jeudi 16 septembre 2021

Candyman (2021)

                                  Photo empruntée sur Facebook par l'entremise de Thierry Spadino

de Nia DaCosta. 2021. U.S.A. 1h31. Avec Yahya Abdul-Mateen II, Teyonah Parris, Nathan Stewart-Jarrett, Colman Domingo, Vanessa A. Williams, Tony Todd, Rebecca Spence.

Sortie salles France: 29 Septembre 2021. U.S: 27 Août 2021

FILMOGRAPHIENia DaCosta est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 8 novembre 1989 à New York. 2018 : Little Woods (réalisation et scénario). 2021 : Candyman (réalisation et scénario). 2022 : The Marvels (réalisation). 


La corruption du Mal par la rancoeur. 
Sortir de la projo de Candyman 2021 n'est point une mince affaire de par sa vénéneuse noirceur et son nihilisme sociétal davantage déclinant. Vendu comme un Remake du chef-d'oeuvre de Bernard Rose, Candyman 2021 n'est nullement l'épigone réactualisé au goût du jour pour contenter le chaland en mal de sensations fortes. Tant et si bien que Candyman, LA SUITE, s'adresse avant tout à un public à la fois mature et responsable tant son climat austère, hermétique n'est pas à la merci de tous afin de l'approcher dans un strict premier degré (pas une once d'humour à relever à l'horizon). Rare pour ne pas le souligner en cette année catastrophique (selon moi évidemment) pour le genre horrifique réduit au produit de consommation. C'est dire si cette version résolument personnelle ne fera l'unanimité auprès du public peu habitué à fréquenter une oeuvre intime dénuée de fard puisque s'intéressant avant tout à nous caractériser une galerie de personnages afro-américains hantés par leur condition esclavagiste auprès d'une civilisation blanche incapable de s'extraire de la haine de l'étranger auprès des ignorants et extrémistes épeurés par la différence. Formellement stylisé à travers ses ombres chinoises, ses figures géométriques, ses tableaux picturaux et ses éclairages flashy compromis au baroque épuré, Candyman 2021 est un éblouissement esthétique en perpétuelle créativité. Et à ce niveau, on peut clamer le chef-d'oeuvre formel aussi moderne qu'atypique (certains plans évoquant par ailleurs une scénographie futuriste tout à fait appropriée et non conçu comme une fioriture de remplissage). 


Un parti-pris idoine d'y dénoncer en filigrane l'exploitation des noirs dans le domaine de l'art auprès de la suprématie blanche quand bien même les violences policières demeurent davantage factuelles si je me réfère à son final horrifique à la dramaturgie malaisante. On quitte donc l'épreuve horrifique avec un arrière goût de souffre et d'amertume dans la bouche eu égard de son dénouement mortifié militant pour une vendetta, faute de la fracture irréversible entre blancs et noirs d'où la communication est feinte faute de simulacre prodigué. Ainsi, derrière son contexte social amer, Candyman 2021 dégage une atmosphère d'angoisse sous-jacente quasi indicible au fil d'un cheminement moral indécis ponctué de bipolarité et de revirements fréquemment malaisants. Sans compter ses scènes de terreur sournoises, démoniales, acrimonieuses lorsque apparaît derrière la victime le croquemitaine appréhendant ses proies de manière éthérée. Sa présence souvent invisible (mais brièvement visible au fond du miroir par le spectateur !) provoquant chez nous une peur viscérale à la fois malsaine et étouffante d'y redouter l'inévitable, renforcée qui plus est d'un goût pour une certaine crudité sanguine à travers son réalisme gore littéralement cinglant. Quant aux interprètes hétéros (mais aussi gays pour y défendre leur cause plus qu'actuelle), quelle judicieuse idée d'avoir sélectionné des comédiens pour la plupart méconnus du public pour mieux se familiariser, s'impliquer dans leurs tourments moraux sous l'impulsion d'une rigueur dramatique (parfois trop) inconfortable. D'où l'aspect  régulièrement déconcertant, voir quelque peu antipathique de ce Candyman autonome n'adjurant nullement à être aimé et exploitant la trame de Bernard Rose avec une intelligence on ne peut mieux intègre, pour ne pas dire déférente. 


No Futur. 
Persuadé qu'un second visionnage permettra encore mieux d'apprivoiser cette séquelle difficile d'accès, mais lestement captivante (sans que l'on s'en aperçoive), Candyman 2021 demeure en tout état de cause une réelle surprise inattendue dans le paysage imberbe du remake aseptique souvent tributaire du copié-collé. Tant et si bien qu'ici c'est tout l'inverse qui se produit en mode (véritable)"séquelle" pour attirer le chaland et (surtout) le passionné du genre en manque de 1er degré. Et ce au point d'y rejoindre les meilleurs spécimens du genre parmi lesquels trônent probablement sur vos étagères fétichistes, The Thing, La Mouche, Maniac, L'Invasion des Profanateurs, La Colline a des Yeux, Le Cauchemar de Dracula, La Féline, Suspiria et quelques autres pépites... 
A découvrir avec précaution donc en étant averti du contenu à la fois opaque, cérébral, hermétique, au point de sortir de la projo avec une certaine gueule de bois... (je me demande d'ailleurs encore ce à quoi je viens d'assister ce soir là ! ?).

*Eric Binford. 

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