de Leigh Janiak. 2014. U.S.A. 1h27. Avec Rose Leslie, Harry Treadaway, Ben Huber, Hanna Brown
Sortie US uniquement en Vod: 12 Septembre 2014
FILMOGRAPHIE: Leigh Janiak est un réalisateur et scénariste américain.
2014: Honeymoon
"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
Sorti discrètement en VHS sous le titre fallacieux La Baie Sanglante 2, alors qu’il fut tourné un an avant La Baie Sanglante, Une Hache pour la Lune de Miel s’avère fascinant à plus d’un titre, malgré une réputation longtemps timorée, désormais réhabilitée par les puristes du maestro Mario Bava.
Le pitch : John Harrington, riche héritier d’une maison de couture, est un psychopathe incapable de réfréner ses pulsions meurtrières : il assassine de jeunes mariées pour tenter d’exhumer un souvenir traumatique enfoui dans l’enfance.
Longtemps considéré, à tort, comme une œuvre mineure, ce thriller vénéneux reste pourtant singulier, troublant, captivant dans son portrait d’un schizophrène prisonnier d’un trauma infantile. Travesti parfois d’une robe de mariée pour parfaire son rituel, il évoque Psychose par ses visions macabres de l’épouse défunte, ses thèmes de refoulement, d’amour maternel et de possessivité.
Pitch: Alex, jeune délinquant passionné par Beethoven et l’ultra-violence, erre la nuit avec ses acolytes, semant la terreur auprès de quidams paisibles, jusqu’à ce que la police le cueille lors d’un homicide sauvage dans une demeure bourgeoise. Condamné à 14 ans de réclusion, il se voit offrir un traitement révolutionnaire par le ministre de l’Intérieur : le "guérir" du Mal. Le rendre aussi docile qu’un agneau par le contrôle absolu de sa conscience.
D’une audace polissonne dans son esthétisme sexuel, traversé par une partition dissonante où l’élégance de Beethoven se frotte à la violence stylisée, semi-parodique, Orange Mécanique multiplie les ironies pour révéler l’instinct violent enraciné en chacun. Indignation, rébellion, vengeance, défense ou sévices gratuits : la violence affleure comme une composante tragiquement humaine, exutoire face à l’injustice, l’inégalité, l’intolérance.
Chaque être humain conserve pourtant ce choix moral : faire le Bien ou le Mal, au nom d’une liberté individuelle, dans une société censée garantir l’égalité.
Par le biais de ce traitement expérimental censé expurger toute pulsion destructrice, Kubrick dénonce les dérives d’une société totalitaire, bien décidée à lobotomiser ses éléments déviants pour les soumettre aux exigences politiques.
Alex devient, en quinze jours d’expérimentations, un pantin vidé de toute agressivité — incapable de se défendre face à l’humiliation, à la menace, ou même au désir suscité par une séduction éhontée.
Par sa satire acide, Kubrick pousse cette logique jusqu’à l’absurde : Alex, réduit à un objet d’obéissance, voit ses anciennes pulsions réémerger. De prédateur sans vergogne, féru de sexe et de violence, il devient une victime stérile.
Rejeté par ses parents rongés de honte, tabassé par ses anciens acolytes devenus policiers, persécuté par le mari de sa dernière victime...
Jusqu’à ce que, ironie cruelle, une symphonie de Beethoven ravive ses bas instincts — quand l’art lui-même échoue à contenir les élans de son âme dévoyée.
de Gabrielle Beaumont. 1980. U.S.A. 1h26. Avec Malcolm Stoddard, Cyd Hayman, Angela Pleasance, Patrick Barr, Wilhelmina Green.
Mea culpa ! 4 visionnages il m'eut fallu pour enfin l'apprécier.
Exploité sous l’étendard étoilé d’Hollywood Video, Les Yeux du Mal fit fantasmer toute une génération de fantasticophiles de vidéoclubs avec sa jaquette flamboyante, héritée de La Malédiction et de L’Exorciste. Une rutilante affiche crépusculaire, dans la droite lignée d’Une si gentille petite fille, des Tueurs de l’éclipse ou encore de De si gentils petits monstres. Des plaisirs innocents, redoutablement ludiques, pour qui sait savourer les bisseries décomplexées au délire assumé.
Primé au Festival Fantastique de Paris — dixit la jaquette française — Les Yeux du Mal embrasse le genre horrifique au premier degré, à travers l’affrontement psychologique d’un père et d’une mère se disputant l’autorité sur leur enfant adoptif, depuis la disparition de sa mère biologique. La petite Wilhelmina Green s’impose d’ailleurs par une photogénie troublante : ce regard noir, à la fois perçant et rigide, presque figé. Son inexpressivité sert parfaitement le climat d’étrangeté qui l’entoure, entre mutisme et postures ambiguës, le récit misant à fond sur la suggestion, l’interrogation sans réponse, l’ambiguïté morale.
Et c’est ce qui renforce l’aspect captivant, envoûtant (nappe musicale inquiétante à l’appui) des Yeux du Mal : cette exploration des liens paternels en déliquescence, gangrenés par les disparitions infantiles qui ravagent une famille déjà lourdement endeuillée. Une impuissance désespérée, mais teintée de colère sourde.
On retiendra aussi deux séquences assez chocs, malsaines, inattendues : le sort d’un bambin violemment sacrifié, ou cette scène dérangeante où la petite Bonnie embrasse son père sur la bouche, à deux reprises, durant son sommeil.
Pour les amateurs de curiosités oubliées des années 80, Les Yeux du Mal saura encore sans doute séduire les collectionneurs incorrigibles de films d’horreur bisseux, soigneusement contés, atmosphériques au possible et interprétés. À voir impérativement en VO — le jour et la nuit face à une VF certes maladroite, mais non dénuée d’un certain charme à travers ses inflexions familières.
Un divertissement intelligent, qui repousse tout effet racoleur pour miser sur le développement de personnages meurtris. Et puis, il y a Angela Pleasence (oui, la fille de Donald), dont la froideur glaçante impressionne dès le prologue, et jusque dans un épilogue sans réponse, venu mieux encore tourmenter l’esprit de cette éventuelle damnation occulte.