vendredi 2 mai 2014

POLTERGEIST

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site discreetcharmsandobscureobjects.blogspot.co

de Tobe Hooper. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Heather O'Rourke, Craig T. Nelson, JoBeth Williams, Zelda Rubinstein, Dominique Dunne, Oliver Robins.

Sortie salles France: 20 Octobre 1982. U.S: 4 Juin 1982

FILMOGRAPHIE: Tobe Hooper est un réalisateur américain né le 25 Janvier 1943 à Austin (Texas)
1969: Eggshells, 1974: Massacre à la Tronçonneuse, 1977: Le Crocodile de la Mort, 1979: The Dark (non crédité), 1981: Massacre dans le Train Fantôme, 1982: Poltergeist, 1985: Lifeforce, 1986: l'Invasion vient de Mars, Massacre à la Tronçonneuse 2, 1990: Spontaneous Combustion, 1993: Night Terrors, 1995: The Manglers, 2000: Crocodile, 2004: Toolbox Murders, 2005: Mortuary, 2011: Roadmaster.


Grand classique des années 80, Poltergeist est la réunion inattendue de deux grands auteurs du cinéma fantastique, celui de Steven Spielberg attaché au poste de producteur, et celui de Tobe Hooper confié à la réalisation. Sans revenir sur la polémique qui entoura la véritable paternité du métrage, on sent bien que Steven Spielberg y a apporté une certaine contribution dans la caractérisation idéaliste d'une famille aisée cohabitant en harmonie et dans la peinture d'une paisible banlieue inscrite dans la bonhomie. Avec l'originalité d'un scénario structuré, Poltergeist perdure son pouvoir attractif dans son alliage d'onirisme, d'humour et d'horreur, quand bien même l'attachante complicité des comédiens nous immerge de plein pied dans leur désarroi. En insistant sur la cohésion de cette famille aujourd'hui désunie, Tobe Hooper attache une grande importance à décrire leur fragilité après que l'une de leur fille eut été enlevée par des esprits frappeurs. Et de quelle manière ! Retenue prisonnière via l'écran de télévision, Carol-Anne tentera de communiquer avec ses parents afin d'implorer leur aide. A travers cette idée judicieuse, on peut notamment y déceler une métaphore sur le pouvoir de l'image et notre accoutumance à rester river devant la TV ! (les parents Freeling s'endorment devant leur poste quand ils ne se disputent pas le choix d'une chaîne lorsque le voisin bénéficie d'une même télécommande !). 


Avec l'intervention de spécialistes en parapsychologie, cette famille subitement frappée par une cause surnaturelle va devoir compter sur leur soutien afin de débusquer leur fille de l'au-delà. Sous couvert de l'archétype de la maison hantée et des esprits frappeurs qui importunent cette aimable famille, le réalisateur met notamment en exergue une réflexion spirituelle sur la vie après la mort (non dénuée de poésie dans le discours réconfortant des matriarches clairvoyantes), tout en rendant hommage à nos défunts lorsque les cadavres y sont profanés. L'efficacité imparable de Poltergeist émane donc de cet habile dosage d'horreur spectaculaire (à l'instar de son point d'orgue paroxystique où les forces du Mal se déchaînent !), d'onirisme (certaines apparitions surnaturelles, la dimension incandescente de l'au-delà !), d'humour pittoresque (la première partie privilégie le comportement cocasse des parents face au spectacle des incidents inexpliqués) et de moments d'intimisme plein de pudeur (la Spielberg touch est passée par là et le score sensible de Goldsmith intensifie l'émotion fraternelle des protagonistes !). Qui plus est, la mise en scène avisée utilise habilement l'artillerie lourde des effets spéciaux sans jamais empiéter sur le fil narratif. Outre le charisme indéfectible alloué aux parents Freeling (Craig T. Nelson et JobBeth Williams forment un couple vertueux plein d'humilité !), le charme innocent de la petite Carol-Anne endossée par Heather O'Rourke et l'autorité maternelle de Tangina Barrons incarnée par Zelda Rubinstein apportent un supplément crédible face à cette situation de conflit paranormal ! 


Spectaculaire, impressionnant, drôle et parfois terrifiant, Poltergeist n'a pas volé sa réputation de grand spectacle horrifique sous couvert d'une satire sur le contrôle des médias (au final, la famille Freeling se débarrasse définitivement du téléviseur !). Pour parachever, le savoir-faire indiscutable de Tobe Hooper (et de Steven Spielberg ?) élève(nt) l'entreprise au modèle de mise en scène ! 

Bruno Matéï
5èx

jeudi 1 mai 2014

APOCALYPSE 2024 (A Boy and his Dog)

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site apocalypsezone.com

de L. Q. Jones. 1975. U.S.A. 1h31. Avec Don Johnson, Susanne Benton, Jason Robards, Tim McIntire, Alvy Moore, Helene Winston.

Sortie salles France: 21 Avril 1976. U.S: Novembre 1975

FILMOGRAPHIE: L. Q. Jones est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur américain, né le 19 Août 1927 à Beaumont, Texas (Etats-Unis).
1964: The Devil's Bedroom. 1975: Apocalypse 2024. 1978: L'Incroyable Hulk (série T.V. 1 Episode: On the Line.


Authentique film culte peu connu du public et rarement diffusé à la TV, Apocalypse 2024 est notamment l'occasion de retrouver dans un tout jeune rôle le héros de Miami Vice: Don Johnson ! Quand à l'identité du réalisateur, plus connu en tant qu'acteur dans ses rôles de western, il est uniquement responsable de deux longs-métrages dont un premier essai resté inédit en France !
Récit post-apo décrivant les vicissitudes d'un survivant et de son chien, Apocalypse 2024 réussit de prime abord à retranscrire avec peu de moyens un univers de désolation après que la 4è guerre mondiale eut éclaté. Communiquant par télépathie avec son animal de compagnie, Vic tente de survivre dans un désert aride parmi l'hostilité de rescapés réduits à la famine. Alors qu'une autre population cohabite dans le monde souterrain, il va tenter d'y pénétrer par l'entremise d'une jeune inconnue qu'il souhaitait préalablement violer. Pendant leurs moments d'intimité et après s'être protégés de la horde des hurleurs, Quilla en profite pour le persuader de rejoindre l'autre monde contre l'avis du chien.


A travers les éléments de comédie noire et d'anticipation pessimiste, L. Q. Jones réalise ici un ovni aussi déroutant qu'attachant. D'abord par l'échange de conversations entretenues entre l'homme et son animal de compagnie doué ici de parole, sachant que ce dernier s'avère beaucoup plus lucide et érudit que son maître ! Ensuite par la dystopie assénée à deux univers distinctes, celui de la surface où tentent de survivre dans la sauvagerie les marginaux les plus défavorisés (on songe inévitablement à Mad-Max 2 !), et celui du monde souterrain où une société plus aisée s'efforce de trouver un fécondateur afin de favoriser leur procréation. Avec un humour plein de sarcasme (le chien Blood vole la vedette à tout le monde dans son sens de la répartie caustique mais aussi sa pudeur à respecter les mauvais choix de son maître !) et l'extravagance de personnages plutôt décalés (chaque habitant de Topeka est peinturluré d'un maquillage laiteux sur le visage !), Apocalypse 2024 mêle la farce satirique au post-nuke en soulignant le caractère dépendant de nos besoins sexuels (Vic est totalement tributaire de ses instincts lubriques !). Certaines mauvaises langues pourraient d'ailleurs reprocher le caractère misogyne de l'intrigue puisque la place de la femme est réduite ici à une fonction perfide et sournoise (sans parler d'objet de soumission dans sa 1ère partie !) afin de renverser le pouvoir et obtenir le trône ! A travers le cheminement indécis d'un rescapé machiste et maladroit, délibéré à épargner son chien pour accoster un monde meilleur, c'est également un récit initiatique que nous relate le réalisateur tout en mettant en évidence une solide histoire d'amitié.


Pittoresque et attachant, étrange et fascinant, Apocalypse 2024 réussit à sortir de la routine dans une tentative iconoclaste de dépoussiérer le genre avec audace, intelligence et ironie mordante (voir l'impensable épilogue confiné dans la farce macabre). La complicité amicale qu'entretiennent l'homme et son chien est une nouvelle fois l'occasion de souligner la fidélité indéfectible qui unissent le maître et l'animal. Une perle rare à faire connaître au plus grand nombre !

Bruno Matéï
3èx


mercredi 30 avril 2014

Predator

                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site futurefantastique.com

de John McTiernan. 1987. U.S.A. 1h47. Avec Arnold Schwarzenegger, Carl Weathers, Elpidia Carrillo, Bill Duke, Jesse Ventura, Sonny Landham, Richard Chaves.

Sortie salles France: 19 Août 1987. U.S: 12 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: John McTiernan est un réalisateur et producteur américain, né le 8 janvier 1951 à Albany à New-York. 1986: Nomads. 1987: Predator. 1988: Piège de Cristal. 1990: A la Poursuite d'Octobre Rouge. 1992: Medicine Man. 1993: Last Action Hero. 1995: Une Journée en Enfer. 1999: Le 13è Guerrier. 1999: Thomas Crown. 2002: Rollerball. 2003: Basic.


Remember, 1987, date à marquer d'une pierre blanche. John McTiernan accomplissant avec Predator un véritable coup de maître pour son second long reconnu depuis comme un classique incontesté. Sans doute inspiré par Terreur Extra-terrestre de Greydon Clark, série B culte au pitch similaire avec le même acteur du rôle-titre), mais aussi de Wolfen de Michael Wadleigh (pour la vision thermique de la créature), John Mc Tiernan opte pour le divertissement à grand spectacle en y combinant film de guerre en vogue (Rambo, Commando, Portés Disparus) et science-fiction rubigineuse (les référentiels Alien et sa suite, X Tro). Démarrant sur les chapeaux de roue avec la mission périlleuse d'un commando parti récupérer un éminent otage en pleine cambrousse, Predator frappe d'emblée par l'ampleur de sa mise en scène dont l'impact des scènes homériques nous laisse déjà le souffle coupé ! Cette petite mise en bouche déjà jouissive n'est rien comparée aux prochaines motivations prédatrices d'un extra-terrestre férue de trophées humains ! C'est donc ici une chasse à l'homme singulière que nous relate le réalisateur par l'intermédiaire d'un rapace redoutablement pernicieux car roi du camouflage et du plaisir de la traque !


Sur le papier, si le scénario peut s'avérer de prime abord risible et aurait sans doute sombré dans la gaudriole Z auprès d'un aimable tâcheron, John Mc Tiernan en extrait un opéra d'action et de violence au souffle primitif ! (voir l'incroyable point d'orgue au cours duquel s'affrontent sauvagement Dutch et le prédateur !). Porté sur les épaules de la montagne de muscles des années 80, Arnold Schwarzenegger  en impose d'ailleurs autant de sa posture saillante pour faire face à la stoïcité de son adversaire. Conçu par Stan Winston, le monstre au look rasta pourvu de gadgets meurtriers s'avère si impressionnant qu'il est depuis entré dans la légende du bestiaire fantastique afin d'égaler le xénomorphe Alien ! Mais avant ce duel homérique resté dans les annales par son ampleur formelle et sa férocité explosive, John Mc Tiernan nous aura peaufiné un redoutable survival lorsqu'une équipe d'élite se retrouve piégée par une présence hostile en interne d'une jungle. Incroyablement photogénique, ce milieu forestier semble véritablement se partager la vedette avec l'ennemi invisible tant le cinéaste exploite à merveille sa végétation très dense où la paranoïa de l'homme est notamment réduite à l'état de soumission. Ce sentiment d'insécurité permanent régi au coeur de la flore demeure d'autant plus palpable par l'anxiété des protagonistes en perdition, sachant que le prédateur se fond facilement à travers la végétation à l'aide d'une combinaison électronique pour mieux les alpaguer.


Véritable leçon de mise en scène exploitant à merveille l'immensité du décor naturel et la convoitise d'une créature protéiforme infiniment ensorcelante et démoniale, Predator marque également de son empreinte un duel au sommet géré entre le survivant et l'étranger, communément épris de rage de vaincre afin d'y asseoir leur suprématie. Chef-d'oeuvre formel baignant dans une dimension mythologique quand bien même la vigueur des combats et de la musique épique redoublent de fulgurance émotionnelle, Predator est probablement l'un des plus grands films d'action génialement combiné à une science-fiction horrifique en vogue qu'Alien(s) imprima de son empreinte liminaire. 

La Chronique de Predator 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/08/predator-2.html

*Bruno
4èx


                                                 

    mardi 29 avril 2014

    Wolf Creek 2

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site kinostar.com

    de Greg McLean. 2013. Australie. 1h46. Avec John Jarratt, Ryan Corr, Shannon Ashlyn, Philippe Klaus, Gerard Kennedy, Annie Byron.

    Sortie salles France: Prochainement...

    FILMOGRAPHIE: Greg McLean est un réalisateur, scénariste et producteur australien.
    2005: Wolf Creek. 2007: Solitaire. 2014: Wolf Creek 2.

    Neuf ans séparent Wolf Creek de cette séquelle, et le moins qu'on puisse dire, c’est que l’attente en valait la chandelle. Non pas que je trépignais d’espérer une suite à ce panthéon de l’horreur qui se suffisait à lui-même, mais ma curiosité a fini par l’emporter : Greg McLean allait-il relever le défi sans céder aux sirènes du produit standardisé ?

    Ça débute fort, avec une séquence d'ouverture qui donne d’emblée le ton crapuleux : un duo de flics zélés s’en prend à notre tueur australien lors d’un contrôle de routine. Évidemment, les rapports de force s’aiguisent à coups de réparties venimeuses, jusqu’à vriller en vendetta criminelle et inverser les rôles de domination. Ce prologue percutant, sans répit ni échappatoire pour les victimes, rappelle la patte tranchante du réalisateur : des mises à mort d’un réalisme cru, presque insupportable, ici spectaculaires.

    Alors qu’on craint de revoir un couple de touristes allemands sombrer dans le même piège, McLean dévie la trajectoire : il introduit un nouveau pèlerin solitaire, témoin malgré lui. Dès lors, à partir d’un canevas habilement construit - oscillant entre action nerveuse (un accrochage sur bitume rappelant Duel), retournements inopinés et apparitions éphémères de personnages secondaires -, le cinéaste reformule le survival du point de vue d’un seul et unique survivant.

    Avec une intensité croissante et un sens aigu du suspense éprouvant, Wolf Creek 2 renoue avec l’horreur hardcore d’un réel trop proche, quand un serial killer plus vrai que nature impose sa loi. Et c’est avec un humour noir profondément dérangeant que McLean relance la tension : son tueur sadique propose à sa victime un défi. Une sorte de Questions pour un champion sous acide - parodie sardonique, gravée dans les annales. Les confrontations psychologiques entre les deux antagonistes font grimper la tension, jusqu’à cet instant absurde où le survivant, à bout de nerfs, tente désespérément d’empoigner un marteau... 

    À travers les recoins suintants de la tanière de l’ogre, véritable charnier aux corps moribonds, McLean continue de jouer avec nos nerfs. Son sens brut de la terreur et son art du crescendo font de Wolf Creek 2 une épreuve sensorielle - tendue, extrême, malsaine - aussi puissante, convaincante que son modèle. Il le doit à la maîtrise de sa mise en scène plus prononcée, à la photogénie hallucinée du désert australien (magnifiquement baigné d’horizons crépusculaires), et à l’interprétation désormais iconique de John Jarratt : visage goguenard, domination suintante, sadisme érigé en rituel. Il crève l'écran jusqu'au trauma. 


    Peut-être encore plus terrifiant, terriblement éprouvant, Wolf Creek 2 secoue sans anesthésie. Il évite l’écueil de la redite grâce à un scénario espiègle, aiguisé, sardonique, qui pousse sa victime à l’extrême bord de l’humanité. Une suite qui fait largement honneur à son modèle, toujours aussi oppressive, sans échappatoire, cependant plus décomplexée dans sa dérision carnassière. On est d'ailleurs même en droit de la préférer. 

    — le cinéphile du cœur noir 🖤

    27.07.25. 2èx. Vost

    lundi 28 avril 2014

    Les Tueurs de l'Eclipse / Bloody Birthday

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

    de Ed Hunt. 1981. U.S.A. 1h24. Avec Susan Strasberg, José Ferrer, Lori Lethin, Melinda Cordell, Julie Brown, K.C. Martel, Elisabeth Hoy, Billy Jakoby

    Sortie salles France: 26 Mai 1982

    FILMOGRAPHIE: Ed Hunt est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né à Los Angeles.
    1973: Pleasure Palace, 1974: Diary of a Sinner, 1976: Point of no return. 1977: L'Invasion des Soucoupes Volantes. 1979: Plague. 1981: Les Tueurs de l'Eclipse. 1986: Alien Warrior. 1988: The Brain.

    Hit vidéo des années 80 paru sous la bannière d’Hollywood Video, Les Tueurs de l’Éclipse est une savoureuse bande d’exploitation fauchée, auréolée d’un capital sympathie indéniable grâce à la succession d’exactions meurtrières perpétrées par de simples bambins.

    Le pitch : trois enfants, sans lien de sang, naissent le même jour, lors d’une éclipse. À l’aube de leurs 10 ans, sans explication rationnelle, ils déclenchent une série d’incidents mortels dans leur petite bourgade. En reprenant le thème de l’enfant tueur, Ed Hunt ne s’encombre ni de psychologie ni de cohérence, préférant illustrer frontalement les méfaits de ses chères têtes blondes. Le scénario enchaîne sans répit les stratégies criminelles qu’ils mettent en œuvre pour se débarrasser de leur entourage.

    Avec sa réalisation classique, ses comédiens avenants – parfois cabotins, parfois apathiques (mention spéciale à Lori Lethin, dont le visage si timoré semble incapable de trancher entre la joie et la détresse lors des scènes dramatiques !) – et ses dialogues élémentaires, Les Tueurs de l’Éclipse aurait pu sombrer dans le nanar. Mais il est sauvé in extremis par le charisme diabolique de ses trois marmots, étonnamment convaincants.

    Avec leurs bouilles faussement innocentes et leurs regards viciés, le trio fascine lorsqu’il s’adonne aux actes les plus crapuleux. Jouant sur l’efficacité de leurs exactions et le raffinement de leurs subterfuges (comme lors de la party d’anniversaire), le film insuffle un dynamisme réjouissant, et s’autorise même une violence frontale : coup de pelle, batte de baseball, balle dans la tête, flèche dans l’œil. D’autant plus percutante qu’elle est le fait d’enfants à peine âgés de 10 ans, rivalisant d’inventivité sadique pour piéger leurs proies – skateboard piégé sur une rampe d’escalier, fléchette jaillissant d’un placard, arme factice remplacée par une vraie dans la ceinture d’un flic, frigo mortel dans une casse automobile...

    Entre deux exterminations, ils s’offrent aussi quelques parties de voyeurisme, comme ce regard glissé dans un trou de placard lors du strip-tease d’une potiche. Quant au final haletant, Hunt fait monter la tension lors de la séquestration d’une baby-sitter et de son petit frère, tous deux contraints de se rebeller contre cette autorité criminelle hors de contrôle.

      
    "La farce rouge des écoliers".
    Bis dans l’âme, à savourer à chaque révision, Les Tueurs de l’Éclipse est une farce macabre transcendée par son irrésistible charme bonnard. Grâce au charisme sardonique du trio infernal, à la vigueur de son rythme fertile en séquences-chocs, ce plaisir coupable et innocent divertit avec générosité, porté par l’attachante maladresse d’un Ed Hunt manifestement animé d’une sincère motivation. Un petit classique qui n’a rien perdu de son efficacité, et qui mérite haut la main sa place auprès des meilleurs films d’enfants meurtriers des glorieuses eighties. Sans prétention aucune.

    * Bruno
    5èx

    jeudi 24 avril 2014

    UN TUEUR DANS LA FOULE (Two Minute Warning)

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Larry Peerce. 1976. U.S.A. 1h55. Avec Charlton Heston, John Cassavetes, Martin Balsam, Beau Bridges, Marilyn Hassett, David Janssen, Jack Klugman.

    Sortie salles France: 12 Novembre 1976

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Larry Peerce est un réalisateur américain, né le 19 Avril 1930 dans le Bronw, New-York.
    1973: Les Noces de cendre. 1976: Un tueur dans la foule. 1987: Queenie (télé-film). 1989: Wired. 1995: Mensonges et trahison (télé-film). 1999: Abus de confiance.


    En pleine expansion du genre catastrophe, le réalisateur méconnu Larry Peerce exploite le filon pour mettre en scène Un Tueur dans la foule. Le pitch s'avère toujours aussi limpide. Un tueur embusqué sur le toit d'un stade se prépare à commettre un carnage durant la retransmission d'un match de football. Déniché par la police, le capitaine Peter Holly tente de l'appréhender parmi l'ingérence d'une brigade spéciale. Avec sa réunion de stars notoires (Charlton Heston, Gena Rowlands, John Cassavetes, Martin BalsamBeau Bridges), Un Tueur dans la Foule n'échappe pas aux traditionnels clichés pour nous décrire les liaisons houleuses de couples amoureux. Le problème, c'est qu'une fois de plus, ces seconds rôles de faire-valoir s'avèrent dénués d'intérêt pour leur accorder une quelconque empathie face à leur souci d'argent ou d'infidélité. C'est donc du côté des rôles principaux, en particulier celui du capitaine Holly, incarné avec virilité par Charlton Heston, et celui du chef de la brigade spéciale, endossé avec pragmatisme par John Cassavetes, qu'Un Tueur dans la foule réussit à gagner notre enthousiasme. A eux deux, ils forment un tandem plutôt solide pour nous convaincre de leurs stratagèmes à tenter d'alpaguer le tueur.


    Si le début du film démarre en trombe avec l'acte crapuleux d'un homicide, le tueur exterminant lâchement au hasard d'une route un cycliste lambda, la suite peine quelque peu à insuffler de l'attention pour la représentation des seconds-rôles que j'ai précédemment reproché. Qui plus est, dès que le réalisateur pénètre sa caméra en interne du stade pour s'attarder sur le jeu des footballeurs et sur l'étude sportive des commentateurs, l'ennui se fait un peu pesant en attendant les prochains méfaits du tueur. C'est avec l'arrivée musclée de la brigade spéciale qu'Un Tueur dans la Foule peut enfin démarrer et y insuffler une certaine dose de suspense dans la manière dont elle va pouvoir l'appréhender. Le plus important n'est donc pas de savoir quand le tueur va pouvoir frapper et quels innocents seront ciblés, mais plutôt de comprendre de quelle manière la brigade va bien pouvoir accéder au toit du stade afin de le déjouer. Car positionné sur un abri bétonné, en amont de l'affiche des résultats, le meurtrier a trouvé la planque idéale afin de se prémunir des balles et tirer facilement sur ses proies. Une tension sous-jacente nous est donc retransmise avec l'attitude assidue des services de police à daigner grimper sur le toit, quand bien même un spectateur de la foule va lui aussi apercevoir sa fameuse planque à l'aide de ses jumelles ! Bien évidemment, la dernière partie du film, beaucoup plus intense et surtout spectaculaire, emprunte la voie de la catastrophe pour illustrer les exactions du criminel tirant au hasard de la foule ! Outre la violence cinglante assénée sur les innocents, les mouvements de foule en panique s'avèrent aussi impressionnants que réalistes par l'effectif de figurants déployés et leur désespoir d'échapper aux balles ! Quand aux motivations réelles de l'individu en question, le réalisateur préfère les occulter pour laisser sous entendre la folie d'un sociopathe !


    Hormis ses longueurs, ses situations rebattues et sa réalisation routinière, Un Tueur dans la Foule est suffisamment haletant et violemment spectaculaire pour se laisser gagner par son caractère diablement ludique. La présence solide des vétérans Charlton Heston et John Cassavetes ajoutent au charme vintage que le genre catastrophe marque de son empreinte en cette époque florissante des années 70.  

    Bruno Matéï
    3èx

    mercredi 23 avril 2014

    Soldat Bleu / Soldier Blue

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Ralph Nelson. 1970. U.S.A. 1h55. Avec Candice Bergen, Peter Strauss, Donald Pleasance, John Anderson, Jorge Rivero, Dana Elcar.

    Sortie salles: 23 Avril 1971

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Ralph Nelson est un réalisateur américain, né le 12 Août 1916 à New-York, décédé le 21 Décembre 1987 à Santa Monica. 1962: Requiem for a Heavyweight. 1965: Les Tueurs de San Francisco. 1966: La Bataille de la Vallée du Diable. 1968: Charly. 1970: Soldat Bleu. 1972: La Colère de Dieu. 1975: Le Vent de la Violence. 1976: Embryo. 1979: Christmas Lilies of the Field (télé-film).


    "Depuis l'aube de l'humanité, l'homme a écrit son histoire dans le sang. Mais il a aussi prouvé que l'étincelle divine existe en lui. Il y a dans l'âme humaine une part d'ombre qui date du jour ou Caïn a tué son frère. La fin du film montre, sans la moindre hypocrisie, les horreurs d'un combat où la folie sanguinaire triomphe de la raison. Les atrocités ne sont pas commises seulement contre l'ennemi, mais aussi contre des innocents, des femmes et des enfants. Horreur suprême: tout cela a bel et bien eu lieu".  
     
    "Sous l’uniforme, la honte".
    Western mythique, réputé pour sa subversion d’une violence insoutenable, Soldat Bleu ébranla une génération de cinéphiles à l’orée des années 70. Si, un an auparavant, Sam Peckinpah avait déjà offert un coup de fouet au genre par le truchement d’une ultra-violence chorégraphiée, Ralph Nelson pousse le curseur plus loin pour dénoncer l’horreur brute d’un massacre historique : celui des Cheyennes, survenu le 29 novembre 1864.

    Ce jour-là, une unité de cavalerie américaine — plus de 700 hommes — attaque un paisible village cheyenne à Sand Creek, dans le Colorado. Les Indiens déploient le drapeau américain et un drapeau blanc de reddition. Malgré cela, la charge est lancée, implacable. 500 morts, dont la moitié sont des femmes et des enfants. Scalps arrachés, corps démembrés, viols en série. Le général Nelson A. Miles, chef d’état-major de l’armée, déclarera que ce massacre fut "peut-être le crime le plus ignoble et le plus injuste de l’histoire des États-Unis".

    Ce bref monologue final, récit brut dicté à la toute fin du film, vient sceller le réel, confirmer l’authenticité du génocide indien orchestré par l’impérialisme ricain. 

    Segmenté en deux mouvements bien distincts, le film s’attache d’abord à explorer la relation houleuse d’un duo d’amants en discorde. Après une embuscade sanglante provoquée par les Indiens — coûtant la vie à 21 soldats — Honus Gent, soldat bleu, timoré et candide, croise le chemin de Cresta Lee, une Américaine jadis capturée par un chef indien et restée deux ans parmi les siens. Livrés à eux-mêmes, ils vont devoir survivre dans un désert hostile et rejoindre coûte que coûte le fort voisin.

    Incarnés par Peter Strauss et Candice Bergen, leur complicité à l’écran doit beaucoup au contraste savoureux de leurs esprits : lui discipliné, elle rebelle. Le cliché de la blonde potiche est ici inversé au profit d’une femme impudente, déterminée à faire entendre à la jeune recrue que son armée est coupable de crimes barbares, d’intolérance, de racisme. On est donc loin des poncifs du western lyrique cher à John Ford, avec ses gentils soldats défendant la civilisation contre les "sauvages" destructeurs de scalps.

    Qui plus est, l’usage d’une partition classique aux accents triomphants nous laisse ici un goût amer, dissonant, face au réalisme frontal des affrontements. À travers des ressorts de comédie et de romance, Ralph Nelson parvient à nous attacher à ces personnages, à suivre leur évolution humaine, cette lente domestication de l’autre par la survie partagée.

    Mais avec l’arrivée de la cavalerie, le ton bascule. Le vernis tombe. Et Soldat Bleu se fait tranchant, brutal, implacable. En un souffle, l’aventure tourne au cauchemar. Ce contraste saisissant imprimé sur les vingt-cinq dernières minutes agit comme un électrochoc. Le film nous colle au mur, dans une intensité dramatique où colère, dégoût, tristesse et malaise s’entrelacent jusqu’à l’écoeurement.

    Dans une violence crue, sans fard, Ralph Nelson filme l’horreur : décapitations, scalps, démembrements, viols, infanticides… Le spectateur endure cette fureur bestiale, impuissant, témoin d’une humanité absorbée par sa propre folie sadique. Ces séquences, innommables et inoubliables, hantent l’esprit longtemps après le générique. Elles marquent au fer rouge.  

     
    "Le sang des blés bleus".
    Soldat Bleu, c’est une réflexion sur la cruauté de la vengeance, une métaphore de la guerre du Vietnam, un réquisitoire contre la haine et la barbarie. L’un des westerns les plus crus, les plus intègres, que le cinéma ait osé perpétrer.

    Et si, de prime abord, la romance pittoresque nous avait tant réconfortés, l’horreur gratuite qui en brise la quiétude ne nous épargnera aucun repli.
    Inoubliable. Éprouvant. Avec le cœur meurtri.

    Public averti.

    * Bruno
    3èx


    mardi 22 avril 2014

    Cujo. Prix du Public, Fantasporto, 1987

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Devildead.com

    de Lewis Teague. 1983. U.S.A. 1h31. Avec Dee Wallace Stone, Danny Pintauro, Daniel Hugh Kelly, Christopher Stone, Ed Lauter, Kaiulani Lee.

    Sortie salles France: 10 Août 1983. U.S: 12 Août 1983

    FILMOGRAPHIE: Lewis Teague (né le 8 mars 1938 à Brooklyn, New-York, Etats-Unis) est un réalisateur, monteur, acteur et directeur de la photographie américain.
    1974: Dirty O'Neil. 1979: The Lady in red. 1980: L'Incroyable Alligator. 1982: Fighting Back. 1983: Cujo. 1985: Cat's Eye. 1985: Le Diamant du Nil. 1989: Collision Course. 1990: Navy Seals: les meilleurs. 1991: Wedlock.

     
    "Quand le monstre du placard bave au carreau".
    D'après le célèbre roman de Stephen King, Cujo est porté à l’écran en 1983 par l’habile faiseur de série B Lewis Teague. Succès commercial en salles et en vidéo, ce classique de tension horrifique reste d’une fulgurance intacte, quarante-deux ans après sa sortie.

    Pour rappel : à la suite d’une panne d’essence, une mère et son jeune fils se retrouvent piégés dans leur voiture, à la merci d’un Saint-Bernard rendu fou.
    De cette intrigue aussi simple qu’inattendue, Lewis Teague tire un modèle d’efficacité, jalonné de séquences d’agressions d’une maestria inouïe, devenues anthologies de terreur pure. En resserrant peu à peu l’étau autour d’une ferme isolée, puis de l’habitacle surchauffé d’un véhicule immobilisé en plein soleil, le réalisateur orchestre un huis clos suffocant : dehors, le monstre à quatre pattes rôde, prêt à bondir et déchiqueter tout espoir de fuite.
    Chaque assaut, chaque tentative du chien pour forcer l’habitacle, nous percute par son réalisme cru ; à l’intérieur, mère et enfant improvisent une défense dérisoire, tremblante, déroutée.

    Pour corser encore le cauchemar, le bambin suffoque, ses crises d’asthme épousant la fièvre de la fournaise. Lewis Teague joue nos nerfs jusqu’à la corde, dilate l’attente, libère la fureur en fulgurances de chair et de crocs. On reste interdit devant la performance du Saint-Bernard : masse baveuse, œil torve, fureur contagieuse, déclenchée au moindre son strident — comme ce téléphone dont la sonnerie prolongée déchire le silence pour mieux convoquer la bête. On se demande encore comment les dresseurs ont mis en scène ces pugilats bestiaux d’un réalisme si écorché.

    Dominé par la présence magnétique de Dee Wallace Stone — effondrée, épuisée, mais inébranlable — Cujo offre à son héroïne une terreur de tous les instants, qu’elle incarne avec une conviction presque douloureuse. Danny Pintauro, gamin terrifié jusqu’au sanglot, captive et émeut tant son effroi semble jaillir du ventre. Sa vulnérabilité achève de transmuter ce Saint-Bernard en croquemitaine, en ogre vorace, en monstre du placard incarné. 

    Satire amère sur la cellule conjugale fissurée (adultère, maltraitance, abus flottent dans l’air de la première partie), parabole sardonique sur l’enfance et ses peurs enfouies, Cujo explose littéralement dans ses quarante dernières minutes, suite ininterrompue de morsures et de hurlements à fleur de portière. Soutenu par une partition tantôt oppressante, tantôt furieusement tonitruante, par un jeu d’acteurs qui vit sa peur jusqu’au spasme, et par une mise en scène redoutable de tension, Cujo reste un cauchemar implacable : le plus grand film d’agression canine jamais tourné, encore inégalé à ce jour (avec, à ses côtés, le bouleversant Dressé pour tuer).
    Un monstre ? Non. Une bête foudroyée par le destin — et nous avec.

    *Bruno
    28.04.25. 5èx. VOST. 1h34.

    Récompense: Prix du Public au Festival du film Fantastique de Fantasporto, en 1987.

    Le DVD de Cujo sorti chez nous car édité par Mad Movies n'était pas le montage intégral (1h25, et donc 1h29 en 1080p).
    En revanche le Blu-ray sorti chez nous chez Carlotta l'est (1h35).
    La morsure de Cujo par la chauve souris est plus longue et détaillée. Dans le dvd Mad, la morsure est coupée plus tôt, on voit moins le sang qui coule sur le museau. Dans le blu-ray on insiste plus sur la dégradation physique de Cujo . La 1ère attaque de Cujo avec l'acolyte du garagiste est plus sale et prolongée (beaucoup plus d'éclaboussures de sang). La mort du garagiste est plus gore (morsure au cou en gros plan). La séquence dans la voiture est plus longue et intense (cujo tape plus sur les vitres, transpiration prolongée des protagonistes). Quand Donna sort de la voiture, les morsures sont plus graphiques. Quand Donna poignarde Cujo, c'est plus sanglant (il saigne plus abondamment). Et enfin pour l'épilogue, Donna serre Tad contre elle de manière plus longue pour renforcer l'émotion qui se dégage et le côté tranquille (avant l'estocade).


    lundi 21 avril 2014

    La Mort au Large / L'Ultimo Squala

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site ayay.co.uk

    de Enzo G. Castellari. 1981. Italie. 1h28. Avec James Franciscus, Vic Morrow, Joshua Sinclair, Giancarlo Prete, Micaela Pignatelli.

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Enzo G. Castellari est un réalisateur, scénariste, acteur, monteur et producteur italien, né le 29 Juillet 1938 à Rome (Italie).
    1967: Je vais, je tire et je reviens. 1968: Django porte sa croix. 1968: 7 Winchester pour un massacre. 1968: Tuez les tous... et revenez seul ! 1973: Le Témoin à abattre. 1976: Keoma. 1977: Une Poignée de salopards. 1977: Action Immédiate. 1979: La Diablesse. 1979: Les Chasseurs de Monstres. 1981: La Mort au Large. 1982: Les Nouveaux Barbares. 1982: Les Guerriers du Bronx. 1983: Les Guerriers du Bronx 2. 1987: Striker. 1987: Hammerhead. 1997: Le Désert de Feu.


    Profitant du filon commercial des 2 premiers opus des Dents de la mer, Enzo G. Castellari nous rend ici sa copie Z dans la pure tradition du Bis transalpin. Car reprenant le même schéma narratif que ces modèles, La Mort au Large illustre à nouveau les vicissitudes de touristes d'une station balnéaire pris à parti avec un dangereux requin ! Et pas des moindres puisqu'aux dires du chasseur Ron Hamer, il s'agirait du plus gros poisson jamais aperçu durant toute sa carrière. Lui et l'écrivain Peter Brenton décident donc d'entreprendre une traque en mer afin d'éradiquer l'animal, et ce depuis que le maire eut refusé l'annulation des festivités d'un concours de voiliers.


    Avec ses personnages ultra caricaturaux blablatant leurs répliques impayables dans une posture contractée, ses situations rebattues et son budget dérisoire, la Mort au large ne peut compter que sur l'efficacité du montage et de l'action récurrente pour stimuler le divertissement. Afin d'alpaguer le requin, c'est donc sur les stratégies de quelques protagonistes que le réalisateur compte focaliser son intrigue en l'émaillant de morts spectaculaires. De manière autonome, ils vont donc parcourir la mer à bord de leur bateau, quand bien même le maire de la ville décidera de le traquer en hélicoptère ! Ce qui nous vaut un bel effet gore assez spectaculaire et plutôt efficace dans son effet minimaliste (suspendu dans le vide car agrippé au patin de l'hélicoptère, l'homme se fera arracher les jambes par la mâchoire du squale !). Du côté des médias, un journaliste véreux au plus près de l'affaire profite également de l'évènement pour s'attirer la notoriété et en soudoyant un chasseur de requin un peu trop zélé (là encore, l'agression du requin laisse en exergue une mort grand-guignolesque du plus bel effet). Afin d'y pallier ses moyens dérisoires, Enzo G. Castellari utilise notamment le stock-shot traditionnel pour substituer les rares apparitions du faux requin, mais aussi la maquette pour certaines séquences aquatiques (comme celle du crash de l'hélicoptère ou lors du final explosif).


    Avec l'attachante bonhomie de comédiens de seconde zone au charisme viril (James Franciscus / Vic Morrow) et la fantaisie involontaire de situations de panique, La Mort au Large joue la carte de l'exploitation sous un format modeste de série B. A l'instar du savoir-faire rudimentaire de son auteur mais tout à fait appliqué à rendre une copie Z des plus divertissantes. Ajouter à cela un score entêtant suscitant la menace et vous obtenez la déclinaison la plus ludique de Jaws. Un divertissement aujourd'hui notoire qui fit d'ailleurs de l'ombre au futur projet des Dents de la mer 3 puisque ayant dépassé ses recettes commerciales en terme d'entrées ! 

    *Bruno
    4èx


    vendredi 18 avril 2014

    BRAINDEAD (Dead Alive). Grand Prix à Avoriaz, 1993.

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site kraders.wordpress.com

    de Peter Jackson. 1992. 1h44. Nouvelle Zélande. Avec Timothy Balme, Diana Penalver, Elizabeth Moody, Ian Watkin, Brenda Kendall.

    Sortie salles France: 27 Avril 1993

    FILMOGRAPHIE: Sir Peter Robert Jackson est un réalisateur, producteur et scénarise néo-zélandais, né le 31 Octobre 1961 à Pukerua Bay, North Island (Nouvelle-Zélande).
    1987: Bad Taste. 1989: Les Feebles. 1992: Braindead. 1994: Créatures Célestes. 1995: Forgotten Silver. 1996: Fantômes contre fantômes. 2001: Le Seigneur des Anneaux. 2002: Les Deux Tours. 2003: Le Retour du Roi. 2005: King-Kong. 2009: Lovely Bones. 2012: Le Hobbit: un voyage inattendu. 2013: Le Hobbit: la Désolation de Smaug. 2014: Le Hobbit: Histoire d'un aller et retour.


    Réputé comme le film le plus gore de tous les temps, Braindead se complaît toujours plus dans l'absurdité avec une fougue et un sens de l'invention débridés ! Après avoir été contaminée par un singe mutant ramené d'Indonésie, la mère de Lionel se transforme peu à peu en zombie et finit par transmettre son virus à d'autres habitants de la région. Souhaitant préserver sa vie, Lionel la planque à l'intérieur de sa cave parmi trois autres macchabées. Mais l'arrivée désinvolte de son oncle et d'une ribambelle d'invités vont semer la zizanie dans la maison quand ils vont tenter de se défendre contre ces zombies dopés aux stimulants ! Puisant son inspiration dans les comédies burlesques du temps du muet (celles de Buster KeatonLaurel et Hardy ou encore Charlie Chaplin pour la romance impartie au couple de héros) et des bobines trash déjantées des eighties (Evil-dead, Ré-animator, Street Trash, Frères de Sang, etc), Peter Jackson nous concocte un film hardgore nonsensique et semble avoir été dopé aux amphétamines pour nous avoir conçu autant de situations incongrues (le repas du pudding entre invités chez la mère de Lionel, le couple de zombies en coït procréant un mort-né vivant, la balade en poussette de ce dernier dans le parc familier, le pasteur expert en karaté pour démembrer les zombies du cimetière !). 


    Récompensé du dernier Grand Prix à Avoriaz en 1993, Braindead peut se targuer d'être le mastodonte du gore décomplexé où rire et action se disputent sans relâche. L'incroyable énergie qui se dégage de la mise en scène de Jackson (abus de cadrages obliques et de zooms grossiers afin d'accentuer son caractère grand-guignolesque !), l'extravagance des personnages erratiques et l'horreur déployée à grands renforts d'hectolitres de sang nous plongent dans un carnaval horrifique toujours plus frénétique. A l'instar de ces 35 dernières minutes, anthologie du carnage vomitif contrebalancé par une dérision aussi morbide que pittoresque. Sur ce point, comment oublier le massacre commis à la tondeuse à gazon que Lionel exécute avec une démesure infernale ! Et si aujourd'hui Braindead n'a rien perdu de sa vitalité dans son pouvoir récréatif, c'est notamment grâce à l'habileté d'effets-spéciaux artisanaux bluffants de réalisme ! Certaines séquences compilées en temps réel s'avèrent d'ailleurs si impressionnantes qu'on se demande comment les techniciens ont pu réussir à entreprendre de tels prodiges dans leur souci du détail gore !


    Le chant du cygne du gore à l'ancienne
    Jouissivement gore et délirant par son esprit cartoonesque, Braindead est le grand huit d'une horreur ricanante culminant son apogée dans une dernière orgie apocalyptique ! Le redécouvrir 20 ans après sa sortie prouve à quel point la mise en scène virtuose de l'insatiable Jackson était en avance sur son temps et que l'ère du numérique n'a pas encore surpassé cette bacchanale de tous les excès ! 

    Bruno Matéï
    3èx

    RécompensesGrand prix, Prix des Effets Spéciaux, Prix de la Critique au Festival du film fantastique d'Avoriaz 1993 
    Meilleurs effets spéciaux au Festival international du film de Catalogne en 1992.
    Silver Scream Award au Festival du film fantastique d'Amsterdam 1993.
    Meilleur film et meilleurs effets spéciaux à Fantasporto, 1993.
    Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur (Timothy Balme) et meilleur scénario aux New Zealand Film and TV Awards en 1993.


    jeudi 17 avril 2014

    Le Silence des Agneaux / The Silence of the Lambs. Oscar du Meilleur Film, 1992

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site sites.psu.edu

    de Jonathan Demme. 1991. U.S.A. 1h58. Avec Jodie Foster, Anthony Hopkins, Scott Glenn, Ted Levine, Anthony Heald, Diane Baker, Kasi Lemmons, Brooke Smith.

    Sortie salles France: 10 Avril 1991. U.S: 30 Janvier 1991

    FILMOGRAPHIE: Jonathan Demme est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 22 Février 1944 à Long Island. 1974: 5 Femmes à abattre. 1975: Crazy Mama. 1976: Fighting Mad. 1977: Handle with Care. 1979: Meurtres en cascade. 1980: Melvin and Howard. 1984: Swing Shift. 1984: Stop Making Sense. 1986: Dangereuse sous tous rapports. 1987: Swimming to Cambodia. 1988: Famous all over Town. 1988: Veuve mais pas trop. 1991: Le Silence des Agneaux. 1992: Cousin Bobby. 1993: Philadelphia. 1995: Murder Incorporated. 1998: Beloved. 2002: La Vérité sur Charlie. 2004: Un Crime dans la Tête. 2008: Rachel se marie.


    Grand classique du thriller moderne au même titre que son homologue Seven, Le Silence des Agneaux remporta tous les suffrages auprès de la critique et du public grâce en priorité à la rigueur d'un scénario charpenté et à une confrontation psychologique en acmé. Couronné de 5 oscars dont celui du meilleur film, Le Silence des Agneaux doit autant sa renommée grâce au duo improbable formé par Jodie Foster et Anthony Hopkins. Si bien qu'une agent du FBI doit collaborer avec un dangereux tueur en série pour tenter d'en appréhender un autre lâché en pleine nature. Cet entretien psychologique qu'amorce Clarice Starling avec le Dr Hannibal Lecter laisse en exergue des confrontations d'une grande intensité émotionnelle si bien que cet anthropophage se joue malin plaisir à fouiller dans l'esprit torturé de la jeune inspectrice. En échange de précieuses informations afin de localiser le tueur Buffalo Bill (Ted Levine est également effrayant en tueur androgyne frustré par sa sexualité !), Clarice est donc contrainte de lui divulguer un traumatisant secret antérieur. Celui d'avoir été témoin d'hurlements d'agneaux abattus sous ses yeux lorsqu'elle fut enfant. Depuis, ces nuits sont régulièrement hantées par ces plaintes moribondes, et donc le fait de tenter de retrouver vivante la dernière victime du tueur pourrait peut-être lui permettre de mettre un terme à ces cauchemars nocturnes. 


    Ainsi, leur relation psychologique fondée sur la psychanalyse et la requête d'informations capitales finit donc par les rapprocher dans une confiance mutuelle teintée d'affection. C'est la une des grandes originalités du récit permettant d'entretenir un rapport équivoque entre l'intégrité d'une inspectrice audacieuse et la manipulation d'un éminent psychiatre d'une intelligence singulière mais tributaire de ses démons. Dominé par la performance glaçante d'Anthony Hopkins (sa 1ère apparition reste dans toutes les mémoires !), l'acteur se fond dans la peau du serial-killer de manière magnétique de par sa posture monolithique rehaussée d'un regard impassible figé dans le vide. Il en émane une aura malsaine insaisissable par son esprit de persuasion et sa démence anthropophage ! Avec fragilité humaine, Jodie Foster incarne une inspectrice en herbe perspicace et pugnace, à l'instar de son franchissement au repère de Buffalo Bill (ce qui nous vaut un final terrifiant bâti sur la peur du noir !). En alternance, elle nous insuffle également une émotion anxiogène éprouvante lorsqu'elle se laisse gagner par des souvenirs douloureux (la mort brutale de son père, la terreur des agneaux sur le point de trépasser) et lorsqu'elle doit faire face à sa survie de manière autonome (son fameux face à face avec Buffalo). 


    "La plus grande révélation est le silence" 
    A la fois bouleversant, tendu et terrifiant, éprouvant, malsain et perturbant à travers sa mise en scène sobrement documentée, Le Silence des Agneaux puise sa force dans sa dimension dramatique, dans l'intelligence du scénario ramifié et dans le pouvoir de suggestion imparti à la psychanalyse et à sa scénographie morbide (notamment cette découverte d'un corps putrescent dans la morgue où l'on extrait de sa bouche un cocon d'insecte). Enfin, l'oeuvre génialement vénéneuse n'aurait peut-être pas gagné son galon de pur chef-d'oeuvre sans la complicité incongrue du duo Starling/Lecter à marquer d'une pierre blanche. Un couple sulfureux bâti sur le rapport d'influence et de considération que Jodie Foster et Anthony Hopkins retransmettent avec une ambivalence infiniment trouble. Et ce jusqu'à sa conclusion irrésolue à l'aura de souffre et au pouvoir émotionnel terriblement déstabilisants. Du grand art pour le genre avec l'étrange impression de découvrir une oeuvre mutante à chaque révision (il faut d'ailleurs privilégier la VO pour son attrait vériste à la limite du reportage).   

    *Bruno
    04.01.23. 5èx

    Récompenses: Oscar 1992 du Meilleur Film, Oscar du Meilleur Acteur (Anthony Hopkins), Oscar de la Meilleure Actrice (Jodie Foster), Oscar du Meilleur Réalisateur (Jonathan Demme), Oscar du Meilleur Scénario: Ted Tally.
    Prix Edgar-Allan-Poe du Meilleur Scénario, Ted Tally