mardi 6 juillet 2021

Les Guerriers de l'Enfer

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"Who'll Stop the Rai" de Karel Reisz. 1978. U.S.A. 2h06. Avec  Nick Nolte, Jonathan Banks, Michael Moriarty, Tuesday Weld, Anthony Zerbe, Richard Masur, Ray Sharkey, Gail Strickland.

Sortie salles France: ?. U.S: 2 Août 1978

FILMOGRAPHIEKarel Reisz est un réalisateur, producteur et théoricien du cinéma puis un metteur en scène de théâtre britannique d'origine tchécoslovaque, né le 21 juillet 1926 à Ostrava (ex-Tchécoslovaquie), décédé le 25 novembre 2002 à Londres. 1955 : Momma Don't Allow (court métrage documentaire). 1958 : We Are the Lambeth Boys (documentaire). 1960 : Samedi soir, dimanche matin. 1964 : La Force des ténèbres. 1966 : Morgan. 1968 : Isadora. 1974 : Le Flambeur. 1978 : Les Guerriers de l'enfer (Who'll Stop the Rain). 1981 : La Maîtresse du lieutenant français. 1985 : Sweet Dreams. 1990 : Chacun sa chance. 1994 : Performance - épisode The Deep Blue Sea (TV). 2000 : Act Without Words I (TV).


Découvrir pour la 1ère fois en 2021, et à titre de (grande) curiosité, ce drame guerrier totalement passé aux oubliettes prouve à quel point le cinéma des années 70 reste une source intarissable de classiques inoxydables de par son âpre réalisme dénué de fioriture. Car Les Guerriers de l'Enfer a beau être honteusement non reconnu, il demeure selon moi l'un des plus forts témoignages que le cinéma ricain nous ait offert sur la guerre du Vietnam. En tout état de cause le plus intègre, le plus authentique, le plus  sombre et désespéré à travers son climat fétide transpirant haine et avarice. Omettez cependant son titre fallacieux que les français ont osé singer afin sans doute de rameuter le grand public friand d'action belliqueuse, si bien que "Qui arrêtera la pluie" "Who'll Stop the Rai" est avant tout un puissant drame psychologique que Nick Nolte (certains critiques prétendent qu'il s'agit - à raison - d'un de ses meilleurs rôles), Michael Moriarty (toujours abonné aux seconds-rôles de paumé avenant avec un talent ici au diapason !), Tuesday Weld (superbe portrait de femme fragile en junkie en devenir) impriment de leur talent avec une force d'expression tacitement sentencieuse. Par conséquent, l'intrigue tourne autour de la rivalité latente entre des agents fédéraux vénaux (principalement une paire d'engeances ne reculant devant rien pour gruger 2 kilos d'héro) et 2 combattants du vietnam tout juste rentrés au bercail. Or, livré à lui même et traumatisé par les horreurs du passé, John Converse (Michael Moriarty) se permet de passer en contrebande de l'héroïne avec l'aide de son comparse Ray Hicks (Nick Nolte), jeune loup autrement stoïque. 


Mais au moment du R.V fixé au foyer conjugal, Ray se retrouve seul avec l'épouse de John ignorant tout de leur transaction alors que 2 flics y surveillent sa demeure. Voilà pour l'exposé brillamment mis en scène si bien que Karel Reisz affiche une circonspection à la présentation de ces personnages empotés impliqués dans un pathétique compromis avec des agents sans vergogne. C'est également ce qui fait la force de l'intrigue habilement structurée (puisque TOUJOURS imprévisible) car plus le méchant est réussi, meilleur le film sera ! Autant dire que l'oeuvre à la fois insidieuse et lestement malsaine captive dès le départ avec l'entrée en matière de tous ces personnages véreux ne comptant que sur leur indépendance pour venir à bout de leur désir. Anti-manichéen quant à ses anciens combattants fascinés par le nouveau marché juteux de la drogue dure, les Guerriers de l'Enfer laisse un goût de plus en plus âcre dans la bouche lorsque ceux-ci ont décidé de passer au front lors d'un final westernien d'une originalité audacieuse. Karel Reisz  injectant une dose d'ironie acide à travers sa sinistre farce de règlements de compte sanglants. Une mise en scène "pop rock opératique" détournant le symbolique "peace and love" peinturée sur une falaise, où l'action lisible s'y confine d'autant plus de nuit ! Intense et captivant, de par son suspense aléatoire et la posture couillue de ces protagonistes aussi entêtés que suicidaires, Les Guerriers de l'Enfer suscite une émotion à la fois trouble et poignante auprès de ces laissés pour compte se réfugiant dans l'illusion de la drogue en guise d'exutoire moral. 


Remarquablement interprété par un cast vibrant d'émotions dépouillées de par le brio de la mise en scène soumise à leurs actions acharnées, les Guerriers de l'Enfer nous laisse sur une mélancolique impression de défaite en dépit de sa lueur d'espoir de dernier ressort que l'on entérine facilement. D'une intensité dramatique sobrement instillée, ce grand film âpre, violent et pessimiste cultive un sentiment d'amertume poignant à travers son réquisitoire contre les conséquences morales de la guerre du Vietnam tout en égratignant ostensiblement le piège avilissant de la drogue. C'est donc évidemment à ne pas rater afin de tenter de lui offrir une seconde vie, bouche à oreille aidant si possible. 

*Eric Binford (immense merci à buddy-movierepack, en espérant voir débarquer un jour prochain une édition blu-ray digne d'éloges, on a bien le droit de rêver !)

Ci-joint sa superbe affiche ricaine :

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