C’est dans le pouvoir de suggestion que Jack Clayton se surpasse pour orchestrer une histoire démoniaque, où deux enfants espiègles seront sévèrement réprimandés par leur nouvelle gouvernante. Persuadée qu’ils sont les vecteurs d’une malédiction invoquée par leur ancien valet de maison, elle apprend, par la nourrice, que ce dernier — prénommé Quint — a trouvé la mort dans un accident douteux lié à son ébriété. Plus troublant encore : Miss Jessel, ancienne gouvernante, est elle aussi décédée subitement après une liaison particulièrement licencieuse avec Quint.
Face à l’insolence croissante des enfants et à leur comportement interlope, Miss Giddens, la nouvelle maîtresse de maison, est convaincue qu’ils sont possédés par les fantômes des deux amants. Ses soupçons se cristallisent dès l’instant où elle aperçoit à plusieurs reprises leurs silhouettes tapies dans la maison ou rôdant près du parc…
Ce scénario charpenté, Jack Clayton le maîtrise avec une rare subtilité, distillant une angoisse tangible, un malaise diffus qui ne laisse jamais le spectateur en paix.
Épaulé par la photographie en clair-obscur du grand Freddie Francis, les jeux d’ombre et de lumière accentuent le sentiment d’insécurité latente, enfouie dans les murs mêmes de cette demeure victorienne.
En jouant sur le gothique intimiste des pièces closes et sur le regard angélique de bambins prétendument innocents, le réalisateur installe un climat malsain, suffocant, à mesure que la gouvernante s’abandonne à la certitude qu’une force obscure s’est emparée de leurs âmes.
Mais la grande force du récit réside dans sa manière de faire vaciller notre propre perception. Miss Giddens, femme noble issue d’une éducation puritaine, est aussi le miroir d’une subjectivité névrosée, où la sensibilité se mue peut-être en délire de persécution. Faute de preuves tangibles, faute de ce comportement trop maîtrisé des enfants, et face aux visions spectrales qui colonisent son esprit, elle pourrait n’être que la victime de son autosuggestion… Une fanatique, prête à purifier ces êtres prétendument souillés par la perversion.
Un joyau d’une noirceur insondable, si bien que la vérité ne nous sera jamais offerte. Henry James lui-même refusa d’éclairer le moindre indice, interdisant à jamais la démystification — qu’il s’agisse de Miss Giddens, des enfants, ou des amants d’outre-tombe.
Génuflexion.
pourquoi ya pas d lien snif
RépondreSupprimerJe suis désolé, je ne mets pas de lien sur ce blog. C'est uniquement conçu comme un album souvenir répertoriant l'essentiel du cinéma de genre.
RépondreSupprimerok merci
RépondreSupprimer