vendredi 17 septembre 2021

Bac Nord

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Cédric Jimenez. 2021. France. 1h45. Avec Gilles Lellouche, Karim Leklou, François Civil, Adèle Exarchopoulos, Kenza Fortas, Cyril Lecomte, Michaël Abiteboul.

Sortie salles France: 18 Août 2021

FILMOGRAPHIE: Cédric Jimenez est un réalisateur, producteur et scénariste français né le 26 juin 1976 à Marseille. 2012 : Aux yeux de tous. 2014 : La French. 2017 : HHhH. 2021 : BAC Nord. 2022: Novembre. 

“On ne sert plus à rien... plus je fais mon métier, moins je le fais.”
Uppercut émotionnel à couper le souffle, Bac Nord est une épreuve morale comme peu de métrages ont sur le parfaire avec autant de réalisme documenté à travers sa délinquance urbaine aujourd'hui rendue incontrôlable (c'est peu de le dire et c'est du jamais vu dans le paysage français). Il faut d'ailleurs remonter à mon sens au percutant la Haine de Kassovitz (et non aux Misérables auquel j'émets quelques réserves) pour retrouver cette dimension dramatique malaisante, cette fulgurance rigoureuse parfois résolument terrifiante eu égard de la guerre sans merci que se livrent flics et voyous s'acharnant à monopoliser leur autorité dans un brouhaha suicidaire. C'est dire si l'efficacité de la mise en scène au cordeau de Cédric Jimenez rivalise avec les productions ricaines les plus musclées dans son sens du cadrage, dynamisme du montage, caméra portée à l'épaule, pour nous immerger de plein fouet dans l'hystérie collective de ces règlements de compte où le pire est sur le point d'éclater lors de tirades d'affolement communautaire. Certaines situations incongrues filmées dans l'urgence demeurant d'une tension paroxystique quant au sort précaire de nos policiers confrontés à l'arrogance des délinquants prêts à se sacrifier pour défendre leur territoire de deal coordonné dans une directive militaire. Tant et si bien que depuis des décennies, politique, justice et membres pédagogues semblent avoir démissionné de leur fonction impérieuse de par le sentiment d'affranchissement d'une délinquance mineure et majeure parvenant communément à imposer leur dictature au sein de leur fief ghettoïsé.   

Et de mémoire, à moins d'y avoir loupé une oeuvre référence, je ne connais aucun métrage ricain ayant su inscrire avec tel souffle belliqueux moult péripéties effrénées de par le vérisme frénétisé des acteurs aussi bien amateurs que professionnels s'affrontant physiquement / verbalement les nerfs à vif. Tous demeurant communément époustouflants de charisme névralgique dans leur fureur animale décomplexée. D'où l'incroyable sentiment d'immersion morale que procure le métrage traitant avec souci de véracité de la hiérarchie délinquante aussi coordonnée et studieuse que leur homologues policiers. Tant et si bien que la frontière entre le Bien et le Mal est rompue, et que certains flics à bout de nerfs dans leur posture humiliée, pour ne pas dire avilissante, finissent par perdre pied avec le sens des valeurs au point de se comporter comme leur rivaux haineux et d'adopter leur gestuelle, leur orgueil démesuré faute de cette violence primale fatalement contagieuse. Ainsi, à travers cette cacophonie désaxée où complices et indics se mêlent également à la partie du gendarme et voleur, Bac Nord jette un effrayant pavé dans la mare. Un effrayant constat d'amertume, de désillusion et de déroute auprès d'une corruption humaine déchue de leurs codes moraux. Et ce tout en romantisant la situation finalement désoeuvrée de ce trio de flics aussi véreux qu'héroïques (leurs burnes s'avèrent aussi grosses que des boules de billards à travers leurs risques encourus, leur course poursuite à bout de souffle et leur stoïcité radicale !) abandonné par leur propre confrère pour un enjeu de racket et de trafic de stupéfiants pas aussi préjudiciable que prévu. 


"Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. Si tu regardes longtemps dans l'abîme, l'abîme regarde aussi en toi."
Impulsé du véhément trio Gilles Lellouche, Karim Leklou et surtout François Civil (en fringant jeune loup fumeur de joint), accompagné du talent plus vrai que nature d'Adèle Exarchopoulos en jeune maman intuitive; Bac Nord met les nerfs à rude épreuve au coeur d'un western urbain en déliquescence séditieuse d'où perce l'animosité d'une jeunesse criminelle davantage azimutée, pour ne pas dire quasi invincible. Un constat d'échec évidemment effrayant car sans lueur d'espoir alors que la génération prochaine osera inévitablement relever le défi d'imposer leur loi avec plus de cran, d'autonomie et de bassesse. 

*Eric Binford

2 commentaires:

  1. Merci pour m'avoir donné envie d'aller voir ce film !!!

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  2. Avec plaisir, j'espère qu'il vous plaira autant que moi car je me suis pris une réelle claque.

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