samedi 31 mai 2025

Fear Street, partie 3 : 1666. de Leigh Janiak. 2021. U.S.A. 1h52. Avec Kiana Madeira Ashley Zukerman Gillian Jacobs

                                                     
                                                    (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site IMDb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives).
 
"Que la Terre Se Souvienne".
Dernier acte d’une trilogie horrifique ambitieuse, Fear Street: 1666 troque le psycho-killer urbain pour l’horreur rurale, en nous plongeant au cœur d’un village puritain rongé par le fanatisme, le feu et le sang. Dans cette relecture de la malédiction originelle, Leigh Janiak revisite les sorcières et les bûchers pour mieux questionner les racines de la haine — celle qui condamne sans preuve, celle qui brûle au nom de Dieu. On y retrouve les visages familiers de Deena et ses compagnons, projetés dans les peaux de leurs ancêtres, comme pour boucler la boucle dans une boucle encore plus vaste : celle du temps, du trauma et de la répétition.
 
Mais si ce retour aux origines intrigue par son cadre crasseux et sa noirceur biblique, l’enchantement, la passion est, parfois, moins magnétique. Moins viscéral que 1994, moins funèbrement baroque que 1978, ce troisième opus ralentit, s’épure presque. L'accent porté sur le discours social et l’allégorie prend un peu le pas sur le vertige sensoriel des précédents volets. Or, sous la terre imbibée de sang et les prêches enragés, une fièvre couve toujours : celle de l’amour interdit, de la vengeance ancestrale, de la quête de vérité, de la mémoire qu’on refuse de laisser mourir.
 
 
La mise en scène, plus sobre, se pare d’ombres suffocantes, de clair-obscurs terreux, où les fantômes de l’Histoire — et de l’intolérance — rôdent, silencieux. Sarah Fier, enfin révélée, cesse d’être un mythe (et c'est là la surprise de cet ultime volet !) pour redevenir une jeune femme humiliée, trahie, déchue. Et c’est dans ce renversement que le film touche au cœur, renouant avec une émotion brute, presque rédemptrice. La seconde moitié — retour en 1994 — ressuscite enfin l’énergie première, le rythme battant, les idées retorses en crescendo et nous entraîne vers une conclusion cathartique, entre chaos coloré et éclats de vérité pour notre plus grand bonheur de cinéphile complice.
 
S’il me reste une préférence pour les deux premiers chapitres — plus enivrés, plus rageurs, plus imprégnés d’une nostalgie sanglante sans effets de manche — 1666 complète pourtant le cercle avec un regard plus grave, presque mélancolique. Car c’est aussi cela que scelle cette trilogie : l’impossible oubli, le refus de l’oubli. Une lutte pour briser les chaînes, pour hurler dans les ténèbres que la peur ne nous possédera pas éternellement.
 
Gratitude à vous, madame Leigh Janiak, pour avoir su faire saigner le passé à nouveau dans votre parti-pris féministe où l'émotion spontanée ne fut jamais occultée.
 
30.05.25.
Vost

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