samedi 22 mai 2021

L'Homme de l'Ouest

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Man of the West" de Anthony Mann. 1958. 1h40. Avec Gary Cooper, Julie London, Lee J. Cobb, Arthur O'Connell, Jack Lord, John Dehner 

Sortie salles France: 26 Décembre 1958 

FILMOGRAPHIEAnthony Mann, de son vrai nom Emil Anton Bundsmann, est un réalisateur et scénariste américain, né le 30 juin 1906 à San Diego (Californie) et mort le 29 avril 1967 à Berlin (Allemagne). 1950 : La Porte du diable. 1950 : Winchester '73. 1951 : Quo vadis de Mervyn LeRoy (Anthony Mann tourne les scènes de l'incendie de Rome). 1952 : Les Affameurs. 1953 : L'Appât. 1960 : Spartacus. Film terminé et signé par Stanley Kubrick probablement en raison de désaccords avec Kirk Douglas, producteur du film. 1960 : La Ruée vers l'Ouest. 1961 : Le Cid. 1964 : La Chute de l'Empire romain. 1965 : Les Héros de Télémark. 1968 : Maldonne pour un espion. 


Etonnant de découvrir un western aussi sombre, aussi crépusculaire et aussi violent en cette année 1958 qu'Anthony Mann (quelle pléthorique filmo !) réalise froidement dans son refus de concession. Incarné par un Gary Cooper aussi glaçant qu'étonnamment aigri (pour ne pas dire acrimonieux à travers l'expression de son regard dépité), l'Homme de l'Ouest s'alloue d'une surprenante noirceur au fil d'un vénéneux récit y fustigeant la violence expéditive. Ainsi, l'intrigue se tisse autour du profil taciturne de Link Jones (Gary Cooper), ancien hors la loi en cavale recherché depuis 15 ans mais qui s'avère aujourd'hui humaniste (comme il l'avoue si bien lors d'une réplique avec un partenaire) après avoir déclarer forfait avec les armes. Or, lors de l'attaque d'un train par 3 bandits, Link est contraint de poursuivre sa route à pied en compagnie d'une chanteuse et d'un joueur professionnel. C'est dans une demeure isolée qu'il décide de trouver refuge afin de se protéger du froid à l'approche de la nuit tombée. Mais le lieu est déjà abrité par les 3 bandits du train de marchandise ainsi que par une vieille connaissance de Link, Dock Tobin, son leader d'autrefois qui l'enseigna au braquage et au crime. Ainsi, pour tenter de survivre et protéger ses deux compagnons de fortune, Link devra renouer avec ses instincts de haine. 


Fort d'un climat quelque peu dépressif, tout du moins anxiogène et particulièrement obscur, l'Homme de l'Ouest affiche un sentiment d'insécurité fétide parmi les présences délétères des bandits se délectant à extérioriser leurs bas instincts pour le plaisir d'y perpétrer le mal. La force dramatique de l'intrigue résidant dans le profil moral de Link Jones sévèrement malmené, molesté et vulnérable par les brimades de ces malfrats avant de renouer peu à peu avec la violence dans son enjeu d'auto-justice. Il est d'ailleurs étonnant d'observer un cowboy héroïque aussi atone, contrarié et hésitant lors de ses prises de position timorées à tenter de s'opposer aux assaillants. Anthony Mann attachant notamment une certaine importance aux rapports intimes qu'il s'alloue avec la chanteuse lors d'une romance impossible pour autant pleine de dignité et de déférence dans leur rapport commun de confiance. On reste enfin impressionné par ses séquences d'actions chiadées qui plus est renforcée d'une violence âpre assez inédite pour l'époque si je ne m'abuse. D'ailleurs la bagarre à poing nu que Link s'échange avec un des malfrats s'avère d'une cruauté rigoureuse à travers son intensité dramatique de longue haleine. Un combat interminable, moment anthologique assez pénible à observer lorsque Link se laisse toujours plus happer par ses bas instincts de vendetta après avoir essuyer de terribles coups et lorsque la victime lui supplie vainement d'arrêter. 


Superbement mis en scène en y exploitant (tout en contraste) autant ses vastes décors naturels qui environnent la bâtisse que ce huis-clos caverneux à l'atmosphère aussi malsaine qu'étouffante (Tarantino s'en serait d'ailleurs peut-être inspiré pour accomplir ses 8 salopards si j'ose dire), l'Homme de l'Ouest s'alloue d'originalité et d'audace pour y dépoussiérer le western classique à travers ces portraits de cow-boys sclérosés, usés par leur déchéance animale (d'autrefois ou tristement actuelle). Grand classique classieux indispensable.

*Bruno

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