vendredi 14 novembre 2025

Une Bataille après l'autre / Eddington

               (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives) 
 
Le coeur du problème: "Le temps au cinéma."

Deux grands films. Deux grands récits. De grands acteurs. Deux grandes mises en scène. De l'ambition perpétuelle. De l'invention chiadée. 
Tout concourt à les sacraliser chefs-d’œuvre - et pourtant je m’y brise. 2h42 pour Une bataille après l’autre, 2h28 pour Eddington. Un tempo en dents de scie, narcotique, qui étouffe l’élan, sabote l’ardeur, décourage, démotive la concentration.

Ces œuvres que j’admire deviennent des traversées exténuantes, des marathons émotionnels qui usent en intermittence au lieu d’élever. L’éblouissement existe, mais il se noie parfois (souvent ?) dans la longueur - et c’est là que naît ma douleur de spectateur : aimer, et souffrir en même temps.

L’émotion est pourtant bien là. J’aime ces films, sincèrement - avec toutefois une préférence pour Eddington. Mais demeure en moi une frustration tenace : leur structure rythmique, insupportable à mes yeux, m’asphyxie à petit feu.
 

Peut-être que cette dérive du temps, cette tentation de l’étirement, vient aussi de là : le cinéma se laisse contaminer par la logique des séries.
Les séries ont imposé leur empire narratif : plusieurs heures, des arcs multiples, des respirations lentes, l’attente comme moteur, une caractérisation psychologique plus dense et profonde. Une temporalité dilatée où l’accumulation fait monument.

Mais transposer ce modèle au cinéma revient souvent à trahir son essence. Le cinéma n’est pas un fleuve, c’est une déflagration. Un éclat. Un impact. . Sa force naît de la concentration, de la densité, de la fulgurance, de la fascination hypnotique, de la sensitivité. 
Là où la série s’étire, le film doit inciser.
Là où la série construit patiemment, le film doit brûler intensément. Nuance. 

Aujourd’hui, trop de cinéastes semblent fascinés par la durée comme signe extérieur de grandeur - comme si l’ampleur automatique des minutes garantissait la noblesse du geste artistique. Une mode, presque une superstition : plus c’est long, plus c’est élevé. 
Or cette équation est fausse. La longueur n’est pas la profondeur. L’étalement n’est pas la vision.
 

Le cinéma perd alors son tranchant, son nerf, son unité organique. Il emprunte au format sériel un rythme qui n’est pas le sien, et le spectateur, lui, vacille dans ce no man’s land temporel où l’intensité se dissipe et où la beauté se dilue.

Ce n’est pas la patience du public qui manque : c’est la nécessité.
Le temps doit être vécu - pas rempli. Et j'en suis terriblement frustré avec ces 2 grandes oeuvres d'utilité publique.
 
— le cinéphile du cœur noir
 

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