Photo empruntée sur Google, appartenant au site Ecranlarge.com
de Michael Winner. 1977. U.S.A. 1h35. Avec Christina Raines, Ava Gardner, Chris Sarandon, Burgess Meredith, Sylvia Miles, José Ferrer, Arthur Kennedy, John Carradine, Christopher Walken, Eli Wallach, Jerry Orbach, Jeff Glodblum, Beverly D'Angelo, Martin Balsam, William Hickey, Tom Berenger.
Sortie salles U.S: 7 Janvier 1977
FILMOGRAPHIE: Michael Winner est un réalisateur britannique né le 30 Octobre 1935 à Londres.
1967: Qu'arrivera t'il après ?, 1971: les Collines de la Terreur, 1971: l'Homme de la loi, le Corrupteur, 1972: Le Flingueur, 1973: le Cercle noir, 1973: Scorpio, Un justicier dans la ville, 1976: Won ton ton, 1977: la Sentinelle des Maudits, 1978: le Grand Sommeil, 1979: l'Arme au poing, 1982: Un justicier dans la ville 2, 1985: le Justicier de New-York, 1988: Rendez-vous avec la mort, 1993: Dirty Week-end.
"Hallucinations sépulcrales au 7e étage".
Surfant sur la vague des succès satanistes de l'époque, Michael Winner s’essaie au genre horrifique en adaptant The Sentinel, roman de Jeffrey Konvitz. Entourée d’une pléiade de stars peu habituées à côtoyer les marges du cinéma de genre, cette série B surprenante, nantie d’une certaine renommée, a fini par s’élever au rang de classique dans la catégorie des vilains p’tits canards déviants.
Le pitch :En quête d’indépendance, Alison Parker quitte le domicile de son fiancé pour emménager dans un appartement new-yorkais, à Brooklyn. Rapidement, d’étranges manifestations s’accumulent : des bruits au-dessus du plafond la nuit, des voisines saphiques surgies de nulle part, et, au sommet de l’immeuble, un vieillard aphone qui semble scruter le monde à travers sa fenêtre.
Imprégnée de son ambiance Seventies, La Sentinelle des Maudits capte l'attention sans faiblir grâce à l’inquiétude latente qui innerve ce sinistre immeuble. Émaillée de séquences chocs, parfois sanguinolentes et terrifiantes (le corps nu du père d’Alison tailladé à coups de couteau !), et de visions d’effroi — ce final mémorable, érigeant une parade monstrueuse ! — Michael Winner cherche clairement à provoquer un malaise hétérodoxe, en assumant le caractère profondément déviant de ses situations.
À mesure que les hallucinations se multiplient, que l’esprit d’Alison vacille, Christina Raines insuffle à son personnage une densité humaine, une fragilité lestée de soupçons et d’un émoi suicidaire en guise de dernier recours. Winner lâche alors les rênes à une imagerie lubrique : orgies de vieillards salaces, libertinage insolent de lesbiennes insatiables — et cette séquence osée, burnée, d’une masturbation aussi gênante qu’inoubliable, comme seuls les Seventies savaient en produire.
Par son intrigue interlope habilement construite, La Sentinelle des Maudits distille son intensité dans les méandres que l’héroïne tente d’éclaircir, entre le poids du clergé et le soutien ambivalent de son amant. Ce dernier, jadis suspecté du meurtre de sa première épouse, incarne l’ambiguïté ambiante. Comme lui, tous les personnages qui traversent le récit s’avèrent distants, austères, équivoques — voire spectres désincarnés. Le Monseigneur Franchino au comportement trouble, le flic arrogant en mal de reconnaissance, dont le cabotinage paranoïaque frôle le grotesque, renforcent encore l’étrangeté du récit.
"Parade nécrosée au sommet de Brooklyn".
Modestement réalisé, le film privilégie un climat d’étrangeté sourde, presque insidieuse, baigné d’une ambiance malsaine, parfois franchement effrayante, traversée de visions d’horreur nécrosées. La Sentinelle des Mauditss’impose ainsi comme un must du genre, porté par sa galerie de personnages sclérosés et la folie macabre qui martyrise son héroïne, acculée au seuil de la damnation. Grâce à l’habileté légendaire des maquillages de Dick Smith, Michael Winner grave dans la rétine une poignée de séquences cauchemardesques, plongées dans la pourriture et la décrépitude. Si bien que l’on reste tétanisé d’effroi face à ce génial récit de patrimoine sépulcral.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site geektyrant.com
de Jim Mickle. 2013. France/U.S.A. 1h45. Avec Kelly McGillis, Michael Parks, Wyatt Russell, Ambyr Childers, Julia Garner, Bill Sage.
Sortie salles France: Prochainement. U.S: 18 Janvier 2013
FILMOGRAPHIE: Jim Mickle est un réalisateur et scénariste américain.
2006: Mulberry Street. 2010: Stake Land. 2013: We are what we are.
Jim Mickle nous avait déjà surpris avec Mulberry Street, un premier film maladroit et redondant mais plutôt prometteur dans sa vision apocalyptique d'un monde contaminé par un mystérieux virus. Son second essai, Stake Land nous a assuré un survival post-apo perfectible mais plein de bonnes intentions dans sa réactualisation du mythe vampirique tout en dressant un joli portrait de fuyards farouches. Avec We are what we are, le réalisateur grimpe d'un échelon dans sa maîtrise de réalisation pour décrire en l'occurrence une histoire de cannibalisme inscrite dans notre époque contemporaine ! Faute d'une vieille tradition, une famille est contrainte de perpétrer une fois par an un acte de cannibalisme afin d'honorer la survie de leurs descendants. Mais une tempête torrentielle finit par dévoiler à la police certains indices d'ossements retrouvés aux abords d'une rivière.
Partant de l'idée originale du film mexicain Ne nous jugez pas, Jim Mickle réexploite intelligemment le filon sans passer par la mode du remake. Si les 45 premières minutes peinent à démarrer, faute d'un rythme languissant où l'ambiance dépressive exacerbe ce sentiment de désuétude, la narration va progressivement accroître un intérêt dans la caractérisation interlope d'une famille religieuse. Avec l'élégance d'une photo limpide aux images parfois ténues, We are what we are traite ici de fondamentalisme sous l'autorité d'un paternel entièrement voué à la cause de Dieu pour la théorie du cannibalisme. Rongés par le chagrin depuis la mort accidentelle de Mme Parker, ses deux filles ainsi que le fils cadet vont devoir se mesurer à son intransigeance afin de perpétrer une tradition inscrite dans la filiation. Si le film exploite habilement ce thème grand-guignolesque pour dénoncer l'intégrisme, il le traite d'autant mieux avec une densité psychologique vis à vis de la posture démunie des enfants et le souci réaliste de nous familiariser avec cette lignée recluse. Avec fragilité, le metteur en scène se focalise sur le fardeau désespéré des soeurs Parker (les actrices dévoilent naturellement un jeu glaçant d'anémie !), contraintes d'obtempérer au paternel pour assassiner de sang froid une pauvre fille enchaînée dans la cave. Mais rongées de remord et de honte, leur regain de pudeur est peut-être un pas vers la rédemption, d'autant plus que l'innocence de leur petit frère est à prémunir. Emaillé de séquences-chocs parfois inattendues, We are what we are met à mal à nos émotions d'empathie et nous extériorise un malaise lattent vis à vis du replis des soeurs Parker. Qui plus est, au rythme d'une musique monotone, le film véhicule sans fioriture un climat diaphane en osmose avec le climat pluvieux d'une rivière jonchée d'ossements humains. Plongé dans l'existence esseulée de cette famille en perdition, le spectateur semble, à l'instar des deux soeurs, abandonné à la solitude, même si l'une d'entre elles est sur le point de se réconforter dans les bras de l'adjoint du shérif. En poussant le bouchon très loin, le réalisateur va intensifier le drame psychologique qui se noue inévitablement en élaborant au final un affrontement paroxystique où l'explosion de l'horreur va sévèrement ébranler les plus sensibles d'entre nous !
En cinéaste avisé réfractaire aux artifices usuels du divertissement, Jim Mickle livre avec We are what we are son film le plus abouti et original dans une démarche auteurisante et avec l'entremise d'une interprétation hors-pair. En résulte une oeuvre austère remplie de mélancolie et de silence lourd, à mi-chemin entre le conte social (le père est comparable à la figure de l'ogre insatiable !) et l'horreur extrême (la barbarie hallucinée qui en découle face à l'achèvement punitif). 15.11.13 Bruno Matéï
Photo empruntée sur Google, appartenant au site horrorpedia.com
de Narcisso Ibañez Serrador. 1969. Espagne. 1h40. Avec Lilli Palmer, Christina Galbo, John Moulder Brown, Pauline Challoner, Tomas Blanco, Candida Losada, Mary Maude.
Sortie salles France: 9 Août 1972
FILMOGRAPHIE: Narciso Ibanez Serrador est un scénariste, producteur et réalisateur uruguayen, né le 4 Juillet 1935 à Montevideo (Uruguay).
1969: La Résidence. 1976: Les Révoltés de l'An 2000
Chef-d'œuvre d'épouvante gothique à l’aura perverse, d’autant plus troublante qu’elle découle du refoulement de jeunes collégiennes (défilé d’actrices particulièrement vénéneuses), La Résidence est un acmé de l’angoisse où l’ombre d’un tueur giallesque rôde derrière les murs d’une geôle scolaire.
Le pitch : Thérèse, nouvelle pensionnaire d’un internat du sud de la France, affronte la discipline sadique d’une directrice qui n’hésite pas à flageller les insolentes. Une nuit, Isabelle disparaît sans laisser de traces après avoir tenté de rejoindre le fils de l’administratrice…
Pour les amoureux d’épouvante séculaire à l’ambiance littéralement ensorcelante,La Résidence est une clef de voûte ibérique, traversée d’une puissance émotionnelle diaphane. Car à travers la claustration d’un pensionnat rongé par l’autoritarisme d’une matriarche (en tenue étriquée façon Ilsa, la louve SS, Lilli Palmer vampirise, éructe d’ambiguïté masochiste), Narciso Ibáñez Serrador nous plonge dans les racines de la perversité, sous l’emprise du conservatisme et de la sociopathie. Préfigurant les figures baroques de Suspiria (scénographie dominée par un univers presque exclusivement féminin, directrice raide comme Miss Tanner, meurtres stylisés), La Résidence dégage ce même magnétisme environnemental, où le mal semble infiltré jusque dans les murs.
En pleine possession de son talent de conteur (cheminement ombrageux en crescendo) et de sa maîtrise technique (caméra fluide, regard aiguisé), Serrador transcende un univers mortifère profondément immersif — autant par l’effronterie de ses personnages que par le point de vue d’un assassin invisible, voyeur permanent. Entre l’ombre du suspect et l’austérité glaçante de l’enseignante, le sentiment d’oppression, latente mais constante, prime sur la cruauté des exactions. Flagellations punitives sur les indociles, meurtres vertigineux sur les plus candides : tout concourt à l’étreinte.
Sur le même mode opératoire quePsychose, Serrador distille une montée progressive du suspense, s’abreuvant d’une menace sourde. Il tisse aussi une relation quasi incestueuse entre la directrice et son rejeton pubère — et va même plus loin qu’Hitchcock, avec une audace plus crue, plus insolente. Le climat malsain instauré par cette directrice saphique (quinquagénaire attirée par les jeunes collégiennes, éprise de sa comparse sadienne) contamine peu à peu les pensionnaires. Fantasmes lors d’une séance de couture, coucheries avec un paysan, scène de douche troublante sous l’œil humide d’une gouvernante : derrière ce portrait de jeunes filles insidieuses se cache un malaise existentiel, nourri par l’intolérance, le fanatisme religieux et le fétichisme d’une mégère interlope.
Le point d’orgue, d’un nihilisme foudroyant, scelle une véritable anthologie de l’effroi obscurantiste (un certain Lucky McKee s’en est peut-être inspiré pour façonner May). Quant à l’ultime image, littéralement dérangeante, elle hantera longtemps au-delà du générique final.
Profondément pervers, poisseux, et malsain, mais terriblement immersif grâce à son pouvoir de fascination irrépressible, La Résidence sublime son huis clos gothique au sein d’un internat rubigineux. Sa splendide photo sépia renforce l’aura vénéneuse de ses collégiennes en rut, victimes de l’endoctrinement d’une hiérarchie asexuée. Démonial, déviant, effronté : une terreur vertigineuse dont on se repaît, ad vitam aeternam. *Bruno 14.11.13. 3èx
Photo empruntée sur Google, appartenant au site pixagain.org
de Joko Anwar. 2012. Indonésie. 1h26. Avec Rio Dewanto, Hannah Al Rashid, Izzi Isman.
Sortie le 15 mai 2013
FILMOGRAPHIE: Joko Anwar est réalisateur, acteur et scénariste indonésien, né le 3 Janvier 1976
2005: Janji Joni. 2007: Dead Time: Kala. 2009: Pintu terlarang. 2012: Modus Anomali.
Survival indonésien goguenard et retors dans sa réhabilitation des codes du genre, Modus Anomali emprunte au suspense d'une énigme aussi confuse que déconcertante. A travers la fuite désespérée d'un quidam amnésique, perdu au beau milieu d'une forêt hostile, Joko Anwar livre un implacable thriller constamment imprévisible dans son lot de revirements abrupts !
Dans une forêt, un homme s'extirpe de la terre après avoir été enterré vivant. Poursuivi par un tueur sans visage, il se rend dans une maison abandonnée. A l'intérieur, il découvre la vidéo du meurtre de sa femme enceinte. Qu'en est-il de ses deux enfants ? La traque pour les retrouver et échapper au meurtrier ne fait que commencer !
Dans une mise en scène originale et inventive (la caméra exploite les décors et scrute la paranoïa du héros avec un sens du cadrage hétérodoxe !), le réalisateur distille une ambiance monocorde des plus déroutantes. Par le silence feutré de la végétation et l'attitude taciturne des protagonistes, Modus Anomali souhaite bousculer les habitudes du spectateurs embarqué dans un jeu de rôle hermétique. En prime, au sein de cette survivance de longue haleine, la manière dont le tueur utilise la paranoïa du héros laisse extérioriser une cruauté à l'humour noir grinçant pour les dommages collatéraux. Émaillé d'indices et de pièges, Joko Anwar fait donc subir à son personnagenombres d'épreuves physiques (sa planque dans une malle étroite alors qu'un feu est entrain de se propager !) et psychologiques ATTENTION SPOILER ! (le sort réservé à ses propres enfants, FIN DU SPOILER sa haine toujours plus viscérale de vouloir étriper son bourreau !)que n'aurait pas renié John Rambo et Evil Ash ! Cette atmosphère crépusculaire d'une forêt particulièrement délétère auquel un tueur s'y est planqué nous place dans une situation de doute, à l'instar du héros incessamment persécuté ! Sans céder à une esbroufe spectaculaire, le réalisateur opte le plus souvent sur le climat tendu d'un environnement étrangement onirique (la forêt superbement éclairée semble insuffler de temps à autre une aura fantasmatique héritée des contes de fée !) tout en nous ébranlant sur le caractère violent de certains évènements.
Passée cette première heure aussi déroutante qu'irrésistiblement inquiétante, la dernière partie va littéralement bouleverser la destinée de notre survivant dans une mise en abîme désarçonnante ! Si personnellement, j'ai été stupéfié de la tournure du revirement, il n'en sera pas du goût de tout le monde, tant son twist révélateur laisse certaines questions et réflexion en suspens !
Original et surprenant, mais déroutant et parfois incohérent dans ses facilités requises, Modus Anomali a au moins le mérite de proposer un survival détonnant dans sa structure insolite à double niveau de lecture. Le choc qui en émane (la stupeur des meurtres s'avère toujours plus dérangeante face à la réaction du héros) et les ruptures de ton accordées laissent en mémoire un ovni audacieux conçu pour diviser son public et s'interroger sur la riposte de la violence.
de Pascal Frezzato. 2013. France. 20 mns. Avec Isabelle Rocton, Bruno Dussart, Caroline Masson, Christophe Masson, Adrien Erault, David Hamon, Camille Houlbert, Maxime Loiseau, Marina Poulet, Matthieu Lemercier, Eugene Rocton et Jean Bastien Erault
FILMOGRAPHIE: Pascal Frezzato est un réalisateur français de court-métrage, né le 4 Décembre 1972.
2010/11: Predator. 2012: Le Règne des Insectes. 2013: Memory of the dead.
Entreprise autrement plus ambitieuse que celle du Règne des Insectes (en rapport à sa scénographie plus hétérogène exploitant ici des décors naturels, ces comédiens amateurs plus nombreux et un planning de tournage plus imposant), Memory of the Dead est le troisième essai de Pascal Frezzato dans la cour des courts. La gestation de ce projet de longue haleine, nous la devons d'abord à la scénariste et comédienne Isabelle Rocton (jouant ici son 1er rôle à l'écran) qui souhaitait rendre hommage au mythe du zombie d'une manière toute intime.
Partant de la même théorie nihiliste que le Règne des Insectes (l'apocalypse sans espoir de rédemption), Memory of the Dead traite de la survie des infectés (on les prénomme ici les "Z") après que la 3è guerre mondiale ait éclaté. A partir de cet argument linéaire, Pascal Frezzato livre un hommage Bis au film de zombie dans sa pure tradition, à l'instar du pré-générique où quelques zombies déambulent au milieu des champs. A travers cette belle séquence filmée en plan large, on pense inévitablement à La Nuit des Morts-vivants de Romero, alors que la scène suivante (leur promenade sur le parking d'un supermarché) évoque le panthéon du genre: Dawn of the Dead.
Passée cette première ébauche du chaos, nous entrons ensuite de plein pied dans l'intimité d'un dîner particulièrement inconvenant ! Le repas dégueulbif de trois infectés avachis sur une victime éventrée ! De manière percutante, et à l'aide de gros plans insistant sur la chair des viscères, le réalisateur semble subitement habité par une audace graphique quelque peu expérimentale. Les effets spéciaux, bricolés et minimalistes, s'avèrent assez efficaces dans leur texture graphique, d'autant mieux privilégiés par un habile montage. A contrario, on peut tout de même reprocher que la caméra s'attarde un peu trop sur l'appétit vorace d'une zombie en particulier, lorsque cette dernière mâchouille longuement un intestin ! A noter également que la qualité des maquillages de latex confectionnés pour les zombies s'avère assez impressionnante (en priorité le faciès menaçant que Isabelle Rocton porte avec ténacité !).
Face à cette débauche gore complaisamment étalée, on peut songer aux effluves d'un Joe d'Amato en pleine renaissance ou d'un Jesus Franco pas encore remis de Mondo Cannibale. On imagine alors que la suite à venir sera sans doute du même acabit ! Que nenni, puisque durant sa dernière partie, le métrage bifurque diamétralement pour adopter une démarche très intime (à l'instar du final désenchanté du Règne des Insectes).
C'est durant ses 10 dernière minutes, face à l'errance solitaire d'une femme zombie, que Memory of the Dead va enfin pouvoir décoller pour dévoiler ses ambitions premières. A travers le cheminement instinctif d'une morte-vivante, le film va subitement explorer son état de conscience comme George Romero l'avait préalablement su traiter dans le Jour des Morts-vivants. La perte de l'être cher face à une réminiscence infantile ! C'est ce que cette infectée souhaite se remémorer durant la visite de son ancienne demeure, où sa démarche nonchalante va l'entraîner vers le refuge tamisé de sa chambre. A l'aide d'un magnifique score élégiaque, l'ambiance mortifère qui imprégnait le métrage va subitement altérer pour extérioriser une amertume délicate ! Tristesse, accablement, colère et regret sont les nouveaux sentiments exprimés du point de vue de ce cadavre rongé par le souvenir et sa nécrose. Ces séquences dramatiques de claustration durant laquelle cette dernière se retrouve recluse dans l'intimité d'une chambre nous saisit à la gorge par son regain d'humanité égaré dans le néant.
Si le jeu perfectible des comédiens aurait gagné à être plus charpenté, (la petite Camille est assez inexpressive face à la vue de sa maman zombifiée alors que Isabelle Rocton adopte une démarche un peu trop rigide pour se déplacer !) le désarroi fragile que nous véhicule l'actrice première nous bouleverse jusqu'aux larmes ! Face à cette décharge d'émotion et d'humanisme désespéré, on songe au magnifique psycho drame Moi, Zombie, Chronique de la douleur de Andrew Parkinson, alors que Pascal Frezzato ignorait l'existence de ce métrage British !
La mère des Larmes Avec l'intégrité du cinéaste et l'aimable participation des comédiens amateurs, Pascal Frezzato continue d'entamer la voie du court-métrage Z en livrant aujourd'hui un hommage aux films de Zombies dans une dramaturgie inattendue. En dépit de quelques défauts techniques évidents (fx de synthèse perfectibles, éclairages ternes), du jeu de prestance parfois hésitant (bien que Isabelle Rocton dégage une incroyable acuité émotionnelle !), Memory of the Dead empreinte la voie de Romero et Parkinson pour sa réflexion sur la conscience et transcende en dernier acte une élégie bouleversante sur le deuil infantile !
La critique de Mathias Chaput:
Après son très réussi « Règne des insectes », le talentueux et passionné Pascal Frezzato récidive dans le court en s’appropriant un thème maintes fois ressassé auparavant : le film de zombies…
Sauf que là, il a choisi le parti pris d’adopter un ton totalement différent et aux antipodes des films d’horreur contemporains en incluant à son œuvre une dimension métaphorique voire cristalline par le biais du personnage de la zombie femelle qui revoit son passé d’humaine après s’être vue dans un miroir…
Et la donne change radicalement !
Inspiré à l’extrême, Frezzato, outre une technique et un sens du cadrage très intéressants prend la symbolique de l’escalier, cet escalier où la « Z » gravite et monte comme une ASCENSION du mort vers son âme dans le ciel…
Et d’un coup, tout son passé, toute sa vie ressurgit ! sa fille enfant, le lit, la chambre, l’ours en peluche, autant d’allégories qui jaillissent du subconscient de cette zombie, frêle et mélancolique…
Les maquillages sont efficaces et les décors très soignés et « Memory of the dead » prend son essor véritablement dès l’entrée dans la maison, parvenant à démarquer le début gore à l’outrance pour partir dans une recherche à la démarche intelligente, cassant les hypothétiques redondances qui auraient pu foisonner si Frezzato n’avait pas exulté son imagination dès lors…
Habilement réalisé et au timing soutenu, « Memory of the dead » plonge le spectateur en immersion vers un voyage sans retour au sein de l’inconscient, dans le creux d’une vague ou d’un tremblement sismique et finalement parvient à apporter un réconfort et un apaisement à une situation douloureuse et énigmatique…
Nul doute que le parcours de « Memory of the dead » sera jalonné du plus grand intérêt des aficionados de films de zombies qui y verront là une approche et une thématique parfaitement novatrice, revigorante et très rigoureuse dans son traitement…
Note : 9/10
Pour ceux qui souhaitent découvrir le Règne des Insectes http://brunomatei.blogspot.fr/2012/08/le-regne-des-insectes_13.html
et Pour une poignée de Spaghettis: http://brunomatei.blogspot.fr/…/per-un-pugno-di-spaghetti-p…
Photo empruntée sur Google, appartenant au site dailymars.net
de Philip Kaufman. 1978. U.S.A. 1h55. Avec Donald Sutherland, Brooke Adams, Jeff Goldblum, Veronica Cartwright, Leonard Nimoy. Sortie salles U.S: 20 Décembre 1978
FILMOGRAPHIE: Philip Kaufman est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 23 Octobre 1936 à Chicago, Illinois (Etats-Unis). 1965: Goldstein. 1967: Fearless Frank. 1972: La Légende de Jesse James. 1974: The White Dawn. 1978: L'Invasion des Profanateurs. 1979: Les Seigneurs. 1983: L'Etoffe des Héros. 1988: L'Insoutenable légèreté de l'être. 1990: Henry et June. 1993: Soleil Levant. 2000: Quills, la plume et le sang. 2004: Instincts Meurtriers. 2012: Hemingway et Gellhorn (télé-film).
"Obey !"
Seconde adaptation du roman homonyme de Jack Finney, l'Invasion des Profanateurs est un remake du classique de Don Siegel aujourd'hui privilégié du caractère oppressant d'une épouvante anxiogène. Epaulé de remarquables effets-spéciaux impressionnants de réalisme (la reconstitution des cadavres perfectibles par les cocons) et d'une galerie de comédiens épatants d'expressivité fébrile (Donald Sutherland, Brooke Adams, Jeff Goldblum, Veronica Cartwright et Leonard Nimoy), cette version colorisée s'érige en sommet de terreur psychologique de par son intensité métronome. Ainsi, à travers un scénario original bâti sur une nouvelle invasion d'E.T, l'Invasion des Profanateurs
doit sa grande réussite à l'intelligence de son propos pour le
rapport intrinsèque à nos pulsions face à la dépendance de l'angoisse et de la souffrance via nos émotions innées. A savoir l'inhérence vitale de régir notre vie par le principe
de la souffrance afin de pouvoir conquérir le bonheur. Il fallait tout de même oser
entreprendre un pitch aussi saugrenu que n'importe quel tâcheron Z
aurait facilement versé dans le ridicule. Imaginez une seconde le
concept SF alarmiste ! Une fleur venue de l'espace est la nouvelle
menace terrienne dans leur mainmise à vouloir prendre possession de nos
corps durant notre sommeil !
Mais sous la houlette de Philip Kaufman, cette trame incongrue s'avère un modèle d'angoisse diffuse et d'efficacité où la paranoïa d'une poignée de survivants sera mise à rude épreuve pour avertir la populace. La première partie, la plus éprouvante, nous fait partager la détresse d'une épouse, convaincue que son mari n'est plus celui qu'elle eut connu et qu'au sein de sa société une conspiration de grande ampleur est sur le point de converger ! Avec l'entremise amicale d'un inspecteur de l'hygiène, d'un couple et d'un psychiatre, ils vont tenter de comprendre les tenants et aboutissants de cette sournoise hostilité. C'est à travers la flore de cocons en mutation que l'origine extra-terrestre s'extrait pour s'emparer de nos corps afin de se dédoubler en zombie impassible ! Dénué d'une quelconque émotion, de douleur et de haine, ces nouveaux conquérants prolifèrent sur terre afin de nous asservir en guise de survie. Le climat d'inquiétude, de doute et de terreur palpable qu'insuffle chaque protagoniste est d'autant plus prégnant que l'endurance de la fatigue les contraint de garder l'oeil éveillé. Cette descente aux enfers se livre donc à un cauchemar sans fin que la mise en scène avisée de Kaufman va habilement coordonner à l'aide d'une bande son dissonante, de cadrages obliques et de mouvements de caméra cuisants (parfois à l'épaule) afin d'amplifier le malaise. La seconde partie, autrement haletante car fertile en poursuites, est une course contre la mort que nos héros devront traverser au sein d'une ville chaotique en adoptant une posture impassible afin de détourner le ravisseur. Avec un désespoir toujours plus contraignant, leur chance de survie semble de plus en plus précaire depuis que chaque citadin s'est substitué par un nouveau corps dénué d'épiderme !
Les Envahisseurs sont parmi nous Métaphore sur la propagande, l'instinct grégaire et les doctrines dictatoriales (et bien d'autres analogies sur notre condition soumise), réflexion métaphysique où les sentiments de peur et de souffrance sont élémentaires à l'épanouissement, l'Invasion des Profanateurs perdure son pouvoir de fascination par la densité d'un scénario implacable et surtout par sa capacité émotionnelle à provoquer l'effroi, jusqu'à l'ultime image, glaçante de nihilisme.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site Hollywood.com
de Francis Ford Coppola. 1982. U.S.A. 1h38. Avec Frederic Forrest, Teri Garr, Raul Julia, Nastassja Kinski, Lainie Kazan, Harry Dean Stanton.
Sortie salles France: 29 Septembre 1982. U.S: 12 Février 1982
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Francis Ford Coppola est un réalisateur, producteur et scénariste américain né le 7 Avril 1939. 1963: Dementia 13. 1966: Big Boy. 1968: La Vallée du Bonheur. 1969: Les Gens de la pluie. 1972: Le Parrain. 1974: Conversation Secrète. Le parrain 2. 1979: Apocalypse Now. 1982: Coup de coeur. 1983: Outsiders. Rusty James. 1984: Cotton Club. 1986: Peggy Sue s'est mariée. 1987: Jardins de Pierre. 1988: Tucker. 1989: New-York Stories. 1990: Le Parrain 3. 1992: Dracula. 1996: Jack. 1997: L'Idéaliste. 2007: l'Homme sans âge. 2009: Tetro. 2011: Twixt.
Echec commercial cuisant lors de sa sortie officielle alors que les critiques de l'époque y accordaient un intérêt limité, Coup de coeur est pourtant, comme son titre l'indique, un moment de cinéma singulier dans son rapport universel à la thématique de l'amour. Car à travers les procédés illusoires du cinématographe, Francis Ford Coppola rend autant hommage au 7è art dans sa faste virtuosité où l'inventivité du cameraman expérimente son outil avec souci de stylisme féerique. Célébration aux romances classiques et aux comédies musicales de l'âge d'or, Coup de coeur est une nuit d'ivresse aussi euphorique que les bulles d'une coupe de champagne que l'on savoure à chaque gorgée.
Le pitch: A Las vegas, un couple s'entre-déchire après 5 ans de vie commune. Ils décident d'un commun accord de se séparer pour vivre indépendamment leur nouvelle liberté au sein d'une ville effervescente.
Trois ans après avoir sublimé la guerre dans le cauchemar vietnamien Apocalypse Now, Francis Coppola dépose les armes pour jeter son dévolu vers la romance d'un couple en perdition. Show de sons et lumières sous les néons polychromes des projecteurs de Las Vegas, Coup de coeur est une ode à l'amour le plus candide et à l'instant présent. Si bien qu'en dépit de l'infidélité du couple désuni, leur fuite vers un Las Vegas utopique va les rappeler à la raison de l'authenticité amoureuse, de l'expérience de leur propre vécu au mépris des broutilles subsidiaires ! Ainsi, à travers cette histoire limpide mainte fois éculée à l'écran, notre cinéaste perdure sa pertinence à réinventer ici le genre romantique dans une mise en scène expérimentale en constante créativité ! Jeu de lumières et d'ombres juxtaposés dans le même plan afin de suivre deux séquences distinctes, éclairages flashy et couleurs rutilantes sur des décors de carte postale, feux d'artifice de numéros musicaux improvisés en pleine rue de festivité, ballades de blues d'un romantisme exaltant, Coup de coeur s'érige au sommet d'une fantasmagorie en constante conversion. Un bain de jouvence pour tous les coeurs en peine ou en étreinte où les âmes blessées s'y séparent pour mieux se retrouver au moment opportun.
Cinema Paradiso En illustrant la virée de deux femmes en quête de plénitude (Teri Garr et Nastassia Kinski magnétisent l'écran de leur érotisme à la fois charnel et gracile !), incessamment courtisées par des amants désireux (Frédéric Forrest et Raul Julia forment avec entrain un duo obstiné !), Coup de Coeur prodigue avec une féerie ensorcelante la sollicitation de l'amour le plus fébrile. En jouant sur les trucages de l'illusion pour y altérer la réalité, Francis Ford Coppola se porte aussi avant-coureur pour annoncer l'ère du numérique. Sauf qu'en l'occurrence, ces procédés artisanaux entièrement régis en studio renvoient à la fertilité première d'un Melies et d'un Chaplin ! Si vous voulez rendre amoureuse votre femme ou renouer avec la prémices de l'émoi sentimental, Coup de coeur est tout à fait capable d'occasionner l'effet escompté au sein de sa féerie étincelante plus vraie que nature.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site daysarenumbers.net
de John Boorman. 1977. U.S.A. 1h58. Avec Linda Blair, Richard Burton, Louise Fletcher, Max Von Sydow, Kitty Winn, Paul Henreid, James Earl Jones, Ned Beatty.
Sortie salles France: 25 Janvier 1978. U.S: 17 Juin 1977
FILMOGRAPHIE: John Boorman est un réalisateur, producteur, scénariste et acteur américain, né le 18 Janvier 1933 à Shepperton (Royaume-Uni).
1965: Sauve qui peut. 1967: Le Point de non-retour. 1968: Duel dans le pacifique. 1970: Leo the last. 1972: Délivrance. 1974: Zardoz. 1977: L'Exorciste 2. 1981: Excalibur. 1985: La Forêt d'Emeraude. 1987: Hope and Glory. 1990: Tout pour réussir. 1995: Rangoon. 1998: Le Général. 2001: Le Tailleur de Panama. 2003: In my Country. 2006: The Tiger's Tail.
"J'ai trouvé particulièrement stimulante l'idée de faire un film qui s'appuyait sur l'attente d'un public préexistant. Chaque film exige un effort pour rejoindre son public et c'est pourquoi le cinéma est si souvent répétitif: la répétition est gage de succès. J'ai trouvé qu'il serait honnête de prendre en charge cette attente du public et de la remodeler, de l'aider à se réorienter, plutôt que de le satisfaire avec la réédition d'un produit familier". John Boorman
Quatre ans après le foudroyant traumatisme planétaire, l'Exorciste, John Boorman s'entreprend de réaliser une suite à contre-courant, dans le sens où il souhaite avant tout s'écarter du grand-guignol révulsif de son modèle. Echec commercial cinglant auquel le public s'attendait sans doute à une forme de remake encore plus horrifiant, le film est à nouveau boudé lorsque son réalisateur en modifie le montage (ainsi qu'un final plus spectaculaire) pour le réexploiter en salles. Enquêtant sur les circonstances troubles de la mort du père Merrin, le prêtre Amont décide de rentrer en contact avec la jeune Regan durant des séances d'hypnose synchronisées afin de rencontrer le démon Papuzu.
Visuellement éblouissant durant le voyage initiatique entrepris en Afrique par le père Amont, l'Exorciste 2: l'hérétique, joue la carte du dépaysement vertigineux lorsque ce dernier doit par exemple, par hypnose synchronique, s'infiltrer à l'intérieur de crevasses d'une montagne pour témoigner d'un exorcisme commis sur l'enfant Kokumo. Réflexion métaphysique sur la nature du Mal, le film de John Boorman bouscule les règles de la convention et redouble d'originalité à tenter d'expliquer les fondements maléfiques du diable Papuzu sous l'apparence hostile d'une invasion de sauterelles. Avec audace, le réalisateur prend donc le risque de dérouter le spectateur avec son lot de séances d'hypnose récurrentes (mais parfaitement synchronisées !), auquel Amont et Regan, tentent de renouer contact (parfois même pas télépathie !) avec Papuzu. La seconde partie, plus ésotérique mais irrésistiblement captivante, nous entraîne vers l'expédition du père Amont, chargé de retrouver Kokumo afin de démystifier la présence du Mal. A grands renforts d'illusions spirituelles et de symboles tribaux, le film nous mêle notamment à un protocole sur la symbiose des sauterelles afin de déjouer leurs enjeux destructeurs. En prime, le climat tropical qui martèle cette contrée aride va venir amplifier l'aura mystérieuse qui y découle où l'écologie joue un rôle majeur.
En ce qui concerne le choix des comédiens, on est heureux de retrouver la jeune Regan du haut de ses 16 ans, ici plus affirmée à insuffler un jeu spontané sous l'entremise de l'illustre Linda Blair. Qui plus est, l'actrice photogénique dévoile un charme de sensualité en osmose avec certaines plages d'onirisme durant son cheminement synchronique (sa présence symbolique sur le toit de son immeuble parmi une nuée de colombes !). Si Richard Burton peut parfois prêter au cabotinage (le prologue au cours duquel une possédée s'immole devant sa posture exorbitée !), il réussit à monopoliser une présence transie d'émoi et de stupéfaction face à son dessein hasardeux. On aurait peut-être aimé une prestance un peu moins monolithique dans ses audaces stoïques mais l'acteur, imprégné d'inquiétude, insuffle malgré tout une densité humaine ensorcelante.
Plongée fascinante dans les tréfonds du Mal au rythme mélodique de l'inoubliable partition de Morricone, l'Exorciste 2 réfute la redite et peut donc se targuer d'être l'une des rares suites à avoir su tenir tête à un panthéon diabolique dans une autonomie auteurisante. Esthétiquement envoûtant dans ses nuances ocres, le film n'oublie pas de provoquer une vraie émotion face à la nouvelle destinée de Regan et de culminer vers un final apocalyptique faisant office d'anthologie (FX prodiges à l'appui !). Pour parachever, et comme le soulignait le journaliste de l'époque, Pierre-André Arène, il est temps de redécouvrir cette oeuvre complexe mais passionnante et profondément originale !
Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviepostershop.com
de Russell Mulcahy. 1984. Australie. 1h35. Avec Gregory Harrison, Arkie Whiteley, Bill Kerr, Chris Haywood, David Argue, Judy Morris.
Sortie salles Australie: Avril 1984
FILMOGRAPHIE: Russell Mulcahy est un réalisateur australien, né le 23 Juin 1953 à Melbourne, dans l'état de Victoria. 1979: Derek and clive get the horn. 1984: Razorback. 1985: Arena. 1986: Highlander. 1991: Highlander 2. 1991: Ricochet. 1992: Blue Ice. 1993: l'Affaire Karen McCoy. 1994: The Shadow. 1996: Tireur en péril. 1998: La malédiction de la Momie. 1999: Resurrection. 2003: Swimming Upstream. 2007: Resident Evil: Extinction. 2008: Le Rois Scorpion 2. 2009: Fais leur vivre l'enfer, Malone !
"Dans la gueule du désert : Razorback".
À peine âgé de trente et un ans lorsqu’il met en chantier son second long-métrage, Russell Mulcahy ne laisse pas indifférent le jury d’Avoriaz, qui voit en ce solide artisan un nouveau prodige de la mise en scène — et ce, même si Razorbackrepart bredouille. Si, lors de sa sortie en salles, le succès reste timide auprès du grand public, c’est du côté des vidéophiles qu’il se taille peu à peu une réputation de série B culte. Mixant allègrement fantastique, aventure et horreur fangeuse pour croquer le portrait déviant d’un duo de rednecks, Mulcahy réinvente le bestiaire animalier pour hausser l’affrontement au rang de mythe. Mais deux portraits d’êtres meurtris se télescopent dansRazorback : celui de Carl, jeune homme exilé dans le désert australien pour retrouver la trace de sa femme disparue, Beth Winters, journaliste engagée pour la cause animale ; et celui de Jack, vieil homme esseulé, rongé par la vengeance après avoir perdu son petit-fils dans une attaque nocturne du sanglier. Chacun, avec sa faille, livre à sa façon une guerre impitoyable contre la bête, tandis que deux bouseux d’abattoir, violeurs en cavale, se retrouvent happés par cette traque implacable.
Spectacle baroque et furibond, où l’onirisme crépusculaire s’imbibe d’une nature solaire, clairsemée — la traversée hallucinée de Carl dans le désert aride ! — Razorback joue la carte de la singularité en ravivant des thèmes éculés du cinéma fantastique. Avec une ambition stylisée, Mulcahy sème des plages de poésie tout au long du cheminement, hasardeux et belliqueux, de ses justiciers hantés par le deuil. Dans la mouvance desDents de la mer pour la démesure bestiale et de Massacre à la tronçonneusepour le portrait de dégénérés sadiques — ces chasseurs de kangourous, aveuglés sous les projecteurs, traqués la nuit pour être torturés à loisir —Razorback hybride les genres et décuple l’intensité de l’aventure. Surtout, Mulcahy nous attache à ses personnages cabossés, où l’humanisme saigne d’écorchures intimes, et propulse ce bestiaire dans un survival sensoriel où des chasseurs faillibles, mais rebelles, affrontent le monstre. Une émotion poignante affleure dans la relation naissante entre Sarah, jeune assistante de Jack, et Carl, veuf inconsolable, qui grâce à elle, s’arrime de nouveau à la tendresse. Cette bribe de romantisme, qui infuse peu à peu le récit, trouve son écrin dans la superbe élégie musicale d’Iva Davies.
Quant à la carrure monstrueuse du Razorback, Mulcahy privilégie la suggestion, sans jamais céder à l’esbroufe : sans doute pour compenser un budget restreint, il use de gros plans, détaille la physionomie infernale, exalte la férocité. Avec un montage précis, une réalisation souvent inventive,Razorback accomplit le tour de force de rendre son monstre crédible, soutenu par une imagerie crépusculaire, littéralement — et inlassablement — ensorcelante. Déjà un chef-d’œuvre formel.
"Bestiaire baroque sous le soleil mort : Razorback".
Spectacle flamboyant, où l’onirisme baroque se dispute à une violence sèche,Razorbackmêle les genres avec une efficacité et une pudeur d’émotion rares. Sa mise en scène, d’une audace inouïe, transcende la bête d’apocalypse et la pugnacité de pionniers que rien n’épuise. Un classique indépendant, incandescent, qui n’est pas près de s’éteindre.
Photo empruntée sur Google, appartenant au site forgottenflix.com
de Franck LaLoggia. 1988. U.S.A. 1h57 (version longue). Avec Lukas Haas, Len Cariou, Alex Rocco, Katherine Helmond, Jason Presson.
Sortie salles U.S: 22 Avril 1988. Angleterre: 16 Juin 1989
FILMOGRAPHIE: Franck La Loggia est un réalisateur, acteur, scénariste, producteur et compositeur américain, né le 12 Janvier 1954 à Rochester, New-York. 1981: Fear no Evil. 1988: Les Fantômes d'Halloween. 1995: Mother
Directement sorti en Vhs à la fin des années 80 et relativement passé inaperçu auprès des vidéophiles, Les Fantômes d'Halloween est une curieuse production d'un réalisateur méconnu puisque uniquement responsable de trois longs-métrages. Baignant dans le climat solaire d'une paisible bourgade ricaine, son prélude nous remémore inconsciemment l'esprit infantile de Spielberg lorsque des enfants farceurs batifolent dans leur quartier en toute insouciance. Mais un évènement dramatique va rapidement obscurcir cette impression de bonheur exaltant avec la réactualisation d'un fait divers crapuleux auquel le responsable n'eut jamais été réprimandé. Car 10 ans au plus tôt, une dizaine d'enfants fut lâchement exécutés par ce dangereux psychopathe. Suite à une mauvaise farce d'Halloween, un garçon embrigadé dans le sellier de son école se retrouve nez à nez avec l'apparition fantomatique d'une fillette. Précédemment violentée et assassinée, elle décide de rentrer en contact avec Frank afin qu'il puisse l'aider à retrouver la paix pour dévoiler au grand jour l'identité du meurtrier. Victime lui aussi d'une sauvage agression par ce même assassin, Frank va tenter de le démasquer avec l'entremise de son frère et d'une intrigante dame blanche.
Ce qui au premier abord parait édénique avec les Fantômes d'Halloween, c'est son esprit de bonhomie hérité du conte fantastique si bien que les enfants en seront les principaux témoins. Particulièrement Frank, gosse docile élevé par un père prévenant mais bouleversé depuis la disparition de son épouse ! Et le jeune fils de se retrouver embarqué dans une situation improbable particulièrement alerte pour sa propre survie ! En confrontant l'amertume des fantômes plaintifs, l'innocence d'un gamin prude et les nouvelles stratégies horrifiques d'un criminel en fuite, les Fantômes d'Halloween oscille les genres parmi l'interférence de traits d'humour (les broutilles quotidiennes imparties aux grands parents de Frank depuis que l'aïeul consomme ses cigarettes en catimini). En prenant son temps pour structurer un cheminement narratif peu surprenant mais parfois cruel, le cinéaste fait également preuve d'une dramaturgie inattendue lorsqu'un présumé coupable est sur le point de retrouver sa liberté. En illustrant l'Amérique des années 60 corrompue par le racisme et la motivation expéditive d'une victime inconsolable, Frank Lallogia ternie à nouveau l'apparence aimable de cette bourgade que l'on s'était idéalisé au premier abord. Mais surtout, il met en exergue les affres d'un enfant fragile confronté à sa raison existentielle. Préalablement sauvé in extremis d'une mort certaine et opposé aux apparitions spirituelles des fantômes, Frank n'aura de cesse pour un si jeune âge d'affronter ses craintes afin de prêter main forte à une mère et une fille désunies ! En jouant sur la légende urbaine de la dame blanche, le réalisateur tente notamment d'agrémenter une petite énigme autour de ce symbole, ici redresseur de tort. Alors que le final ne manquera pas de provoquer une émotion poignante face au ton résolument féerique, libérateur de la situation.
Attachant et agréable à suivre mais néanmoins perfectible, Les Fantômes d'Halloween aurait pu être plus passionnant à travers ses sombres thématiques si la mise en scène chétive et une direction de seconds rôles parfois timorée eurent été plus maîtrisés. Pour autant, la beauté naturelle de certaines images, l'onirisme formel qui en découle tantôt, la bouille attachante du jeune Lukas Haas et surtout la volonté du réalisateur à ternir son récit emportent l'adhésion.
Un grand merci à l'Univers Fantastique de la Science-fiction
04.11.13. 3èx Bruno Matéï
Photo empruntée sur Google, appartenant au site gallerytheimage.com
"Henry: Portrait of a Serial Killer" de John Mc Naughton. 1986. U.S.A. 1h23. Avec Michael Rooker, Tom Towles, Tracy Arnold.
Sortie salles France: 6 Février 1991
FILMOGRAPHIE: John Mc Naughton est un réalisateur américain, né le 13 Janvier 1950 à Chicago. 1984: Dealers in Death. 1986: Henry, portrait d'un serial killer. 1991: Sex, drugs, Rock and Roll. 1991: The Borrower. 1993: Mad Dog and Glory. 1996: Normal Life. 1998: Sexcrimes. 2000: Condo Painting. 2001: Speaking of sex. 2004: Redliners. 2009: Backstabbers. 2013: The Harvest.
Ce film s'inspire de fait réels. Ce n'est pas une histoire vraie proprement dite. Les aveux d'un certain Henry ont servi à faire ce film. Aveux qu'il a niés, par la suite. Otis et Becky sont des personnages fictifs.
Interdit en salles durant 4 ans par la censure américaine et estampillé X, Henry est le premier long-métrage du réalisateur John Mc Naughton. Inspiré du personnage d'Henry Lee Lucas, tueur en série responsable de plus de 199 meurtres, le film dépeint la dérive meurtrière d'un duo d'anciens taulards, des marginaux résolument reclus de leur condition miséreuse. D'un côté, Henry, le plus influent, est un tueur méthodique extériorisant sa rage sur les innocents depuis le traumatisme de son enfance galvaudée par une mère prostituée. De l'autre, Otis est un badaud écervelé facilement influencé par le vice et la perversion. A bord de leur véhicule, ils sillonnent les quartiers nocturnes afin d'assassiner au hasard d'une rue des citadins. Au coeur de ce duo indocile, la soeur d'Otis, Becky, tente de se faire une place dans leur appartement restreint et s'efforce à chercher un petit boulot de strip-teaseuse avant de tomber amoureuse d'Henry. Car épris d'empathie et d'identification pour ses confidences martyrs, Becky eut été préalablement victime d'une enfance incestueuse vis à vis de son géniteur. A travers le teint blafard d'une photo granuleuse ainsi que le souci documentaire d'une réalisation expérimentale, John Mc Naughton nous immerge au sein d'un cauchemar urbain profondément glauque et crapuleux. Ainsi, le climat poisseux, particulièrement prégnant, s'avère si malsain qu'à la sortie de la projo nous nous sentions physiquement pollués par cette débauche où la saleté du sang et les cris d'agonie résonnent encore tel un écho !
Or, en autopsiant sans concession le portrait de deux assassins arriérés, littéralement vautrés dans le meurtre, Henry... constitue une épreuve de force morale toujours plus dérangeante de par sa gratuité profondément perverse. Car en position de voyeur, nous sommes contraints de témoigner de l'existence triviale du trio de chômeurs (Otis va vite abdiquer son poste de pompiste au fil de son cheminement meurtrier) et surtout d'espionner par l'oeil de la caméra leurs méfaits criminels par le truchement de leurs errances nocturnes. La contrainte de subir leur quotidienneté misérable et surtout d'assister à leurs exactions sanglantes provoquant un malaise viscéral tangible du fait de son traitement hyper réaliste. Ainsi, en évitant toute forme de racolage, John Mc Naughton filme de manière crue des meurtres brutaux à l'aide d'une caméra vhs qu'Otis se divertit à préserver en mémoire. Alors que du point de vue de Henry (l'être le moins licencieux car jamais assouvi de sadisme), les crimes sont souvent établis hors champs en nous proposant simplement d'en découvrir la résultante des mutilations. Qui plus est, les flash-back émis au son des hurlements des victimes rehaussent l'aspect cauchemardesque de l'esprit dérangé d'Henry, prisonnier de ses pulsions vengeresses et torturé par ces démons. On s'étonne d'ailleurs de lui éprouver un chouia d'empathie pour le rapport à la fois amical et affectueux entretenu avec Becky, et ce juste avant de renouer avec ses pulsions malades.
Incarné par des comédiens transis de vérité à travers leur dégénérescence immorale, Henry... provoque autant de fascination pour l'aspect reportage infligé à sa mise en scène que de dégoût pour la représentation radicale du duo de serial-killers irrécupérables. Glaçant et psychologiquement perturbant du fait de son épineuse intensité (telle ce massacre d'une famille filmé en mode "VHS" !), rarement un film d'horreur n'aura décrit avec autant de vérisme et véracité l'introspection pathétique de deux monstres humains. Pour public averti.
L'avis de Mathias Chaput: http://horrordetox.blogspot.fr/2011/03/henry-portrait-of-serial-killer-de-john.html
*Bruno 31.10.13. 3èx