Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com
de Tobe Hooper. 1985. U.S.A. 1h52 (version intégrale). Avec Steve Railsback, Peter Firth, Frank Finlay, Mathilda May, Patrick Stewart, Michael Gothard, Nicholas Ball, Aubrey Morris, Nancy Paul, John Hallam, John Keegan.
Sortie Salles France: 18 Septembre 1985. U.S: 21 Juin 1985
FILMOGRAPHIE: Tobe Hooper est un réalisateur américain né le 25 Janvier 1943 à Austin (Texas)
1969: Eggshells, 1974: Massacre à la Tronçonneuse, 1977: Le Crocodile de la Mort, 1979: The Dark (non crédité), 1981: Massacre dans le Train Fantome, 1982: Poltergeist, 1985: Lifeforce, 1986: l'Invasion vient de Mars, Massacre à la Tronçonneuse 2, 1990: Spontaneous Combustion, 1993: Night Terrors, 1995: The Manglers, 2000: Crocodile, 2004: Toolbox Murders, 2005: Mortuary, 2011: Roadmaster.
Série B à gros budget mésestimée à sa sortie, d'autant plus desservie par son échec commercial, Lifeforce s'est depuis taillé une réputation de petit classique de la science-fiction horrifique pour son judicieux alliage des genres, la qualité de ses fx et de son score orchestral ainsi que sa grande efficacité narrative. Le pitch: Lors d'une mission spatiale, le colonel Tom Carlsen et son équipage explorent un vaisseau spatial réfugié dans la comète de Halley. A l'intérieur, ils y découvrent trois êtres d'apparence humaine confinés dans des caissons de verre. Ces sujets dénudés s'avèrent de redoutables vampires de l'espace déterminés à conquérir notre monde en se nourrissant de notre force vitale. Nanar pour les uns, divertissement de haute tenue pour les autres, Lifeforce ne manque ni de moyens techniques ni d'idées retorses pour captiver le spectateur embarqué dans une trépidante course contre la montre où s'y télescopent vampires extra-terrestres et zombies en rut. D'après le roman de Colin Wilson, le film bénéficie d'une trame originale afin d'explorer le mythe du vampire dans un contexte futuriste. Son aspect insolite émanant de l'origine stellaire à laquelle ces vampires appartiennent.
Il tire parti d'une indéniable efficacité à multiplier leurs exactions meurtrières afin de converger à une réaction en chaîne produisant ainsi une pandémie dans un Londres en flammes ! Soutirés de leur substance vitale par le simple acte d'un baiser, les citadins possédés se contraignent à leur tour d'embrasser d'autres proies afin de survivre et de sauvegarder la race extra-terrestre. Parmi la présence angélique de la française Mathilda May, Lifeforceest notamment guidé par son aura ensorcelante, son appétit insatiable à dérober nos forces vitales afin de nous anéantir et conquérir notre planète. Sa présence tangible ou éthérée planant durant tout le récit. Filmée dans son plus simple appareil, l'actrice dévoile un charme de sensualité à damner un saint. Sa présence charnelle mais délétère s'érigeant en icone du Mal pour nous convaincre de sa puissance vampirique à connotation sexuelle. Car au-delà de ses ambitions belliqueuses, la vamp recherche également un mâle afin de satisfaire ses désirs, pallier sa solitude et anticiper sa postérité ! Ainsi, à travers l'impuissance des hommes incapables de refréner leur émotion pour résister à son baiser, on peut y voir une métaphore sur la nature vampirique de la femme et leur instinct éminemment séducteur tout un suggérant un discours réflexif sur la vie après la mort. Si on peut émettre quelques réserves sur le jeu cabotin (mais oh combien attachant !) de 1 ou 2 de seconds-rôles (quoique en VO, sa distribution demeure encore plus convaincante), Mathilda May se tire honorablement de son rôle laconique en misant sur l'attrait d'un corps immaculé doublé d'un regard pénétrant.
Récit audacieux brassant les genres de la science-fiction, de l'érotisme et de l'horreur, Lifeforce réussit à divertir grâce à l'élaboration d'un scénario aussi original que captivant car fertile en péripéties.
Le soin alloué aux effets-spéciaux (même si aujourd'hui leur aspect mécanique peut parfois paraître obsolète) et aux décors futuristes (le magnifique préambule confiné au sein du vaisseau spatial insuffle une poésie trouble !), et l'implication sympathique des comédiens parachèvent le spectacle d'une grosse série B bourrée de peps et de charme à la sincérité indéfectible.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinedemedianoche.cl
de Bob Balaban. 1989. U.S.A./Canada. 1h22. Avec Randy Quaid, Mary Beth Hurt, Sandy Dennis, Bryan Madorsky, Juno Mills-Cockell.
Sortie salles France: 22 Janvier 1989 (Festival d'Avoriaz). U.S: 27 Janvier 1989
FILMOGRAPHIE: Bob Balaban est un acteur, scénariste, réalisateur et producteur américain, né le 16 Août 1945 à Chicago. 1983: The Brass Ring (télé-film). 1989: Parents. 1992: Amazing Stories: Book Five (épisode TV). 1993: My Boyfriend's Back. 1994: The Last good Time. 1995: Legend (série TV). 1997: Subway Stories: tales from the Underground (télé-film). 1999: Strangers with Candy (série TV). 1999: Un Agent très secret (série TV). 2000: Deadline (série TV). 2001: Temps mort (série TV). 2004: No Joking (télé-film). 2005: Hopeless Pictures (série TV). 2005: The Exonerated (télé-film). 2007: Bernard et Doris (télé-film). 2008: Swington (série TV). 2009: Georgia O'Keefe (télé-film).
Traitant du thème de la fragilité de l'enfance, à l'instar de son compère Paperhouse, communément récompensés à Avoriaz, Parents n'a pas usurpé sa réputation de perle culte vantée à l'époque dans les pages de Mad Movies et autres mags spécialisés. Le redécouvrir aujourd'hui prouve à quel point le film de Bob Balaban (réalisateur méconnu issu de la télévision) était pourvu d'une audace rafraîchissante au sein du paysage horrifique. Le pitch: Michael est un petit garçon fragile observant la vie avec autant de curiosité que de perplexité. Car le comportement suspect de ses parents l'amène à penser qu'ils pourraient être adeptes du cannibalisme. Sous couvert de pitch original baignant dans l'humour noir et la satire sociale, Parents est avant tout l'étude psychanalytique d'un enfant en perte de repère car découvrant le monde inquiétant des adultes sous un jour nouveau. Du point de vue de sa conscience candide, Michael observe l'existence de ses parents sous un aspect autrement vénal après les avoir surpris dans leur lit entrain de forniquer. Et ce n'est pas l'influence perverse de sa copine d'école, une mythomane intarissable, qui le réconfortera dans sa paranoïa grandissante.
Au fil de ses observations quotidiennes, son investigation le mènera finalement à la plus horrible des vérités au point de devenir adepte du végétarisme. Ainsi, à travers les éléments horrifiques du cannibalisme et de la perversité, Bob Balaban satirise en diable afin de nous dévoiler l'envers du décor. Celui de la face cachée d'une Amérique d'apparence puritaine mais corrompue par le mensonge et le vice. Avec son ambiance d'étrangeté aussi décalée que dérangeante, le réalisateur nous assène une caricature de la cellule familiale habitée par le cynisme et la passion culinaire, en l'occurrence celle de la chair humaine ! Autour de l'introspection fragile de Michael, un climat lourd et oppressant s'y distille, contrebalancé de l'attitude ironique des parents faussement rassurants. Non dupe de leur hypocrisie, Michael bascule dès lors dans un cauchemar domestique où le danger toujours plus palpable l'incite à se rebeller contre l'autorité rendue hostile à ses yeux. Outre sa réalisation soignée et inventive parfois expérimentale, Parents est largement privilégié de la conviction des interprètes (en parents autoritaires, Randy Quaid et Mary Beth Hurt forment un duo indissociable !). Mais c'est surtout la présence introvertie de Bryan Madorsky qui renforce l'intensité des situations car endossant avec un naturel trouble un enfant gagné par la contrariété et la quête de découverte (ici effroyable).
American Beauty Malsain et oppressant, dérangeant et cruel (l'épilogue n'y va pas de main morte pour martyriser une fois de plus le bambin !), mais redoublant de dérision et de cocasserie, Parents n'a rien perdu de son insolence et de sa force métaphorique à démasquer l'aspect véreux de la maturité. L'adulte insidieux ayant comme priorité de se nourrir de son prochain afin d'y survivre.
de Mariano Baino. 1993. 1h32. Russie / Italie / Angleterre. Avec Valeri Bassel, Mariya Kapnist, Louise Salter, Venera Simmons, Pavel Sokolov.
Sortie salles: 16 Avril 1997
Récompenses: Prix du Public à Montréal, 1997. Vincent Price Award à Rome, 1994.
FILMOGRAPHIE: Mariano Baino est un réalisateur, scénariste et producteur italien, né le 17 Mars 1967 à Naples, Italie.
1991: Caruncula (court métrage). 1993: Dark Waters. 2004: Never Ever After (court-métrage). 2010: Based on a true life (court-métrage).
"Les Chants Funèbres de l’Onde Noire".
Inédit en salles en France et longtemps cantonné à une édition DVD somme toute banale, Dark Waters fait partie de ces films indépendants que l’ignorance relègue à l’ombre — jusqu’à ce que le bouche-à-oreille l’élève au rang de perle rare. Aujourd’hui, le label Ecstasy of Films lui offre une résurrection digne, dans une copie resplendissante rendant justice au soin formel de son auteur. Mieux encore : nous le découvrons dans une version Director’s Cutinédite en France, enrichie de précieux bonus. À ce titre, je vous recommande vivement le documentaire Deep into Dark Waters, qui revient sur les conditions de tournage au sein de l’équipe technique.
Après la mort de son père, Elisabeth se rend sur une île isolée pour en apprendre davantage sur le couvent qu’il finançait depuis son enfance. Là-bas, elle découvre une communauté de nonnes au comportement impénétrable, comme si un souffle ancien y soufflait encore, fait de silence et de présages.
Pour son unique et fulgurant essai, l’Italien Mariano Baino nous plonge dans un cauchemar éveillé, un poème sensoriel, une fantasmagorie morbide où Alice au pays des merveilless’égare dans les ténèbres des chants funèbres — entre les pleurs étouffés d’enfants et le braillement d’une créature lovecraftienne, écho venu du fond des catacombes. Dark Waters, envoûtant et déroutant de bout en bout, est une épreuve fantasmatique, hantée par une aura funeste où chaque vision onirique cherche à infiltrer notre âme pour mieux nous séduire.
Dans la lignée du cinéma d’Argento, pour la stylisation picturale au service d’un onirisme ésotérique, ou de Jodorowsky, pour sa mystique provocante et dérangeante, le film déroule une succession d’apparitions diaphanes, au rythme d’un cheminement indécis. Hantée depuis l’enfance par de mystérieux rêves, Elisabeth poursuit l’origine floue de son passé, et c’est un secret de famille qu’elle finira par exhumer, à travers l’intercession des ténèbres.
Ce huis clos occulte, gouverné par une assemblée presque exclusivement féminine, renvoie aussi au souffle lyrique de Suspiria, notamment dans la fragilité de son héroïne et la progression initiatique de son enquête — quête d’un mystère enfoui au sein d’un couvent dont les murs murmurent. Comme Suzy, Elisabeth arrive un soir de pluie dans cet endroit à la fois repoussant et envoûtant ; et c’est épaulée par une camarade qu’elle tentera de démêler les fils d’un destin tissé dans l’ombre. Sensoriel, insolite, baroque et expérimental, Dark Waters privilégie, lui aussi, l’extravagance d’une bande-son dissonante, le vertige visuel et les figures interlopes — plutôt que la futilité d’une intrigue dont l’issue, en fin de compte, importe peu.
"Élisabeth aux Portes du Néant".
Créateur d’images oniriques et morbides, Mariano Baino a sculpté avec Dark Waters un chef-d’œuvre pictural, fusion d’art gothique et d’expressionnisme, poème incandescent nourri de ténèbres. À l’image des bougies qui veillent dans chaque catacombe, Dark Waters est une invitation au voyage — une odyssée naturaliste dans les abîmes, une quête initiatique d’une fille confrontée à sa propre morale. Celle d’un combat spirituel où le bien et le mal ne sont plus que des reflets dans une eau trouble.
Merci à Ecstasy of Films et à Mariano Baino *Bruno
Photo empruntée sur Google, appartenant au site atlasmedias.com
de Dennis Villeneuve. 2010. Quebec. 2h10. Avec Lubna Azabal, Mélissa Désormeaux-Poulin, Maxim Gaudette, Rémy Girard, Abdelghafour Elaaziz, Allen Altman.
Sortie salles France: 12 Janvier 2011. U.S: 22 Avril 2011
FILMOGRAPHIE: Denis Villeneuve est un scénariste et réalisateur québécois, né le 3 octobre 1967 à Trois-Rivières.
1996: Cosmos. 1998: Un 32 Août sur terre. 2000: Maelström. 2009: Polytechnique. 2010: Incendies. 2013: An Enemy. 2013: Prisoner
Réalisateur prodige reconnu du public par le thriller haletant, Prisoners, Denis Villeneuve avait pourtant déjà prouvé son talent de technicien avisé avec Enemy, thriller personnel autrement hermétique sur le thème du double, et le film qui nous intéresse aujourd'hui, Incendies.
Drame psychologique dénonçant les horreurs de la guerre, l'obscurantisme, l'instinct de vengeance et le fanatisme religieux, Incendies relate la quête de vérité de deux jumeaux fouinant le passé de leur défunte mère afin de rencontrer un père et un frère qu'ils n'ont jamais connu. Contraints de leur remettre deux enveloppes, Jeanne décide de regagner son pays d'origine, la Palestine, avant que son frère Simon ne la rejoigne. Alternant évènements du présent et du passé à travers de nombreux flash-back, Dennis Villeneuve met en parallèle leur périple et leur investigation de longue haleine dans un pays marqué par la violence de tensions religieuses, tout en retraçant le douloureux parcours de cette mère catholique, abdiquée par sa propre famille après avoir eu l'audace de fréquenter un jeune musulman. A travers ces secrets de famille bafoués par l'intolérance et la barbarie de conflits entre chrétiens et musulmans, le cinéaste dépeint le chemin de croix d'une femme violentée et humiliée, réduite à la déchéance, mais d'une dignité insolente dans sa stoïcité à ne pas se laisser vaincre par la défaite. Quand au cheminement imprécis de Jeanne et Simon, de fil en aiguille, et avec le soutien d'aimables enquêteurs, ils vont réussir à percer la vérité sur leur mère au moment même d'être bouleversés par leur véritable identité. Autour de ce trio galvaudé par la vendetta et le terrorisme, le frère méconnu pâtira notamment de sa révolte belliqueuse avant de se confronter à une révélation des plus licencieuses.
Outre le magnifique portrait maternel asséné à cette femme inflexible, Incendies nous illustre avec autant de retenue que de réalisme éprouvant sa descente aux enfers et celle de ses enfants de la honte. Autour des sentiments d'injustice, de haine et de révolte engendrés par les divergences de religion, Dennis Villeneuve décortique les conséquences dramatiques de la rancoeur et de la vengeance avant de nous réconcilier avec les notions d'amour, de paix et de pardon. Un témoignage éminemment bouleversant pour cette oeuvre fragile dont le climat austère et étouffant nous reste à la gorge bien au-delà du générique de fin. Bruno Matéï
Photo empruntée sur Google, appartenant au site bloodygoodhorror.com
de Joe d'Amato / Peter Newton. 1981. 1h32. Italie. Avec George Eastman, Annie Belle, Charles Borromel, Katya Berger, Kasimir Berger, Hanja Kochansky, Ian Danby, Ted Rusoff, Edmund Purdom, Carolyn De Fonseca, Cindy Leadbetter, Lucia Ramirez, Mark Shannon, Michele Soavi, Martin Sorrentino, Goffredo Unge.
Sortie salles France: 6 Juillet 1983. Italie: Octobre 1981
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Joe d'Amato (né Aristide Massaccesi le 15 décembre 1936 à Rome, mort le 23 janvier 1999) est un réalisateur et scénariste italien. 1977 : Emanuelle in America, 1977 : Viol sous les tropiques, 1979: Buio Omega (Blue Holocaust), 1980: Anthropophagous, La Nuit Erotique des morts-vivants, Porno Holocaust, 1981: Horrible, 1982: 2020, Texas Gladiator, Caligula, la véritable histoire, Ator l'invincible, 1983: Le Gladiateur du futur.
"Horrible : L’Anthropophage ressuscité".
Un an après le succès sanglant d'Anthropophagous, Joe D’Amato rempile avec un psycho-killer, bien décidé à pousser l’hémoglobine plus loin encore. Recrutant de nouveau Georges Eastman, Horrible pourrait presque passer pour une suite dégénérée : le tueur ressemble à s’y méprendre au cannibale famélique d’alors. À la différence près qu’ici, nul appétit de chair humaine, mais une pure frénésie homicide, doublée d’un pouvoir de régénération dont on se demande encore par quel miracle il se relève, éventré, après avoir escaladé la grille d’un portail, pourchassé par un prêtre. Sa nationalité grecque et son exil précipité laissent d’ailleurs planer le doute : serait-ce bien notre anthropophage ?
Doté d’un pitch aussi grotesque qu’improbable, Joe D’Amato se moque de la cohérence, préférant exhiber la dérive sanguinaire d’un fou échappé d’un hôpital. Après avoir occis infirmière, homme d’entretien et motocycliste, le monstre gagne la campagne et jette son dévolu sur une maison isolée, proie idéale : un enfant, une nourrice, une tétraplégique y sont livrés à lui, à huis clos.
Titre racoleur à souhait, Horrible embrasse sans scrupule son horreur pornographique : le scénario n’est qu’un prétexte pour égrener des meurtres gratinés, à la lisière du sadisme complaisant. Comme cette inoubliable séquence où une jeune femme, piégée dans sa cuisine, finit la tête dans le four — supplice d’asphyxie interminable, combustion en prime. D’autres réjouissances macabres s’égrènent : crâne fendu à la scie circulaire, tympan perforé à la perceuse, gros plans cradingues garantis.
Les comédiens, figés dans une apathie lunaire, n’en sont pas moins attachants par leur naïveté candide — mention spéciale au marmot insupportable de six ans, qui cabotine ses crises et ses larmes, terrorisé par « l’ogre ». Plus omniprésent encore, Georges Eastman cabale à nouveau en tueur ahuri, conférant à son regard lambda une étrangeté presque solennelle. L’atmosphère fétide qui faisait la sève d’Anthropophagous se dissipe ici au profit d’une angoisse latente, qui explose dans un dernier acte haletant : un jeu de cache-cache malsain entre l’enfant, la nourrice, la tétraplégique et le monstre, ponctué de sursauts et d’hémoglobine, dans un esprit de dégénérescence hystérique.
"D’Amato déchaîne la boucherie".
Mieux rythmé qu’Anthropophagous, mais plus absurde encore dans sa narration tirée par les cheveux (comme le laisse entendre son titre US !), Horrible privilégie l’horreur sanguinolente et l’action suffocante, culminant dans le huis clos domestique. Au-delà de ses défauts criants, de ses incohérences et de ses maladresses de série Z, il charme par son jusqu’au-boutisme, ses effets gore artisanaux et son score de Carlo Maria Cordio, tantôt lugubre, tantôt mélancolique, jusqu'à l'envoûtement.
À redécouvrir, sans distance, pour le plaisir d’un Z viscéral jusqu’à la moelle.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site projectdeadpost.com
de Dan O'Bannon. 1985. U.S.A. 1h31. Avec Clu Gulager, James Karen, Don Calfa, Thom Matthews, Linnea Quigley, Beverly Randolph, Jewel Shepard, John Philbin, Miguel A. Nunez Jr.
Sortie salles France: 15 Mai 1985
FILMOGRAPHIE: Dan O'Bannon est un scénariste et réalisateur américain, né le 30 Septembre 1946 à Saint-Louis, dans le Missouri (Etats-Unis), décédé le 17 Décembre 2009 à Los Angeles en Californie.
1985: Le Retour des Morts-vivants. 1991: The Resurrected
Sorti la même année que Le Jour des Morts-vivants, à quelques semaines près, Le Retour des Morts-vivants se décline en parodie du mythe que le célèbre scénariste Dan O'Bannon s'entreprend de mettre en image pour une première réalisation. On peut d'ailleurs presque évoquer un coup de maître tant ce dernier s'avère aussi à l'aise et inspiré à exploiter horreur et dérision en interne d'un huis-clos converti en train fantôme ! Si bien que dans un esprit BD clairement hérité des EC. Comics (photo rutilante à l'appui !), le film nous offre une patine visuelle assez cartoonesque pour la tenue vestimentaire impartie aux adolescents punks mais aussi pour le look décalé de certains cadavres putrescents (le zombie liquéfié planqué au sous-sol !), juste après nous avoir rendu un hommage cocasse à la Nuit des morts-vivants. C'est le sujet de discussion amorcé entre l'employé d'un entrepôt, Frank, et son apprenti, Freddy, afin de convaincre ce dernier que la trame de la nuit des morts-vivants était authentique mais romancée par son auteur puisque contraint par l'armée de ne pas ébruiter sa véracité. Car si à une certaine époque, les morts sont bels et bien revenus à la vie, c'est sous les effluves de déchets toxiques expérimentés par les forces militaires. Stoqués depuis la fin des années 60 dans le sous-sol même de l'entrepôt, Frank invite alors l'adolescent à aller visiter ses conteneurs.
Mais par une maladresse de ce dernier, une fuite d'un des contenants va libérer le gaz toxique pour les empoisonner et ramener à la vie tous les cadavres à proximité ! Pendant ce temps, les amis du jeune Freddy, une bande de punks gentiment rebelles, s'introduisent dans la nécropole d'à côté pour s'y saouler en attendant son retour ! Divertissant et jouissif en diable, Le Retour des Morts-vivants dégage une énergie insolente de par son concours de circonstances malchanceuses auquel la complicité fraternelle des protagonistes décuplera une fougue offensive. Parmi cette dynamique de groupe, les comédiens expansifs s'en donnent à coeur joie à nous retransmettre leur état de panique face à la menace, quand bien même la bande de Freddy viendra rejoindre nos quatre survivants confinés dans un salon funéraire. Outre ses idées inventives émaillées de gags hilarants (la dégénérescence de Frank et Freddy les réduisant à l'état inversé de vivant-mort, les multiples traquenards invoqués aux ambulanciers et aux policiers !), la truculence des situations émane également du comportement débridé des morts-vivants. Car ici, ils courent massivement vers leurs proies et sont doués de parole pour réclamer de la cervelle qu'ils consomment uniquement afin de se soulager de leur état de décomposition !
Soutenu d'une bande-son rock entêtante et pourvu d'effets-spéciaux soignés assez convaincants, Le Retour des Morts-Vivants doit beaucoup de sa vitalité de par l'habileté d'une intrigue structurée au montage rigoureux et par la complicité impayable des comédiens épatants de spontanéité. Il s'en dégage une telle bonne humeur et un sens de dérision respectueux au genre que les multiples visionnages n'écornent nullement son pouvoir euphorique ! Un classique légitime donc dont le mélange horreur/comédie fonctionne à point nommé, quand bien même le nihilisme de son épilogue nous surprend sans prévenir de son audace sardonique ! *Eric Binford
Photo empruntée sur Google, appartenant au site bdzoom.com
de Jeremy Saulnier. 2013. U.S.A. 1h30. Avec Macon Blair, Devin Ratray, Amy Hargreaves, Kevin Kolack, Eve Plumb, David W. Thompson.
Récompense: Prix FIPRESCI au festival de Cannes, 2013
Sortie salles France: 9 Juillet 2014. U.S: 25 Avril 2014
FILMOGRAPHIE: Jeremy Saulnier est un réalisateur, scénariste et directeur de photographie américain.
2007: Murder Party. 2013: Blue Ruin.
Après Murder Party, premier essai d'une comédie horrifique restée inédite dans nos contrées, le débutant Jeremy Saulnier s'attaque au Vigilante Movie avec une ambition personnelle puisque Blue Ruin détourne les codes grâce à son intrigue sans repère et à son portrait au vitriol imparti au justicier lymphatique. Ponctué d'ironie saugrenue, le métrage joue autant la carte du naturalisme à travers sa nature sereine, une manière de contraster avec la nonchalance d'un loser aussi maladroit qu'émotif. Avec son attitude irréfléchie, sa timidité et ses exactions criminelles perpétrées avec amateurisme, c'est un peu comme si Le Distrait rencontrait Justice Sauvage ! Venant d'apprendre que le meurtrier de ses parents vient d'être libéré de prison, Dwight décide de l'assassiner en guise de vengeance. Embourbé dans une réaction en chaîne meurtrière, il tente en désespoir de cause de continuer sa dérive punitive en s'en prenant à la famille du meurtrier et en évitant les balles ennemies.
Récompensé à Cannes du prix Fipresci à la quinzaine des réalisateurs, Blue Ruin allie film noir et cinéma d'auteur afin de tirer parti d'un canevas éculé à toutes les sauces. Si ce film indépendant brille déjà par la structure de sa réalisation peaufinant notamment le cadre environnemental, il permet surtout de transcender le portrait d'un solitaire aigri incapable d'avoir su accepter le deuil parental. Présenté d'abord comme un Sdf vivant reclus dans sa voiture insalubre depuis la mort de ses parents, Dwight va subitement changer de look afin de se fondre dans l'apparence d'un aimable citoyen après avoir appris la libération du meurtrier. Obnubilé à l'idée de se venger sans mesurer les conséquences de ses actes crapuleux, il va se laisser entraîner dans un itinéraire indécis afin de retrouver le vrai criminel, mais aussi se protéger contre l'inévitable riposte. Une contre-attaque familiale de culs-terreux incultes aussi déterminés dans leurs pulsions de haine destructrice ! Gagné par le remord et la paranoïa, Dwight songera même à tenter de préserver le destin de sa soeur si elle était amenée à devenir une cible potentielle !
Avec ses éclairs de violence crue (le 1er meurtre dans les toilettes), ses situations incongrues (l'otage du coffre), ses rencontres amicales de personnages sans morale (la soeur et l'ami d'enfance de Dwight !) et ses moments d'intimisme introspectif, Blue Ruin casse les conventions du film d'auto-défense pour dessiner l'humanisme d'un paumé dépressif incapable de canaliser son émotivité pour remonter la pente de sa déchéance. Une surprenante découverte à la limite de la parodie renfrognée et la révélation d'un acteur hanté par l'échec et le désarroi: Macon Blair !
Photo empruntée sur Google, appartenant au site zombiepop.net
de Gary Sherman. 1981. U.S.A. 1h34. Avec James Farentino, Melody Anderson, Jack Albertson, Dennis Redfield, Nancy Locke, Lisa Blount, Robert Englund.
Sortie salles France: 19 Août 1981. U.S: 29 Mai 1981
FILMOGRAPHIE: Gary A. Sherman est un réalisateur, scénariste et producteur américain né en 1943 à Chicago dans l'Illinois. 1972: Le Métro de la mort, 1981: Réincarnations, 1982: Descente aux enfers, Mystérious Two (TV film), 1984: The Streets (TV film), 1987: Mort ou Vif, 1988: Poltergeist 3, 1990: Lisa, After the Shock, 1991: Murderous Vision (TV film).
Film culte d’une génération entière,Réincarnations a marqué une légion de jeunes cinéphiles l’ayant découvert au tout début des années 80. Tant lors de sa sortie en salles (les ados comme moi durent s’y rendre accompagnés d’un adulte, le film étant interdit aux moins de 18 ans !) que grâce à sa mythique édition VHS chez UGC Vidéo.
Au-delà de l’incroyable scénario concocté par Dan O’Bannon et Ronald Shusett pour insuffler un sang neuf au mythe du zombie — et à celui de Frankenstein — c’est surtout l’ambiance mortifère, littéralement prégnante, qui saisit l’esprit du spectateur pour ne plus jamais le lâcher.
Alors que deux meurtres secouent une tranquille bourgade côtière, le shérif Dan Gillis piétine à retrouver le ou les responsables de ces morts d’une brutalité inouïe. Son enquête le conduit bientôt à soupçonner l’embaumeur local, le médecin-légiste William G. Dobbs.
Dès sa scène d’ouverture cinglante — restée gravée dans toutes les mémoires — Gary Sherman ébranle le spectateur sans sommation : une drague anodine sur la plage entre un photographe et une jeune tentatrice bascule soudain dans l’horreur la plus frontale lorsqu’un homme s’oppose à une confrérie invisible.
Des séquences cauchemardesques de cet acabit, Réincarnationsen regorge. Toutes aussi estomaquantes que radicales, elles déploient une violence sèche, une verdeur nécessaire, tandis que le climat d’angoisse, subtilement distillé, monte crescendo au fil de l’enquête du shérif.
On salue au passage l’interprétation fiévreuse de James Farentino (sans doute son plus grand rôle), exprimant une lente dégringolade vers les méandres d’un vaudou tapi dans l’ombre.
À ses côtés, Jack Albertson, au charisme émacié, incarne le médecin-légiste avec une dérision macabre, presque goguenarde. Et que dire de la présence trouble de Melody Anderson, épouse trop affable pour ne pas éveiller les soupçons...
Outre la justesse du casting et la maîtrise glaciale de la mise en scène (Sherman n’a jamais autant brillé dans sa capacité à crédibiliser une société de morts-vivants impassibles et non carnivores), la puissance émotionnelle de Réincarnations tient surtout à sa manière de nous plonger dans une intrigue vénéneuse, toujours plus envoûtante.
Les scénaristes nous offrent ici une farce macabre d’une cruauté délicieuse, où l’humour noir se mêle à la terreur sourde, et où chaque revirement vient mordre dans la chair du récit. Jusqu’au twist final, traumatisant, qui remet en cause notre propre réalité. Serions-nous, nous aussi, les pantins articulés d’un créateur imposteur ?
Mais Réincarnations, c’est aussi le charme d’une série B esthétiquement formelle, baignée dans l’illusion paisible d’une bourgade côtière. Une ville bercée par une mélodie de piano — inoubliable score deJoe Renzetti — avant d’être ravagée par l’onde noire d’un sacrement morbide, implacable.
Chef-d’œuvre d’humour macabre, baignant dans une atmosphère aussi lourde qu’oppressante (bande-son bourdonnante à l’appui), Réincarnations incarne l’archétype d’une série B artisanale où toute une équipe s’emploie à cristalliser un pitch improbable… et pourtant redoutablement clairvoyant.
Et ce ne sont pas les maquillages spectaculaires deStan Winston qui viendront contredire la réussite incontestable de cette farce sardonique, où la violence — brutale, tranchante — s’impose, justifiée. Inoubliable.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com
de Darren Aronofski. 2014. U.S.A. 2h18. Avec Russel Crowe, Jennifer Connely, Ray Winstone, Anthonby Hopkins, Emma Watson, Logan Lerman, Douglas Booth, Nick Nolte, Mark Margolis.
Sortie salles France: 9 Avril 2014. U.S: 28 Mars 2014
FILMOGRAPHIE: Darren Aronofski est un réalisateur américain né le 12 février 1969 à Brooklyn (New York). Il travaille aussi en tant que scénariste et producteur.
1998 : π, 2000 : Requiem for a dream, 2006 : The Fountain, 2009 : The Wrestler, 2010 : Black Swan. 2014: Noé
En conteur biblique, Darren Aronofski s'inspire ici librement du récit de l'arche de Noé pour nous bâtir une interprétation plus moderne et épique, à l'instar du film d'aventure lyrique puissamment évocateur. Alors que Dieu est sur le point d'anéantir la terre, faute de la méchanceté de l'homme féru de suprématie, Noé devient l'élu pour la construction d'une gigantesque arche afin d'y préserver la vie animale. Mais une tribu guerrière menée par Samyaza est sur le point d'investir leur forteresse. En s'inspirant d'un illustre chapitre du livre de la genèse, Darren Aronofski nous propose un blockbuster familial constamment captivant dans ses thématiques universelles abordées avec intelligence pour remettre en cause la place de l'homme sur Terre. Réflexion spirituelle et métaphysique se télescopant à renfort d'images allégoriques où Adam et Eve seraient les principaux commanditaires de notre déchéance. En alternant l'action, le fantastique, le drame et la romance, Noé nous dépeint l'incroyable destinée d'une famille unie par l'amour, leur combat ardu pour la préservation d'un nouveau monde mais aussi leur dissolution morale où la stature de l'homme n'a plus lieu d'être. C'est tout du moins la conviction de Noé, patriarche exemplaire mais soudainement envahi de visions prophétiques, persuadé d'avoir été choisi par le divin afin de refonder l'humanité.
A travers son cheminement spirituel, le réalisateur oppose les thématiques du fanatisme religieux et du sens du sacrifice lorsqu'il se résout à respecter sa mission pour préserver la cause animale au lieu de celle de l'homme. La première partie prend le soin de nous attacher à l'intimité de cette famille déférente avant leur nouveau compromis avec les géants de pierre (des anges préalablement punis par Dieu) finissant par prêter main forte à la construction de l'arche mais aussi à une hostilité guerrière. Ce qui nous vaudra une bataille furieusement épique impartie entre ces molosses et l'armée de Samyza, tentant en désespoir de cause de rejoindre le domaine avant le déluge annoncé ! Là encore, passé le chaos du fracas des armes, une vision dantesque du monde englouti nous ait évoqué avec un souffle de réalisme vertigineux. La seconde partie, beaucoup plus dense dans l'étude caractérielle, laisse place à la responsabilité humaine de Noé négligeant derrière lui le charnier de victimes innocentes, quand bien même sa dernière volonté sera de sacrifier les siens ! Face au fanatisme intransigeant de cet homme autrefois loyal, Darren Aronofski laisse débattre les témoins de sa famille avec une foi désespérée pour le rappeler à la raison. Celle de l'amour et de la compassion. A travers leur destin sont également interrogées les notions de pardon, de vengeance, d'erreur humaine, de repentance et de seconde chance afin de mettre en appui la fragilité de l'homme perpétuellement tiraillé entre l'instinct de colère et la compassion.
Superbement interprété (Russel Crowe et Jennifer Connely s'entredéchirent corps et âmes ! ), épique, intense, lyrique et parfois bouleversant, Noé confronte le blockbuster émotif avec l'intelligence d'une réflexion New-Age. Riches de thématiques toutes plus passionnantes, Noé illustre également avec poésie un hymne au respect de l'environnement et à la cause animale où le rôle difficile de l'homme est remis en cause pour sa nature aussi défectueuse que destructrice.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site amoeba.com
d'Elliot Silverstein. 1977. U.S.A. 1h37. Avec James Brolin, Kathleen Lloyd, John Marley, R.G. Armstrong, Ronny Cox, Henry O'Brien, Elizabeth Thompson.
Sortie salles France: 13 Mai 1977
FILMOGRAPHIE: Elliot Silverstein est un réalisateur et producteur américain, né le 3 Août 1927 à Boston, Massachusetts (Etats-Unis). 1962: Belle Sommers (télé-film). 1965: Cat Ballou. 1967: The Happening. 1970: Un Homme nommé Cheval. 1973: Nightmare Honeymoon. 1977: Enfer Mécanique. 1986: Betrayed by Innocence (télé-film). 1987: La Nuit de tous les Courages (télé-film). 1987: Fight for Life (télé-film). 1990: Rich Men, Single Women (télé-film). 1993: Flashfire.
Démarquage bisseux de Duel de Spielberg, Enfer Mécanique marqua toute une génération de spectateurs grâce à ces multi rediffusions projetées sur la chaîne privée (mais gratuite !), la Cinq ! Série B purement ludique où seule compte l'efficacité d'une action endiablée, Enfer Mécanique n'a point usurpé son statut de petit classique du Fantastique si bien qu'à la revoyure (4è x !) il perdure à captiver de par la vigueur d'une mise en scène à la fois soignée et attentionnée pour la caractérisation de ses personnages contrariés en proie à une menace indicible. L'aimable participation des trognes charismatiques de seconde zone (James Brolin en tête !) doit notamment beaucoup à l'extrême sympathie qui s'y détache, quand bien même chacun des protagonistes sont engagés dans la cohésion afin de contrecarrer la menace, véritable serial-killer motorisé d'une vélocité sans égale lorsqu'il s'acharne à traquer ses proies pour les écraser sur le bitume. Car c'est sous l'apparence d'une Berline noire qu'est personnifiée l'entité, véhicule sans conducteur habité par le Malin (c'est ce que nous révélera l'épilogue à renfort de visions dantesques d'un brasier rugissant !).
Ainsi, à l'aide de plans parfois alambiqués, le réalisateur parvient à distiller une véritable aura maléfique à travers l'étrange morphologie de cette carrosserie blindée comparable au corbillard ! Qui plus est, au son d'avertissement d'un klaxon arrogant, l'engin erratique fait preuve d'une frénésie incontrôlée pour s'élancer sur ses victimes ! Avec son environnement aussi montagneux que désertique, Elliot Silverstein exploite une scénographie héritée du Western au sein de cette communauté reculée de Santa Ynez. Les shérifs, héroïques et serviables, tentant courageusement de protéger leur village face à l'audace du hors là loi laissant derrière lui les cadavres de touristes après son passage éclair. Mené par le capitaine Wade Parent, c'est donc une course-poursuite inlassable que nos justiciers vont emprunter sur les routes de l'Utah en usant de moult stratégies pour l'annihiler. Durant les péripéties meurtrières de la voiture, on est d'ailleurs surpris d'assister à la mort inopinée de protagonistes essentiels. Cette radicalité à laquelle fait preuve le réalisateur surprend d'autant plus que cette série B est uniquement impliquée dans le divertissement plaisant même si elle s'autorise quelques effusions de violence dénuées de concession.
Interprété avec une spontanéité communicative (notamment auprès de l'épouse du shérif que Kathleen Lloyd endosse avec une chaleureuse fringance) et solidement mis en scène sans avoir recours au gros budget, Enfer Mécanique n'a absolument rien perdu de son efficacité à aligner sans répit nombre de péripéties spectaculaires et dérives meurtrières. L'épique partition orchestrale de Leonard Rosenman et l'apparence spectrale de la voiture s'y combinant parfaitement afin d'iconiser un serial-killer échappé de l'enfer ! A revoir sans réserve. *Bruno 4èx (04.07.22). Vostfr
Photo empruntée sur Google, appartenant ausite impawards.com
de Quentin Tarantino. 1992. U.S.A. 1h39. Avec Harvey Keitel, Tim Roth, Michael Madsen, Steve Buscemi, Chris Penn, Lawrence Tierney, Quentin Tarantino.
Sortie salles France: 2 Septembre 1992. U.S: 21 Janvier 1992
FILMOGRAPHIE: Quentin (Jérome)Tarantino est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, né le 27 Mars 1963 à Knoxville dans le Tennessee.
1992: Réservoir Dogs. 1994: Pulp Fiction. 1995: Groom Service (segment: The Man from Hollywood). 1997: Jacky Brown. 2003: Kill Bill 1. 2004: Kill Bill 2. 2007: Boulevard de la Mort. 2009: Inglorious Basterds. 2012: Django Unchained.
En 1992, un petit film indépendant au succès commercial modeste va bousculer le paysage du polar noir et rouge et lui permettre de redorer son blason. Auréolé d'un bouche à oreille élogieux et de critiques enthousiastes, Réservoir Dogs va imposer au fil des ans son statut de film culte et asseoir la réputation d'un cinéphile enragé, Quentin Tarantino. A la suite d'un braquage de bijouterie ayant mal tourné, une poignée de gangsters se réfugient au point de rencontre d'un vieil entrepôt. Persuadé qu'ils ont été dénoncés par un membre des leurs, ils vont tenter de démasquer la taupe en attendant l'arrivée de leur boss. Polar sanguin habité par la paranoïa, la suspicion et la traîtrise, Reservoir Dogs est un concentré de violence sardonique où la suggestion prend souvent le pas sur l'ostentatoire. Car si le sang s'avère continuellement présent à l'écran, Quentin Tarantino ne nous en illustre que la résultante, les conséquences dramatiques d'un braquage raté auquel des malfrats en costard se sont malencontreusement frottés.
Observer en intermittence l'agonie d'un malfrat grièvement blessé à l'abdomen s'avère une expérience rigoureuse lorsqu'elle est traitée avec autant de verdeur dans son réalisme. Baignant dans la mare de son propre sang, la victime livide s'avère d'autant plus impuissante qu'elle risque de succomber à tous moments à ses blessures, quand bien même ses collègues anxieux essaient de se disculper de leur culpabilité ! Et pour en rajouter dans le grotesque improvisé, un maniaque au rasoir va notamment prendre son pied à torturer l'oreille d'un flic otage sur un tube musical de Stealers Wheel ! Cette séquence anthologique s'avère d'autant plus percutante que Tarantino utilise habilement le hors champs, la caméra déviant subitement de quelques centimètres sur la gauche afin de se diriger sur l'inertie d'une façade ! Le fait inopiné que le spectateur se retrouve inexplicablement confronté à un décor aussi trivial renforce l'impression de malaise, alors que les supplices de la victime se font écho sur une bande rock décontractée guinchée par le tueur ! Emaillé de flash-back sporadiques afin de mieux connaître les identités des malfrats et afin de savoir comment ils ont pu approcher leur patron, Reservoir Dogs ne cesse de surprendre par son accumulation de revirements aléatoires, à l'instar de l'échappée des gangsters (en mode déchronologique !) après leur défaite du braquage. Outre la construction iconoclaste de l'intrigue et la virtuosité de la caméra, le film tire notamment parti de la répartie des dialogues ciselés que Tarantino se délecte souvent à parodier ! Alternant l'humour noir et aussi la truculence comportementale de gangsters cools (vêtus de costards et lunettes noires, ils sont férus de pop-culture et de malbouffe !), le réalisateur s'épanche par exemple sur leur goûts musicaux d'un tube de Madonna ou sur leur statut moral à offrir ou refuser le pourboire d'une serveuse.
En privilégiant l'étude psychologique d'antagonistes en remise en question, communément confrontés à leur instinct de perspicacité pour comprendre les aboutissants de leur déroute, Quentin Tarantino brosse une galerie de gangsters hilarants tout en fignolant l'aspect réaliste de leur situation de crise vouée à l'hécatombe. Sardonique et jouissif, Reservoir Dogs baigne autant dans une violence insupportable (mais jamais outrée !) que dans une "cool attitude" générée par ses braqueurs faussement compétents !