons. 1985: Emmanuelle 6. 1990: La Griffe d'Horus (TV). 1990: A la poursuite de Barbara. 1991: Perdues dans New-York. 1993: Killing Car. 1994: Le Parfum de Mathilde. 1997: Les 2 Orphelines Vampires. 2002: La Fiancée de Dracula. 2007: La Nuit des Horloges. 2010: Le Masque de la Méduse.


Tourné en partie par Jean Rollin (Jesus Franco aurait pris la poudre d'escampette au bout de 2 jours de tournage !), Le Lac des Morts-vivants est considéré à juste titre comme l'un des nanars les plus affligeants de l'Hexagone (et de la planète entière s'exclameront les goguenards !). Nanti d'un budget de miséricorde, d'acteurs amateuristes (même Howard Vernon semble totalement évasif !) et d'une réalisation godiche, cette production Eurociné transcende sa nullité par un humour involontaire multipliant les bourdes techniques. Maquillage verdâtre des zombies tantôt criard, tantôt désaturé dès qu'ils s'extirpent de l'eau, piscine camouflée en étang de nénuphars et surtout un jeu d'interprétation constitué en grande partie de bovins du 3è âge quand il ne s'agit pas de jolies potiches dénudées filmées sous toutes les coutures !


Le scénario risible est à lui tout seul une farce saugrenue alliant romantisme infantile, horreur académique et parodie troupière ! Dans un petit village des années 50, des zombies nazis autrefois assassinés et noyés par des résistants français s'extirpent d'un lac pour revenir se venger. La cause de leur damnation provient des messes noires invoquées dans les eaux de l'étang sous le règne de l'inquisition médiévale. Débarquée au village, une journaliste enquête auprès du maire pour connaître les origines de la tragédie que la populace prénomme "le lac des maudits". Enfin, pour insuffler une certaine forme de poésie romanesque à l'intrigue, un flash-back nous remémore qu'un des soldats allemands avait eu une relation idyllique avec une femme française, décédée quelques temps après l'accouchement de leur fille. Revenu aujourd'hui d'entre les morts, l'officier décide de rendre visite à sa fille avec une bonhomie virginale !!!


Jamais ennuyeux car tellement andouille dans les chassés croisés imparties entre zombies délavés et victimes ahuries, le Lac des Morts-vivants est notamment privilégié d'une quantité astronomique de dialogues aussi bien grandiloquents qu'hilarants ! A titre d'exemple, je vous laisse lire l'une des répliques les plus mémorables !
Le maire: Seul le grand feu sacré de l'apocalypse pourrait les réduire en cendres et leur donner la paix éternelle !
Katia: Le grand feu sacré de l'apocalypse, le feu auquel je pense n'a rien de sacré vous voyez ! Au contraire, il est moins mystique mais tout aussi efficace que l'apocalypse ! Pas grand chose ne lui résiste, n'hésitez pas utilisez le !
Le maire: Mais, mais, à quoi pensez vous ?
Katia: Au napalm !
Le maire: Merci, merci Katia ! Vous allez sauvez le village de la destruction et moi du désespoir !


On a retrouvé la 7è compagnie !
Panthéon du Z franchouillard où le grand-guignol troupier se dispute à l'érotisme polisson (le club des baskets est entièrement à poil pour aller faire trempette dans la piscine !), le Lac des Morts-vivants est un nanar suprême que tout aficionados se doit d'expérimenter ! Filmé avec une maladresse et un sérieux stoïques, joué par des métayers plus vrais que nature et des nymphettes décomplexées, cette pantalonnade s'alloue même d'un charme formel dans ses paysages bucoliques et dans sa poésie niaise attendrissante. Ajoutez enfin pour agrémenter la fantaisie grand-guignol un score dissonant résolument envoûtant et vous obtenez un épigone d'outre-tombe des Bidasses en Folie !
A noter l'apparition clin d'oeil du regretté Jean Rollin en victime baba !

25.01.13. 3èx
Bruno Matéï