mardi 6 mars 2012

Candyman. Prix du Public Avoriaz 93.


de Bernard Rose. 1992. U.S.A. 1h38. Avec Virginia Madsen, Tony Todd, Xander Berkeley, Kasi Lemmons, Vanessa Williams, DeJuan Guy, Barbara Alston, Caesar Brown, Kenneth A. Brown, Michael Culkin.

Sortie salles France: 20 Janvier 1993. U.S: 16 Octobre 1992

FILMOGRAPHIE: Bernard Rose est un réalisateur, scénariste, acteur, directeur de la photographie et monteur britannique. Il est né à Londres le 4 août 1960.
1987 Body contact, 1988 Paperhouse, 1990 Chicago Joe and the Showgirl, 1992 Candyman, 1994 Ludwig van B.(Immortal Beloved),1997 Anna Karénine, 2000 Ivans xtc., 2008 The Kreutzer Sonata, 2010 Mr Nice.

 
"Candyman : le miroir fendu de la haine".
Quatre ans après l’éblouissant Paper House, Bernard Rose transpose à l’écran l’une des nouvelles de Clive Barker, The Forbidden, tirée des Livres de Sang. Sous couvert de légendes urbaines et de superstitions nourries par la peur des déshérités, Candyman aborde frontalement l’exclusion et la xénophobie à travers le martyr d’un croque-mitaine, symbole vindicatif d’une communauté noire immolée par la haine raciale.

Le pitch : Une étudiante et sa collègue rédigent une thèse sur les légendes urbaines. Elles s’aventurent dans un quartier noir défavorisé de Chicago pour enquêter sur le mythe de Candyman. Incrédule et athée, Hélène devient malgré elle la nouvelle cible du spectre, destinée à embrasser les ténèbres comme maîtresse de son royaume maudit..

Porté par un scénario ingénieux transcendant un conte social d’une noirceur inouïe, Candyman avance d’abord à pas feutrés : l’enquête minutieuse de deux universitaires piégées par le mythe qu’elles croyaient disséquer. À première vue, on pourrait croire à un énième avatar de psycho-killer, héritier des cavalcades insolentes d’un Freddy Krueger adulé dans les années 80. Or, grâce à une première partie qui suggère plus qu’elle ne montre, et à la menace tapie d’un être peut-être chimérique, l’œuvre austère de Bernard Rose distille un suspense vénéneux, insinué jusqu’à l’os.

À travers Hélène, érudite fascinée par les croyances populaires mais sourde à toute notion de surnaturel, le réalisateur exploite l’incrédulité pour la hisser au rang de victime emblématique, soumise à la vengeance implacable d’un homme noir jadis massacré par une foule raciste — revenu de l’au-delà par le truchement des miroirs, à quiconque murmure cinq fois son nom face à la glace. Chaque meurtre perpétré dans les bas-fonds insalubres trouve en Hélène la coupable idéale, manipulée par Candyman. D’un crochet rouillé, le spectre lui greffe la preuve du crime dans les mains, l’enferme dans une spirale de chantage moral, et l’enchaîne par l’enlèvement d’un enfant gardé dans un recoin imprenable.

 
Cette empathie pour la victime blanche, arrachée à son confort pour être livrée à une justice sourde, cette impuissance à clamer l’innocence face à l’inexorable, nous cingle d’un malaise étouffant, d’une terreur presque palpable. Par une maîtrise technique implacable, Bernard Rose attise l’angoisse à chaque apparition, à chaque effusion de sang orchestrée par Candyman, jusqu’à nous ligoter au cauchemar d’Hélène promise à la damnation. Les décors d’HLM rongés de graffitis hystériques et l’inoubliable partition solennelle de Philip Glass amplifient ce climat d’abandon et de pourriture. Quant à l’apparition béante du spectre revanchard, drapé de velours noir et armé de son crochet sifflant, elle nous cloue sur place, à l’unisson de sa voix gutturale (privilégier coûte que coûte la VO, plus grave et caverneuse !).


"L’évangile sanglant du croque-mitaine vengeur".
Brillamment interprété par une Virginia Madsen candide, poignante de vulnérabilité et de vertige, face à un Tony Todd glaçant de majesté funèbre, Candyman se dresse en chef-d’œuvre absolu du fantastique à résonance sociale. Un conte macabre d’une cruauté foudroyante, peinture sans fard d’une haine raciale jamais assagie, qu’étouffe encore son atmosphère urbaine suffocante. Une date incontournable, à revoir sans jamais s’endurcir.

Bruno 
03.04.25. 4èx. Vost
06.03.12. 

Récompense: Prix du Public à Avoriaz en 1993.
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4 commentaires:

  1. Clairement une oeuvre phare en ce qui me concerne !!!! Le premier film à m'avoir foutu une trouille bleue !!!!!

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  2. une véritable claque ! un film anti pop corn qui redore ses lettres de noblesse au fantastique moderne ! Les Griffes de la nuit que j'adore ne lui arrive pas à la cheville !

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  3. La voix de Tony Todd disant à la magnifique Virginia Madsen "Be My Victim !!!"de la même façon que l'on aurait dit "Be my love" couplé à la musique de Phillip Glass... Eternel !!!

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