vendredi 9 mai 2025

The Ugly Stepsister / Den stygge stesøsteren

                         (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site IMDb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives).

de Emilie Blichfeldt. 2024. Norvège/Pologne/Suède/Danemark.1h48. Avec Lea Myren, Thea Sofie Loch Næss, Ane Dahl Torp, Flo Fagerli, Isac Calmroth, Malte Gårdinger. 

Sortie salles France: 2 Juillet 2025

FILMOGRAPHIEEmilie Blichfeldt est une réalisatrice, scénariste et productrice norvégienne. 
The Ugly Stepsister est son premier long-métrage. 


« Derrière le miroir, le cauchemar d’une perfection mutilée. »
Dans notre société aseptisée, où l’apparence grignote chaque jour un peu plus les nobles sentiments, The Ugly Stepsister (La vilaine demi-sœur) brandit son étendard goguenard. Déconstruction vitriolée de Cendrillon, le film s’illustre par des plans sanglants et carrément pornographiques (!!!), à la lisière du malaise. Pour sa première réalisation, Emilie Blichfeldt aborde la chirurgie plastique, l’élitisme et le patriarcat avec une ironie si acerbe qu’elle nous emporte vers une trajectoire émétique, son final jusqu’au-boutiste n’épargnant aucun haut-le-cœur, même chez les plus aguerris.

The Ugly Stepsister déborde de provocations paillardes, orales, organiques — et dresse sans ambages, avec un humour corrosif, le portrait miséreux d’une princesse en devenir, prête à martyriser son corps pour séduire le prince charmant qu’elle idolâtre jusque dans ses rêves moites. Un prétendant aussi superficiel qu’elle, davantage queutard qu’amoureux, considérant la femme comme simple chair consommable. Cette galerie de personnages, tous plus détestables les uns que les autres, Emilie Blichfeldt les caricature avec un réalisme mordant. Sa mise en scène inspirée, ponctuée de ruptures de ton (génial score électro à l’appui), porte un film en costume visuellement renversant.


La photo, gothique et charnelle, a du caractère : un onirisme contrasté, pailleté et sensuel, au service d’un cadre aristo grotesque, faisandé, ordurier. À l’image de cette figure maternelle, matrone cupide érigée en icône de vulgarité lubrique, prête à sacrifier ses rejetons pour asseoir sa propre destinée.

Admirablement construit, traité avec invention et un langage visuel percutant, le film distille une dimension dramatique éprouvante, sans jamais prévenir. The Ugly Stepsister confine au malaise viscéral lors de la descente aux enfers dégénérative de cette jouvencelle, irrémédiable. Constamment sarcastique, moralement rigoureux et sanguinaire jusqu’à la nausée, le dernier acte — anthologique — ne se complaît jamais. Il nous laisse K.O., par la maîtrise de nos sentiments malmenés par la doctrine du paraître et la sexualité consumériste. Jusqu'aux larmes de la déchéance la plus basse et démunie. 


« La beauté comme seule arme. La chair comme seul prix. »
Un uppercut sincère, perturbant, chargé d’intentions payantes pour secouer les consciences. Une proposition horrifique, lucide et insolente, qui dit tout de la déshumanisation de notre chair nouvelle — tributaire du bistouri, de la drogue et de la (mal)bouffe. Une farce noire norvégienne qui nous étreint la gorge comme une corde de pendu. 

Pour public averti.

*Bruno

Récompenses: Corbeau d'Argent, Prix du Public, BIFF Bruxelles, 2025.

                                 (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site IMDb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives).

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