lundi 29 décembre 2025

Les 101 Dalmatiens

                   (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

Quand j’ai revu Les 101 Dalmatiens hier soir pour la seconde fois uniquement, j’ai été saisi par cet enchantement permanent, seconde après seconde. La magie de Disney est imprimée dans la pellicule comme jamais. À tel point que je considère ce film comme l’un des plus grands chefs-d’œuvre de Walt Disney. Tout y transpire une évidence lumineuse : l’humour badin, omniprésent, la poésie, le pouvoir d’enchantement irrésistible suscité par ces chiots dalmatiens terriblement expressifs, mais aussi par leurs propriétaires, ce couple profondément humain, tendre et sincère, militant pour la cause animale avec amour indéfectible.

J’aime également beaucoup, en filigrane, cette forme de plaidoirie contre la fourrure animale, incarnée par l’une des plus grandes méchantes de l’histoire de Disney : Cruella, toujours drapée dans son manteau de fourrure, silhouette glaciale et obsessionnelle à la limite d'une figure horrifique. Le film ne moralise jamais frontalement, mais son message s’impose avec une clarté redoutable.

L’implication émotionnelle est totale, notamment dans les séquences d’action. La poursuite finale en voiture est d’une folie extravagante, presque démente, comme rarement dans un film d’animation Disney. On est happé, impressionné, littéralement emporté. Certes, l’histoire reste assez simple - deux malfaiteurs, magnifiquement dessinés, dérobent les quinze chiots pour le compte de Cruella - mais cette simplicité devient une force émotionnelle. Le récit avance avec une efficacité implacable, les rebondissements surgissent de manière quasi métronomique, toujours au bon moment, dans la juste mesure de ne pas épater la galerie.

J’ai aussi adoré ce détail cocasse et délicieux : les chiots sont de véritables cinéphiles. Ils regardent à la télévision des films animaliers, et cette mise en abyme, à la fois drôle, tendre et poétique, m’a profondément touché.

Et que dire de plus, si ce n’est que la magie Disney transparaît à chaque plan. Les 101 Dalmatiens est d’ailleurs le premier film à avoir utilisé la xérographie en animation, un procédé d’impression issu de la photocopie et de l’impression laser. Sans cette technique, le film n’aurait tout simplement jamais pu exister, tant le nombre de chiens à animer était colossal. À l’écran, cette profusion est impressionnante : d’abord quinze, puis peu à peu, jusqu’à ce chiffre mythique de cent un. Une idée aussi folle que génialement justifiée.

Un pur chef-d’œuvre de Walt Disney donc, traversé d'une émotion candide et pure, exaltante, loufoque, profondément épanouissante - un divertissement bienveillant qui continue de battre comme un cœur vivant, intact, éternel près de 70 ans après sa sortie.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

samedi 27 décembre 2025

Le choc des Titans / Clash of the Titans de Louis Leterrier. 2010. U.S.A/Angleterre/Australie. 1h46.

                                                      
                      (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)
 
Le Choc des Titans : quand le regard se fait plus noble que le jugement.
 
Lorsque Le Choc des Titans de Louis Leterrier est sorti en 2010, j’avais été profondément déçu au point de sortir de la projo en mode "déprime". Le spectacle promis ne m’avait pas du tout emballé. Pire : je l’avais rejeté, violemment. Quinze ans plus tard, je décide de le revoir en cette période féérique de Noël. Et je me prends une claque. Visuelle. Émotionnelle.
 
 
Alors, qu’est-ce qui a changé depuis 15 ans ? Peut-être suis-je devenu moins puriste, moins passéiste et que j'étais devenu un vieux con après tout, persuadé du "c'était mieux avant". Peut-être ai-je abandonné une part d’orgueil. Mais surtout, j’en suis persuadé: j’accepte aujourd’hui bien mieux les effets spéciaux numériques. Là où autrefois je résistais, je boudais, je digérais mal, je refusais presque par principe cette perfection artificielle, imberbe, je me laisse désormais porter. Et hier soir, devant Le Choc des Titans, j’ai retrouvé mes douze ans. Miracle ! Littéralement. J’ai regardé le film avec des yeux d’enfant. Et ça c’est quelque chose de rare, de précieux au cinéma. Si je l’avais découvert à cet âge-là, il aurait sans doute été l’un de mes plus grands spectacles d’enfance. Or, c'est justement ce que j'avais ressenti avec son modèle initial lors de ma location VHS
 
 
Soyons clairs : ce n’est pas un chef-d’œuvre, loin s'en faut. C’est un pur divertissement, bâti avant tout sur l’action, l'aventure humaine et les créatures fantastiques. Mais sa durée ramassée - 1h36 sans le générique de 10' - prouve que Leterrier va droit à l’essentiel. Le scénario, sans surprise, reprend le schéma du film de Desmond Davis. Pourtant, le récit reste agréable à suivre, jamais ennuyeux, séduisant même (sous l'impulsion de la déesse Io élégamment interprétée par Gemma Arterton), attachant. Le film dégage un charme, une vraie sympathie, portée par un casting solide : Liam Neeson, Ralph Fiennes en Dieux combattifs, Sam Worthington, convaincant dans son regard habité de demi-dieu malgré une interprétation sans légende, Gemma Arterton touchante donc, Mads Mikkelsen remarquable de sobriété dans la retenue et la sagesse, Jason Flemyng en démon maudit détestable, et d’autres encore, tous investis, honnêtes.
 
 
Mais ce que l’on retient avant tout, c’est l’aspect visuel enveloppant. Remarquable. Les décors sont somptueux, et oui, j’insiste : les effets numériques sont formidables. Chaque scène d’action est lisible surtout, claire, efficace, intense, épique. Leterrier ne confond jamais vitesse et précipitation. On en prend plein la vue : l’attaque des scorpions très efficace, la séquence de la Gorgone - vénéneuse, tendue, spectaculaire, horrifique presque-, et bien sûr l’affrontement final avec le Kraken, absolument monstrueux, à nous clouer au siège dans sa formulation de péplum catastrophiste. Le rythme est métronomique, l’ennui impossible. La musique orchestrale de Ramin Djawadi, tantôt épique, tantôt lyrique, renforce encore ce sentiment d’émerveillement autrement percutant que son modèle.
 
 
Évidemment, cela ne remplace pas le classique de 1981 dans toutes les mémoires de la génération 80, plus féerique, plus innocent, plus poétique, plus émotionnel aussi. Mais le Choc des Titans de Louis Leterrier reste un formidable divertissement d’action, une série B de luxe du samedi soir, généreuse, directe, spectaculaire, impliquée. Un spectacle dépaysant qui assume ce qu’il est et qui, aujourd’hui, m’a offert bien plus que je ne l’imaginais. Et pour cela, on ne peut que saluer le travail du cinéaste français qui fut d'ailleurs récompensé par un succès public (1 876 286 entrées chez nous). 
 
Pensée particulière à Kévin Beluche 😉
 
— le cinéphile du cœur noir 🖤
2èx. 4K. Vost 

Box Office France: 1 876 286 entrées 

mercredi 24 décembre 2025

Top 10 – 2025 : quand l’horreur retrouve le souffle des années 80.

Des films hantés par le corps, le deuil, la mémoire, la technologie et la fin de l’innocence.

Top 1 ex-aecquo:  

                          
 
 Top 2 ex-aecquo: 
 

         
 
 Top 3:           

  En vrac: 
 
 

 

                                     Bonus :

     

                  

                                                           

    

Le Puits et le Pendule / The Pit and the Pendulum de Stuart Gordon. 1991. U.S.A/Italie. 1h37.

                      (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

Le Puits et le Pendule est un film un peu oublié, à tort, dans la filmographie du petit maître - ou plutôt de l’artisan - du fantastique qu’est Stuart Gordon. Car il s’agit là d’un solide divertissement horrifique, qui parvient à conjuguer un certain réalisme historique avec un grand-guignol rarement complaisant dans ses séquences de torture. Le film rend d’ailleurs un hommage appuyé à La Marque du Diable, à Le Grand Inquisiteur et consorts, en s’inscrivant pleinement dans cette tradition d’un cinéma cruel mais lucide.

C’est une série B à la production modeste, au budget clairement limité, et pourtant Stuart Gordon s’exécute avec une honnêteté et une rigueur assez remarquables. La reconstitution historique, bien que contrainte, demeure crédible. Oui, les décors manquent parfois d’ampleur, mais on croit à ce que l’on voit, notamment grâce à l’investissement et à la conviction des acteurs, qui portent le film à bout de bras.
 

Sur ce point précis, il est impératif de saluer l’interprétation féminine de Rona De Ricci, absolument remarquable dans le rôle de Maria. Elle est d’une expressivité saisissante, capable d’incarner la peur, la contrainte, mais aussi l’espoir et l’amour pour son compagnon emprisonné. Elle soulève le récit sur ses épaules avec une grâce aussi surprenante qu’inattendue, et lui confère une véritable colonne émotionnelle.

Du côté du mal, la présence de Lance Henriksen s’impose avec évidence dans le rôle de l’inquisiteur. Son personnage, à la psychologie ambiguë et profondément torturée, est rongé par un amour refoulé pour Maria, mêlé à des pulsions sadomasochistes et à une perversion totale, dissimulées derrière la soutane et l’autorité religieuse. Une figure de monstre humain, gangrenée par le pouvoir et le fanatisme.
 

Évidemment, le film égratigne avec efficacité cet obscurantisme religieux, au fil d’un récit alternant romance impossible, vengeance et tentatives d’évasion - avec même une pointe de surnaturel ironique - au cœur du château-géôle de l’inquisiteur Torquemada. Au-delà de La Marque du Diable, Le Puits et le Pendule convoque aussi l’ombre de Les Diables de Ken Russell - jusqu’au souvenir d’Oliver Reed à nouveau présent en pape avec une dérision sardonique - et rend un hommage final à la version de Roger Corman lors d’un final haletant, machiavélique et spectaculaire.

Certes, ce dernier n’est pas exempt de quelques facilités, notamment dans la manière dont l’une des victimes parvient à se libérer de ses chaînes et à combattre ses ennemis. Mais la conclusion balaie ces menus défauts par une rupture de ton presque féerique, inattendue, apaisante, et pourtant jamais ridicule. Un final bienveillant, surprenant, qui laisse une impression durable.
 

Ce qui prouve, une fois encore, que Le Puits et le Pendule - coproduction italo-américaine - est un très bon divertissement horrifique, désireux autant de choquer que de réfléchir. Un film qui n’exploite jamais la torture de manière gratuite, et qui interroge frontalement la barbarie, la perversité et le sadisme d’inquisiteurs et de leurs sbires, infligeant à de pauvres femmes innocentes des supplices séculaires innommables.
 
— le cinéphile du cœur noir 🖤 
11.03.15. 23.12.25. 
3èx. Vost 

mardi 23 décembre 2025

Outlander: Blood of my Blood de Jamie Payne, Azhur Saleem, Emer Conroy et Matthew Moore. 2025. U.S.A.

                                                         
                              (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)
 
"Le battement avant le mythe."
 
J’ai hésité, j’avais peur. Je n’aurais pas misé un clopé sur la résurrection d’un succès déjà légendaire, menacé par le spectre de la redite.

Et pourtant, cette première saison préquelle s’avère formidablement réjouissante - une sorte de miracle inespéré, rendant dignement honneur à son aîné sans jamais le singer. 
 
Elle impose promptement sa propre personnalité, grâce à la sobriété de ses acteurs et à la solidité d’un récit tissé de digressions. On y retrouve les mêmes ingrédients, ce même savant dosage des genres disparates, mais avec un charme et une sincérité renouvelés.
 

Car oui, Outlander est bel et bien un phénomène de société, puisqu'elle a influencé la culture populaire, le tourisme et la représentation du féminin. Le gouvernement écossais a d’ailleurs salué l’effet positif de la série sur le rayonnement culturel du pays. 

Elle a rassemblé une communauté mondiale autour de valeurs émotionnelles et historiques fortes. Elle réussi à faire dialoguer le passé et le présent à travers le prisme du désir, du courage, de l'espoir et du temps.

Elle est parvenue à rassembler les amateurs d’histoire et de reconstitution, les spectateurs attirés par la passion amoureuse et le romanesque, les fans de récits épiques et de voyages dans le temps.

Outlander: ce sang qui lie les amants au-delà de l'éternité, entre le coeur et la lignée, qui fait chavirer nos coeurs, ad vitam aeternam.
 

Pour preuve, les Récompenses coulent également à flot : 
    Critics' Choice Television Awards 2014 : Nouvelle série la plus attendue
    People's Choice Awards 2015 : Série de science-fiction ou fantastique du câble préférée
    Saturn Awards 2015 : Meilleure actrice de télévision pour Caitriona Balfe
    Critics' Choice Movie Awards 2016 : Binge watching série
    Women's Image Network Awards 2016 :
        Série dramatique
        Actrice dans une série dramatique pour Caitriona Balfe
        Épisode écrit par une femme : Toni Graphia pour The Devil's Mark
    People's Choice Awards 2016 :
        Série de science-fiction ou fantastique du câble préférée
        Actrice de science-fiction ou fantastique préférée pour Caitriona Balfe
    Costume Designers Guild Awards 2016 : Terry Dresbach
    Saturn Awards 2016 :
        Saturn Award de la meilleure série fantastique
        Meilleure actrice de télévision pour Caitriona Balfe
    BAFTA Scotland 2016 : Meilleure actrice de télévision pour Caitriona Balfe
    Scottish Gaelic Awards (en) 2016 : Meilleure contribution internationale pour Àdhamh Ó Broin, consultant en gaélique
 
   
  Hollywood Professional Association Awards 2016 (en) : Meilleur son pour l'épisode Prestonpans (Nello Torri, Alan Decker, Brian Milliken, Vince Balunas)
    Critics' Choice Movie Awards 2016 : Binge watching série
    Satellite Awards 2017 :
        Meilleure série télévisée de genre
        Meilleure distribution[89]
        Outstanding Blu-ray
    Oscar Wilde Awards 2017 : Caitriona Balfe
    People's Choice Awards 2017 :
        Meilleure série
        Meilleure série SF/Fantastique sur une chaîne premium
        Meilleur acteur dans une série SF/Fantastique pour Sam Heughan
        Meilleure actrice dans une série SF/Fantastique pour Caitriona Balfe
    Women's Image Network Awards 2017 : Série dramatique
    Saturn Awards 2017 : Saturn Award de la meilleure série fantastique
    Saturn Awards 2018 : Saturn Award de la meilleure série fantastique
    Saturn Awards 2019 : Saturn Award du meilleur acteur de télévision pour Sam Heughan
    Saturn Awards 2021 : Saturn Award de la meilleure actrice de télévision pour Caitriona Balfe

lundi 22 décembre 2025

Dumbo de Ben Sharpsteen. 1941. 1h04. U.S.A.

                     (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

Dumbo est un chef-d’œuvre absolu, comme Walt Disney savait en offrir avec une désarmante évidence. Un film qui milite, avec une douceur trompeuse, pour le droit à la différence, l'affirmation de soi (or, Dumbo ne prononce pas un mot !) et qui délivre aussi un véritable message d’utilité publique sur l’exploitation des animaux dans les cirques. Dès ses premières minutes, le film montre ces éléphants contraints à exécuter des numéros de clowns dangereux, humiliants, sous le regard amusé des hommes. Une cruauté ordinaire, silencieuse, dérangeante.

Et pourtant, Dumbo déborde de fantaisie, d’humour et d’invention. La galerie de personnages extravagants illumine le récit, et surtout cette petite souris, fidèle et malicieuse, meilleur ami de Dumbo, qui ne cesse de l’accompagner, de le guider, de l’aider à grandir. Elle devient le moteur de son initiation, la voix qui lui apprend à croire, à se redresser, puis à voler.


Le film est d’une poésie folle, parfois même délicieusement délirante, notamment lors de cette séquence hallucinée où l’alcool ouvre les portes d’un cauchemar baroque, peuplé d’éléphants roses et de visions surréalistes. Les chansons, entraînantes et joyeuses, insufflent une énergie communicative, une légèreté qui masque à peine la mélancolie du fond.

Visuellement, le film est d’une grande ambition cinématographique. Tout est soigné, précis, inventif, et l’on sent à chaque plan l’amour porté à cette histoire touchante d’un éléphanteau condamné à la solitude après avoir été séparé de sa mère. Mais Walt Disney ne sombre jamais dans le pathos : l’humour, la tendresse et l’expressivité des personnages désamorcent la tristesse sans l’effacer.


Des décennies plus tard, Dumbo n’a pas pris une ride. Il conserve intact son pouvoir d’enchantement, sa poésie parfois baroque, parfois extravagante, et demeure l’un des sommets les plus émouvants du cinéma d’animation. Un film simple en apparence, mais profondément humain, qui continue de toucher droit au cœur.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

dimanche 21 décembre 2025

Borsalino and co de Jacques Deray. 1974. 1h50. France/Italie/Allemagne.

                  (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

Réalisé par Jacques Deray quatre ans après Borsalino, cette séquelle reste à mes yeux injustement sous-estimée, et pourtant supérieure à son modèle. Les critiques de l’époque s’y sont trompées selon moi, sans doute trop heurtées par sa violence putassière, le public aussi, puisque le film ne rassemble que 1 698 380 entrées, loin derrière les 4 710 380 du premier. Et pourtant.

Je lui préfère son élégance crépusculaire, sa photographie somptueuse, magnifiée par la restauration Pathé de 2013, absolument superbe en Blu-ray. Tout y est plus sombre, plus grave, plus contracté, plus intense. L’ironie et l’insouciance ont disparu. Ici, la violence s’expose sans fard : plus réaliste, plus frontale, plus brutale, souvent même spectaculaire. Un monde qui ne joue plus, qui frappe tous azimuts. 


Les décors, fastueux, luxueux, nous plongent pleinement dans les années 30, avec une modernité visuelle absente du premier film. Ils respirent, imposent leur présence, deviennent presque des personnages secondaires tant Jacques Deray les filme avec amour et précision. Chaque rue, chaque façade semble chargée de mémoire, de vie citadine et de menace.

Alain Delon, hiératique, souverain, est impressionnant de bout en bout. On est avec lui, dans sa peau, dans cette posture de chef désormais seul, ambigu, peu recommandable. Le scénario est classique, prévisible, certes, mais on ne s’ennuie jamais. La vengeance de Roch - que Delon endosse avec son costume snob comme une seconde peau - se déploie avec une efficacité implacable. Ce film de gangsters prend alors des allures de western urbain, tendu par la vengeance et la fatalité. Avec toutefois un soupçon de romance murmurée par la ravissante Catherine Rouvel dans sa pudeur réservée. 


(Toujours) Porté par la musique entêtante de Claude Bolling, même si beaucoup plus discrète, Borsalino & Co. est un film de gangsters comme on n’en fait plus. Des décennies plus tard, cette coproduction franco-italo-allemande demeure un divertissement adulte, stylisé, raffiné, élégamment cruel, d’une violence sèche et souvent spectaculaire. Une époque révolue au demeurant.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

lundi 15 décembre 2025

L'Elue / Keeper de Osgood Perkins. 2025. U.S.A. 1h38.

                        (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

A l'instar de modestes péloches des années 80, L’Élue est une sympathique série B horrifique - et même une bonne - solidement ancrée dans le sous-genre du folk horror. Un véritable film d’ambiance, qui prend le temps, je l'admets. Beaucoup de temps. Sa première heure s’attache presque exclusivement à l’installation d’un climat inquiet, feutré, interrogatif, fondé sur l’attente et le regard d’un personnage féminin que l'actrice Tatiana Maslany porte à bout de bras. Comme elle, on observe, on doute, on s’interroge, on hallucine : que se trame-t-il réellement dans cette cabane confinée, perdue au cœur de bois silencieux et opaques ?

Visuellement, le film est soigné, parfois même onirique, avec une esthétique travaillée qui enveloppe cette lente montée de l’angoisse. L’atmosphère anxiogène, mystérieuse, sourdine, fonctionne indéniablement, même si l’on n’adhère pas totalement à l’interrogation morale qui occupe la protagoniste durant plus d’une heure. Pourtant, la tension demeure, diffuse mais tenace, nourrie par l’attente de la révélation. C'est captivant dans une juste mesure.


Or, L’Élue trouve sa vraie réussite dans sa dernière demi-heure, absolument réjouissante dans sa manière d’effrayer à point nommé. Perkins y lâche enfin les chevaux, offrant des visions horrifiques inédites, dérangeantes, profondément malaisantes. On perd pied avec fascination capiteuse mêlée de répulsion malsaine. Les créatures marquent, troublent, agressent les sens par leur étrangeté même, et les scènes chocs fonctionnent précisément parce qu’elles restent aussi singulières. L’angoisse et la terreur montent alors crescendo, jusqu’à une ultime image à l’ironie morbide, grinçante, qui imprime la rétine, à l'envers.

Bien plus fréquentable que l’incident de parcours, The Monkey, L’Élue ne mérite ni le discrédit ni le mépris qu’une partie de la critique et du public lui ont réservés. En dépit d’avis divisés, il s’agit d’une vraie série B cérébrale, atmosphérique, imparfaite mais habitée, avec laquelle on passe, indéniablement, un bon moment. L'inverse du produit standard vite vu vite oublié.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

Blanche Neige et les 7 nains / Snow White and the Seven Dwarfs de William Cottrell, David Hand, Wilfred Jackson. 1937. U.S.A. 1h23.

                      (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)

Blanche-Neige et les Sept Nains est un chef-d’œuvre absolu de l’histoire du cinéma. Le rappeler n’a rien d’un réflexe nostalgique, mais d’une évidence. Premier long-métrage d’animation des studios Disney, le film, réalisé par David Hand, sort le 21 décembre 1937 et rencontre un succès tout simplement monstrueux. Son budget de 1,48 million de dollars - un record pour l’époque - accompagne une prouesse technique alors inédite, vertigineuse.

Mais ce qui frappe aujourd’hui, lorsque l’on redécouvre ce film fabuleux, c’est son âge : près de 90 ans ! Les bras m'en tombent. Et pourtant, son pouvoir d’enchantement demeure intact, du premier au dernier plan. Un enchantement nourri par une splendeur visuelle colorée, singulière, parfois même exceptionnelle, mais aussi par des personnages immédiatement attachants - Blanche-Neige, bien sûr, et les Nains, inoubliables. L’humour, distillé avec une douceur constante, irrigue tout le métrage, porté par une inventivité technique, narrative et visuelle proprement sidérante.


Et puis il y a la grâce. Celle de Blanche-Neige, qui irradie chaque image, chaque geste, chaque chanson fredonnée comme une promesse d’innocence éternelle. Il y a aussi les chants des Nains, surgissant avec spontanéité, fringance et bienveillance, comme une célébration simple de la vie. Blanche-Neige et les Sept Nains est un film habité, traversé de part en part par la féerie chère au studio Disney.

Et cette prétendue niaiserie dont certains ont pu accuser le film se voit ici transcendée - totalement transcendée - par le pouvoir d’enchantement qui émane de l’expressivité des personnages et par la formalité de ces dessins plus vrais que nature. Dès lors, ressentir, près de 90 ans plus tard, des émotions aussi galvanisantes et épanouissantes tient du prodige : un prodige cinématographique que ni le temps, ni son passage, ne sont parvenus à réprimer.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

dimanche 14 décembre 2025

Running Man d'Edgar Wright. 2025. U.S.A. 2h16 (2h08).

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Running Man (2025) - La série B crépusculaire qui ressuscite l’âme de l’action 80s.

Running Man fait peau neuve en son écrin de film d’action à l’ancienne, au point qu’on a parfois l’impression de savourer une pure production des années 80. Ben oui, ici l’action n’est jamais bourrine : elle respire, elle retarde, elle sert le récit, elle épouse la mise en scène. Le cinémascope convoque même les classiques de Carpenter je trouve, tandis que l’univers futuriste, délicieusement rétro (une mode cette année pour le genre, et c'est tant mieux), affiche un soin maniaque dans chaque décor, chaque cadre, chaque détail, sans foisonnement, sans paillettes. Nous avons affaire à une grosse série B d’action, visuellement splendide, crépusculaire, dont le futurisme géométrique est aussi enivrant qu’immersif.


Glenn Powell, lui, le forcené, le téméraire, l'insoumis animal, crève littéralement l’écran. À tel point qu’on se surprend à se demander s’il n’est pas en train de naître en nouveau héros de cinéma d’action, dans la lignée de Schwarzenegger, Stallone ou Bruce Willis. C’est dire si ce Running Man est un remake à contre-emploi de celui de Paul Michael Glaser, porté par Arnold Schwarzenegger : là où l’original assumait un ton cartoonesque, ultra kitsch, décomplexé au possible, ludique jusqu’à l’absurde, cette version choisit la sobriété, un sérieux presque austère, sans jamais renoncer à l’humour noir qui tâche et les éclairs de violence radicale émaillés de sacrifices collatéraux.

Le film déploie également une dénonciation très efficace d’une société autoritaire et totalitaire, qui contrôle les masses par des médias manipulateurs, menteurs, instruments d’asservissement. Sur ce plan sociopolitique et médiatique, le propos frappe juste. Les scènes d’action sont spectaculaires, tendues, parfaitement lisibles. Edgar Wright filme avec une implication totale : on sent son amour pour ce qu’il met en images, du premier au dernier plan. Le film dégage une énergie visuelle et technique impressionnante, reste constamment efficace, même sans multiplier les surprises, jusqu’à un final explosif, libérateur et haletant dans une inversion des rôles médiatiques.


Au bout du compte, Running Man s’impose comme une excellente surprise au tempo musical entêtant, une formidable réussite qui a du corps et de l'esprit, l’un des divertissements classieux de 2025. Un remake intelligent qui parvient à cristalliser sans fard son univers dystopique en supplantant son modèle autrement décérébré et régressif.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

Saint Ange de Pascal Laugier. 2004. France. 1h34.

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(Révision: 4)

Saint-ange - Réhabilitation d'un écrin maudit. 

Saint-Ange de Pascal Laugier est l’un de ces films injustement rejetés à sa sortie en 2004, mal compris, boudés par la critique comme par le public, alors qu’il s’agit d’un très beau drame fantastique, sensible et profondément mélancolique. Une première œuvre qui mérite aujourd’hui d’être réhabilitée, regardée à nouveau, avec patience, amour et attention.


Dans la lignée de L’Orphelinat, du Cercle infernal, de Rosemary’s Baby, de Fragile, Les Autres ou encore de L’Au-delà, Saint-Ange explore les zones troubles de la maternité, de la mémoire et du trauma de la guerre, jusqu’à un final suspendu, quasi spectral, qui agit comme un clin d’œil discret aux grands films de hantise psychologique mais aussi à l'Au-delà de Fulci dont Laugier ne cache nullement son admiration.

Virginie Ledoyen y est poignante, saillante, magnétique dans la pudeur et la mesure. Mère en devenir à la fois perplexe, fragile, inquiète, interrogative, elle avance dans le mystère avec une douceur inquiète, une force tranquille, presque rassurante. Elle incarne une présence de chair et de cœur, un ancrage humain face à l’indicible. À ses côtés, Lou Doillon - trop décriée à l’époque - est pourtant saisissante. Elle ne joue pas : elle est cette jeune femme sans âge au bord de la rupture, fébrile, névrosée, mentalement instable, à la lisière de la démence. Deux présences complémentaires, deux états de l’âme, deux fractures qui s'uniront pour le meilleur et pour le pire.


Pascal Laugier
magnifie le décor de Saint-Ange avec un soin formel gothique d’une grande beauté séculaire. Chaque pièce respire, chaque couloir murmure. La vaste maison devient un personnage à part entière, un corps vivant chargé de souvenirs et de douleurs enfouies, jouant un rôle central dans l’évolution narrative. Le film se déploie alors sur deux niveaux de lecture : drame psychologique intime ou drame fantastique hanté. Les deux coexistent, se répondent, sans jamais s’annuler. Et c'est ce qui rend le film aussi fort, beau, passionnant, en suspens avec cet art consommé de la hantise cérébrale. 

La musique, fragile et délicate, accompagne cette atmosphère mélancolique avec pudeur, renforçant l’émotion sans jamais l’alourdir. L’histoire, solide et prenante, avance à pas feutrés parmi la discrétion d'une directrice taiseuse que Catriona Mc Coll persiste dans une posture hiératique figée. La mise en scène est inspirée, inventive, les cadrages stylisés sont d’une grande précision. On se passionne autant pour la dimension technique et formelle que pour la force narrative et le jeu impliqué des actrices au sein d'un décorum gothique enivrant jusqu'à se perdre dans ses sous-sols à la fois poussiéreux et rubigineux. 


Ensorcelant dans une douceur de miel éthérée, Saint-Ange est un film contemplatif qui demande de l’écoute, du silence, du temps. Il parle d’enfants martyrisés, de mémoire refoulée, de douleur transmise, de maternité brisée. Un drame fantastique élégant, habité, injustement oublié, et qu’il est urgent de réhabiliter.


Et c'est produit par l'artisan Christophe Gans, noble binôme, aussi féru d'amour pour le genre.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

27.08.12
14.12.25. 4èx

de Pascal Laugier. 2004. France. 1h38. Avec Virginie Ledoyen, Lou Doillon, Catriona MacColl, Dorina Lazar, Virginie Darmon, Jérôme Soufflet, Marie Herry, Eric Prat, Marin Chouquet, Christophe Lemaire.

Sortie salles France: 23 Juin 2004

FILMOGRAPHIE: Pascal Laugier est un réalisateur Français né le 16 Octobre 1971.Courts-Métrages: 1993: Tête de Citrouille. 2001: 4è sous-sol. Longs-métrages: 2004: Saint Ange. 2008: Martyrs. 2012 : The Secret (The Tall Man). 2018 : Ghostland.