samedi 1 janvier 2022

The Card Counter

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Paul Schrader. 2021. Angleterre/U.S.A. 1h52. Avec Oscar Isaac, Tye Sheridan, Willem Dafoe, Tiffany Haddish, Britton Webb, Amye Gousset, Joel Michaely.

Sortie salles France: 29 Décembre 2021

FILMOGRAPHIE: Paul Schrader est un scénariste et réalisateur américain né le 22 juillet 1946 à Grand Rapids (Michigan).1978 : Blue Collar (également scénariste). 1979 : Hardcore (également scénariste). 1980 : American Gigolo (également scénariste). 1982 : La Féline (Cat People). 1985 : Mishima (Mishima: A Life in Four Chapters) (également scénariste). 1987 : Light of Day (également scénariste). 1988 : Patty Hearst. 1990 : Étrange Séduction (The Comfort of Strangers). 1992 : Light Sleeper (également scénariste). 1995 : Chasseur de sorcières (Witch Hunt) (téléfilm). 1997 : Touch (également scénariste). 1997 : Affliction (également scénariste). 1999 : Les Amants éternels (Forever Mine) (également scénariste). 2002 : Auto Focus. 2005 : Dominion: Prequel to the Exorcist. 2007 : The Walker (également scénariste). 2008 : Adam Resurrected. 2013 : The Canyons. 2014 : La Sentinelle (Dying of the Light) (également scénariste). 2016 : Dog Eat Dog (également scénariste). 2017 : Sur le chemin de la rédemption (First Reformed) (également scénariste). 2021 : The Card Counter. 


"Tout ce qui est fait dans le présent affecte l'avenir en conséquence, et le passé par rédemption."
Sorti en catimini chez nous le 29 Décembre 2021 en dépit de ces critiques élogieuses, The Card Counter est le nouveau film évènement de l'éminent Paul Schrader, réalisateur et scénariste de génie à la filmo aussi passionnante qu'éclectique. On peut également souligner qu'en tant que producteur exécutif, Martin Scorcese s'y porte signataire, les 2 individus ayant déjà collaboré à moult reprises tout le long de leur carrière en guise d'amitié professionnelle. Véritable uppercut cinégénique à travers le génie de sa mise en scène studieuse littéralement hypnotique, The Card Counter demeure une moment de cinéma comme on n'en voit que trop rarement aux confins de nos salles obscures (trop souvent tributaires de divertissements décérébrés sans âme). Tant et si bien que certains n'hésiteront pas à le qualifier de "chef-d'oeuvre" de par l'odyssée mortifiée qui s'esquisse sous nos yeux avec une puissance émotionnelle somme toute assez réservée. Celle d'un joueur de poker solitaire partagé entre l'expiation et la rédemption à la suite de ses anciennes exactions perpétrées sur des prisonniers de guerre au camp de Guantánamo (centre de détention militaire situé à Cuba avec son lot de présumés terroristes islamistes). Dans la mesure où fraîchement sorti de prison, William Tell, ancien militaire donc, rencontre Cirk lors d'une conférence. Un jeune marginal lui sollicitant de kidnapper l'orateur de la tribune, le colonel John Gordo, commanditaire responsable du suicide de son père. 

Ainsi, à travers cette sombre trame savamment planifiée au sein d'un cheminement interrogatif aussi imprévisible que sinueux, Paul Scharder, résolument amoureux de tout ce qu'il filme, entre pudeur et sobriété, nous transfigure deux profils psychologiques meurtris par l'injustice, la solitude, l'échec et la mort. La vigueur émotionnelle du vénéneux récit qui se trame sous nos yeux émanant principalement de l'ambivalence de l'anti-héros William Tell qu'Oscar Isaac immortalise de sa présence quasi fantomatique en vindicateur de dernier ressort aussi angélique de démonial. Paul Schrader se chargeant de dresser son (fragile) portrait plein de discrétion et de non-dit sous l'impulsion du jeune apprenti Cirk avide d'auto-justice (superbement campé par Tye Sheridan à travers ses expressions sciemment moins affirmées par son immaturité). Quand bien même La Linda, financière afro ricaine, accepte d'entrainer quotidiennement William dans les compétitions de poker après l'avoir influencé. Et si le récit latent, tout à la fois simple, millimétré et complexe, ne cesse de nous interroger sur les véritables motivations des protagonistes, c'est pour mieux nous happer dans les méandres Spoil ! d'une inopinée vengeance funèbre lors d'une ultime demi-heure à la fois sinistrée et désespérée dans sa tension infernale Fin du Spoil. Et ce sans céder à une violence graphique largement suggérée par l'intelligence d'une mise en scène hyper scrupuleuse habitée par une forme de grâce. Si bien que l'on peut également prétendre que l'ombre de Taxi Driver plane sur les épaules de cet ex militaire traumatisé par ses propres exactions criminelles après avoir essuyé l'autorité d'un colonel sans vergogne. Son évolution morale étant orchestrée par une partition musicale lancinante insufflant au climat anxiogène du récit une puissance formelle ensorcelante. On peut donc évoquer le pur film d'ambiance au sein d'une photo limpide soumise à l'étrangeté des silences pesants et des regards impassibles.


American Nightmare.
Grand moment de cinéma révolu sublimant dans l'épure une fragile réflexion sur l'indécision d'une vengeance à travers les thèmes de la perte de l'innocence, de l'expiation, du pardon, de la peur de la souffrance et de l'amour, The Card Counter est autant habité par sa mise en scène au cordeau que par ces comédiens occultes communément rattachés à une valeur humaine en perdition. Du grand art.  

*Eric Binford
vost

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