vendredi 17 juin 2022

Complot de Famille / Family Plot. Prix Edgar-Allan-Poe du meilleur scénario

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

d'Alfred Hitchcock. 1976. Angleterre. 2h00. Avec Bruce Dern, William Devane, Barbara Harris, Karen Black, Ed Lauter, Cathleen Nesbitt, Katherine Helmond.

Sortie salles France: 21 Juillet 1976. U.S: 9 Avril 1976

FILMOGRAPHIE: Alfred Hitchcock est un réalisateur, producteur et scénariste anglo américain, né le 13 Août 1899, décédé le 29 Avril 1980. 1935: Les 39 Marches. 1936: Quatre de l'Espionnage. Agent Secret. 1937: Jeune et Innocent. 1938: Une Femme Disparait. 1939: La Taverne de la Jamaique. 1940: Rebecca. Correspondant 17. 1941: Soupçons. 1942: La 5è Colonne. 1943: l'Ombre d'un Doute. 1944: Lifeboat. 1945: La Maison du Dr Edward. 1946: Les Enchainés. 1947: Le Procès Paradine. 1948: La Corde. 1949: Les Amants du Capricorne. 1950: Le Grand Alibi. 1951: L'Inconnu du Nord-Express. 1953: La Loi du Silence. 1954: Le Crime était presque parfait. Fenêtre sur cour. 1955: La Main au Collet. Mais qui a tué Harry ? 1956: l'Homme qui en savait trop. Le Faux Coupable. 1958: Sueurs Froides. 1959: La Mort aux Trousses. 1960: Psychose. 1963: Les Oiseaux. 1964: Pas de Printemps pour Marnie. 1966: Le Rideau Déchiré. 1969: l'Etau. 1972: Frenzy. 1976: Complot de Famille.

Comédie policière rondement menée de par son lot de rebondissements, suspense lattent (avant une tension furtive en dernière partie pour le sort précaire d'un des personnages) et quiproquos que l'on ne peut anticiper, Complot de Famille est le divertissement idoine sous l'impulsion d'un scénario charpenté particulièrement décomplexé (il n'a point grugé son Prix Edgar Allan Poe du Meilleur Scénario). Pour ce faire, on peut autant compter sur l'engouement de notre quatuor de protagonistes vénaux (2 couples d'amants peu recommandables alors que l'on s'attache inévitablement auprès du duo le moins hostile et  répréhensible) escroquant sans vergogne les honnêtes gens. Blanche Tyler usant de séances de spiritisme avec la complicité de son amant George Lumley pour un enjeu pécuniaire de 10 000 dollars. Fran élaborant de son côté des rapts auprès de personnalités fortunées pour leur soutirer un diamant avec la complicité de son compagnon jouailler Arthur Adamson. Ainsi, ses personnages sans scrupule finiront inévitablement par se croiser et se rencontrer lors d'un jeu de cache-cache davantage tendu, pour ne pas dire oppressant, au péril de la vie de certains d'eux. 

Sémillante et enjouée au point de nous susciter parfois l'hilarité (ses grossières imitations dans la cuisine de l'une de ses victimes sclérosées), Barbara Harris se délecte à se fondre dans la peau d'une médium empathique avec un charisme typiquement cocasse dans sa posture faussement philanthrope. Elle est accompagnée du monstre sacré Bruce Dern incarnant ici avec une aisance autrement plus discrète, avenante et vigilante la double fonction de chauffeur de taxi et de détective amateur afin de retrouver la trace du fantôme Edward Shoebridge. L'indigne héritier de la fortune de Julia Rainbird, vieille dame cossue rongée de remords à la suite de la mort de sa soeur et du mari de celle-ci lors d'un étrange incendie. Quant au jeu torve de William Devane (le personnage le plus sombre des 4), il recourt à une expression à la fois cynique, insidieuse et orgueilleuse pour duper ses ennemis et préserver son identité. Il est enfin entourée de la troublante et vénéneuse Karen Black  (quel regard félin dans sa défroque distinguée accoutrée de lunettes noires !). Sa fameuse complice à la fois burnée et rigoureusement prudente négociant aux proches de la victime de rapt la mise d'un diamant en promesse de sa libération.  

Il serait donc temps de réhabiliter urgemment cette merveille de comédie policière menée sans temps morts et irrésistiblement passionnante alors qu'Hitchcock, dénué de prétention pour son ultime métrage, prend son temps à planter son intrigue pour y faire évoluer ses personnages avec une diabolique dérision (parfois proche du comique). Les acteurs communément expansifs prenant plaisir à participer à l'aventure rocambolesque au travers d'une topographie sinueuse semée d'embuches, de fausses pistes et de revirements génialement dosés au compte goutte, et donc sans esbroufe. Un régal j'vous dit. 

*Bruno Matéï 
2èx

jeudi 9 juin 2022

You won't be alone

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Goran Stolevski. 2022. U.S.A/Australie/Serbie. 1h49. Avec Sara Klimoska, Anamaria Marinca, Alice Englert, Félix Maritaud, Carloto Cotta, Noomi Rapace.

Sortie salles France: 1er Avril 2022

FILMOGRAPHIEGoran Stolevski est un réalisateur et scénariste australien. 2022: You won't be alone. 

Expérience de cinéma naturaliste contrairement à ses apparences cryptiques, You won't be alone empreinte au cinéma de Herzog et de Malick sous couvert d'un prétexte occulte magnifiant le portrait d'une femme-enfant en apprentissage existentiel. Et si ce métrage auteurisant ne plaira assurément pas à tous (faute de son climat hermétique plutôt froid et distant et de son aspect documenté plus vrai que nature), l'expérience quasi atypique que procure ce 1er essai ne peut laisser indifférent l'amateur d'étrangeté indépendante puissamment évocatrice. Ainsi, à travers la divergence morale d'une femme sorcière envers sa fille adoptive, mi-humaine, mi-sorcière, Goran Stolevski nous fait partager 1h49 durant le trajet oscillatoire de cette dernière qui devra apprendre l'adulte tempérance de vivre en communauté au sein d'une nature solennelle olfactive. Tant et si bien que You won't be alone se vit et se ressent comme un trip expérimental, telle une seconde naissance que le spectateur perçoit à travers les yeux candides de cette sauvageonne passant d'un corps à un autre afin de mieux comprendre et apprivoiser la nature humaine. Parfois bercé d'une partition fragile discrètement envoûtante, cet hymne à la vie, à la maternité, à la nature et à l'amour transpire l'authenticité du vécu auprès de ces métayers d'une époque séculaire à travers leur idéologie aussi superstitieuse que conservatrice. 

Baignant dans un doux climat de plénitude à travers ses yeux ingénus emplis de curiosité et de soif de découverte, tout en décrivant son rapport contradictoire avec la mort qu'elle commet de temps à autre à autrui dans son inculture à différencier le Bien du Mal, You won't be alone est contrebalancé de visions dérangeantes, malsaines et cruelles (surtout en présence de nouveau-nés éplorés) de par la menace létale d'une sorcière envieuse (sans doute le portrait le plus fulgurant du cinéma de par sa nature expressive dénuée d'humanisme !) incapable de comprendre, communiquer et transmettre la valeur maternelle eu égard de son mépris pour sa progéniture en proie à un éveil sentimental qu'elle ne pu soupçonner. Délicat et fragile, méphitique et désobligeant à travers l'ombre de la méchanceté la plus couarde et isolée, You won't be alone est autant une oeuvre existentielle onirique qu'expressive à nous communiquer avec un scrupuleux souci documentaire les premiers émois d'une naissance multiple que nous découvrons à travers la sensible intimité d'une enfant-monstre en proie aux valeurs inextinguibles du Bien après s'être débarrassée de son influence maléfique. 

*Bruno Matéï 

mardi 7 juin 2022

Luz, la Fleur du Mal / Luz: The Flower of Evil / Luz, la flor del mal.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmaffinity.com

de Juan Diego Escobar Alzate. 2019. Colombie. 1h44. Avec Yuri Vargas, Jim Muñoz, Conrado Osorio, Andrea Esquivel, Sharon Guzmán.

Sortie salles: 7 October 2019 (Sitges Film Festival)

FILMOGRAPHIEJuan Diego Escobar Alzate est un réalisateur et scénariste colombien, né le 15 Août 1987 à Manizales. 2019: Luz. 

Issu de Colombie, cet OVNI indépendant ne plaira assurément pas au grand public non préparé à une expérience ésotérique aussi personnelle qu'envoûtante. Certaines de ses images fantasmagoriques demeurant de véritables tableaux oniriques que le réalisateur imprime à travers une flamboyante photographie bercée d'un fond musical aussi fragile que mélodieux. Et à ce niveau sensoriel d'une nature stellaire aussi gracile qu'épanouissante, la première demi-heure fait mouche à nous dépeindre cet univers bucolique laconique auquel une poignée de villageois tentent de cohabiter en harmonie en tentant d'y trouver leur paix intérieure. Or, à travers un récit sans trop de surprise nous relatant durant 1h44 la folie dépressive d'un père bigot et de ses 3 filles soumise à sa foi chrétienne, Luz, la Fleur du Mal cède place à la redondance et aux logorrhées à ne traiter que des thèmes du Bien et du Mal depuis l'intrusion d'un enfant mutique potentiellement habité par le diable. Réaliste, déroutant, pesant, ennuyeux, dérangeant, fascinant, beau, fragile, violent, immersif et sensitif, Luz ne laisse toutefois pas indifférent l'amateur d'expérience spirituelle ne ressemblant à nul autre métrage. 

Mais en l'état, on aurait peut-être opté pour un moyen métrage de 50 minutes plutôt que d'étirer sur la longueur ce concept religieux rébarbatif car beaucoup trop chargé en palabres et versets bibliques de nous marteler que Dieu (le bien) et Diable (le mal) ne font qu'une seule et même entité en notre enveloppe corporelle que nous combattons quotidiennement selon nos croyances, notre agnosticisme ou notre athéisme. Pour clore, on peut enfin dénoter la qualité de son cast méconnu totalement habité par leur expression tantôt aliénée, tantôt affligée au travers de séquences parfois horrifiques ou brutales que nous ne voyons pas arriver. Et on sent bien que le réalisateur très inspiré par son récit mystique se refuse à sombrer dans le racolage ou la fioriture en misant essentiellement sur l'expérience d'un vécu maladif à travers le fanatisme rigoriste (symbolisé par ce paternel transi incapable d'y distinguer les valeurs du Bien et du Mal), vecteur de tous les maux de nos sociétés depuis la nuit des temps. 

Exclusivement pour public averti donc.

*Bruno Matéï 

lundi 6 juin 2022

Hors la Loi

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Robin Davis. 1985. France. 1h48. Avec Clovis Cornillac, Wadeck Stanczak, Nathalie Spilmont, Isabelle Pasco, Pascal Librizzi, Jean-Claude Tran, Joël Ferraty, Philippe Chambon, Jean-Paul Roussillon, Madeleine Robinson. 

Sortie salles France: 3 Avril 1985

FILMOGRAPHIE: Robin Davis, né le 29 mars 1943 à Marseille, est un réalisateur français. 1975 : Ce cher Victor. 1979 : La Guerre des polices. 1982 : Le Choc. 1983 : J'ai épousé une ombre. 1985 : Hors-la-loi. 1989 : La Fille des collines.  

Oublié de nos jours mais enfin commercialisé en format Blu-ray chez nous, Hors la loi est un sympathique récit d'aventures à la française, aussi mineur soit son contenu bâclé, pour ne pas dire dégingandé. Une traque sans relâche que subissent de jeunes délinquants d'un centre de redressement contre la police, les militaires et des fermiers revanchards à la suite d'une rixe mortelle dans une salle des fêtes. En dépit de ses nombreuses maladresses (principalement au niveau de l'attitude parfois irritante des protagonistes plutôt mal dirigés, qu'ils soient jeunes ou adultes), de son manque d'intensité et d'un récit prévisible pâtissant des hurlements outrées des jeunes acteurs jouant les rebelles au grand coeur avec un sens de l'improvisation théâtrale, Robin Davis compte sur les nombreux rebondissements belliqueux et ses magnifiques panoramas provinciaux pour nous attacher à ce survival champêtre modestement attachant. A l'instar de la présence déjà convaincante de Clovis Cornillac du haut de ses 16 ans en délinquant quelque peu autoritaire épris de sentiments pour Ida mais contraint de se mesurer à son rival Christian particulièrement envieux de cette dernière. 


*Bruno Matéï
2èx

mardi 31 mai 2022

The Gate / La Fissure

                                       
                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site lovingmoviesfr.file

de Tibor Takács. 1987. U.S.A. 1h24. Avec Stephen Dorff, Christa Denton, Louis Tripp, Kelly Rowan, Jennifer Irwin.

Sortie salles France: 28 Mai 1987. U.S: 15 Mai 1987

FILMOGRAPHIE SELECTIVETibor Takacs est un réalisateur hongrois né le 11 Septembre 1954 à Budapest (Hongrie). 1978: Metal Messiah. 1982: 984: Prisoners of the Future (télé-film). 1987: The Gate. 1989: Lectures Diaboliques. 1992: The Gate 2. 1996: Sabotage. 1997: Sanctuary. 2001: La Fille du Père-Noel (télé-film). 2003: Rats. 2007: Ice Spiders (télé-film). 2007: Mega Snake (télé-film). 2010: Tempête de météorites (télé-film). 2013: Spiders 3D.


Si j'avais quelque peu omis cette modeste série B que j'avais trouvé à l'époque bonnard et attachante (notamment grâce à l'originalité de ses effets-spéciaux particulièrement réussis et oh combien réjouissants), quelle fut ma surprise de le redécouvrir aujourd'hui sous un angle autrement gratifiant si bien que j'ai redécouvert (en format HD qui plus est) un formidable divertissement qu'on ne retrouve plus (ou si peu, à l'instar de la géniale série Stranger Things) de nos jours. Car aussi imbitable que cela puisse paraître, The Gate est un VRAI film d'horreur (point que j'avais bizarrement complètement omis de ma mémoire) joué par des bambins que Tibor Takacs ose combiner au travers de leur esprit de cohésion et de leur amitié indéfectible. Son climat étonnement angoissant distillant une lourde atmosphère d'étrangeté et d'insécurité en la présence d'ados farouches (mais en voie de rébellion) à tenter de venir à bout de la menace monstrueuse au sein de leur cocon domestique. L'intrigue simpliste traitant de ce trio (un frère, une soeur et leur acolyte) à déjouer les forces maléfiques d'un dessein morbide planétaire à la suite du déracinement de l'arbre de leur jardin. 


Ainsi, redécouvrir aujourd'hui ce B movie dénué de prétention prouve à quelque point les années 80 fut une véritable aubaine pour imprimer sur écran de petits métrages ludiques bourrés de sincérité, de générosité et de bons sentiments (dans le bon sens du terme) dans leur plaisir commun de bien faire à nous faire croire à l'improbable. En l'occurrence, on se retrouve à reluquer entre passion et fascination de petits monstres diablotins terriblement réalistes dans leur petit corps véloce que Tibor Takacs exploite lestement à l'aide d'FX toujours bluffants. Tant et si bien qu'aujourd'hui on reste aussi impressionné par leur apparence démoniale à travers un charisme quelque peu singulier. Quant au monstre final de taille autrement disproportionnée et filmé en stop motion, là encore on reste enchanté par cette vision de cauchemar dantesque en dépit de son aspect rétro génialement attachant. Et si la première partie laisse beaucoup de place à la suggestion, la mise en attente et à certaines dérives hallucinatoires plutôt insécures, le second acte autrement épique et horrifique embraye sur des confrontations à la fois haletantes et terrifiantes (l'apparition du mort-vivant s'extirpant du mur de la chambre fait froid dans le dos par son apparence spectrale !) que nos héros en herbe amorcent avec une foi déterminée (nous n'avons jamais le désagréable sentiment de supporter des ados turbulents et décervelés comme on est parfois contraint de se coltiner au travers de prods triviales plutôt arrivistes). 


Si bien que dans The Gate tout est relativement soigné, tant au niveau de sa réalisation soignée, de ses trucages artisanaux, de son score lugubre, de son atmosphère réellement anxiogène que des comédiens juvéniles (Stephen Dorff en tête en noble leader à la capacité de réflexion) réellement investis dans leur fonction à la fois épeurée et dévouée à combattre les forces du Mal lors d'une une directive solidaire (avec en prime un joli discours sur la fidélité amicale comme le prouve justement son épilogue salvateur). A redécouvrir donc avec un réel plaisir assumé, The Gate paraissant aujourd'hui plus couillu, plus charmant, plus réjouissant dans son concentré d'horreur, de fantastique mais aussi d'humour et de tendresse étonnamment premier degré ! 

*Bruno Matéï
3èx

lundi 30 mai 2022

Mise à Prix / Smokin' Aces

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Joe Carnahan. 2006. U.S.A/France/Angleterre. 1h49. Avec Ryan Reynolds, Jeremy Piven, Ray Liotta, Andy García, Alicia Keys, Common, Jason Bateman, Ben Affleck, Curtis Armstrong, Chris Pine, Joel Edgerton.

Sortie salles France: 1er Août 2007 (Int - 12 ans). U.S: 9 Décembre 2006. Angleterre: 12 Janvier 2007

FILMOGRAPHIE: Joe Carnahan est un réalisateur, scénariste, monteur et producteur américain, né le 9 mai 1969 à Sacramento. 1998 : Blood and Bullets. 2002 : Narc. 2002 : The Hire: Ticker (spot de la série The Hire pour BMW). 2006 : Faceless (TV). 2007 : Mise à prix. 2010 : L'Agence tous risques. 2012 : Le Territoire des loups. 2013-2015 : Blacklist (série télévisée) (3 épisodes). 2014 : Stretch. 2014-2015 : State of Affairs (série télévisée) (4 épisodes, également créateur). 2021 : Boss Level. 2021 : Copshop. 


Synopsis
(issu de Wikipedia): Le boss de la pègre Primo Sparazza a lancé un contrat juteux sur la tête de Robert « Buddy Aces » Israel, un magicien louche qui a décidé de dévoiler au grand jour ce qui se passe dans le milieu de la pègre de Las Vegas. Le FBI, pressentant sa chance d'utiliser cet escroc à la petite semaine pour faire tomber le gros morceau que représente Sparazza, place Aces en détention provisoire, sous le contrôle de deux agents envoyés à la planque de Aces au lac Tahoe. Lorsque le montant de la rançon pour la tête de Aces se diffuse dans la communauté, des escrocs et escrocs en devenir, chasseurs de primes, gangsters, vieilles camées et traîtres du milieu se lancent également à sa poursuite. 


Mon avis: Démentiel !
Formidable polar d'action mené à un rythme intrépide en dépit de ces premières 40 minutes laissant trop de place aux palabres selon moi (il m'a fallut un petit temps d'adaptation pour entrer dans l'univers et la mise en place des personnages), Mise à prix est un régal jubilatoire sous l'impulsion d'un scénario constamment imprévisible et débridé. Tant et si bien que l'on reste bouche bée par ses twists à répétition afin de parachever un épilogue aussi ironique que dramatique. D'ailleurs, sur ce point de divergence des genres, Joe Carnahan (Narc, c'était lui !), manie admirablement nos émotions si bien que le spectateur est soit partagé par la drôlerie (parfois hilarante, à l'instar de la présence iconique du petit karatéka surnommé "Boogie" nous offrant une posture pédante à mourir de rire !), soit par une émotion parfois poignante que l'on ne parvient pas à préméditer tant le réalisateur maîtrise son sujet et sa mise en scène à à couper au rasoir. Car truffé de trouvailles, de personnages décalés (comme sortis d'une bande-dessinée mal élevée), de quiproquos et incidents ultra violents rigoureusement spectaculaires (et tout cela monte en crescendo dès que les gangsters, déployés en masse, s'approchent toujours plus près du repère de Israel), Mise à prix ne laisse nulle place à la routine dès que l'intrigue est plantée en dépit de la complexité de certains enjeux policiers (telle cette réminiscence en rapport à l'espionnage). 


C'est donc un fabuleux divertissement retors que nous cultive Joe Carnahan, épaulé il faut avouer par un casting incandescent (Ryan Reynolds, Jeremy Piven, Ray Liotta, Andy García, Alicia Keys, Common, Jason Bateman, Ben Affleck, Curtis Armstrong, Chris Pine s'amusent comme des gosses dissipés tout en prenant leur rôle au sérieux), d'une BO survoltée et surtout d'un script à la fois très efficace et original en dépit des apparences trompeuses. Et si on sent clairement une influence Tarantinesque, notamment auprès de la fringance de ses dialogues décomplexés et de son humour méchant, le cinéaste parvient pour autant à imposer son style et affirmer son intégrité (énergie à revendre en sus) afin de ne pas sombrer dans l'hommage trivial qu'on aurait tort de sermonner. Tout à la fois endiablé, déjanté, hilarant, impondérable (impossible de prédire qui trépassera dans la séquence suivante) et brutalement épique, Mise à Prix se permet en outre au sein de ce bain de sang sarcastique à instaurer une véritable émotion autour de ces personnages (méchants ou gentils) se combattant séparément avec une bravoure aussi burnée que méthodique. 

*Bruno Matéï 
2èx

jeudi 26 mai 2022

Abuela. Prix du Jury, Gérardmer, 2022.

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Paco Plaza. 2021. Espagne/France. 1h40. Avec Almudena Amor, Vera Valdez, Karina Kolokolchykova, Alba Bonnin, Chacha Huang, Pablo Guisa Koestinger.

Sortie salles France: 6 avril 2022. Espagne: 22 Octobre 2021

FILMOGRAPHIE: Francisco Plaza Trinidad dit Paco Plaza est un réalisateur et scénariste espagnol, né le 8 février 1973 à Valence (Valence).2002 : OT: la película (documentaire). 2002 : Les Enfants d'Abraham. 2004 : L'Enfer des loups. 2007 : [REC] (co-réalisé avec Jaume Balagueró). 2008 : [REC]² (co-réalisé avec Jaume Balagueró). 2012 : [REC]3 Génesis. 2017 : Verónica. 2019 : Eye for an Eye. 2021 : Abuela. Prochainement: Hermana muerte. 


"À la fin d'une vie, la vieillesse revient en nausées. Tout aboutit à ne plus être écouté."
Proposition horrifique aussi originale qu'universelle à travers sa thématique houleuse de la peur de la vieillesse, Abuela est le nouveau projet de Paco Plaza, réalisateur inégal néanmoins attachant et intègre à travers son amour du genre qu'il voue sans se lasser. Car élevant le style au 1er degré (il s'agit bien d'une horreur adulte, posée, réfléchie et filandreuse), celui-ci soigne son cadre intimiste d'un huis-clos domestique entre une grand-mère sclérosée et sa petite fille s'efforçant de la soigner à la suite d'une hémorragie cérébrale. Superbement éclairé et photographié à travers ses décors domestiques vétustes où rien n'est laissé au hasard, Abuela dégage dans un premier temps une attirante atmosphère d'étrangeté placide lorsque la fille de 25 ans, mannequin de mode, est témoin d'inquiétants phénomènes inexpliqués sous la mainmise de sa grand-mère aussi mutique qu'insidieuse auprès de ses non-dits et de ses postures à la fois rigides et glaçantes. Ainsi, durant une bonne heure de métrage, on reste attentif au saisissant portrait imparti au 3è âge dans un vérisme documenté tantôt touchant, tantôt répulsif et si attentionné. Paco Plaza accordant autant d'attachement à la condition corporelle de cette dame décharnée impotente que la jeune mannequin (saisissant contraste entre beauté et laideur !) s'efforce de préserver en dépit de ses affres grandissantes pour sa folie mentale qu'elle redoute dans le plus grand désarroi (moment de solitude si poignant dans le resto chinois). 


Mais là ou le bas blesse émane qu'au fil de leurs rapports équivoques toujours plus tendus, ambigus et irraisonnés, le cinéaste emprunte certaines ficelles préjudiciables quant aux réactions morales de la jeune fille finissant toujours par céder à l'amour pour sa grand-mère alors que sa vie est sur le point de basculer dans la déprime et la démence. Tant et si bien que si nous étions à sa place, il me semble que nous aurions probablement (pour la plupart d'entre nous) pris la poudre d'escampette d'assister à tel cauchemar irrationnel en la présence de notre grand-mère potentiellement douée de télékinésie et autre sorcellerie. Et Plaza de poursuivre dans les clichés du genre avec 2 gros évènements meurtriers aussi effroyables qu'imbitables face au témoignage davantage démunie de la jeune fille en quête désespérée d'une main secourable. Quand bien même son final autrement plus intelligent, suggestif et terriblement sournois renoue avec les qualités de la première heure de par son art consommé d'une horreur feutrée diffuse aussi malsaine que dérangeante. 


C'est la perspective de la vieillesse qui nous donne l'envie de vivre.
Clairement non conçu à tous les spectateurs, Abuela demeure perfectible, inabouti, dégingandé, mais pour autant angoissant, malaisant, parfois effrayant et toujours troublant. A l'image de cette dame décatie à 2 doigts de trépasser que campe admirablement Vera Valdez (audacieusement mise à nu dans son corps exsangue, elle est habitée par ses fonctions occultes à travers son regard tantôt neutre, tantôt lestement expressif). On peut autant applaudir la force d'expression névralgique de Almudena Amor en mannequin juvénile l'accompagnant jusqu'à la mort en témoignant de sa vieillesse putrescente avec une appréhension (trop) contradictoire et perplexe. Remarquablement interprété donc (le gros point qualitatif du métrage avant sa mise en scène épurée), Abuela ne laisse pas indifférent si bien que l'on peut également répertorier nombre de qualités substantielles à travers sa réflexion sur la peur de la vieillesse et de la mort autant qu'à celle de la laideur corporelle.  

*Bruno Matéï

Récompenses: Festival international du film fantastique de Gérardmer 2022 : Prix du jury (exæquo avec Samhain de Kate Dolan). 
Prix Feroz 2022 : meilleure bande annonce pour Miguel Ángel Trudu

lundi 23 mai 2022

Solitaire / En Eaux troubles / Rogue.

                                             
                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Rogue" de Greg McLean. 2007. U.S.A/Australie. 1h39. Avec Radha Mitchell, Michael Vartan, Sam Worthington, Caroline Brazier, Stephen Curry.

Sortie salles France: 13 Août 2008.

FILMOGRAPHIEGreg McLean est un réalisateur, scénariste et producteur australien.
2005: Wolf Creek. 2007: Solitaire. 2014: Wolf Creek 2. 2016 : The Darkness. 2016 : The Belko. Experiment. 2017 : Jungle.


Révélé par le traumatisant Wolf Creek, Greg McLean exploite 2 ans plus tard le film de monstre marin avec Solitaire, une série B rondement menée à travers son inévitable concentré d'agressions animales, de suspense oppressant et de stratégies de survie plutôt bien pensées. Qui plus est, de nous surprendre constamment quant au sort aléatoire des potentielles futures victimes, on reste également fasciné et impressionné par son final dantesque quant à la confrontation épique entre le monstre et l'un des protagonistes sévèrement tourmenté par la bête carnivore. Ainsi, en exploitant l'unité de lieu lors de sa première heure (un groupe de touriste est contraint de s'abriter sur un ilot après le naufrage de leur bateau en essayant de théoriser une issue de secours), Greg McLean ne s'embarrasse nullement de racolage et de situations éculées grâce à l'intelligence de son histoire (tirée d'une histoire vraie) attachant autant d'importance à l'intensité dramatique de ses personnages aliénés (car en instance de survie précipitée) que des agressions animales jamais outrancières auprès des rares apparitions du monstre à écailles. D'ailleurs il faut patienter une bonne trentaine de minutes pour voir débarquer la première séquence morbide, tant et si bien que McLean nous expose d'abord la présentation de ses touristes hétéroclites lors d'une visite touristique à couper le souffle de par l'ampleur de ses paysages naturels d'une beauté édénique à couper le souffle. Le tout sous l'impulsion d'un envoûtant score mélodique aussi planant que dépouillé quant au sentiment de sérénité que l'on ressent à travers cette scénographie exotique résolument dépaysante. 


Ainsi donc, Solitaire ne cherche nullement à révolutionner le sous-genre si bien que l'action s'avère peu présente 1h39 durant. Pour autant, on reste constamment captivé et fasciné par ce huis-clos maritime de par l'attachement éprouvé pour ses protagonistes en proie à la peur, à la panique, à l'espoir et parfois à un héroïsme de dernier ressort aussi couillu que suicidaire, et par la présence disproportionnée du croco insidieux que McLean suggère lestement, notamment grâce au réalisme des situations à la fois censées, effrénées et désespérées. Or, pour relancer l'action dans une direction plus végétative et rocailleuse et ainsi satisfaire l'amateur de sensations fortes, le réalisateur nous comble avec enfin la présence démonstrative du monstre en proie à une rivalité humaine que l'on ne pouvait préméditer. L'attachant Michael Vartan demeurant sobrement convaincant en journaliste à la fois discret et pugnace lorsqu'il tente ensuite de secourir l'ultime victime en instance de survie précaire. Radha Mitchell incarnant avec un naturel sans fard une guide touristique s'évertuant à protéger son groupe aux caractères parfois bien trempés avec une forme d'autorité sciemment mesurée pour éviter d'accentuer la panique. Le reste du casting étant à l'avenant à travers leurs expressions humaines tantôt dépressives, apeurées, tantôt acharnées, sachant aussi qu'il s'agit d'acteurs méconnus auprès du public français (ce qui renforce donc le réalisme de ces profils lambdas en dépit de quelques persos secondaires un tantinet caricaturaux). 


Héros malgré lui
Voici donc une excellente série B aussi intelligente dans son refus de surenchère (et les FX numériques, récompensés en Australie, sont par ailleurs très réalistes) qu'attachante auprès de son suspense retors culminant vers un long final (une bonne vingtaine de minutes) autrement homérique et éprouvant (avec ce même degré de scrupuleux vérisme, aussi saugrenue soit cette confrontation inattendue). 

*Bruno Matéï
3èx

Récompense: Prix des meilleurs effets spéciaux pour Andrew Hellen, Dave Morley, Jason Bath et John Cox, lors des Australian Film Institute Awards en 2007.

jeudi 19 mai 2022

Le Bossu

                                       
                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de André Hunebelle. 1959. France/Italie. 1h45. Avec Jean Marais, Bourvil, Sabina Selman, Jean Le Poulain, Hubert Noël, Paulette Dubost, Alexandre Rignault.

Sortie salles France: 13 Janvier 1960

FILMOGRAPHIEAndré Hunebelle est un maître verrier et réalisateur français, né le 1er Septembre 1896 à Meudon (Hauts-de-Seine), décédé le 27 Novembre 1985 à Nice. 1948: Métier de fous. 1949: Millionnaires d'un Jour. 1949: Mission à Tanger. 1950: Méfiez vous des Blondes. 1951: Ma Femme est formidable. 1952: Massacre en dentelles. 1952: Monsieur Taxi. 1953: Les Trois Mousquetaires. 1953: Mon Mari est merveilleux. 1954: Cadet Rousselle. 1955: Treize à table. 1955: l'Impossible Monsieur Pipelet. 1956: Casino de Paris. 1956: Mannequins de Paris. 1956: Les Collégiennes. 1957: Les Femmes sont marrantes. 1958: Taxi, roulotte et Corrida. 1959: Le Bossu. 1959: Arrêtez le massacre. 1960: Le Capitan. 1961: Le Miracle des Loups. 1962: Les Mystères de Paris. 1963: Oss 117 se déchaîne. 1963: Méfiez vous Mesdames. 1964: Banco à Bangkok pour Oss 117. 1964: Fantômas. 1965: Furia à Bahia pour Oss 117. 1965: Fantômas se déchaîne. 1967:   Fantômas contre Scotland Yard. 1968: Pas de roses pour Oss 117. 1968: Sous le signe de Monte-Cristo. 1971: Joseph Balsamo. 1974: Les Quatre Charlots Mousquetaires. 1974: Les Charlots en Folie: A nous quatre Cardinal ! 1978: Ca va faire tilt.


Le pitchA la suite de l'assassinat du duc Philippe de Nevers par son cousin Philippe de Gonzague, un chevalier, Henri de Lagardère, lui promet lors de son dernier souffle de prendre sous son aile sa fille Aurore qu'il eut secrètement avec Isabelle de Caylus. Epaulé de son nouveau comparse Passe-poil, ils s'exilent quelques années en Espagne avant d'élaborer une retorse vengeance.

Ovationné par le public avec 5 846 808 entrées, Le Bossu a rapidement gagné son galon de classique du genre (notamment grâce ces multi rediffusions tv) alors que je reste profondément marqué par sa diffusion télévisuelle un mardi soir chez ma grand-mère sur Antenne 2. Revoir ce soir pour la 3è fois ce chef-d'oeuvre d'aventures et de cape et d'épée puis redorer ses émotions adolescentes comme s'il s'agissait de la première fois tient d'une aubaine miraculeuse. Pour autant, il n'y a à proprement parler rien de miraculeux à travers cette histoire de vengeance de longue haleine (étalée sur plusieurs années !) que Jean Marais et Bourvil complotent avec une fougue commune somme toute fringante. L'un endossant le rôle intrépide d'un chevalier au grand coeur à la fois rigoureusement loyal, malicieux et véloce dans sa capacité bondissante à venir à bout de ses rivaux. L'autre incarnant avec son charisme débonnaire un faire-valoir empoté s'efforçant timidement d'y protéger Aurore, fille de la princesse d'Isabelle de Caylus, avec une maladresse facétieuse. Celle-ci, radieuse et ingénue, étant peu à peu motivée par ses sentiments qu'elle éprouve auprès de son maître protecteur, j'ai nommé Henri de Lagardère interprété par Jean Marais dans un double rôle plein de ruses et d'ironie. 


Tant et si bien que l'on reste constamment enchanté par la virtuosité de la réalisation d'André Hunebelle  extrêmement formaliste, pointilleux, tatillon à parfaire son entreprise d'aventures remarquablement menées et charpentées (narrativement parlant) en y chorégraphiant des séquences de combats et poursuites aussi vigoureuses que percutantes. Aussi parce que tout sonne vrai et que les cascades sont exécutées avec un professionnalisme parfois détonnant (notamment auprès de la complicité héroïque des chevaux, telle cette situation en catimini où l'un d'eux est contraint de se coucher sur le sol par l'autorité du cavalier). Le Bossu étant tout simplement la réunion prodigieuse de talents hétéroclites à l'unisson pour le plaisir du grand public renouant à ses premiers émois d'une aventure en costumes séculaire. Formaliste également pour le soin imparti à ces décors naturels tout droit sortis d'un jardin d'Eden (les vastes plaines provinciales ensoleillées nous dépaysent dans une aura féerique palpable) que des sculptures et monuments d'un authentique château renfermant des trésors de richesses architecturales. Alors qu'en interne, les figurants, princes, ducs et gentes dames affublés de flamboyants costumes nous irradient la vue, à l'instar de la luminescente Sabina Selman dans un double rôle candide touché par la grâce de sa mansuétude sensuelle. Une actrice (méconnue à mes yeux) absolument convaincante, physiquement splendide à en pleurer de ses doux yeux de saphir, à travers ses  expressions timorées de tendresse, de détresse, de désir, d'espoir et d'apaisement lors de son houleux parcours de quête de vérité et de retrouvailles inespérées. 


Pur plaisir de cinéma épuré qu'on ne retrouve plus depuis des siècles à l'ère du tout numérique et de l'envahissement des super-héros bourrins, Le Bossu reste d'une modernité et d'une fraîcheur sans égales à travers son cocktail idoine de tendre romance, de fantaisie, d'action et d'aventures sous l'impulsion d'un chevalier vaillant parfois inquiétant dans son rôle bicéphale de bossu à la morphologie quelque peu malaisante. Une trouvaille narrative à la fois originale et judicieuse que Jean-Marais endosse avec un naturel sarcastique délicatement chafouin en redresseur de tort burné. 

*Bruno
11.06.2019
19.05.2022. 3èx

Ci-joint la chronique de DVDFR.COM:
Le Bossu est le film qui lia André Hunebelle à Jean Marais pour une série de classiques indémodables comme Le Capitan, Le Miracle des loups, Les Mystères de Paris et bien sûr, la trilogie Fantômas. Film d’aventure, comédie d’action familiale, Le Bossu demeure l’un des films les plus emblématiques de la filmographie de Jean Marais, marquant une rupture définitive avec le cinéma de Jean Cocteau qui l’avait connaître. Totalement investit dans ses cascades, bondissant, souriant l’épée à la main, le comédien se donne à fond dans ce magnifique long-métrage dépaysant, plein de couleurs et de joie de vivre. Soutenu par l’humour et la tendresse de Bourvil, le comédien trouve ici un second souffle et peut démarrer une longue carrière marquée par de grands succès populaires. Adapté du roman de cape et d’épée écrit par Paul Féval en 1857, Le Bossu avait certes déjà connu quelques adaptations, dont une mise en scène par Jean Delannoy en 1944 avec Pierre Blanchar dans le rôle de Lagardère, mais malgré les transpositions ultérieures, dont celle excellente réalisée par Philippe de Broca en 1997 avec Daniel Auteuil dans le rôle titre, celle d’André Hunebelle reste celle qui nous vient immédiatement à l’esprit. Réalisé avec une fougue et un panache contagieux par André Hunebelle, magistralement interprété, Le Bossu est un chef d’oeuvre du genre.

mercredi 18 mai 2022

Réaction en chaîne / The Chain Reaction

                                         
                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Chain Reaction" de Ian Barry. 1980. Australie. 1h32. Avec Steve Bisley, Arna-Maria Winchester, Ross Thompson, Ralph Cotterill, Hugh Keays-Byrne, Lorna Lesley.

Sortie salles France: 4 Février 1981. Australie: 25 Septembre 1980.

FILMOGRAPHIEIan Barry est un réalisateur, scénariste et producteur australien. 2003: Un père Noël au grand coeur (TV Movie). 2003 Sirènes (TV Movie). 2002 Miss Lettie and Me (TV Movie). 2001: A la poursuite du diamant de Jeru (TV Movie). 2000: Le village du père Noël (TV Movie) 2000: Le choix du retour (TV Movie). 1999 Pollution mortelle (TV Movie). 1998 Un secret bien gardé (TV Movie). 1997: Joey. 1996 Robo Warriors. 1995: Blackwater Trail. 1994: The Seventh Floor. 1991: Vengeances de femmes (TV Movie). 1989 Minnamurra.


Réaction en chaine (nucléaire), définition:
En physique nucléaire, une réaction en chaîne se produit lorsqu'un neutron cause la fission d'un noyau atomique fissile produisant un plus grand nombre de neutrons, qui à leur tour causent d'autres fissions, permettant de poursuivre cette réaction. 
Une réaction en chaîne non contrôlée se produisant avec une quantité suffisamment importante de combustible fissile (masse critique) peut mener à une explosion : c'est le principe d'une bombe atomique. La réaction en chaîne peut aussi être contrôlée et utilisée dans un réacteur nucléaire pour produire de l'énergie thermique, elle même susceptible d'être utilisée pour produire de l'électricité : c'est le principe de fonctionnement des centrales nucléaires.


Découvert une première fois sur Canal + à l'orée des années 80 un mercredi soir, Réaction en chaîne est une fort sympathique bande d'exploitation sous couvert de série B alarmiste quant au péril nucléaire qu'un couple et une victime (allègrement) contaminée s'efforcent d'alerter auprès de la populace et des autorités locales lors d'une traque de longue haleine. Production australienne co-produite par Mister  Georges Miller (auquel il aurait potentiellement réalisé les 2 courses-poursuites vertigineuses d'une intensité - déjà - effrénée !), Réaction en chaine fleure bon le divertissement musclé de par son rythme rapide émanant d'une efficacité soutenue en se focalisant sur les agissements d'un couple de vacanciers ayant hébergé un étranger grièvement blessé. On reconnaîtra d'ailleurs en 1er rôle réactionnaire, irascible et inconséquent, l'illustre présence (étonnamment irritable donc) de Steve Bisley (coéquipier et acolyte de Mad-Max tourné 1 an au préalable). Celui-ci endossant un pilote chevronné au caractère bien trempé lorsqu'il s'agit de s'opposer à l'étranger toujours plus moribond, aux force de l'ordre et aux hommes en combinaison blanche s'efforçant d'alpaguer leur fugitif afin d'étouffer l'affaire. 


Alors que sa compagne autrement plus douce et prévenante s'appliquera à protéger le contaminé dans une posture maternelle autrement plus lucide, posée et réfléchie. Un saisissant contraste donc qu'Arna-Maria Winchester incarne auprès de son physique saillant assez particulier si bien qu'elle dégage une aura sensuelle assez singulière, notamment d'après son bronzage bistré et ses manières un tantinet masculines. Mais au-delà de son suspense soutenu (le sort incertain de nos héros potentiellement contaminés par l'étranger) agrémenté de scènes d'action plutôt bien torchées (surtout les 2 poursuites en bagnoles froissées jamais gratuites), Réaction en chaine cultive une ambiance d'étrangeté sensiblement malsaine à travers une scénographie naturelle de toute beauté que le réalisateur exploite autour du bercail des vacanciers isolés en pleine forêt australienne. Quand bien même l'apparition toujours plus prononcée des hommes en blouse blanche affublés de masque à gaz renforce son climat malsain à la frontière de la science-fiction et de l'horreur (à l'instar de cette main agrippant soudainement lors d'une poursuite auto la passagère en proie à un irrésistible affolement). 


Ajoutez à cela l'invention de cadrages stylisés parfois baroques, un décorum industriel suintant l'hostilité et des protagonistes décomplexés aux gueules burinées que l'on a peu coutume de voir et vous obtenez une petite perle du thriller catastrophiste sous l'impulsion du score envoûtant de Andrew Thomas Wilson (à l'instar de son magnifique générique liminaire longeant une colline sur une route crépusculaire pour aboutir à la centrale nucléaire) que n'aurait renié Tangerine Dream (au gré de ses accents cosmiques). 

*Bruno Matéï
08.11.18
18.05.22. 3èx

jeudi 12 mai 2022

The Northman

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Robert Eggers. 2022. U.S.A/Angleterre. 2h17. Avec Alexander Skarsgård, Nicole Kidman, Anya Taylor-Joy, Willem Dafoe, Ethan Hawke, Björk, Claes Bang, Kate Dickie.

Sortie salles France: 11 Mai 2022 (Interdit - 12 ans avec avertissement). U.S: 22 Avril 2022

FILMOGRAPHIE: Robert Eggers est un réalisateur américain né le 7 juillet 1983 à Lee (New Hampshire). 2015: The Witch. 2019: The Lighthouse. 2022: The Northman.


"La meilleure façon de se venger d'un ennemi est de ne pas lui ressembler"
Impossible pour moi d'émettre un avis objectif car je sors juste de la projo et je reste fichtrement partagé entre gros plaisir de cinéma (vu nul part ailleurs !), fascination, perplexité mais aussi frustration et déception (aussi parce que j'en attendais trop d'après ces échos conférés au chef-d'oeuvre inégalé Conan le Barbare auquel il prête quelques références et allusions). Alors oui, d'un niveau formel, indiscutablement on en prend plein la vue pour être même par moments littéralement envoûté par nombre de séquences onirico-cauchemardesques d'une vénéneuse beauté funeste. Quant à l'histoire classique de vengeance, Robert Eggers s'efforce de la renouveler en s'écartant des codes usuels dans un parti-pris à la fois auteurisant et expérimental. Mais d'une durée non négligeable de 2h17, The Northman contient hélas plusieurs longueurs, de sautes de rythme qui m'ont fait sortir du film à 3, 4 reprises. Quand bien même d'autres fulgurances autrement homériques m'ont littéralement cloué au siège par leur intensité barbare d'une sauvagerie escarpée et au montage absolument maîtrisé (tout est parfaitement lisible jusqu'à l'hallucinant combat final - bien que concis - exécuté dans un enfer de laves). 


Mais fort d'un climat froid, austère et hermétique laissant peu de place à la passion des sentiments et à la chaleur humaine (même si la romance du couple ne nous laisse pas indifférent), The Northman manque bougrement d'émotion lyrique à travers les profils antipathiques de vikings ne vivants que pour la guerre, le sang, la violence et la vengeance. A mes yeux donc, et pour un premier visionnage, The Northman est difficile à suivre sachant que je ne m'attendais nullement à une aventure aussi déroutante qu'expérimentale (avec ce que cela sous entend de métaphores ésotériques et de visions surnaturelles à base de sorcellerie magnifiquement stylisées cela dit) soufflant sans cesse le chaud et le froid par son rythme en dent de scie. Alors que les comédiens, à la mine communément bourrue (ils tirent tous la gueule sans exception, même les femmes, dont Nicole Kidman dans un rôle d'autre part détestable) ne nous suscite qu'un maigre attachement dans leur fonction héroïco-vindicative à bâton rompu et à bout de souffle. 


Avec l'espoir d'y réviser mon jugement lors d'un second visionnage que j'aborderai avec plus de clémence et d'attention scrupuleuse puisque pleinement averti du contenu exigeant de l'aventure d'un autre temps. A découvrir quoiqu'il en soit. 

*Bruno Matéï

mardi 10 mai 2022

Black Water. Prix du meilleur réalisateur et de la meilleure photographie, Festival du film underground de Melbourne, 2007.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de David Nerlich et Andrew Traucki. 2007. Australie. 1h29. Avec Diana Glenn, Maeve Dermody, Andy Rodoreda, Ben Oxenbould, Fiona Press.

Sortie Video France: 3 Juin 2008

FILMOGRAPHIE: Andrew Traucki est un réalisateur, scénariste et producteur australien. 2013: The Jungle. 2012 The ABCs of Death (segment "G is for Gravity").  2012 Event Zero (TV Series) (1 episode). - Harriet (2012).  2010 The Reef .  2007 Black Water.


3 ans avant le tétanisant The Reef (le film de requin le plus flippant que j'ai pu voir avec Open Water) l'australien Andrew Traucki traita déjà du monstre aquatique avec le terrifiant Black Water lui aussi directement sorti en video dans nos contrées. Tiré d'une histoire vraie, l'intrigue s'inscrit en mode huis clos maritime lorsque 3 touristes se retrouvent perchés sur un arbre après l'attaque sanglante de leur guide par un crocodile dans le Nord de l'Australie. Attendant vainement d'éventuels secours, ils ne pourront compter que sur leur  autonomie, leur sang froid et leur bravoure de dernier ressort pour tenter de venir à bout des menaces du monstre carnassier. Eprouvant à plus d'un titre et franchement angoissant lorsqu'il ne s'agit pas de terreur viscérale de par son réalisme documenté, Black Water met mal à l'aise le spectateur assistant impuissant avec une appréhension à la fois anxiogène et déprimante aux tentatives désespérées du trio de protagonistes en perte de repère dans ce refuge naturel dénué de présence humaine. Il faut d'ailleurs préciser qu'à travers cette scénographie blafarde à la fois glauque et inquiétante, alourdi de la discrétion d'une partition cafardeuse, sa photo naturaliste et les profils dépouillés de ces comédiens méconnus (chez nous) concourent d'intensifier l'action imprévisible avec une efficacité gratifiante.


Notamment eu égard de la manière leste du réalisateur à renforcer la crédibilité de son contexte cauchemardesque (doux euphémisme !) par des situations de panique et d'offensive dénuées de surenchère. Si bien que l'on reluque les faits et gestes de nos survivants blottis dans cet unique décor inhospitalier (ils se cramponnent d'un arbre à un autre pour éviter de mettre les pieds dans l'eau et tenter de rejoindre un bateau) avec l'idée en tête d'y prédire qui pourrait sortir en vie de ce piège à touriste. Andrew Traucki adoptant un parti-pris aussi cruel qu'intolérable quant à la destinée précaire de ses personnages en proie à une épreuve morale et physique jusqu'au-boutiste. Autant avouer sans ambages que Black Water parvient sous le moule de la série B indépendante à susciter fréquemment angoisse, empathie, tension et effroi auprès des apparitions insidieuses (ou fulgurantes) du monstre que ceux-ci tentent de repousser à travers stratégies d'échappatoire redoutablement couillues (pour ne pas dire suicidaires en se posant la question de savoir que ferions-nous en pareille occasion ?). Ce qui nous mène vers un final d'une cruauté franchement poignante (pour ne pas dire bouleversante auprès des plus sensibles) qu'une des héroïnes instille avec un art consommé de la bravoure en désespoir de cause. Et ce même si on aurait parfois préféré un tantinet plus de substance au niveau des caractérisations humaines même si on reste infiniment attaché à leur sort précaire à faible lueur d'espoir (j'insiste à nouveau sur le caractère âpre de son ambiance malsaine d'un calme étouffé au sein de cette végétation étrangement sombre et hostile). 


Hymne à la bravoure solidaire au sein d'un contexte cauchemardesque faisant office de véritable descente aux enfers (humectée), Black Water détonne par sa dramaturgie éplorée eu égard de la terreur viscérale perçue par nos protagonistes et du réalisme escarpé de leurs situations oppressantes réalisées avec souci documenté. Si bien qu'avant l'estomaquant The Reef, Andrew Traucki (accompagné qui plus est de son acolyte David Nerlich) réalisa déjà l'exploit d'y parfaire le film de croco le plus flippant que l'on ai vu sur la toile (même si les références sont trop peu nombreuses, pour ne pas dire inexistantes). Une référence au demeurant donc à ne surtout pas rater si bien que la peur au cinéma s'y fait d'autant plus rare et clairsemée.

Ci-joint chronique de The Reef: https://brunomatei.blogspot.com/2019/08/the-reef.html

*Bruno Matéï
2èx