"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
lundi 10 juillet 2017
THE LOST CITY OF Z
de James Gray. 2016. U.S.A. 2h21. Avec Charlie Hunnam, Robert Pattinson, Sienna Miller, Tom Holland, Angus MacFadyen, Edward Ashley, Nicholas Agnew, Ian McDiarmid.
Sortie salles France: 15 Mars 2017. U.S: 21 Avril 2017
FILMOGRAPHIE: James Gray est un réalisateur, scénariste et producteur américain né à New York en 1969. 1994 : Little Odessa. 2000 : The Yards. 2007 : La nuit nous appartient. 2008 : Two Lovers. 2013 : The Immigrant. 2016 : The Lost City of Z.
D'après l'histoire vraie de l'explorateur anglais Percy Fawcett délibéré durant toute sa vie à retrouver les traces d'une éventuelle cité d'or au coeur de la forêt amazonienne, The Lost city of Z renoue avec le souffle épique et romanesque des récits d'aventures les plus authentiques. Car riche d'une intensité émotionnelle parfois bouleversante au travers de séquences intimistes sans fard, James Gray semble touché par la grâce d'avoir aussi majestueusement narré (structure limpide en sus) cette incroyable épopée humaine prônant les thèmes des valeurs familiales, du courage, de l'espoir, du dépassement de la peur, de l'obsession, du sens de l'amitié (les rapports indéfectibles entre Percy et ses 2 comparses) et de la tolérance envers les ethnies sauvages discréditées ou parfois exploitées à l'esclavage chez l'homme blanc.
D'une ampleur visuelle à couper le souffle au sein de vastes décors naturels hostiles (extérieurs tournés en Colombie) confrontant l'homme à une survie suicidaire (rations précaires d'eau et de nourriture, maladies, affronts meurtriers de tribus indigènes à proximité des fleuves, faune sauvage à l'affût), The Lost city of Z nous oriente vers un voyage mystique (son final évocateur faisant appel à une idéologie spirituelle) sous l'autorité inflexible de Percy Fawcett. Un explorateur érudit et patriotique pétri de valeurs, de sens du devoir et en avance sur son temps quant à sa morale imputée à l'égalité des sexes et au racisme que l'acteur Charlie Hunnam endosse avec noble sobriété. Cette foi furibarde et désespérée de sillonner sa cité perdue, son endurance de poursuivre sans relâche cet Eldorado durant plusieurs décennies nous invoque stupeur et dignité par son courage physique, sa force de caractère, sa résilience de longue haleine, et ce en dépit des sacrifices qu'il est contraint de s'imposer auprès de sa fonction parentale. Car partagé entre le sens du devoir familial et sa passion professionnelle, ce dernier pour autant révérencieux et compréhensif aura tout de même l'aubaine de se confronter à une épouse aussi humaine car d'autant plus patiente, optimiste et tolérante en dépit de son désarroi affectif et de sa crainte du trépas. Là aussi James Gray dresse l'honorable profil d'une femme fidèle privilégiant au final l'entreprise héroïque de son époux, l'actrice Sienna Miller l'incarnant avec une juste discrétion, entre force d'esprit, franchise et élégance épurée.
En terre inconnue
Passionnant et subtilement envoûtant en dépit d'un début gentiment placide prenant son temps à exposer sa trame, The lost city of Z est un grand moment de cinéma sous l'oeil avisé de l'éminent James Gray maîtrisant la puissance de son récit sous une fulgurance visuelle tangible. Magnifique portrait d'un destin aventurier, progressiste avant-coureur dont la raison de vie n'était que de changer l'avenir et y imposer sa signature afin de confronter l'évolution du monde aux civilisations inconnues, The Lost city of Z demeure une flamboyante épopée humaine derrière une rage de vaincre l'échec, et ce quitte à en sacrifier son destin. D'une sensibilité jamais démonstrative émane un chef-d'oeuvre humble où son intensité dramatique nous bouleverse sans nous prévenir, et ce pour nous transformer psychologiquement parlant.
Bruno Dussart
vendredi 7 juillet 2017
LES SORCIERES / PACTE AVEC LE DIABLE
"The Witches" de Cyril Frankel. 1966. Angleterre. 1h31. Avec Joan Fontaine, Kay Walsh, Alec McCowen, Ann BellAnn Bell, Ingrid Boulting, John Collin, Michele Dotrice.
Sortie salles Angleterre: 9 Décembre 1966. U.S: Février 1967. Inédit en salles en France
FILMOGRAPHIE: Cyril Frankel est un réalisateur anglais né le 28 décembre 1921 à Stoke Newington en Londres. 1950 : Explorers of the depths. 1950 : Eagles of the fleet. 1951 : Wing to wing. 1953 : The nutcracker. 1953 : Man of africa (documentaire). 1954 : Make me an offer. 1955 : It's great to be youg. 1957 : No time for tears. 1958 : She didn't say no! 1958 : Alive and kicking. 1960 : Scheidungsgrund : Liebe. 1960 : Never take sweets from a stranger. 1960 : School for scoundrels. 1961 : Don't bother to knock. 1961 : On the fiddle. 1963 : The very edge. 1966 : Pacte avec le diable. 1967 : The trygon factor. 1975 : La Trahison. 1990 : Eine frau namens Harry.
jeudi 6 juillet 2017
Mulholland Drive
de David Lynch. 2001. 2h26. U.S.A/France. Avec Naomi Watts, Diane Selwyn, Laura Harring,
Justin Theroux, Ann Miller, Dan Hedaya, Lori Heuring, Angelo Badalamenti.
Sortie salles France: 21 Novembre 2001. U.S: 12 Octobre 2001
FILMOGRAPHIE: David Lynch est un réalisateur, photographe, musicien et peintre américain, né le 20 Janvier 1946 à Missoula, dans le Montana, U.S.A. 1976: Eraserhead. 1980: Elephant Man. 1984: Dune. 1986: Blue Velvet. 1990: Sailor et Lula. 1992: Twin Peaks. 1997: Lost Highway. 1999: Une Histoire Vraie. 2001: Mulholland Drive. 2006: Inland Empire. 2012: Meditation, Creativity, Peace (documentaire).
Une perte identitaire au sein de l'industrie du 7è art.
Histoire d'amour passionnelle au sein de l'univers impitoyable et si illusionniste d'Hollywood, Mulholland Drive oppose deux récits contradictoires afin de semer doute et confusion à travers l'identité trouble de deux jeunes actrices prometteuses aptes à concourir pour la célébrité. A la suite d'un accident de voiture conduit par deux mystérieux individus, une jeune femme brune est frappée d'amnésie. A proximité du crash, elle s'enfonce dans un bosquet pour se diriger vers la ville de Mulholland Drive. Elle finit par entrer à l'improviste au sein d'une demeure occupée par une actrice néophyte, Betty Elms, elle-même chaudement hébergée par sa tante. Rapidement éprise d'amitié, Betty décide d'épauler l'inconnue dans sa quête identitaire, ce qui les mèneront vers une découverte macabre.
Magnifiquement incarné par Naomi Watts et Laura Harring crevant l'écran à chacune de leurs apparitions, Mulholland Drive emprunte le cheminement d'un thriller à suspense comme seul Lynch, alchimiste inné, a le secret. Car constamment trouble et envoûtant, imbitable mais aussi limpide quant aux rapports (autrefois) intimes des deux héroïnes en proie à l'investigation, sa narration déstructurée est conçue à la manière d'un puzzle que le spectateur s'efforce de remodeler sans en saisir tous les tenants et aboutissants. Emaillé de séquences érotiques d'une sensualité épurée (l'intense échange du baiser durant l'audition de Betty, l'étreinte sexuelle de cette dernière avec Rita nous hypnotisant les sens !), Mulholland Drive demeure un vénéneux objet de séduction que notre duo saphique se partage entre passion des sentiments et rancune meurtrière. C'est ce que la seconde partie, brutalement dramatique et ramifiée dans les psychés contradictoires des héroïnes, nous impose à travers le dédale tortueux de deux personnalités où se disputeront trahison, cupidité et jalousie.
Une histoire d'amour dans la cité des rêves
Envoûtant, onirique, cocasse, absurde et méthodiquement fascinant au sein d'un environnement baroque indicible, Mulholland Drive cultive au final une superbe histoire d'amour écorchée vive sous l'impulsion torride de deux actrices talentueuses corrompues par la chimère d'Hollywood. Sombre récit d'échec personnel parmi le témoignage d'une foule de complices aussi bien interlopes que véreux, David Lynch y revêt son talent de conteur singulier afin d'imposer sa signature personnelle. Pour cela, il emprunte par ailleurs le truchement du thriller obsessionnel où les indices irrésolues nous laissent fatalement en suspens (du moins au 1er visionnage). On se laisse pour autant facilement bordé par la main de ce rêve éveillé parmi l'emprise lascive de deux égéries d'Hollywood traversant l'écran de Lynch avec une désillusion romanesque. Rien que pour elles (les protagonistes et les comédiennes ne faisant qu'une !), Mulholland Drive constitue un précieux moment de cinéma d'une finesse sensorielle.
Récompenses:
Festival de Cannes 2001 : Prix de la mise en scène, ex æquo avec The Barber de Joel et Ethan Coen.
César 2002 : Meilleur film étranger.
BAFTA 2002 : Meilleur montage pour Mary Sweeney.
mardi 4 juillet 2017
REMO, SANS ARME ET DANGEREUX
"Remo Williams: The Adventure Begins" de Guy Hamilton. 1985. U.S.A. 2h01. Avec Fred Ward
Joel Grey, Wilford Brimley, J.A. Preston, George Coe, Charles Cioffi, Kate Mulgrew.
Sortie salles France: 19 Mars 1986. U.S: 11 Octobre 1985
FILMOGRAPHIE: Guy Hamilton, né le 16 septembre 1922 à Paris (France) et mort le 20 avril 2016 à Majorque en Espagne, de parents britanniques, est un réalisateur britannique. 1952 : L'assassin a de l'humour (The Ringer). 1953 : Le Visiteur nocturne. 1954 : Un inspecteur vous demande. 1955 : Les Indomptables de Colditz. 1956 : Charley Moon. 1957 : Manuela. 1959 : Un brin d'escroquerie.
1959 : Au fil de l'épée. 1961 : Le Meilleur Ennemi. 1964 : L'Affaire Winston. 1964 : Goldfinger.
1965 : The Party's Over. 1966 : Mes funérailles à Berlin. 1969 : La Bataille d'Angleterre. 1971 : Les diamants sont éternels. 1973 : Vivre et laisser mourir. 1974 : L'Homme au pistolet d'or. 1978 : L'Ouragan vient de Navarone. 1980 : Le miroir se brisa. 1982 : Meurtre au soleil. 1985 : Remo sans arme et dangereux. 1989 : Sauf votre respect.
Film culte des années 80 ayant bercé toute une génération, à l'instar du tout aussi fun et débridé Commando, Remo sans arme et dangereux est un divertissement d'action follement réjouissant sous l'impulsion épique d'un thème électro de Craig Safan et Tommy Shaw aussi inoubliable. Et ce en dépit de l'aspect totalement improbable de l'entrainement rigoureux de Rémo entamant une initiation héroïque avec une agilité surréaliste (il faut le voir esquiver les balles par la seule vélocité de son corps ainsi que la force de son esprit !). Officiellement décédé après une interpellation musclée avec des malfrats, le policier Samuel Makin est en fait le jouet d'une organisation secrète délibérée à l'exploiter pour nettoyer la ville des dirigeants les plus véreux, notamment ceux appartenant à une base militaire. Avec l'aide d'un vieux chinois et durant une longue épreuve de force aussi bien morale et physique, Samuel devient Remo auprès de l'enseignement d'une bravoure sans armes. Truffé d'humour voir d'hilarité (parfois involontaire quant au caractère "hénaurme" de certains exploits physiques - Chiun accourant sur l'eau d'un lac à grandes enjambées - !), de bonne humeur et de chaleur humaine autour de la relation amicale que se partagent progressivement Remo et son mentor, Maître Chiun, Remo s'extirpe du ridicule, aussi naïf soit son concept singulier (un super-héros sans panoplie se défendant à mains nues contre les balles ennemies !). Dénué d'une once de prétention et assumant pleinement le côté saugrenu de ces péripéties au sein d'un schéma narratif somme toute classique, Guy Hamilton parvient pour autant à rajeunir le genre académique en cette époque sacro-sainte des Eighties grâce à la générosité de son action tantôt inventive, tantôt vertigineuse.
A l'instar de certaines séquences de haute voltige (l'épreuve d'acrobatie sur la grande roue, l'affrontement musclé du haut de la statue de la liberté en rénovation - l'escalade sur le tronc d'arbre déplacé dans les airs par un câble porteur) provoquant la sensation d'ivresse ! Nous sommes d'autant plus impressionnés par l'habileté de la réalisation et du montage n'en faisant jamais trop (ou alors si peu !) pour épater la vue avec souci artisanal du détail technique. Bref, une époque révolue donc conçue sur l'authenticité de cascades impeccablement coordonnées si bien que l'ère numérique n'en n'était pas encore à sa prémices. Au-delà de l'aspect fun des moments d'entraînements à la fois cocasses et improbables, et du passage à l'acte belliqueux de Remo sur le terrain militaire, Rémo renchérit son charme en la présence d'un trio pétulant militant les valeurs d'amitié et d'amour (et ce en dépit du machisme badin de Chiun !). Fred Ward incarnant sans nul doute son rôle le plus sympathique à l'écran dans celui du (super) héros infaillible si bien que l'acteur au charisme viril compte sur la dérision et la bonhomie de sa posture surhumaine afin de se démarquer de l'orgueil. Dans celui du manager placide plein de sagesse et de bons préceptes, Joel Grey lui partage la vedette avec davantage de cocasserie puis l'empathie progressive qu'il cultive auprès de son comparse avec poignante dignité (notamment ce final où perce une émotion sensible quant à l'éventuel sort dramatique de Chiun ou de Remo !). Enfin, affublée d'une robe militaire longiligne, la charmante et si rare Kate Mulgrew se fond dans la peau d'un major avec une innocence et un naturel fondés sur la noblesse de sentiments aussi sincères qu'amoureux.
Inévitablement naïf et à la limite du grotesque lors de certaines séquences homériques hallucinées, Remo, sans arme et dangereux s'extirpe miraculeusement du ridicule, voir de la série Z de luxe, grâce à sa cocasserie en roue libre monopolisant tout le cheminement narratif, à ses péripéties davantage explosives si je me réfère à la touche guerrière de la dernière demi-heure (ajoutez notamment l'aspect dépaysant du vaste cadre forestier magnifiquement filmé) et surtout grâce à la camaraderie de l'attachant trio héroïque débordant de spontanéité et chaleur humaine (j'insiste encore là-dessus !) pour nous combler de béatitude communicative !
Dédicace à Olivier Hancart, Ludovic Hilde, Abdala Bouzebiba
Bruno Dussart
3èx
lundi 3 juillet 2017
GHOST STORY
"Histoire de fantômes" de Stephen Weeks. 1974. Angleterre. 1h27. Avec Murray Melvin, Larry Dann, Vivian MacKerrell, Marianne Faithfull, Barbara Shelley, Anthony Bate, Leigh Lawson...
Sortie salles France: 22 Septembre 1976. Angleterre: 19 Mars 1974
FILMOGRAPHIE: Stephen Weeks est un réalisateur, scénariste et producteur anglais né en 1948 à Hampshire. 1984: The Bengal Lancers! 1984: L'épée du vaillant. 1976: Scars (TV Movie documentary). 1974: Histoire de fantômes. 1973: Gawain and the Green Knight. 1971: I, Monster.
Il y a des raretés dont on ferait mieux de ne pas exhumer de l'oubli.
Eric Binford
vendredi 30 juin 2017
L'AMBULANCE
"The Ambulance" de Larry Cohen. 1990. U.S.A. 1h35. Avec Eric Roberts, James Earl Jones, Megan Gallagher, Red Buttons, Janine Turner, Eric Braeden, Richard Bright.
Sortie salles France: 5 Juin 1991. U.S: 29 Mars 1990
FILMOGRAPHIE: Larry Cohen est un réalisateur, producteur et scénariste américain né le 15 Juillet 1941. Il est le créateur de la célèbre série TV, Les Envahisseurs.
1972: Bone, 1973: Black Caesar, Hell Up in Harlem, 1974: Le Monstre est vivant, 1976: Meurtres sous contrôle, 1979: Les Monstres sont toujours vivants, 1982: Epouvante sur New-York, 1985: The Stuff, 1987: La Vengeance des Monstres, Les Enfants de Salem, 1990: l'Ambulance. 1995 Fausse identité (TV Movie) 1996: Original Gangstas. - Comme Producteur: Maniac Cop 1/2/3.
- Comme Scénariste: Cellular, Phone Game, 3 épisodes de Columbo.
Echec public aux States mais joli succès dans l'hexagone (notamment sous l'effigie de sa Vhs), l'Ambulance est une série B trépidante typiquement représentative de son auteur, l'illustre Larry Cohen. Créateur entre autre de la série Les Envahisseurs et de deux chefs-d'oeuvre du fantastique moderne, le Monstre est Vivant et Meurtres sous Contrôle. A partir d'un pitch aussi original que cocasse, l'Ambulance met en exergue une course-poursuite infernale entre un dessinateur de BD délibéré à appréhender une mafia médicale exerçant des trafics d'êtres humains afin de guérir les diabétiques. Dans le rôle (à contre-emploi) du méchant chirurgien, on est surpris de retrouver l'acteur Eric Braeden issue de la série TV Amour, gloire et beauté, se fondant ici dans la peau d'un savant fou moderne avec une dérision macabre gentiment convaincante. Et ce en dépit d'un cabotinage assumé que chaque acteur incarne avec aplomb enjoué afin d'accentuer le caractère débridé du contexte horrifique aussi bien singulier qu'improbable.
Bien conscient de ses facilités qu'il empreinte durant un cheminement narratif à la fois homérique et pittoresque, Larry Cohen ne prend jamais au sérieux son argument sardonique et privilégie l'énergie de sa mise en scène maîtrisant efficacement rebondissements et imprévus avec une générosité en roue libre. L'Ambulance alternant sans temps morts investigation policière infructueuse (les flics stéréotypés en prennent plein leur grade dans leur posture décervelée !) et survival urbain que notre héros (formidablement campé par la verve amicale du fringant Eric Roberts swinguant dans une "cool attitude" !) encourt à perdre haleine, notamment afin de retrouver saine et sauve une jeune inconnue rencontrée plus tôt dans le centre-ville. Outre les présences très attachantes de nos principaux protagonistes s'évertuant à courser les malfrats en blouse blanche, on est également ravi de retrouver une foule de seconds-couteaux bien connus des amateurs de B movies (James Earl Jones, Megan Gallagher, Red Buttons, Richard Bright, Nicholas Chinlund), sans compter quelques caméos inopinés (Stan Lee en personne et Lou Ferigno !) se prêtant au jeu du pastiche avec bonhomie.
Pur divertissement de samedi soir fertile en frénésie visuelle (photo saturée en sus !) sous l'impulsion excentrique de comédiens s'en donnant à coeur joie dans les outrances gestuelles et verbales si bien qu'on les croiraient sortis d'une bande-dessinée, l'Ambulance est le prototype par excellence de la série B galvanisante (aussi naïve soit-elle !) dans son concentré d'humour, d'actions et de cascades aussi bien funs que décomplexés ! A redécouvrir avec un réjouissant sourire d'ado !
Bruno Dussart
3èx
jeudi 29 juin 2017
OKJA
de Bong Joon-ho. 2017. Corée du Sud/U.S.A. 2h01. Avec Ahn Seo-hyeon, Tilda Swinton, Paul Dano, Jake Gyllenhaal, Byeon Hee-bong, Steven Yeun, Lily Collins
Diffusé sur Netflix en Corée du Sud, États-Unis et France : 28 juin 2017
FILMOGRAPHIE: Bong Joon-ho est un réalisateur et scénariste sud-coréen, né le 14 septembre 1969 à Séoul. 2000 : Barking Dog. 2003 : Memories of Murder. 2006 : The Host. 2009 : Mother. 2013 : Snowpiercer, le Transperceneige. 2017 : Okja.
Bouleversant témoignage contre l'exploitation et la barbarie animale sans misérabilisme et encore moins de complaisance (en dépit de certaines séquences difficiles, notamment son éprouvante dernière partie qui arrachera des larmes aux plus sensibles !), Okja a de quoi remuer les consciences auprès des carnivores, complices malgré eux d'une inépuisable souffrance animale instaurée au sein d'abattoirs insalubres souillés par les larmes et le sang des victimes innocentes qui ne demandaient qu'à vivre dans la quiétude. Poème familial pétri de tendresse et d'humanité lorsqu'une jeune coréenne s'éprend d'amour auprès de son animal de compagnie, en l'occurrence un cochon génétiquement modifié, Okja nous relate un périple haletant pour la survie lorsque ce dernier embrigadé de force chez une multinationale est prochainement contraint de finir dans les assiettes du consommateur dupé par une propagande fallacieuse.
Car dénonçant la cupidité et la corruption des lobbys et de l'agroalimentaire impliqués dans la pratique des OGM, Bong Joon-ho traduit son histoire avec pudeur (notamment sa première partie affichant avec poésie un panorama naturel idyllique) et pincée d'humour (l'incroyable course-poursuite perpétrée à travers ces centres commerciaux puis culminant sur l'autoroute !). Car dosant habilement, et avec brio technique bluffant de réalisme (notamment le design détaillée de la créature plus vraie que nature !) action inventive inscrite dans la fantaisie (les bravoures étant transfigurées avec l'hallucinante fluidité d'une caméra formaliste !) puis enchaînant doucement avec le drame et l'horreur, le réalisateur télescope les genres parmi l'efficacité d'un cheminement narratif à l'issue indécise. Certes un chouilla prévisible avouons-le mais pour autant truffé d'inventions (visuelles) et d'adrénaline lorsque des militants de la cause animale s'efforcent de prêter main forte à notre héroïne exploitée à des fins mercantiles face à une population ricaine lobotomisée par la pub. D'une riche intensité quant à sa douloureuse progression dramatique et le jeu profondément humble des protagonistes en quête désespérée de bravoures, Okja déploie une palette d'émotions lyriques derrière son manifeste pour le droit de vie animale lorsque ceux-ci sont envoyés dans des camps d'extermination après y avoir été maltraités en labo expérimental.
Un cri d'alarme contre la corruption agroalimentaire et la barbarie des abattoirs
Bruno Dussart.
Ci-joint la critique de Gilles Rolland : http://www.onrembobine.fr/critiques/critique-okja/
mercredi 28 juin 2017
Le Bazaar de l'Epouvante / Needful Things
de Fraser Clarke Heston. 1993. U.S.A. 2h01. Avec Ed Harris, Max von Sydow, Bonnie Bedelia, Amanda Plummer, J. T. Walsh, Ray McKinnon.
Sortie salles France: 13 Juillet 1994. U.S: 27 Août 1993
FILMOGRAPHIE: Fraser Clarke Heston est un réalisateur et scénariste américain, né le 12 février 1955 à Los Angeles. 1990 : L'Île au trésor (téléfilm). 1991 : Sherlock Holmes et la croix de sang (téléfilm). 1993 : Le Bazaar de l'épouvante. 1996 : Alaska. 2011 : The Search for Michael Rockefeller (documentaire).
Discrédité dès sa sortie, le Bazaar de l'épouvante est pourtant une bonne adaptation d'un roman de Stephen King au pitch aussi original qu'inquiétant. Son ambiance familiale régie autour d'une bourgade côtière et résidée par d'aimables habitants ne manque pas de charme avant que l'ambiance sécure ne bifurque de ton afin d'adopter une tournure cauchemardesque. Un récit latent efficacement mené et narré avec, en filigrane, une intelligente réflexion sur l'influence vampirique du Mal lorsqu'un antiquaire décide de semer le chaos parmi nous. Des citadins soudainement vindicatifs car victimes de préjugés et de défiance à accuser leur prochain faute d'avoir été aveuglés par la cupidité, la manipulation, le mensonge. Emaillé de séquences chocs parfois impressionnantes de par son réalisme acéré (l'agression à l'arme blanche entre les 2 voisines est étonnante de brutalité tranchée), le Bazaar de l'Epouvante est d'autant plus servi d'un cast indéfectible parmi lesquels Ed Harris, Max von Sydow, Bonnie Bedelia, Amanda Plummer s'affrontant avec une densité psychologique en perdition morale. Fraser Clarke Heston prenant son temps à développer leur profil pour mieux s'immerger dans leur tourments peu à peu vandales, bipolaires, meurtriers au sein d'une scénographie côtière avilie par une méchanceté couarde. Un excellent divertissement donc dont on parvient à facilement s'impliquer tant son suspense scrupuleusement planifié parvient à captiver sans faillir jusqu'aux explosions de violence sanglantes et incendiaires (au propre comme au figuré).
*Eric Binford.
16.04.25. 3èx
mardi 27 juin 2017
L'INVASION DES FEMMES ABEILLES
"The Invasion of the Bee Girls" de Denis Sanders. 1973. U.S.A. 1h26 (Uncut). Avec Cliff Osmond, Wright King, Ben Hammer, William Smith, Anita Ford, Victoria Vetri.
Sortie salles France: 1er Juin 1973
FILMOGRAPHIE: Denis Sanders est né le 21 Janvier 1929 à New York City, décédé le 10 Decembre 1987 à San Diego, California, USA. 1982: Computers Are People, Too! (TV Movie documentary). 1973 Invasion of the Bee Girls. 1971 The American West of John Ford (TV Movie documentary). 1971 Soul to Soul (Documentary). 1970 Elvis Show (Documentary). 1964 Shock Treatment. 1964 One Man's Way. 1962 La guerre est aussi une chasse. 1959 Crime & Punishment.
Drôle de curiosité indépendante que cette Invasion des femmes abeilles réalisée par Denis Sanders, spécialiste ricain de documentaires et séries TV ! Inédit en salles en France si je ne m'abuse et sorti il y a quelques années en Dvd chez Bach Films dans une édition somme toute passable (je vous recommande d'ailleurs de vous reporter vers la version HD 720 P dispo sur le blog Ciné-Bis-Art !), l'Invasion des femmes abeilles puise son charme par son irrépressible étrangeté émanant d'un cadre érotique teinté d'onirisme (la séquence raffinée du coït entre un sexagénaire et le Dr Harris) lorsqu'il ne s'agit pas de séquences chocs gentiment impressionnantes (le regard pénétrant des femmes abeilles aux yeux d'ébène, la métamorphose de l'une d'elles durant une expérimentation supervisée par Susan Harris !). Car ici point (ou si peu) d'effets-spéciaux visuels pour nous épater mais l'aura vénéneuse d'une ambiance fantasmatique plutôt insolite lorsque des femmes génétiquement modifiées s'entreprennent de séduire les mâles auprès d'ébats sexuels morbides Les victimes succombant à l'infarctus à la suite d'épuisement sexuel ! On peut d'ailleurs prêter une allusion à Frissons de Cronenberg pour son thème vénérien et l'intensité des ébats charnels appuyés d'une ambiance malsaine autrement sous-jacente !
Une séquence fort cocasse interviendra d'ailleurs un peu plus tard lorsque le maire de la ville annoncera à ses habitants d'interdire la copulation avec leur compagne lors d'un couvre-feu, quand bien même un des témoins de la salle protestera de vive voix (et avec fermeté !) d'imposer une décision aussi stupide et intolérante ! Durant ses meurtres à répétition, un inspecteur (campé par l'illustre William Smith - Le Riche et le Pauvre - New-York ne réponds plus -) s'efforce d'en élucider le mystère au moment même de s'éprendre d'une jeune assistante. Si l'intrigue minimaliste et nébuleuse s'avère plutôt tirée par les cheveux, et que la réalisation télévisuelle pêche d'un manque de maîtrise, Denis Sanders parvient toutefois à captiver et séduire grâce à l'aspect singulier de l'entreprise scientifique que dirige un défilé de jeunes mannequins étrangement sensuelles dans leur posture impassible ! Mention spéciale au charme indéfectible d'Anitra Ford crevant l'écran à chacune de ses apparitions félines ! D'autre part, on ne reste pas non plus insensible à la partition entêtante de l'illustre Charles Bernstein particulièrement inspiré par les sonorités Soul/Jazzy de Lalo Schifrin héritées de l'Inspecteur Harry. La photo colorée, contrastée et soignée rehaussant en prime l'aspect festif/bigarré/rétro d'une intrigue aussi déjantée dont quelques séquences indicibles marquent les esprits !
Jamais ennuyeux et plutôt amusant sous l'impulsion décomplexée d'un pitch aussi bien saugrenu que débridé, l'Invasion des femmes abeilles demeure une fort sympathique curiosité tirant parti de son charme au travers de curieuses séquences baroques (notamment cette rixe musclée entre l'inspecteur Agar et les violeurs de sa compagne) où science-fiction, érotisme et horreur s'entrecroisent de manière aléatoire !
Bruno Matéï
2èx
jeudi 22 juin 2017
FRANKENSTEIN CREA LA FEMME
"Frankenstein Created Woman" de Terence Fisher. 1967. 1h28. Angleterre. Avec Peter Cushing, Robert Morris, Susan Denberg, Thorley Walters, Barry Warren, Duncan Lamont.
Sortie salles France: 31 Octobre 1967. Angleterre: 18 Juin 1967
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Terence Fisher est un réalisateur britannique né le 23 février 1904 à Londres (Maida Vale), et décédé le 18 juin 1980 dans la même ville. 1957 : Frankenstein s'est échappé, 1958 : Le Cauchemar de Dracula , 1958 : La Revanche de Frankenstein , 1959 : Le Chien des Baskerville , 1959 : L'Homme qui trompait la mort , 1959 : La Malédiction des pharaons, 1960 : Le Serment de Robin des Bois , 1960 : Les Étrangleurs de Bombay, 1960 : Les Maîtresses de Dracula, 1960 : Les Deux Visages de Docteur Jekyll , 1961 : La Nuit du loup-garou, 1962 : Le Fantôme de l'Opéra , 1962 : Sherlock Holmes et le collier de la mort, 1963 : The Horror of It All, 1964 : La Gorgone , 1965 : The Earth Dies Screaming, 1966 : L'Île de la terreur , 1966 : Dracula, prince des ténèbres , 1967 : La Nuit de la grande chaleur , 1967 : Frankenstein créa la femme, 1968 : Les Vierges de Satan, 1969: Le Retour de Frankenstein, 1974 : Frankenstein et le monstre de l'enfer.
Quatrième volet de la saga Frankenstein que Terence Fisher reprend sous ses ailes après le sympathique essai de Freddie Francis, Frankenstein créa la femme serait l'un des épisodes les plus réussis et controversés selon l'éditeur Seven 7. Pour ma part, même si j'ai plus d'affection et de considération pour Frankenstein s'est échappé, la revanche de Frankenstein, le Retour de Frankenstein et Frankenstein et le monstre de l'enfer; Frankenstein créa la femme parvient sans peine à me fasciner pour m'immerger dans sa romance empoisonnée. De par la structure ciselée de son scénario original et la caractérisation de personnages infortunés (les amants) ou dépravés, tel ce trio d'aristocrates détestables auquel l'innocence en paiera le lourd tribut. Car prenant pour thèmes l'amour, la vengeance et la mort du point de vue d'amants d'outre-tombe, Terence Fisher en extirpe un jeu de séduction mortelle sous l'impulsion d'une Némésis étrangement séduisante et candide. Cette dernière n'étant que le jouet cérébral de son amant préalablement guillotiné pour un crime qu'il n'a pas commis.
Un peu plus tôt, Terence Fisher aura pris soin de nous familiariser avec l'étreinte amoureuse que se partagent secrètement l'assistant Hans et la serveuse Christina, du fait de son visage défiguré sur l'hémisphère gauche. Mais trois gentlemans sans vergogne et impudents vont littéralement faire voler en éclat leur liaison passionnelle avec une cruauté sournoise. Pendant ce temps, le baron et son adjoint Hertz mettent au point une nouvelle expérience de résurrection où l'âme pourrait voguer d'un corps à un autre ! Captivant et passionnant, Frankenstein créa la femme insuffle une belle intensité dramatique sous couvert d'une vendetta singulière inscrite dans le surnaturel, et ce en suggérant au possible les séquences-chocs avec dérision macabre. Quand bien même Terence Fisher privilégie l'audace d'inverser les codes par le biais d'une créature "féminine" nouvellement fringante car auparavant estropiée et vitriolée. Néanmoins complice car aussi inconsciemment avide de rancoeur punitive, cette dernière insuffle une inquiétante emprise sensuelle à travers sa devise criminelle de châtier non seulement les responsables de la condamnation de son compagnon mais aussi de son propre Spoiler ! suicide ! Fin du Spoil. Le baron et son adjoint adoptant pour le coup une posture de culpabilité si bien qu'ils vont tenter de réparer leur tort en tentant d'alpaguer Christina victime de dédoublement de personnalité. Cette idée astucieuse de lui draper juste après son décès une faste apparence dans un nouveau corps et de lui permettre d'accomplir une vengeance surnaturelle parmi une complicité spirituelle renforçant la nature insolite du mélo en berne.
Etrange, envoûtant, sensuel et cruel, Frankenstein créa la femme ne manque pas d'aura subtilement vénéneuse pour réactualiser la saga avec l'originalité d'un script assez audacieux (d'où son éventuelle controverse à sa sortie !) et l'inspiration de sa mise en scène estampillée Fisher brossant d'autant mieux sa distribution charismatique.
Dédicace à Eric Draven
Eric Binford.
2èc
mardi 20 juin 2017
L'Avion de l'Apocalypse / Incubo sulla città contaminata
d'Umberto Lenzi. 1980. Italie/Mexique/Espagne. 1h28. Avec Hugo Stiglitz, Laura Trotter, Mel Ferrer, Francisco Rabal, Maria Rosaria Omaggio.
Sortie le 11 Décembre 1980 en Italie, 23 Juin 1982 en France.
Version Française Censurée: 1h19, Version Italienne ou Anglaise: 1h28'10"
Interdit au moins de 18 ans lors de sa sortie en France.
FILMOGRAPHIE: Umberto Lenzi est un réalisateur et scénariste italien, né le 6 Aout 1931 à Massa Marittima, dans la province de Grosseto en Toscane (Italie). 1962: Le Triomphe de Robin des Bois, 1963: Maciste contre Zorro, Sandokan, le Tigre de Bornéo, 1964: Les Pirates de Malaisie, 1966: Kriminal, 1967: Les Chiens Verts du Désert, 1968: Gringo joue et gagne, 1969: La Légion des Damnés, Si douces, si perverses, 1970: Paranoia, 1972: Le Tueur à l'orchidée, 1972: Au pays de l'Exorcisme, 1973: La Guerre des Gangs, 1974: Spasmo, La Rançon de la Peur, 1975: Bracelets de Sang, 1976: Brigade Spéciale, Opération Casseurs, La Mort en Sursis, 1977: Le Cynique, l'infâme et le violent, 1978: Echec au gang, 1980: La Secte des Cannibales, l'Avion de l'Apocalypse, 1981: Cannibal Ferox, 1983: Iron Master, la guerre du fer, 1988: Nightmare Beach, la Maison du Cauchemar, 1991: Démons 3, 1996: Sarayevo inferno di fuoco.
Le pitch : à l’aéroport, un journaliste attend l’atterrissage d’un vol pour accueillir un professeur notable. Mais un autre appareil, non identifié, se pose, libérant une cohorte de monstres humains qui se jettent violemment sur les témoins médusés. Dans un déchaînement de violence barbare, ces derniers sont sauvagement massacrés et dévorés par ces créatures assoiffées de sang. L’invasion ne fait que commencer !
Sous couvert de message écolo dénonçant les dangers du nucléaire et la folie contagieuse de l’homme avide de progrès technologique, Lenzi tente de se démarquer de son comparse Fulci, notamment par la caractérisation de ses morts-vivants — ou plutôt de ses infectés, puisqu’aucun macchabée récalcitrant ne se relève vraiment. En l’occurrence, des passagers d’un avion clandestin sombrent dans une folie meurtrière, conséquence probable d’une défaillance radioactive de la centrale nucléaire voisine. Assoiffés de sang pour régénérer leur chair, ils commettent exactions sordides et sadisme sans limite. Le prologue, échevelé, évoque déjà une bande dessinée pour adultes : massacre dantesque à coups de mitraillettes, agressions à la hache, au couteau, à la serpe. Gros plans sur chairs éclatées ou striées, gorges tranchées, bras sectionnés, hurlements stridents de victimes livrées à ces ahuris sanguinaires aux trognes de pizza carbonisée (ah, c’te blague Carambar !). Quant au cheminement narratif en état d’urgence, il alterne opérations militaires musclées et échappée d’un journaliste frondeur, avec ce même souci du spectacle décérébré ô combien jouissif !
Warning ! Spoils en pagaille ! Sinon, passez à la conclusion.
L’aventure foutraque, effrontée par sa violence crapoteuse et saugrenue pour ses situations excentriques, demeure miraculeusement efficace grâce à son grain de folie vigoureux ! Massacre organisé sur un plateau télé puis dans un club de gym (avec, à l’appui, donzelles dévêtues — dont l’une verra son bout de sein saucissonné au couteau !), carnage improvisé en bloc opératoire (Rodriguez s’en souviendra pour Planet Terror), agressions récurrentes au cœur de foyers domestiques. Ces séquences nerveuses, habilement montées, sont rehaussées d’audacieuses dérives gores artisanales (du moins dans la version uncut), à l’instar d’une énucléation en gros plan ou d’un sein perforé au tisonnier — pompage évident chez Fulci ! Quelques imprévus égayent encore cette intrigue triviale mais saturée d’agressions cannibales : un couple réfugié à la campagne, deux jeunes femmes claustrées dans une cave (séquence d’angoisse palpable, écho cauchemardesque au carnage hospitalier). Et que dire de notre journaliste, incarné avec une mollesse culte par l’inexpressif Hugo Stiglitz (c’est pour ça qu’on l’adore !), tentant avec son épouse de fuir la ville assiégée pour se retrancher… sur le manège d’un luna-park ! Idée impromptue, cocasse : le couple doit grimper sur un grand huit pour échapper aux zombies cramponnés aux wagonnets. Quant à la conclusion dérisoire, nul n’a oublié sa fameuse supercherie : tout cela n’était qu’un affreux cauchemar que notre héros fantasmait en plein sommeil… à moins que ce ne fût une prescience, ou quand le cauchemar devient réalité. Ah ah ! Fin des spoils.
20.06.17 (5èx)
08.08.11
lundi 19 juin 2017
ON L'APPELLE JEEG ROBOT. Prix du Jury, Gerardmer 2017.
"Lo chiamavano Jeeg Robot" de Gabriele Mainetti. 2015. Italie. 1h57. Avec Claudio Santamaria,
Luca Marinelli, Ilenia Pastorelli, Stefano Ambrogi, Maurizio Tesei, Francesco Formichetti, Daniele Trombetti.
Sortie salles France: 3 Mai 2017. Italie: 25 Février 2016
FILMOGRAPHIE: Gabriele Mainetti est un réalisateur, acteur, compositeur et producteur de cinéma italien, né le 7 novembre 1976 à Rome. 2015 : On l'appelle Jeeg Robot
Précédé d'une réputation flatteuse dans les festivals où il fut projeté si bien qu'il remporta plusieurs récompenses (voir en fin d'article !), On l'appelle Jeeg Robot réinvente le film de super-héros avec subversion pour un genre si traditionnellement familier. Détournant les codes avec malice et provocation, Gabriele Mainetti conjugue efficacement action et romance sous l'impulsion de personnages superbement dessinés, et ce avec une dimension humaine bouleversante si je me réfère à sa magnifique histoire d'amour que se partage l'anti-héros avec une jeune déficiente. L'intrigue brossant une galerie d'antagonistes peu recommandables au sein d'une pègre sans vergogne assoiffée de haine et de vengeance. On peut d'ailleurs relever la nature brutale des règlements de compte ultra violents car s'avérant d'un réalisme assez cru pour choquer un public trop jeune. Mais grâce à cette violence plutôt malsaine, le film gagne en réalisme et intensité, notamment si je me réfère au sort des personnages les plus loyaux. Au coeur de leur conflit pour le pouvoir, un marginal solitaire, Enzo Ceccotti, tente tant bien que mal de survivre en perpétrant quelques larcins. Mais sa vie va pour autant basculer sur le trajet d'une course poursuite lorsqu'il plongera dans les eaux d'un canal renfermant des fûts toxiques. Depuis, il détient une force physique surhumaine au moment même de se lier d'amitié auprès de la fragile Alessia !
Quelle bouffée d'air frais que de savourer un film de super-héros aussi hétérodoxe au sein d'un genre conventionnel usé jusqu'à la corde ! D'un charisme ordinaire, les malfrats qu'on nous décrit sans fard (à l'exception du narcissique "le gitan" !) insufflent d'autre part de la vigueur dans leur gueule plus vraie que nature évoluant au sein de la banalité d'un quotidien urbain livré en prime au terrorisme. Quant bien même notre super-héros génialement incarné par le renfrogné Claudio Santamaria ne correspond nullement à l'archétype du genre dans son jeu d'expressions ordinaires, à l'instar de son apparence lambda dénuée de combinaison flashy. Ce dernier, solitaire, paumé, introverti, placide et individualiste, résidant dans un appartement précaire avec comme seul refuge le visionnage de films pornos et la consommation de crème dessert. Par le biais de son profil à la fois évasif et contrarié, On l'appelle Jeeg Robot en extrait une forme d'hymne aux laissés-pour-compte sous le pilier d'une romance candide qu'il va partager avec une jeune fille autrefois abusée. Enzo, de prime abord peu enclin à protéger les autres et sauver l'humanité, apprenant à côtoyer l'amour, la loyauté et l'héroïsme d'une noble cause lors d'un éveil de conscience dont la vengeance confirmera son désir de modifier sa voie. Ce qui converge à un affrontement au sommet entre lui et le gitan (quel olibrius à l'expression faciale outrancière !) afin de déjouer un attentat dans un stade de foot. Là encore, si les scènes d'action sont jouissives et spectaculaires, Gabriele Mainetti n'abuse pas pour autant de surenchère pour nous combler afin de préserver aussi une forme de réalisme chez ses super-héros sans panoplie.
Captivant et passionnant grâce à l'habileté de son ossature narrative tributaire du cheminement des personnages, On l'appelle Jeeg Robot parvient sans esbroufe à rendre plausible l'improbabilité du "super-héros" nanti de supers pouvoirs comme le fut autrefois Superman de Donner si je peux me permettre cette allusion (mélancolique). Car le film ayant parvenu avec vibrante émotion (et sans naïveté !) à m'évader et me bouleverser sous le vernis d'une intensité dramatique imputée au caractère pur, authentique d'une love story que je ne suis pas prêt d'oublier. On est d'autant plus surpris de s'attacher à cet anti-héros anti système et de constater son évolution, sa chaleur humaine pour le vénérer ensuite avec dignité comme le souligne son plan final aussi révélateur que rédempteur. Du vrai et beau cinéma avec un coeur qui bat sous couvert d'hommage touchant au manga (rétro) des années 80 (une frange du public français se remémorera Goldorak avec nostalgie !)
Bruno Dussart.
Récompenses: David di Donatello:
David di Donatello du meilleur réalisateur débutant (Gabriele Mainetti)
David di Donatello du meilleur producteur (Gabriele Mainetti)
David di Donatello du meilleur acteur (Claudio Santamaria)
David di Donatello de la meilleure actrice (Ilenia Pastorelli)
David di Donatello du meilleur acteur dans un second rôle (Luca Marinelli)
David di Donatello de la meilleure actrice dans un second rôle (Antonia Truppo)
David di Donatello du meilleur monteur (Andrea Maguolo)
Bari International Film Festival :
Prix Ettore Scola du meilleur réalisateur débutant
8½ Festa do Cinema Italiano de Lisboa :
Prix de la critique du meilleur film
Prix du public du meilleur film
Festival du film fantastique d'Amsterdam :
Silver Scream Award
Festival du film italien de Villerupt (2016)
Amilcar du jury
Festival International du film fantastique de Gérardmer (2017)
Prix du jury (ex-æquo)
vendredi 16 juin 2017
LOVE HUNTERS
"Hounds of Love" de Ben Young. 2016. Australie. 1h48. Avec Ashleigh Cummings, Emma Booth, Stephen Curry, Susie Porter, Damian de Montemas, Harrison Gilbertson.
Sortie salles France: 12 Juillet 2017. U.S: 11 Mars 2017. Australie: 1er Juin 2017
FILMOGRAPHIE: Ben Young est un réalisateur, acteur et scénariste australien.
2016: Love Hunters.
Quel Trip d'avoir assisté à un thriller horrifique si maîtrisé, aussi diablement intense qu'implacable, surtout venant d'un cinéaste néophyte puisqu'il s'agit de son premier long-métrage ! Sur le papier, Love Hunters avait de quoi laisser dubitatif par son impression de déjà vu déjà 1000 fois traités à l'écran avec plus ou moins de bonheur. Une jeune fille tombant dans les mailles du filet d'un couple de serial-killers experts dans l'art de kidnapper les fugueuses indociles pour les séquestrer dans leur cocon conjugal. Seulement ici, l'australien Ben Young impose sa patte personnelle à travers une réalisation aussi inspirée que stylisée (notamment cette bande-son monocorde, tel un battement de coeur irrégulier, parvenant à nous hypnotiser par son intensité auditive), quand bien même sa distribution au physique "ordinaire" parvient remarquablement à apporter un cachet d'authenticité. Aussi bien les rôles principaux (le couple et leur victime) que les seconds-rôles (la famille de la disparue et la police locale). Outre sa facture visuelle particulièrement soignée et non exempt d'expérimentation (ses longs plans filmés au ralenti pour imprimer la banalité d'un quotidien étrangement serein), Love Hunters bénéficie en prime de rebondissements particulièrement inventifs (la tentative d'évasion dans la salle de bain puis un peu plus tard celle du viol, les rapports tendus avec un voisin, l'intimidation d'un dealer) afin de surprendre le spectateur trop habitué aux codes éculés du genre.
Sur ce point, Love Hunters ne ressemble d'ailleurs à rien de connu à peu de choses près si bien que le réalisateur s'attache à nous brosser scrupuleusement, et au travers d'un climat aussi bien austère que feutré, le portrait d'un couple de tueurs dans leur stricte intimité. Entre étreinte amoureuse, jalousie rivale et goût pervers pour une sexualité morbide. Car au centre de leur relation passionnelle, leur nouvelle victime va malgré elle devenir un élément perturbateur si bien que l'époux assez sournois et manipulateur auprès de sa muse semble lui éprouver un soupçon de sentiments. C'est au fil de cette dissension conjugale que Love Hunter gagne en tension et dramaturgie sous l'impulsion d'un suspense émoulu que nous endurons sans pouvoir deviner l'évolution de cette guerre des sexes. Un spectateur attentif car totalement impliqué dans l'action, partagé entre contrariété, appréhension, empathie puis terreur pour la destinée de la victime dont on ne saurait présager un heureux dénouement. Quant à cette terreur psychologique que nous éprouvons pour sa condition de vie miséreuse, entre sévices sexuels et détérioration corporelle, Ben Young privilégie toujours le hors-champs (en dehors d'une seule séquence sanglante particulièrement crue lors de son point d'orgue) afin de ne pas sombrer dans la complaisance que nombre de cinéastes ont tendance à abuser pour choquer le plus facilement. Le jeu expressif et viscéral de la victime en déliquescence morale (Meilleure Actrice pour Ashleigh Cummings au Fedeora Award !) instaurant en prime un sentiment de désespoir qui ira crescendo jusqu'à sa dernière partie tendue comme un arc, et à nouveau imprévisible quant à l'intervention de nouveaux personnages et l'éventuelle issue dramatique. A ce titre, sa conclusion plutôt bouleversante insuffle une émotion candide au rythme d'une illustre chanson pop toute aussi gracile.
Mother and child.
Constamment tendu et désespéré, psychologiquement fouillé (et inopiné) quant aux rapports de force que s'improvise le trio conjugal (notamment la caractérisation fébrile de l'épouse en requête impossible de maternité !), Love Hunters créé la surprise avec une maîtrise, une intelligence et un réalisme cauchemardesque peu commun si bien que l'horreur des situations perpétuellement suggérée ne nous empêche pas de plonger avec effroi dans une descente aux enfers exiguë. Ajoutez à cela la singularité d'une ambiance lourde oppressante parfois désamorcée de tubes pop mélancoliques où perce une émotion fragile et vous obtenez une perle du psycho-killer (indépendant) à découvrir d'urgence ! En attendant le nouveau projet de ce réalisateur fort prometteur car pétri d'ambition, de foi et d'intégrité dans son amour pour le genre !
Dédicace à Cid Orlandu
Bruno Matéï