mercredi 21 décembre 2011

GONE BABY GONE


de Ben Affleck. 2009. U.S.A. 1h54. Avec Morgan Freeman, Casey Affleck, Michelle Monaghan, Ed Harris, Robert Wahlberg, Amy Madigan, Amy Ryan, Michael K. Williams, Edi Cathegi, John Ashton.

Sortie en salles en France le 26 Décembre 2007. U.S: 19 Octobre 2007

FILMOGRAPHIE: Benjamin Geza Affleck, dit Ben Affleck est un acteur, réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 15 Août 1972 à Berkeley en Californie.
2007: Gone Baby Gone
2010: The Town
2012: Argo

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Dieu s'adressant à ses disciples: "Je vous envoie comme des agneaux au milieux des loups. Soyez rusé comme un serpent et pur comme une colombe."
Acteur peu confirmé souvent superficiel, Ben Affleck s'attelle toutefois à la réalisation en 2007 avec un premier long-métrage, Gone Baby Gone, d'après un roman de Dennis Lehane. Clint Eastwood avait d'ailleurs emprunté 5 ans au préalable l'un des récits du romancier pour concrétiser son bouleversant Mystic River. Malgré un succès mitigé au box-office, ce polar glauque enrichi sa densité au fil d'un scénario machiavélique traitant de l'enfance galvaudée.

Dans une petite ville de Boston, une fillette de 4 ans disparaît sans laisser de traces. La mère engage deux détectives privés pour tenter de la retrouver saine et sauve. Après 3 jours d'investigation, les chances s'amenuisent tandis qu'un peu plus tard un autre enfant, un garçonnet de banlieue, est à son tour porté disparu. 


Conçu comme une enquête policière de prime abord tristement banale mais particulièrement vénale pour disséquer la vérité d'une disparition infantile inexpliquée, Gone Baby Gone attise l'inquiétude déconcertée au fil de son canevas tortueux. Il nous confine dans une contrée bucolique de Boston où les quidams marginaux, drogués et flicards corrompus s'entrecroisent dans un univers insidieux alors qu'une mère de famille junkie semble désintéressée de l'absence de sa fillette kidnappée.
Avec la verve perspicace d'un duo de jeunes détectives, leur cheminement nous entraîne dans une succession d'évènements délétères particulièrement glauques et sordides. En effet, rien de plus dérangeant et intolérable que de se confronter à la mort d'un enfant et de ses responsables tortionnaires capables de commettre le pire des crimes en guise de cupidité.
Mais l'improbabilité est encore à encourir pour nos protagonistes avides de justice quand le fantôme d'Amanda refait finalement surface. Un exutoire impondérable qui va nous permettre de réévaluer les consciences perverties, les âmes endeuillées ou les esprits torturés par la déchéance de l'enfance assujettie.

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Ben Affleck brosse ici un tableau licencieux sur la responsabilité parentale quand les géniteurs sont incapables d'assumer leur devoir d'inculcation et d'affection pour l'équilibre d'un bambin. Il nous questionne sur la déontologie professionnelle quand des hommes sans vergogne décident de bafouer les règles pour sauver la postérité d'un enfant innocent. Quel avenir précaire est envisagé quand un gamin livré à lui même depuis sa naissance dans un climat sordide est destiné à survivre et réitérer les mêmes erreurs que ces géniteurs ?
Mais à travers le comportement drastique d'un détective convaincu de son code d'honneur et d'une justice équitable, le réalisateur cherche à nous interroger sur les conséquences potentiellement dramatiques qu'un enfant maltraité pourrait encourir pour sa future destinée.
Il remet en question notre doctrine morale et souveraine de protéger et éduquer l'enfant candide inscrit dans la pureté de l'ignorance avec une légitime décence.
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Dominé par la sobre prestance de Casey Affleck, étonnant dans un rôle austère d'homme engagé dans l'honneur et d'une brochette d'illustres acteurs (Morgan Freeman en retraité dépité et Ed Harris en flic frondeur), Gone Bay Gone doit sa puissance émotionnelle grâce à la densité de ses personnages fébriles et d'un suspense machiavélique. Structuré avec parcimonie pour accentuer son intrigue implacable et baignant dans une ambiance glauque parfois malsaine, il culmine son point d'orgue dans un épilogue renversant littéralement bouleversant. Cette révélation inopinée nous permet de reconsidérer une justice équitable et nous dresse un constat équivoque, une ambivalence sur notre idéologie à expertiser la notion morale du bien et du mal.
Une oeuvre puissante et cérébrale qui donne à réfléchir sur notre revendication d'élever et discipliner un enfant.

21.12.11
Bruno Matéï

TOP 13, 2011 !

Numéro 1:
http://brunomatei.blogspot.com/2011/05/la-solitude-des-nombres-premiers.html


Numéro 2:
http://brunomatei.blogspot.com/2011/11/la-guerre-est-declaree-grand-prix.html


Numéro 3: 


Dans le désordre: 


http://brunomatei.blogspot.com/2011/07/balada-triste-balada-triste-de-trompeta.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/12/la-piel-que-habito.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/02/black-swan.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/12/mothers-day.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/11/kidnappes-secuestrados.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/12/drive-prix-de-la-mise-en-scene-cannes.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/10/territoires.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/07/woman.html


http://brunomatei.blogspot.com/2011/12/intouchables.html





lundi 19 décembre 2011

INTOUCHABLES


de Eric Toledano et Olivier Nakache. 2011. France. 1h52. Avec François Cluzet, Omar Sy, Anne Le Ny, Audrey Fleurot, Clothilde Mollet, Alba Gaia Bellugi, Cyril Mendy, Christian Ameri, Marie-Laure Descoureaux.

Sortie en salle en France le 2 Novembre 2011.
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FILMOGRAPHIE: Olivier Nakache est un réalisateur, scénariste et acteur français, né à Suresnes le 14 Avril 1973. Il travaille souvent en coréalisation avec Eric Toledano. Il est le frère de l'actrice Géraldine Nakache.
Eric Tolédano est un réalisateur, scénariste, acteur et dialoguiste français né le 3 juillet 1971 à Paris. Il travaille régulièrement avec Olivier Nakache sur l'écriture et la réalisation de longs-métrages.
2005: Je préfère qu'on reste amis... 2006: Nos jours heureux. 2009: Tellement proches. 2011: Intouchables. 2014: Samba. 
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D'après l'histoire vraie d'une étonnante amitié entre un tétraplégique (Philippe Pozzo di Borgo) et un black de banlieue, Intouchables est le succès surprise de cette fin d'année 2011. Une bouffée d'air frais dans la confrontation du choc des cultures et des générations réalisée sans pathos pour la caractérisation émise à un handicapé en berne. Une oeuvre sensible tenant du miracle car unifiant notamment sans préjugé les classes sociales contradictoires. Pour continuer de toucher les assedics, un jeune banlieusard, repris de justice, postule pour un emploi d'aide à domicile chez un tétraplégique aristocrate. Leur relation au départ intempestive va aboutir à une complicité amicale indétrônable. 
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Conçu dans le moule de la comédie familiale tous publics, Intouchables avait de quoi laisser perplexe les allergiques aux produits franchouillards pullulant systématiquement sur nos écrans chaque mercredi de l'année. D'autant plus que cet énorme succès surprise que personne n'attendait concoure aujourd'hui pour transcender les chiffres d'affaires démesurés d'un autre succès antinomique, Bienvenu chez les Ch'tis. Si je peux me permettre de rassurer les réfractaires à la comédie nordiste de Danny Boon, Intouchables n'est en rien une comédie franchouillarde comme on en voit trop régulièrement dans notre paysage hexagonal. Cette union amicale entre un tétraplégique rupin et un banlieusard marginal réussissant sans peine à provoquer les éclats de rire incontrôlés et la tendresse dans un subtil alliage de situations jamais redondantes où les réparties fusent. Si Omar Sy doit énormément au potentiel comique de ces facéties dans sa spontanéité désinvolte, nos deux réalisateurs n'oublient pas pour autant de nous conter une poignante histoire d'amitié d'une riche dimension humaine. En confrontant le choc des cultures aux générations distinctes, leur complicité impromptue tend à unifier, rassembler les mentalités divisées par leur classe sociale. Avec l'aisance naturelle d'un banlieusard flâneur dénué d'ambition mais soudainement compromis à épauler le quotidien d'un handicapé, Intouchables démontre sous l'alibi humoristique notre frêle manière d'appréhender le malade voué à une grave déficience physique. Mais avec l'indifférence de Driss, jeune délinquant issue d'une famille miséreuse et vivant dans un climat d'insécurité déprimant, sa condition précaire imposée depuis l'enfance va lui éveiller la conscience face à la condition grabataire d'un aristocrate collectionneur de peinture. Par l'échange du loisir (la musique classique confrontée à la funk et au disco), de la communication, le respect d'autrui et par l'éducation parentale (le jeune frère de Driss est un rouleur de mécanique sur la corde raide tandis que la fille de Philippe est inversement une potiche capricieuse et impertinente), leurs péripéties insouciantes vont favorablement équilibrer leur existence commune.


Si l'interprétation perfectible d'Omar Sy souffre parfois d'une once de justesse dans ses tribulations délurées, l'acteur ne manque pas d'atout à nous insuffler sa bonhomie et sa soif de vie sans excès rébarbatif lors de ses réparties impayables. Son show de taquineries et pitreries imparties à Philippe réussissant à provoquer le rire sans verser dans la gaudriole. Secondé par François Cluzet, il réussit admirablement à éluder la complaisance dans sa condition austère de paraplégique renouant avec la vivacité existentielle (l'envolée lyrique en delta plane et une bouffée d'air frais exaltante !). L'empathie que l'on éprouve envers son lourd handicap n'est jamais outrancière car elle nous inculque avec subtilité l'intelligence de ne jamais s'apitoyer sur son sort.


Mené à un rythme effréné et servi par un duo aussi irrésistible qu'inattendu, Intouchables est LA comédie surprise de l'année ! Un antidépresseur radical dans sa philosophie à nous rappeler que la vie est une denrée précieuse qu'il faut savoir entretenir quelque soit nos contraintes imposées par l'infortune. L'abatage d'Omar Sy en pleine reconnaissance et la prestance autrement flegme de François Cluzet réussissant à nous séduire et attendrir sans misérabilisme ni mièvrerie. Hymne à la vie, ode aux valeurs de l'amitié, Intouchables scande l'euphorie de l'éclat de rire avant de nous ébranler lors d'un épilogue humble, car transcendant l'amitié cordiale entre deux acolytes inséparables. Son succès n'est cette fois-ci en rien prohibé et mérite toutes les louanges dithyrambiques, notamment grâce à sa dignité humaine et à sa tolérance impartie aux mentalités contraires. 

Dédicace à Philippe Astruc.
19.12.11
Bruno Matéï

Note: le générique de fin indique que 5% des bénéfices réalisés par le film sont reversés à une association pour les personnes paralysées: Simon de Cyrène, fondée par Laurent de Cherisey.

jeudi 15 décembre 2011

DRIVE. Prix de la mise en scène, Cannes 2011.

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Nicolas Winding Refn. 2011. 1h42. Avec Ryan Gosling, Carey Mulligan, Albert Brooks, Bryan Cranston, Ron Perlman, Oscar Isaac, Christina Hendricks, Cesar Garcia, Tiara Parker, Christian Cage.

Sortie salles France: 5 Octobre 2011. U.S: 16 Septembre 2011.

FILMOGRAPHIE: Nicolas Winding Refn est un scénariste, réalisateur, producteur et acteur danois, né le 29 septembre 1970 à Coppenhague (Danemark). 1996: Pusher. 1999: Bleeder. 2003: Inside Job. 2004: Pusher 2. 2005: Pusher 3. 2008: Marple - Nemesis (télé-film). 2009: Bronson. 2010: Valhalla Rising. 2011: Drive. 2012: Only God Forgives.


D'après un roman de James Sallis, Drive est une invitation au polar stylisé, hypnotique, laconique à travers une errance sentimentale en apesanteur (élégie musicale en sus dans toutes les mémoires !). Si bien que le public français particulièrement conquis l'eut applaudi avec 1 580 624 entrées. A titre anecdotique, Neil Marshall était désigné pour le réaliser alors que Hugh Jackman devait endosser le rôle du chauffeur de nuit. Un chauffeur de braqueurs, cascadeur pour le cinéma, tombe amoureux de sa voisine de palier, Irène. Son mari, repris de justice à peine sorti de prison, est contraint de perpétrer un nouveau braquage pour le compte de mafieux. L'opération tourne mal et le Driver qui s'était porté assistance décide par amour de secourir Irène et son jeune fils en traquant un à un les responsables du meurtre de son défunt mari. Encensé par la critique et auréolé du Prix de la mise en scène sur la croisette cannoise, Drive a su surprendre et conquérir une majorité du public alors que sa simplicité narrative aurait pu chavirer l'entreprise vers une série B superficielle. Le préambule, saisissant de virtuosité concise, évoque irrémédiablement une réminiscence auprès du magnifique Driver de Walter Hill. De par sa course-poursuite urbaine à travers Los Angeles mais aussi pour le profil mutique imposé à l'anti-héro d'un sang froid impassible ! Cascadeur pour le cinéma le jour, chauffeur illégal la nuit, le Driver dépend de son urbanisation tentaculaire à travers l'ambiance irréelle de sa ville constellée (on songe aussi à Michael Mann et Friedkin pour l'esthétique léchée des éclairages autrement orangers et azurs). Son professionnalisme pour la conduite de véhicules clinquants et sa droiture de solitaire inflexible, illégalement complice d'actions frauduleuses, nous saisit d'autant plus de fascination à travers sa défroque décalée (un blouson argenté estampillé d'un scorpion au dos). C'est en portant assistance à un ancien repris de justice et par amour pour une jeune voisine influençable que sa destinée routinière va subitement adopter un tournant mortuaire.


Tant et si bien que le driver se résigne à venger la mort injustifiée de l'ex taulard derrière son nouveau masque d'ange exterminateur. Ainsi, si Drive fascine et hypnotise de façon aussi bien désincarnée que contemplative, il le doit beaucoup à sa bande-son entêtante héritière de l'ambiance (mélancolique) des années 80, ainsi qu'au panache de sa mise en scène perfectionniste multipliant les cadrages alambiqués ou chiadés avec une inventivité en roue libre. Qui plus est, son pouvoir attractif est décuplé du magnétisme de Ryan Gosling (ancien danseur, compositeur, musicien mais également chanteur et guitariste du groupe Dead Man's Bones) littéralement habité en marginal au grand coeur mais pour autant entraîné dans une spirale meurtrière hallucinée (il faut le voir massacrer ses victimes avec une sauvagerie stylisée !). Lui partageant la vedette dans une posture vertueuse ensorcelante, notamment auprès de son regard tendrement sémillant, Carey Mulligan irradie l'écran de sa silhouette filiforme emplie de sagesse et d'innocence. Nicolas Winding Refn dirigeant le couple avec une attention hyper consciencieuse si bien que leurs moindres faits, gestes et respirations sont magnifiquement radiographiés par une caméra résolument posée. Oscillant les étreintes romantiques et les éclairs de violence funèbres, Drive exerce un pouvoir d'attraction irrépressible à travers un itinéraire sanglant à l'onirisme aussi crépusculaire qu'arc en ciel. L'intrigue simpliste mais pour autant efficace parvenant à maintenir l'intérêt auprès des enjeux humains de par leur impitoyable descente aux enfers. La mise en scène au firmament sublimant la notion de silence lattent et les non-dits avec une grâce mélancolique. Ainsi, à travers cette romance aléatoire d'un chauffeur clandestin et d'une veuve en berne, Drive y transcende leur déconvenue sentimentale, entre lyrisme enchanteur et violence consumée. Si bien que certaines séquences hyper tendues nous crispent à notre siège avec une appréhension souvent perplexe, voire démunie.


Illuminé d'une pop-rock aussi fiévreuse qu'envoûtante, Drive explore avec une ambition personnelle l'odyssée romanesque d'un couple en perdition morale, faute d'une conséquence criminelle irréversible. Une romance fébrile transplantée dans le cadre d'un polar purement baroque afin d'y esquisser les émotions oniriques de leur dérive sentimentale. Capiteux et obsédant, formellement stylisé dans une modernité high-tech, Drive hante durablement les esprits à travers cette vendetta urbaine où ultra violence âpre et plages de tendresse se contredisent avec une rigueur dramatique aussi fragile que finalement bouleversante. Dans la mesure où l'on apprécie en prime son épilogue bicéphale d'une infinie tristesse car soufflant le chaud et le froid avec une sobriété pleine d'humilité. Beau à en pleurer sous l'impulsion du duo iconique Ryan Gosling (LA révélation !) / Carey Mulligan (confondante d'aménité mélancolique). 

RécompensesPrix de la Mise en scène à Cannes 2011.
Utah Film Critics Association 2011
Meilleur film
Meilleur acteur dans un second rôle pour Albert Brooks
Meilleure photographie pour Newton Thomas Sigel
Satellite Awards 2011 :
Meilleur acteur pour Ryan Gosling
Meilleur acteur dans un second rôle pour Albert Brooks
Meilleur réalisateur pour Nicolas Winding Refn
Meilleur son pour Dave Patterson, Lon Bender, Robert Fernandez, Victor Ray Ennis
Black Film Critics Circle 2011 : Meilleur acteur dans un second rôle pour Albert Brooks
Critics' Choice Movie Awards 2012 : Meilleur film d'action


* Bruno
25.08.18.
19.12.11. 341 vues

INTRUDER


de Scott Spiegel. 1989. U.S.A. 1h28. Avec Elisabeth Cox, Dan Hicks, Renne Estevez, Sam Raimi, Bruce Campbell, Ted Raimi, Craig Stark.

FILMOGRAPHIE: Scott Spiegel est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur américain, né le 24 Décembre 1957 à Walnut Lake, Michigan.
1989: Intruder
1999: Une Nuit en Enfer 2
2004: My Name is Modesty
2008: Spring Break '83


Une caméra inventive multipliant les cadrages alambiqués, un cadre original et 2/3 meurtres sympathiquement gore ne font pas un bon film. 
Aucune gestion de suspense, aucune ambiance anxiogène habilement distillée, des acteurs amateurs risibles, pas une once de frayeur à l'horizon, une succession de situations archi rebattues, un final ridicule dont une révélation du meurtrier proprement grotesque.
Me suis endormi à 1H05 de métrage. Je ne le reverrais plus et je comprends pourquoi je n'ai jamais été tenté de le voir à l'époque ! (une bonne intuition si je puis dire).




Un supermarché ferme ses portes pour la journée et les employés apprennent peu de temps après qu'ils vont se retrouver au chômage car le magasin a été racheté. C'est à ce moment là qu'un ex petit- ami de l'une des employées refait surface. Son attitude violente inquiète le personnel,qui se retrouve assassiné dans des conditions atroces.


mardi 13 décembre 2011

LA PIEL QUE HABITO

     
de Pedro Almodovar. 2011. Espagne. 1h57. Avec Antonio Banderas, Elena Anaya, Marisa Paredes, Jan Cornet, Roberto Alamo, Eduard Fernandez, Blanca Suarez, Susi Sanchez, Barbara Lennie, Fernando Cayo.

Sortie en salles en France le 17 Août 2011. Espagne: 2 Septembre 2011. U.S: 14 Octobre 2011

FILMOGRAPHIE: Pedro Almodovar Caballero est un réalisateur espagnol né le 24 Septembre 1949 à Calzada de Calatrava dans la province de Ciudad Real et la communauté autonome de Castille-La-Manche, en Espagne.
1980: Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier. 1982: Le Labyrinthe des passions. 1983: Dans les Ténèbres. 1984: Qu'est ce que j'ai fait pour mériter ça ? 1985: Matador. 1986: La Loi du Désir. 1988: Femmes au bord de la crise de nerfs. 1989: Attache moi. 1991: Talons Aiguilles. 1993: Kika. 1995: La Fleur de mon secret. 1997: En chair et en os. 1999: Tout sur ma mère. 2002: Parle avec elle. 2004: La Mauvaise Education. 2006: Volver. 2009: Etreintes Brisées. 2009: La Conseillère anthropophage. 2011: La piel que Habito.
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D'après le roman Mygale de Thierry Joncquet, le nouveau Almodovar est une pièce rare, un dédale ténébreux inversant les chronologies pour mieux nous surprendre dans une énigme tortueuse illustrant deux familles au passé galvaudé. Déroutant, âpre, vertigineux, d'une richesse formelle épurée transcendant la sculpture du corps érotique, ce drame d'amour fou est un hypnotique jeu de miroir dans la relation prohibée entre le monstre et son créateur.

Robert Ledgard est un chirurgien esthétique notoire ayant réussi à créer un épiderme artificiel pour préserver les êtres humains de maladies telle que la malaria. Avec l'aide d'un cobaye féminin du nom de Vera, ce médecin gravement éprouvé par la mort de sa femme et de sa fille élabore en secret une vengeance punitive mais aussi un nouvel espoir à renouer avec l'amour de sa chère défunte. 
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Extravagant dans sa mise en scène singulière et le profil établi envers ces personnages interlopes, La Piel que Habito ne cesse de jouer avec nos sentiments déroutés. Il titille notre curiosité fébrile fréquemment ébranlée par une intrigue vénéneuse multipliant les allers-retours du passé et du présent. Proprement inracontable, le script savamment mis en place par Almodovar et Joncquet se réapproprie des genres pour les distordre et amplifie sa dramaturgie au fil des révélations familiales dissociées.
C'est l'ambition démesurée d'un médecin torturé, surmené par les deuils d'une épouse infidèle et du suicide de sa fille qui nous est illustré d'une manière subjective par un réalisateur au sommet de son inspiration. En l'occurrence, Robert a réussi à ravir une ravissante jeune femme gracile, prise comme cobaye pour ses expériences chirurgicales afin de mieux préserver notre épiderme contre certaines maladies. Ou plus exactement sauver la mise de victimes de brasier d'un incendie criminel. Car depuis la mort de son épouse retenue prisonnière dans sa voiture carbonisée et celle de sa fille violentée par un styliste drogué, Robert décide d'accomplir une vengeance implacable contre son tortionnaire. Mais également concocter depuis des années une créature parfaite afin de renouer avec l'amour déchu d'une femme antécédemment coupable d'adultère.
Les personnages équivoques dépeints dans cette énigme à tiroirs ont tous un passé tortueux et des secrets inavoués tandis que la filiation parentale va les confronter dans leur psyché étroitement lié.


Dans la peau limpide et pastel d'une femme asservie aux expérimentations organiques d'un savant sans vergogne, Elena Anaya redouble de lascivité érotique dans son corps perfectible voué à un véritable simulacre d'une perte identitaire. Elle réussit viscéralement dans sa dernière ligne droite à retranscrire au spectateur ses états d'âme sévèrement commutés sitôt la révélation énoncée. Dans celui de son créateur damné, Antonio Banderas réussit avec sobriété et austérité à affilier ressentiments vindicatifs teintés de cynisme et compassion attendrie par l'influence perfide de sa divine créature. Ils forment à eux deux un tandem incongru dans leur relation en demi-teinte inscrite sur la rancoeur et la tendresse acculée.
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D'une maîtrise virtuose impressionnante d'inventivité formelle dans sa beauté esthétique glacée, La Piel que Habito est un drame hermétique d'une puissance psychologique davantage contraignante assénée aux personnages sévèrement fustigés. Emporté par la grâce infortunée de ces deux protagonistes répréhensibles, l'oeuvre empoisonnée d'Almodovar réinvente l'art de narrer une histoire d'une richesse thématique contemporaine. C'est à dire notre rapport instinctif face à la fascination érotisée du corps charnel et notre perte de repère face à une identité fraudulée. Cette oeuvre épurée et funèbre bouscule les marques du spectateurs jusqu'à bouleverser notre morale dans son épineux épilogue aussi chétif que désarmant. 
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Dédicace à Hélia Marzloff
13.12.11
Bruno Matéï
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Pour ceux qui n'auraient pas compris tous les éléments capitaux de l'intrigue du film, je vous laisse le scénario brièvement décortiqué par le site Wikipedia: 

ATTENTION SPOILERS !!!!!!
Résumé détaillé
L'action se passe en 2012. Un éminent chirurgien esthétique, Robert Ledgard tente depuis douze ans de créer une peau synthétique qui aurait pu sauver son épouse, grièvement brûlée. Il réussit à créer un épiderme viable qui apparaît être d'une formidable résistance face aux agressions extérieures : piqûres de moustiques, brûlures,... Néanmoins, comme tout scientifique, le docteur Ledgard a besoin d'un cobaye. Il s’agit de sa dévouée patiente Vera, qu'il détient captive dans une chambre de son manoir, dans la région de Tolède. Seule Marilia, la fidèle domestique du médecin, est au courant de cette relation qu'elle voit d'un mauvais œil.
Un soir de carnaval où Robert est absent, Zeca, le fils de Marilia, arrive pour se cacher dans la maison : il a été reconnu sur la vidéo d'un cambriolage et veut échapper à la police. Marilia accepte de l'aider temporairement. Zeca remarque Vera sur les images de vidéo-surveillance du manoir et croit reconnaître la femme de Ledgard, qui fut son amante avant sa mort. Zeca ligote alors sa mère et entre dans la chambre de la femme pour la violer. Quand Robert rentre chez lui, il les surprend et tue Zeca d'une balle. Il part se débarrasser du corps, laissant Marilia et Vera seules au manoir.
Marilia commence alors à se confier : elle est la mère biologique de Robert, bien qu'il l'ignore. Des années auparavant, Zeca a eu une liaison avec la femme de Robert ; ensemble, ils ont tenté de fuir, mais ont eu un grave accident de voiture. Zeca a pu en réchapper et s'enfuir mais la femme de Robert a brûlé vive dans la voiture. Sauvée in extremis, elle a survécu plusieurs mois avant de se défenestrer en surprenant son reflet dans une vitre. Norma, sa fille a été témoin de la scène et a alors sombré dans une grande détresse psychologique.
La suite de l'histoire est un flashback : en 2006, Robert choisit de se faire accompagner de sa fille, encore fragile, à un mariage. Cette dernière croise du regard Vicente, un séduisant styliste dépendant aux médicaments. Les deux jeunes se plaisent, mais quand Vicente tente de coucher avec elle dans le parc du château, Norma s'affole et Vicente la frappe et l'assomme par accident. Pris de panique, Vicente s’enfuit mais Robert est témoin de la scène. Norma sombre à nouveau dans la dépression et retourne en hôpital psychiatrique. Robert kidnappe alors Vicente et le retient prisonnier dans une cave jusqu'au jour où Norma se suicide. La vengeance de Robert commence alors lentement : il fait subir à Vicente contre son gré de multiples opérations chirurgicales pour lui faire changer de sexe et le transformer en sosie parfait de sa femme.
En 2012, Vicente est devenu Vera et feint la soumission en acceptant de rejoindre Robert dans son lit. Un jour, Fulgencio, collègue chirurgien de Robert qui a participé aux opérations sans en connaître le contexte, reconnait le visage de Vicente sur un avis de recherche. Mettant en doute l’innocence de Robert, il le menace de révéler l'affaire au grand jour, mais Robert et Vera le menacent et le font fuir. Robert a désormais toute confiance en Vera. Mais la vision de l’avis de recherche a bouleversé Vera et le soir même, elle s'empare d'un revolver, tue Robert et Marilia et s’enfuit pour retrouver sa mère

lundi 12 décembre 2011

L'ETRANGERE (When we live / Die Fremde). Prix du Public à Créteil et Angers.


de Feo Aladag. 2010. Allemagne. 1h59. Avec Derya Alabora, Settar Tanriogen, Sibel Kekilli, Almila Bagriacik, Alwara Hofels, Florian Lukas, Marlon Pulat, Nizam Schiller, Nursel Koese, Serhad Can.

Sortie en salles en France le 20 Avril 2011. U.S: 28 Janvier 2011

Récompenses: Label Europa Cinemas à Berlin 2010. Prix Lux 2010. Meilleur Film, Meilleure Actrice au Festival de Tribeca 2010. Prix du Public au Festival de Créteil 2010. Prix du Public au Festival d'Angers 2011. Film de Bronze, Meilleure Actrice au German Film Awards.

FILMOGRAPHIE: Feo Aladag est une réalisatrice, scénariste, productrice et actrice, née le 13 Janvier 1972 à Vienne.
2010: l'Etrangère


Pour son premier long-métrage, la réalisatrice australienne Feo Aladag aborde le thème du conservatisme religieux, de l'intolérance et des valeurs puritaines à travers le portrait rétrograde d'une famille turque dépréciant leur fille aînée coupable d'avoir quitté un mari trop violent. Lardé de récompenses à travers le monde, l'Etrangère éveille les consciences car il donne à réfléchir sur les conséquences extrémistes que peut envisager chaque individu tributaire de sa foi monothéiste.

Umay, 25 ans, décide de fuir la Turquie en compagnie de son jeune fils pour ne plus subir les violences récurrentes d'un mari impérieux. Elle se réfugie chez ses parents à Berlin pour bâtir une nouvelle vie. Mais la famille austère et drastique ne conçoit pas que leur fille ait pu quitter si précipitamment sa vie conjugale. 
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Dans un contexte social d'actualité pour le parti-pris engagé à nos doctrines religieuses, Feo Aladag nous décrit le cheminement d'une jeune mère accablée par une communauté intégriste, faute d'avoir osé enlever son jeune fils sous l'autorité rigide d'un mari autoritaire.
Alors qu'Umay imagine trouver soutien et réconfort auprès de ses parents, ceux-ci vont rapidement répudier leur propre fille à cause de leur éthique irrévocable prônant les liens intangibles du mariage.
Dans un climat familial machiste où la condition de la femme est largement discréditée, l'Etrangère nous démontre les conséquences tragiques qui peut encourir une famille intolérante à bannir leur fille coupable d'avoir osé transgresser les traditions.
La réalisatrice nous dévoile avec réalisme rugueux le comportement rétrograde de rejetons inculqués par un père endurci par ces convictions, tolérant la maltraitance et l'allégeance commise aux femmes.
Les conséquences délibérées d'Umay pour sauver la vie de son propre fils vont inévitablement annihiler l'honneur d'une famille pratiquante endoctrinée par ses convictions puritaines. Tandis que l'entourage amical va également pointer du doigt l'attitude opportuniste d'une femme conspuée pour avoir dévalorisé les liens sacrés du mariage.
Les exactions viriles des frères d'Umay, en crise de marasme d'une situation familiale éhontée vont être contraints d'employer la violence punitive pour redorer un semblant d'honneur à leurs parents bafoués. Une manière expéditive de pouvoir ainsi restituer un fils dans son pays d'origine sous l'autorité parentale d'un homme méprisable. Néanmoins, l'état de santé moribond du père d'Umay va finalement le ramener à une raison équitable. En effet, sa virulente attaque cardiaque va lui permettre de tolérer un regain de conscience rédemptrice pour enfin pardonner à sa fille l'acte indigne d'avoir ravi un enfant à son père irascible.


Dans le rôle candide d'Umay, Derya Alabora livre une prestation époustouflante de vérité prude dans sa condition humiliée d'une femme stigmatisé par sa communauté musulmane. Une jeune mère tolérante et sans rancune à l'idée de reconquérir le coeur de ses parents mais aussi courageuse et pugnace dans son devoir maternel de protéger un enfant ingénu. Cette actrice à la beauté naturelle gracile nous bouleverse le coeur et nous arrache les larmes de révolte dans un épilogue fataliste afin de mieux réprimander la bêtise humaine.


Sans outrance, l'Etrangère est un drame humain proprement bouleversant qui ose aborder sans jugement les problèmes d'intolérance et d'inégalité des sexes dans le traitement infligé aux femmes dans certains pays réactionnaires. Transcendé par l'incroyable interprétation de Derya Alabora et d'une sobre mise en scène éludée d'esbroufe, cette oeuvre substantielle retranscrit avec édifiance un tableau effarant des mentalités anachroniques. 

12.12.11
Bruno Matéï


Feo Aladag

vendredi 9 décembre 2011

Aux Frontières de l'Aube / Near Dark. Licorne d'Or au Rex de Paris 1988.


de Kathryn Bigelow. 1987. U.S.A. 1h38. Avec Adrian Pasdar, Jenny Wright, Lance Henriksen, Bill Paxton, Jenette Goldstein, Tim Thomerson, Joshua John Miller, Marcie Leeds, Kenny Call, Ed Corbett.

Sortie en salles en France le 9 Novembre 1988. U.S: 2 Octobre 1987

FILMOGRAPHIE: Kathryn Bigelow est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 27 Novembre 1951 à San Carlos, Californie (Etats-Unis).1982: The Loveless (co-réalisé avec Monty Montgomery). 1987: Aux Frontières de l'Aube. 1990: Blue Steel. 1991: Point Break. 1995: Strange Days. 2000: Le Poids de l'eau. 2002: K19. 2009: Démineurs. 2012: Kill Bin Laden


En 1987, une jeune réalisatrice novice va tenter d'apporter un sang neuf à la mythologie vampirique avec Near Dark. Un titre on ne peut mieux approprié tant il retransmet à merveille la divinité de la nuit lorsqu'une famille de nomades y sont tributaires jusqu'à la fin des temps. Récompensé de la Licorne d'or, du Prix d'interprétation féminine (Jenny Wright) au Rex à Paris et du Corbeau d'Argent au festival de Bruxelles, ce western moderne puise sa force dans sa poésie crépusculaire et son romantisme éperdu. Le pitchCaleb, jeune homme sans histoire, rencontre une nuit une jeune fille, Mae, dans la contrée bucolique de l'Arizona. Le couple profite de l'obscurité de la nuit pour s'isoler dans la campagne et s'enlacer tendrement. Passé l'étreinte, l'étrangère le mord au cou pour le contaminer de sa condition d'immortelle. Après que Caleb eut subi d'intenses malaises corporels, il décide de rejoindre Mae et sa famille de noctambules. Réalisatrice aujourd'hui reconnue et célébrée par les fans comme une spécialiste du cinéma d'action moderne, Kathryn Bigelow livre avec sa première réalisation une oeuvre désenchantée au pouvoir d'envoûtement hypnotique.


Car scandé de la musique capiteuse de Tangerine Dream, ce voyage au bout de la nuit est avant tout une initiation à la lumière de la pénombre. De par sa photographie limpide transcendant l'opacité d'une nature ténébreuse, Near Dark demeure un hymne lascif à sa plénitude. Ainsi, à travers l'errance nocturne d'une bande de marginaux corrompus par leur condition de vampire (bien que le terme familier ne soit à aucun moment prononcé), la réalisatrice nous dépeint leurs exactions perpétrées pour la soif de survie. Alors que le couple formé par Jesse et Diamondback s'avère fusionnel et que Severen compense son ennui lors de leurs virées meurtrières aux abords de pubs mal fréquentés (inoubliable séquence de carnage chorégraphique sur un air de country !), la jeune Mae éprouve une inlassable amertume à ne pouvoir concrétiser sa romance. C'est donc en rencontrant Caleb, jeune fermier un tantinet coureur qu'elle décide de choisir l'amant idéal pour y réconforter la tare de sa solitude. Quant à l'adolescent Homer, emprisonné dans un corps d'enfant depuis sa conversion, il attache autant de hâte à daigner rencontrer l'âme soeur jusqu'au moment d'aborder la petite soeur de Caleb. Ainsi, cette tribu de marginaux au look de cow-boys rustres se contente de perdurer leurs méfaits meurtriers à travers les contrées reculées des Etats-Unis. En toute insouciance et désintérêt pour la déontologie du bien et du mal, nos créatures de la nuit se débauchent dans une violence outrancière, faute de leur condition d'immortels. Mais depuis l'arrivée de Caleb réfractaire au crime gratuit, leur cohésion familiale en sera bouleversée.


L'équipée va donc lentement se désunir,  faute de conflits amoureux compromis entre Mae et Caleb, mais aussi Homer, épris d'affection pour la petite Sarah. Et si Near Dark continue aujourd'hui d'exacerber son pouvoir d'immersion et de fascination, c'est prioritairement grâce aux profils mélancoliques de ces vampires contemporains en quête d'idylle impossible. De par sa poésie suave sublimant l'épanouissement de la nuit et ses effets-spéciaux minimalistes mais très efficaces (effets de ralenti langoureux sur les corps des vampires subitement embrasés au contact du soleil), ce portrait transgressif de tueurs sanguinaires est transfiguré par la prestance iconique de son cast méconnu. Imprégnée de tendresse parmi l'expression candide de son visage suave, Jenny Wright illumine l'écran avec une sensuelle mélancolie à tenter de dompter son nouvel amour. Secondé par Adrian Pasdar, il réussit sobrement à nous convaincre de son nouveau statut de vampire, esclave d'une hiérarchie familiale inscrite dans la misanthropie. En marginal erratique et mégalo, Bill Paxton excelle lors de ses méfaits sanguinaires, quand bien même Lance Henriksen livre sans doute son meilleur rôle dans celui du patriarche autoritaire, ancien baroudeur de guerre de sécession mais aujourd'hui épanoui dans les bras de sa dulcinée. Enfin, Joshua John Miller leur volerait presque la vedette tant il retransmet à merveille sa condition éternelle d'adolescent infortuné dans son petit corps juvénile d'autant plus destiné à séduire les fillettes nubiles.


La Nuit nous appartient
A travers l'errance nocturne de vampires cyniques et désabusés, Near Dark transcende la beauté élégiaque de la nuit auprès de leur quête infructueuse d'apprivoiser l'amour. Parmi leur complicité marginale en dissension, Near Dark y transfigure la plus envoûtante épopée de vampires de l'ouest au sein d'un crépuscule ensorcelant. Inoubliable et beau à en pleurer. 

* Bruno
09.12.11. 
07.09.22. 6èx

Distinctions: Licorne d'Or et Prix d'interprétation féminine pour Jenny Wright au festival du Rex de Paris en 1988.
Corbeau d'Argent au festival du film fantastique de Bruxelles en 1988.




mercredi 7 décembre 2011

L'ILE DU DR MOREAU (The Island of Lost Souls)

       

de Erle C. Kenton. 1932. U.S.A. 1h10. Avec Charles Laughton, Richard Arlen, Leila Hyams, Kathleen Burke, Arthur Hohl, Stanley Fields, Paul Hurst, Hans Steinke, Tetsu Komai, George Irving.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Erle C. Kenton est un réalisateur, acteur et producteur américain, né le 1er Août 1896 à Norboro (Montana), décédé le 28 Janvier 1980 à Glendale (Californie).
1919: No mother to guide him. 1920: Married Life. 1924: Bring Him In. 1932: l'Ile du Dr Moreau. 1944: La Maison de Frankenstein. 1945: La Maison de Dracula. 1966: Doom of Dracula
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D'après le roman de H.G. Wells publié en 1896, l'île du Dr moreau est la seconde adaptation cinématographique concoctée en 1932 sous le label de la Paramount. Au préalable, une première version muette produite en Allemagne et mis en scène par Urban Gad aura vu le jour en 1921. Deux autres versions viendront plus tard tenter de dépoussiérer cette île maudite en 1977 par Don Taylor (remake modeste et sympathique) et en 1996 par John Frankenheimer (la version Bis la plus risible à ce jour !). A titre subsidiaire, l'oeuvre précieuse qui nous intéresse ici a été interdite en Angleterre jusqu'en 1958, faute de son thème jugé trop licencieux. A la suite d'un naufrage en pleine mer de l'océan indien, Edward Parker est recueilli par le Dr Moreau. Il se retrouve dans une étrange petite île épiée par des créatures mi-hommes, mi-animales. Le Dr Moreau est à l'origine de cette mutation génétique après avoir pratiqué sur des animaux sauvages des expériences scientifiques immorales. En effet, ce médecin narcissique souhaite métamorphoser chaque animal en être humain docile et discipliné. 
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En pleine période de gloire des trésors d'épouvante érigés sous la bannière de la Universal, la Paramount produit en 1932 une seconde version de l'île du Dr Moreau. L'oeuvre la plus réussie à ce jour, du moins la plus prégnante et fascinante, d'autant plus que l'interprétation de Charles Laughton va accentuer son charme vénéneux émanant de cette île singulière. Dans des décors exotiques d'un îlot émaillé d'ombres suspicieuses, cette aventure baroque gouvernée par un médecin sans vergogne nous ensorcelle par son ambiance malsaine sous-jacente. Sans recourir à de vulgaires effets chocs complaisants, Erle C. Kenton réussit à provoquer l'inquiétude, le sentiment palpable d'insécurité, la peur diffuse dérivés de feuillages forestiers occultant d'ombrageuses créatures difformes. Sous les exactions délétères d'un médecin mégalo et orgueilleux, ces animaux sauvages ont été expérimentés pour subir des greffes avec des êtres dits humains. Disséqués dans la chambre de la douleur, ils n'ont pas d'autre choix que de subir diverses tortures infligées par un tortionnaire pour devenir des monstres de foire destitués de leur nature primitive. L'ambition du Dr Moreau est de daigner créer l'être humain parfaitement synthétisé. Un hybride mi-homme, mi-animal doué de parole et de faculté de penser mais asservi par un impérieux chirurgien se prétendant nouveau dieu de l'humanité.


Ce qui frappe de façon probante à la vue de ce chef-d'oeuvre c'est sa cruauté aussi immorale que corporelle imputée à des créatures difformes physiquement impressionnantes. Ce réalisme désincarné imparti au bestiaire humain évoluant dans un décor tropical poisseux, cette atmosphère feutrée particulièrement étouffante insuffle à l'île du Dr Moreau un climat de fascination particulièrement dérangeant. A titre de fleuron de l'anormalité réside dans la plus ténue des créatures féminines, Lota, la femme panthère. Une jeune esclave suave et mélancolique, totalement désespérée de sa condition de métamorphe. Sans le moindre recours à des maquillages terrifiants, la comédienne Kathleen burke réussit lestement à retranscrire avec candeur son désarroi, sa tristesse élégiaque de sa condition de victime soumise. Tandis que le bedonnant Charles Laughton éprouve une mesquine perversité à endosser un docteur excentrique habité par ses convictions cyniques de dominer le monde. De cette ambition disproportionnée, l'argument métaphysique du scénario tend à nous suggérer que chaque être vivant ne peut être substitué à un autre organisme et que son instinct naturel finira toujours par reprendre ses droits.

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Baignant dans un climat trouble et malsain renforcé d'une photo noir et blanc blafarde, l'île du Dr Moreau demeure un incontournable du fantastique séculaire. Surprenant de cruauté par son réalisme parfois rigide, notamment auprès des saisissants maquillages transcendant la physionomie de créatures atypiques, cette oeuvre vénéneuse n'a en l'occurrence rien perdu de son pouvoir de fascination diaphane.

Dédicace à Isabelle Rocton

07.12.11
Bruno Matéï