Photo empruntée sur Google, appartenant au site forum.plan-sequence.com
de Danny Philippou et Michael Philippou. 2022. Australie. 1h34. Avec Sophie Wilde, Alexandra Jensen, Joe Bird, Otis Dhanji, Miranda Otto
Sortie salles France: 26 Juillet 2023 (Int - 16 ans). États-Unis, Canada : 28 juillet 2023
FILMOGRAPHIE: Danny Philippou et Michael Philippou sont des réalisateurs australiens.
2022: La Main.
Peter Jackson a adoré La Main : "C'est le meilleur film d'horreur que j'ai pu voir depuis des années"
Et il a bien raison. Car selon ma sensibilité de cinéphile acharné, c’est l’un des films les plus flippants que j’aie pu voir, sans la moindre hésitation. Par ses effets de peur que l’on redoute comme la peste - à l’instar d’une Regan possédée et impuissante dans L’Exorciste - La Main cultive ce même inconfort, cette tension tenace, tapie tout au long d’une intrigue à suspense aussi latent que diffus. C’est dire si cette œuvre, emballée avec un soin maniaque (et des effets de caméra étourdissants d’inventivité - la scène du lit, probablement inspirée des Griffes de la nuit, est un sommet), m’a envahi d’immersion. Elle m’a happé dès le prologue dans un cauchemar cérébral, d’une puissance visuelle aussi ensorcelante que malaisante. Comptez notamment 20 à 30 minutes de spiritisme marquantes, dignes du Cercle infernal ou de L’Enfant du Diable.
Mais au-delà de son concept retors - mille fois vu ailleurs - La Main parvient à redorer le genre. Elle le régénère dans sa capacité à susciter, ou plutôt sustenter, la trouille et le malaise, par la caractérisation psychologique d’une bande d’ados à mille lieues des stéréotypes, aux physiques standards, anti tape-à-l’œil. Et surtout, ils deviennent naturellement attachants par leur fragilité nue, leur contrariété commune, leur fébrilité névrosée face à une expérience politiquement incorrecte avec les voix de l’au-delà, fétides et licencieuses. Nous sommes ici face à une horreur adulte, brute, premier degré - sous l’impulsion de personnages juvéniles jamais décervelés ou agaçants - pris dans une spirale de provocation, de perte de repères, de quête d’amour et de rédemption. Et les voir souffrir ainsi, de manière aussi inlassable qu’injuste, ça fait mal. Psychologiquement, très très mal.
L’œuvre, d’une intensité rigoureuse, sombre et désespérée, se déploie aussi en filigrane comme un drame psychologique poignant sur l’incapacité à faire le deuil maternel, vu du point de vue d’une fille tiraillée par ses démons internes. Une interrogation spirituelle, identitaire, coupable : sa mère s’est-elle sciemment donné la mort ? Et pourquoi ? Mais très vite, le film nous fait oublier qu’on est simplement « au cinéma ». Le réalisme de ce quotidien ombrageux est si expressif, si organique, qu’on oublie fissa qu’il s’agit d’un habile divertissement. Les frères Danny et Michael Philippou - youtubeurs à leurs heures perdues (on croit rêver) - orchestrent avec un art consommé de la peur diffuse une nouvelle référence de l’horreur contemporaine. Une œuvre générationnelle, ancrée dans une jeunesse Z asservie au smartphone, au narcissisme, aux réseaux.
Redoutablement efficace par sa mise en scène ciselée, sa maîtrise formelle, et le jeu dépouillé de comédiens habités par l’anxiété, la peur, le désarroi, La Main s’érige en cauchemar à vif. Mia tente d’échapper aux griffes du Mal au gré d’hallucinations morbides, terriblement glaçantes, au point de ne plus pouvoir distinguer le réel de ses visions. Et cette cruauté - graphique, morale- jamais gratuite, jamais convenue, vient gifler le spectateur. Certaines séquences d’ultraviolence gorasse sont si éprouvantes qu’on en sort vidé, lessivé, hypnotisé. Car dans ce nouveau théâtre démonial, la possession des corps laisse des séquelles irrémédiables sur l’âme.
"La Main : frisson terminal d’un cauchemar à vif".
Épreuve de force terrifiante, bouleversante, malaisante, sans jamais nous laisser cligner des yeux tant elle possède une aura magnétique, La Main est l’un des rares films d’épouvante (la vraie, donc) à susciter la frousse avec autant de brio - et quelle première œuvre ! - d’intelligence, de profondeur dramatique. Une alchimie roublarde, une expérience sensorielle que l’on vit à fleur de nerfs. Quant à ceux qui, hélas, n’auront pas adhéré au concept... je les plains. Ils ne sauront jamais ce qu’ils ont raté. Car la motivation première du cinéma d’horreur est de nous effrayer - vraiment - avec le plus de réalisme possible. Et sur ce terrain-là, les Philippou frappent un grand coup. J’attends leur prochain délire sépulcral avec la fébrilité d’un damné.
*Bruno
Ci-joint la critique de Jean-Marc Micciche:
Séance découverte avec le gros choc La main...Bien parti aux cotés de Demeter pour être le meilleur film fantastique de l'année. Partant de la mode d'un I Concept (on organise des soirées à se faire peur à travers l'utilisation d'une main pour entrer en contact avec le royaume des morts), le film déploie tout son potentiel horrifique en créant une ambiance où le chaos peut surgir à chaque instant...rarement la frontière qui sépare le monde des morts et celui des vivants n'as été aussi palpable. Mais là où les auteurs font encore plus fort, c'est que les auteurs réussissent à dévier l'horror movie pour ados super efficace pour travailler d'autres vertiges de l'angoisse, plus douloureux, plus intime, plus macabre. La main fait partie de ses rares films où le spectateur est confronté à l'inéluctable. A l'instart du Simetière de Mary Lambert, les personnages agissent pour se faire du bien car la douleur d'une perte est trop lourde à porté et c'est cette obsession qui confine à la folie qui conduit les perso à leurs pertes...De ce fait, de la simple série b horrifique et commercial, le film devient un drame poétique et macabre qui indéniablement marque le spectateur pas forcement préparé à une telle expérience dans l’indicible horreur...Une futur classique à ne pas douter !!! 10/10