mercredi 1 mai 2013

Evil-dead (The Evil-Dead). Meilleure 1ère oeuvre au Rex de Paris, 1982.

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Sam Raimi. 1981. U.S.A. 1h25. Avec Bruce Campbell, Ellen Sandweiss, Richard DeManincor, Betsy Baker, Theresa Tilly.

Sortie salles U.S: 15 Octobre 1981 (première à Détroit). 15 Avril 1983 en sortie nationale.
France: Mai 1982 au Marché du film de Cannes. Novembre 1982 au Rex de Paris. 24 Août 1983 en sortie nationale.

FILMOGRAPHIE: Sam Raimi est un réalisateur, acteur, producteur et scénariste américain, né le 23 Octobre 1959 à Franklin, Etats-Unis. 1981: Evil-Dead. 1985: Mort sur le Grill. 1987: Evil-Dead 2. 1990: Darkman. 1993: Evil-Dead 3. 1995: Mort ou Vif. 1998: Un Plan Simple. 1999: Pour l'amour du jeu. 2000: Intuitions. 2002: Spi-derman. 2004: Spider-man 2. 2007: Spider-man 3. 2009: Jusqu'en Enfer. 2013: Le Monde fantastique d'Oz.

L’opéra de la terreur !
Le film d’horreur le plus férocement original, dixit un Stephen King abasourdi ! Depuis sa sortie rentable en salles et son illustre succès en VHS, Evil Dead s’est imposé au panthéon des films d’horreur les plus impressionnants de l’histoire. L’emblème moderne du « ouh, fais-moi peur ! », alors même que son récit puise dans les clichés usuels de l’épouvante traditionnelle : une forêt bucolique, ténébreuse, régie par des démons sataniques.

Réalisé avec des bouts de ficelle et une poignée de comédiens amateurs, cette première œuvre d’un jeune cinéaste surdoué est un moment de folie furieuse jamais contemplé sur toile. Car conçu comme un train fantôme erratique, Evil Dead est une sarabande infernale, une nuit démoniaque et irrationnelle, dans laquelle un groupe de vacanciers a la déveine de croiser les forces du mal. En empruntant le schéma classique du film de possession et le cadre du slasher champêtre, Sam Raimi se réapproprie les conventions avec une insolence jubilatoire.

Entre ses touches d’onirisme macabre et sa profusion de gore aux accents frénétiques, Evil Dead provoque l’euphorie par sa mise en scène virtuose. D’une efficacité redoutable, Raimi transcende son script éculé en jouant la carte de la provocation et de l’action cinglante dans un esprit de grand-guignol carnavalesque. Fort de son ingéniosité bricolée, il secoue le spectateur et joue avec ses nerfs, face à ces protagonistes soumis, un à un, à l’emprise démoniaque.

À la bande-son tonitruante, où ricanements moqueurs se disputent aux hurlements d’effroi, Evil Dead distille une panique masochiste chez son spectateur voyeur. Jamais série B n’aura rendu si palpable — et terrifiante — une scénographie forestière, où l’entité démoniaque semble s’infiltrer jusque dans la pellicule. À ce titre, et en frôlant miraculeusement l’écueil du ridicule, la scène du viol de Cheryl reste un moment d’anthologie, couillu, chargé d’une verve visuelle aux connotations sexuelles — c’est d’ailleurs pour cette transgression que l’Angleterre assigna Raimi devant les tribunaux.

La tension diffuse devient de plus en plus prégnante, la férocité cauchemardesque atteint son apogée lors d’une ultime demi-heure totalement débridée, quand le dernier survivant, esseulé, se retrouve confiné dans la cabane maudite, à lutter vaillamment contre les démons ricaneurs.

 
"Le rire du démon dans la pellicule".
Furieusement gore (les armes blanches pénètrent et sectionnent les chairs avec une verdeur viscérale !), diablement jouissif, méchamment railleur, Evil Dead déploie avec une vigueur rare un florilège de déviances horrifiques dignes d’un bad trip sarcastique. Chef-d’œuvre subversif d’horreur hardgore, il reste d’une modernité renversante, notamment par sa capacité à transgresser la peur en y injectant stupeur, choc, euphorie — on ne compte plus les estocades des jump scares ultra-efficients.

C’est ce qu’on appelle aussi : une déclaration d’amour. Celle d’un artiste entièrement habité par ses innovations d’alchimiste ricaneur.

*Eric Binford
01.05.13. (23è visionnage)

La critique d'Evil-Dead, version 2013: http://brunomatei.blogspot.fr/2013/05/evil-dead-2013.html

RécompensesPrix du Public et le Prix de la Meilleure Première Œuvre au Festival du Rex à Paris en 1982.


L'Enfance Volée / Der Verdingbub


de Markus Imboden. 2011. Suisse. 1h48. Avec Katja Riemann, Stefan Kurt, Maximilian Simonischek, Max Hubacher, Lisa Brand, Miriam Stein.

Sortie salles en 2011 en Suisse alémanique, 18 avril 2012 en Suisse romande
FILMOGRAPHIE: Markus Imboden est un réalisateur et scénariste suisse, né le 17 Octobre 1955 à Interlaken. L'Enfance Volée est son film le plus connu dans son pays natal.


Témoignage bouleversant sur la condition des orphelins suisses mais aussi des enfants destitués de leurs parents dans les années 50, l'Enfance Volée relate ici les destins de Max et Berteli embrigadés de force dans une famille d'accueil. Avec l'autorité castratrice de leurs nouveaux parents, des fermiers miséreux sans vergogne, les adolescents vont endurer diverses maltraitances physiques et sombrer dans l'esclavage avant de tenter la rébellion.


Drame social d'une intensité dramatique toujours plus éprouvante, l'Enfance Volée est un film choc imparable sur l'intolérance et la tyrannie parentale mais aussi le laxisme des pouvoirs publics.
Sans pathos et encore moins de misérabilisme, Markus Imboden réussit avec réalisme à nous décrire le calvaire de deux adolescents asservis par des paysans rétrogrades victimes de leur médiocrité. Si le film s'avère aussi poignant, immersif et passionnant dans sa peinture sordide allouée aux valeurs familiales, il le doit surtout à la caractérisation convaincante de ces personnages. Les antagonistes réussissant avec sobriété (en dehors du jeu outrancier du pasteur) à véhiculer une humanité déclinante dans leur désoeuvrement engendré par l'alcoolisme et la précarité financière. Enfin, les deux enfants incarnés par Maximilian Simonischek et Lisa Brand forment un duo inévitablement émouvant dans leur désarroi et rancoeur esseulées. Ils nous insufflent avec pudeur une empathie naturelle de par leur jeu dépouillé inscrit dans l'humilité fraternelle.


Superbement photographié au sein d'une nature bucolique verdoyante, l'Enfance Volée est un drame fort et cruel sur l'enfance galvaudée, intelligemment détourné de fioriture et de bons sentiments. La prestance habile des comédiens permettant de nous immerger dans leur existence sordide avec une vérité humaine prédominante. Au final, il demeure difficile de sortir indemne d'un tel fardeau pour ces enfants compromis à la maltraitance et l'inceste sexuelle. Un constat édifiant auquel 100 000 d'entre eux furent du jour au lendemain destitués de leurs parents pour être placés dans des familles d'accueil miséreuses après la seconde guerre. Sans compter cet hommage humble aux baladins accordéonistes ayant survécu grâce à leur inspiration musicale. Sur ce dernier point, ne vous fiez pas à l'aspect racoleur de son affiche (ainsi que son titre conventionnel). 

30.04.13
Bruno Matéï



jeudi 25 avril 2013

FLASH GORDON

                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site mariolikesmovies.com

de Mike Hodges. 1980. U.S.A/Angleterre. 1h51. Avec Sam J. Jones, Melody Anderson, Ornella Muti, Max Von Sydow, Topol, Timothy Dalton, Brian Blessed.

Sortie salles France: 28 Janvier 1981. U.S: 5 Décembre 1980

FILMOGRAPHIE: Mike Hodges est un producteur, réalisateur et scénariste britannique, né le 29 Juillet 1932 à Bristol (Royaume-Uni). 1971: La Loi du Milieu. 1972: Retraite Mortelle. 1974: l'Homme Terminal. 1978: Damien, la malédiction 2 (non crédité). 1980: Flash Gordon. 1985: Les Débiles de l'espace. 1987: L'Irlandais. 1989: Black Rainbow. 1998: Croupier. 2003: Seul la mort peut m'arrêter.


Film culte chez une frange de spectateurs, estampillé "nanar suprême", Flash Gordon est une improbable production de l'intarissable Dino de Laurentiis sous l'égide de Mike Hodges. Un cinéaste inégal à qui l'on doit tout de même un authentique chef-d'oeuvre du polar britannique, La Loi du Milieu. D'après le comic créé par Alex raymond en 1934, Flash Gordon revient sur nos écrans en ce début des années 80 avec cette super production influencée par le phénomène Star Wars. La distribution éclectique composée d'illustres comédiens parmi lesquels Max Von Sidow (hiératique, il EST l'empereur Ming, sadique et impassible !), Ornella Muti (en nympho écervelée) et Timothy Dalton (en prince versatile accoutré d'un pyjama vert !), a de quoi dérouter le spectateur au vu de leur prestance excentrique. Mais la palme de l'acteur le plus incongru en revient à l'inexpressif Sam J. Jones dans la peau du super héros féru de football américain (la partie sportive improvisée sur le temple de Ming est un moment d'anthologie couillu !). Il s'agit ici de son 2è rôle à l'écran puisqu'un an au préalable il avait partagé l'affiche avec la comédienne Bo Derek pour y faire une apparition dans Elle de Blake Edwards. En l'occurrence, il faut avouer que ce piètre acteur fait bien pâle figure pour endosser le rôle majeur de Flash Gordon. Hormis sa silhouette saillante, le jeune comédien au minois bien docile semble complètement dépassé par les évènements au fil de ces déboires avec des E.T insidieux. Par miracle, il réussit pour autant à franchement nous amuser par son jeu cabotin alliant l'esprit pugnace et la bonhomie puérile.


Pour en revenir à l'ovni risible de Mike Hodges, son grand spectacle s'avère une pantalonnade disco (chargé de teintes polychromes !) alternant désarroi, rire grinçant et plaisir coupable. Le scénario impayable est à lui seul une blague de comptoir ! A la suite du crash d'une fusée sur une planète hostile, Flash Gordon et ses comparses vont rencontrer une société d'extra-terrestres régis par un tyran totalitaire. Pour tenter de survivre, ils vont devoir s'allier avec les hommes oiseaux et le prince Barin afin de déjouer les ambitions diaboliques du leader Ming ! Entre les désirs conjugaux de ce dernier pour s'accaparer d'une princesse, les caprices insidieux de sa fille nympho et les querelles jalouses du prince Barin, une guerre se prépare entre les deux clans pour l'avenir de l'humanité ! Pour compenser la vacuité de son scénario, Mike Hodges émaille son intrigue d'un concours d'épreuves mortelles que nos héros doivent entreprendre afin de mesurer leur courage. Enfin, la dernière demi-heure laisse place à un baroud d'honneur intergalactique assez réjouissant dans ses nombreux échanges de tirs au rayon laser. L'action échevelée se résumant à une bataille spatiale auquel l'armée des hommes volants s'est déployée en masse parmi l'entraide de Flash (équipé pour le coup d'un scooter aérien !) afin de réduire en poussière l'empire de Ming.


Surveillez bien les étoiles dans le ciel, un Flash aux cheveux blonds n'est jamais bien loin !
Avec ses dialogues hilarants, ses décors criards en matte painting, ses costumes en paillette au look disco et surtout la complicité amiteuse des comédiens, Flash Gordon côtoie la farce débridée avec une bonne humeur indécrottable. S'il s'agit sans doute d'un des plus ubuesques films de super-héros, la sympathie et la fougue que l'on éprouve au fil de ses aventures rocambolesques nous préserve un sourire de gosse jusqu'au mot "fin" laissé en suspens ! (la suite escomptée n'ayant jamais vu le jour !). Et pour marquer le rythme, le score tonitruant orchestré par le groupe Queen est loin d'être étranger au plaisir coupable procuré !

25.04.13. 4èx
Bruno Matéï


mercredi 24 avril 2013

Angel Heart

                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site forum.nanarland.com

d'Alan Parker. 1987. U.S.A/Angleterre/Canada. 1h53. Avec Mickey Rourke, Robert De Niro, Lisa Bonet, Charlotte Rampling, Stocker Fontelieu, Brownie McGhee, Michael Higgins.

Sortie salles France: 8 Avril 1987. U.S: 6 Mars 1987

FILMOGRAPHIE: Alan Parker, né Alan William Parker le 14 Février 1944 à Islington, Londres, est un réalisateur, compositeur, scénariste et producteur anglais.
1975: The Evacuees (télé-film). 1976: Bugsy Malone. 1978: Midnight Express. 1980: Fame. 1982: l'Usure du Temps. 1982: Pink Floyd the Wall. 1984: Birdy. 1987: Angel Heart. 1988: Mississippi Burning. 1990: Bienvenue au Paradis. 1991: The Commitments. 1994: Aux bons soins du Dr Kellogg. 1996: Evita. 1999: Les Cendres d'Angela. 2003: La Vie de David Gale.


Voyage au bout de l’âme noire.

Dans les limbes du cinéma, il existe des œuvres qui, telles des entités envoûtantes, nous attirent dans leur spirale infernale et, peu à peu, nous happent sans retour. Angel Heart d'Alan Parker est l’une de ces œuvres. Thriller occulte imbibé de magie noire, le film est un voyage au bout des ténèbres où le spectateur s’égare aux côtés de Mickey Rourke, dans un rôle de détective privé en perdition, et où chaque image semble tremper dans le poison de l’âme humaine.

Synopsis : New York, 1955. Un détective privé, Harry Angel, est contacté par un mystérieux client, Louis Cyphre, pour retrouver Johnny Favorite, un ancien chanteur disparu depuis 12 ans après la guerre. Au fil de son enquête, l’enchevêtrement des indices devient un piège, et les corps s’amoncellent autour de lui, dans une danse macabre dont il ne peut plus se défaire.

Pour la première fois de sa carrière, Alan Parker plonge dans l’abîme du genre horrifique, tout en empruntant les codes du film noir. Ce détour stylistique, adapté du roman de William Hjortsberg, révèle la main habile du réalisateur, qui, en virtuose, façonne une esthétique crépusculaire d’une rare beauté. La photographie, jouant sur les nuances du clair-obscur, nous immerge dans un monde où la lumière et l’ombre ne sont que des frontières floues, où la ville de New York devient un labyrinthe tentaculaire, prête à avaler toute certitude.


À mesure que l’investigation d’Harry Angel se déploie, Angel Heart prend une tournure de plus en plus abstraite, transformant une quête de vérité en une plongée abyssale dans la psyché du détective. Chaque rencontre, chaque témoin, chaque cadavre ajoutent une couche d’angoisse, jusqu’à ce que l’horreur devienne une réalité indiscernable de la folie qui ronge l’esprit d’Angel. Le film se fait le miroir de sa propre déchéance, une lente descente aux enfers où la perte de repères devient une matière organique, aussi noire que la nuit.

Ce voyage vers l’inconnu se poursuit jusqu’en Louisiane, un autre territoire où le mystère se fait encore plus oppressant. Là, la culture du vaudou et des rituels occultes se déploie, étendant son ombre sur l’enquête. Alan Parker ne se contente pas de raconter une histoire ; il crée un environnement sensoriel où la peur et le désir se confondent. La réalisation formelle atteint une perfection si méticuleuse qu’une aura maléfique semble s’immiscer dans chaque recoin de l’écran. L’atmosphère, feutrée mais oppressante, porte le spectateur vers un climat malsain, de plus en plus poisseux, à l’image même des rituels pratiqués sur les cadavres des victimes. La présence du Mal est palpable, presque tangible, et son influence, omniprésente, s’intensifie à mesure que la quête de vérité devient une spirale autodestructrice.

La lente dérive psychologique de Harry Angel est sublimée par l’interprétation viscérale de Mickey Rourke, qui, dans le rôle du détective en proie à ses propres démons, incarne à la perfection cette fragilité intérieure, cette névrose qui se transforme progressivement en une psychose dévorante. L’intrigue devient pour lui une toile d’araignée mentale, une prise lente mais certaine qui le condamne à une révélation d’une cruauté inouïe.

Dans le rôle de Louis Cyphre, Robert De Niro partage la vedette avec Rourke, apportant à son personnage une élégance glaciale et une menace sourde. Sa présence, discrète mais pénétrante, s’impose à l'écran comme une figure aristocratique, froide et calculatrice. À l’instar d’un baron du Mal, Cyphre manipule son interlocuteur avec une finesse cruelle, ses ongles acérés devenant des instruments de torture psychique dans un jeu de duperie pervers. Ce rôle de maître des ténèbres, joué avec une subtilité inquiétante, est l’un des points forts du film, parfaitement dosé pour maintenir une tension constante.


Jusqu'au bout des Ténèbres.
Angel Heart s’apparente à une œuvre de pur cauchemar. Sa beauté opaque et ensorcelante, à la fois fascinante et perturbante, semble avoir été façonnée par le diable lui-même. Le film n’est pas seulement un thriller noir ; il est une entité à part entière, une hallucination qui nous entraîne inexorablement vers une révélation schizoïde. L’intensité de son atmosphère lugubre, l’aura machiavélique qui émane de chaque scène et l’interprétation frémissante de Mickey Rourke renforcent l’aspect délétère du film, une vision du Mal si omniprésente qu’elle finit par envahir notre propre perception.

En effet, Angel Heart est un voyage dans l’inconnu, un pèlerinage vers la perte de soi, où chaque pas, chaque ombre, chaque murmure est une invitation à se perdre. L’omnipotence du Mal, incarnée avec une telle brillance visuelle et psychologique, fait de ce film un chef-d’œuvre inclassable, une expérience sensorielle aussi bouleversante que fascinante.

Ainsi, Angel Heart s’élève, dans l’univers cinématographique, comme l’un des films les plus audacieux et perturbants des années 80, une exploration labyrinthique de l’âme humaine, de ses ténèbres, et des démons qu’elle cache au plus profond d’elle-même. Une œuvre où l’horreur devient une réflexion sur la condition humaine, un miroir déformé qui ne nous laisse que l’image d’un abîme.

*Bruno
04.05.25. 4èx. Vost. 4K
24.04.13. 

mardi 23 avril 2013

LE DERNIER REMPART (The Last Stand)

                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site vivalacinema.superforum.fr

de Kim Jee-Woon. 2013. U.S.A. 1h47. Avec Arnold Schwarzenegger, Forest Whitaker, Eduardo Noriega, Peter Stormare, Rodrigo Santoro, Jaimie Alexander, Zach Gilford, Luis Guzman.

Sortie salles France: 23 Janvier 2013. U.S: 18 Janvier 2013

FILMOGRAPHIE: Kim Jee-Woon est un réalisateur, scénariste et directeur de la photo sud-coréen, né le 6 Juillet 1964 à Séoul.
1998: The Quiet Family, 2000: The Foul King. 2003: Deux Soeurs. 2005: A Bittersweet Life. 2008: Le Bon, la brute et le cinglé. 2010: I saw the devil. 2013: Le Dernier Rempart.


Après plus de 10 ans d'absence, Arnold Schwarzenegger revient sur les écrans dans un rôle majeur de dur à cuir sous la caméra de Kim Jee-Woon. Pur hommage aux séries B d'action des années 80 qui envahissaient nos écrans et nos étagères Vhs, Le Dernier Rempart est un plaisir coupable du samedi soir conçu pour divertir sans modestie.

Afin qu'un dangereux criminel preneur d'otage évite de franchir la frontière mexicaine, un shérif et ses adjoints décide de s'allier pour lui barrer le chemin au sein de leur petite bourgade. 


Actionner bourrin dénué de prétention en assumant pleinement sa fonction de divertissement, le Dernier Rempart s'affiche en western moderne sous l'égide d'un shérif sclérosé délibéré à ne pas se laisser intimider par la pègre d'un leader mafieux. Ca démarre fort avec une spectaculaire évasion high-tech élaborée par les sbires du dangereux repris de justice culminant sa fuite à bord d'un bolide blindé. Alors que la police tente par tous les moyens de le mettre hors d'état de nuire, il réussit haut la main à esquiver les barrages routiers avec l'ingérence d'hommes de mains suréquipés. Mais afin de gagner la frontière mexicaine, il doit emprunter l'itinéraire d'une petite ville du Texas. Dans cette bourgade reculée, le Shérif Owens décide de le cueillir parmi le volontariat d'adjoints débutants. C'est à ce moment propice que le clou du spectacle promu achève son apothéose dans un déluge d'échanges de tirs (sulfateuse à l'appui s'il vous plait !) et d'explosions. Avec l'efficacité d'une réalisation nerveuse décuplant sans répit ses séquences d'action continuellement cinglantes, le Dernier Rempart gagne d'autant plus notre sympathie par la dérision accordée à chaque personnage. Et en priorité vis à vis des adjoints couards du shérif, plutôt indécis à devoir se mesurer contre des malfrats belliqueux, mais davantage engagés dans un élan (suicidaire) de bravoure solidaire. La palme de l'hilarité en revenant à l'ancien trublion maso de Jackass, Johnny Knoxville, ici reconverti en benêt artilleur ! Avec une ferveur délurée, certaines de ses pitreries provoquent facilement le rire par sa démesure héroïque incontrôlée. Dans celui du shérif sexagénaire redresseur de tort, Arnold Schwarzenegger nous revient avec une forme lénifiante beaucoup moins agile pour sa posture stoïque qu'à l'époque de sa notoriété. Raison pour laquelle l'affrontement au corps à corps entamé avec Cortez relève plus du combat de catch que des traditionnelles bastons homériques. Néanmoins, sa présence avenante et sa bonhomie attachante nous émeut d'une certaine manière dans sa volonté de daigner renouer avec la symbolique du héros vaillant.


Nanar survitaminé assumant pleinement son rôle ludique d'actionner décérébré, le Dernier Rempart est une jouissive offrande pour tous les fans du genre. Et en particulier à ceux de la génération 80 qui auront été bercés par les buddy movies et films de guerre post-vietnamiens où leurs héros préférés (Stallone / Schwarzenegger, même combat !) se partageaient l'affiche avec une foi imperturbable. 

23.04.13
Bruno Matéï

lundi 22 avril 2013

LA PART DES TENEBRES (The Dark Half)

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmaffinity.com

de George A. Romero. 1992. U.S.A. 2h02. Avec Timothy Hutton, Amy Madigan, Michael Rooker, Julie Harris, Robert Joy.

Sortie salles France: 18 Août 1993

FILMOGRAPHIE: George Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York.
1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead. 2011: Deep Red.


Oeuvre mésestimée aujourd'hui sombrée dans l'oubli, La Part des Ténèbres est l'un des films les moins appréciés du maître Romero. S'il s'agit de l'un de ces projets les moins personnels, on ne peut pas occulter l'originalité de son scénario (tiré d'un roman de Stephen King) ainsi que la conviction de ces interprètes. A la suite d'un chantage avec l'un de ses fans, l'écrivain Thad Beaumont décide de se débarrasser de son pseudonyme en divulguant sa véritable identité aux médias. Depuis ses déclarations, une série de meurtres sanglants ébranlent son entourage. Thad est rapidement suspecté par la police puisque ses empreintes digitales sont relevées sur les lieux de chaque crime.


En habile conteur, George A. Romero empreinte ici la voie du thriller fantastique en préconisant un suspense haletant parfaitement planifié. Le film se focalisant essentiellement sur une série  d'évènements meurtriers perpétrés au sein d'une petite bourgade et l'investigation autonome qui s'ensuit vis à vis de l'écrivain. En traitant du thème du double et de notre "part des ténèbres" enfouie en chacun de nous, George Romero dirige avec savoir faire un thriller diabolique reposant sur les épaules de Timothy Hutton. Dans un double rôle en demi-teinte, l'acteur véhicule une belle spontanéité à incarner deux personnages antinomiques confrontés à l'éthique du bien et du mal. A l'instar de Jekyll et Hyde, Thad Beaumont et Georges Starck forment la dualité d'une gémellité schizophrène. Leurs enjeux impartis à la soif de survivre, d'exister et de perdurer sont traités avec une certaine intensité dans leur esprit de rancoeur et intelligence pour sa réflexion identitaire sur l'influence du mal. Cette dense confrontation opposant un personnage de fiction avec son propre créateur (l'écrivain, prisonnier du genre qui a taillé sa réputation), suscite trouble et fascination, notamment par la caractérisation délétère de Georges Starck. Figure renfrognée du Mal matérialisée par la tumeur cérébrale de Thad Beaumont, insatiablement délibérée à cultiver sa nouvelle existence. Pour ajouter un aspect insolite à l'intrigue, George Romero fignole l'esthétisme d'une séquence cauchemardesque (le rêve prophétique de Thad), ainsi que l'onirisme d'une métaphore divine sous l'entremise de volatiles destinés à emporter l'âme des damnés. Sur ce point, la dernière séquence finale se révèle assez spectaculaire et singulière dans son imagerie poético-morbide déployant l'offensive d'une nuée de passereaux carnivores.


Avec modestie, George A. Romero s'impose en l'occurrence en habile conteur, dans l'art et la manière de transfigurer une intrigue originale. La densité de son interprétation et surtout la maîtrise acerbe de son suspense renforçant le caractère attachant de cet inquiétant thriller injustement méprisé. 

22.04.13. 3èx
Bruno Matéï

samedi 20 avril 2013

HIERRO

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site identi.li

de Gabe Ibanez. 2009. Espagne. 1h29. Avec Elena Anaya, Bea Segura, Mar Sodupe, Andrés Herrera, Miriam Correa, Kaiet Rodriguez.

Sortie Dvd France: 24 Novembre 2010. Sortie salles Espagne: 15 Janvier 2010

FILMOGRAPHIE: Gabe Ibanez est un réalisateur espagnol, né le 7 Juin 1971 à Madrid.
2009: Hierro


A la suite de la disparition inexpliquée de son fils sur un ferry, une mère décide de partir à sa recherche mais se retrouve plongée dans un désarroi paranoïaque.

Pour un premier film, le réalisateur Gabe Ibanez opte pour un fantastique éthéré sous couvert d'un drame psychologique intimiste. Au suspense lattent avare en péripéties, Hierro privilégie surtout un climat d'étrangeté prégnant sous l'égide d'une mère démunie, persuadée que son fils est resté en vie à la suite de sa disparition. S'agit-il d'un enlèvement ou d'un accident mortel ? Le rythme lancinant découlant des va-et-vient successifs d'une héroïne perdue au milieu d'un archipel et le manque d'aplomb de la réalisation risquent toutefois de rebuter certains spectateurs. Qui plus est, sa structure narrative indécise manque de conviction pour nous convaincre pleinement de son dénouement prévisible. Les quidams suspicieux étant mal exploités dans leur autorité hostile et leur potentielle culpabilité. Toute en fragilité humaine, l'actrice Elena Aneya véhicule une inévitable empathie dans le combat d'une mère désespérée à daigner retrouver son fils. Elle réussit avec sobriété à provoquer une émotion candide dans son instinct maternel subordonné à l'amour d'un enfant.


La mer des larmes
Si Hierro ne convainc pas pleinement, faute d'un scénario mal ficelé et d'un rythme un peu trop languissant, il réussit tout de même à provoquer une certaine émotion et un intérêt périodique au fil de séquences oniriques imprégnées d'une ambiance feutrée. En outre, son épilogue salvateur renoue avec une poésie diaphane lors d'une séquence fantasmagorique absolument bouleversante. En résulte un drame intimiste bancal qui manque de persuasion mais insuffle tout de même quelques bonnes idées et une certaine émotion au fil du cheminement hasardeux d'une héroïne déchue.

Dédicace à Cid Orlandu
20.04.13
Bruno Matéï

mercredi 17 avril 2013

Jack Reacher

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site collider.com

de Christopher McQuarrie. 2012. U.S.A. 2h10. Avec Tom Cruise, Rosamund Pike, Robert Duvall, Jai Courtney, Richard Jenkins, Werner Herzog.

Sortie salles France: 26 Décembre 2012. U.S: 21 Décembre 2012

FILMOGRAPHIE: Christopher McQuarrie est un réalisateur, producteur, acteur et scénariste américain, né en 1968 à Princeton dans le New Jersey. 2000: Way of the Gun. 2012: Jack Reacher

Un mystérieux tueur abat froidement 5 citadins dans un jardin public. Une avocate et un ancien baroudeur vont faire équipe pour déjouer une mystérieuse conspiration.

Un bon polar d'espionnage déguisé en actionner contemporain. Un héros vindicatif pas comme les autres. Une intrigue tortueuse plutôt prenante qui converge vers le complot judiciaire. Tom Cruise est assez étonnant dans le rôle anti-conformiste d'un vagabond justicier particulièrement retors. Flegmatique mais véloce, il incarne son rôle avec sobriété, même si ces détracteurs pourraient lui reprocher sa rudesse d'esprit. Attention tout de même aux amateurs d'action qui risqueraient d'être déçus, le film se focalisant surtout sur un suspense lattent au sein d'une intrigue à tiroirs quelque peu alambiquée. La réalisation appliquée, l'efficacité de son récit, les dialogues ciselés et le climat austère nous changent des sempiternels blockbusters conçus uniquement pour nous en mettre plein la vue. Ici, c'est tout l'inverse qui se produit, les deux seules scènes explosives étant uniquement au service d'une longue investigation policière. Tout cela manque quand même un peu de vigueur et d'intensité mais le polar déroutant s'avère néanmoins captivant pour ne pas ennuyer et fait presque figure d'ovni dans la caractérisation insolite de ce justicier infaillible.

18.04.13
Bruno 


BASIC INSTINCT


                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site affiches-et-posters.com

de Paul Verhoeven. 1992. 2h08. Avec Michael Douglas, Sharon Stone, George Dzundza, Jeanne Tripplehorn, Denis Arndt, Leilani Sarelle, Dorothy Malone, Bruce A. Young

Sortie salles France: 8 mai 1992. U.S: 20 Mars 1992

FILMOGRAPHIE: Paul Verhoeven est un réalisateur néerlandais, né le 18 Juillet 1938 à Amsterdam.
1971: Business is business. 1973: Turkish Delices. 1975: Keetje Tippel. 1977: Le Choix du Destin. 1980: Spetters. 1983: Le Quatrième Homme. 1985: La Chair et le Sang. 1987: Robocop. 1990: Total Recall. 1992: Basic Instinct. 1995: Showgirls. 1997: Starship Troopers. 2000: l'Homme sans Ombre. 2006: Black Book.


Thriller érotique au succès international considérable (352 millions de dollars de recettes), Basic Instinct reçut un tel accueil enthousiaste qu'il généra une multitude d'ersatz particulièrement rustres. Outre le portrait psychologique imparti aux amants interlopes, sa grande réussite émane de son scénario délétère d'une subtile ambiguïté. Durant un rapport sexuel avec une mystérieuse blonde, une ancienne rock star est retrouvée sauvagement assassinée à coups de pic à glace. L'inspecteur Nick Curran mène l'enquête auprès de l'écrivain et psychologue Catherine Tramell, la maîtresse avec qui la victime avait eut une liaison la veille du crime. La rencontre sulfureuse avec cette femme retors va l'entraîner vers une relation amoureuse vénale jusqu'au point de non retour.


Suspense acéré, érotisme torride et violence incisive sont les ingrédients d'un thriller vertigineux au scénario impeccablement charpenté. L'extrême efficacité de son récit émane surtout des rapports de drague entretenus avec un flic indécis et une mante religieuse insaisissable. L'ambivalence de leur relation charnelle inscrite dans la romance et la suspicion convergent vers un jeu de manipulation où la potentielle coupable va tisser sa toile afin de mieux duper ses adversaires. Avec une maîtrise virtuose géométrique (les deux poursuites en voitures sont techniquement renversantes, l'estocade des meurtres d'une sauvagerie explicite et la stylisation érotique d'une audace épurée), Paul Verhoeven exploite sexe et violence avec une intelligence roublarde. Au sens aiguisé du suspense sans faille et en semant une suspicion progressive, il nous élabore une enquête criminelle jubilatoire par ses fausses pistes en pagaille, rebondissements et revirements sanglants. En mangeuse d'homme et lesbienne assumée, Sharon Stone explose littéralement l'écran et révèle son élégance charnelle avec une sensualité incongrue. La densité du scénario résulte en partie de la caractérisation de son personnage aussi trouble que clairvoyant. En victime galvaudée, subordonnée à l'amour d'une maîtresse bicéphale, Michael Douglas impose avec constance un jeu équivoque d'inspecteur en perdition entaché par ses sentiments. Un flic névrosé au passé torturé mais davantage délibéré à coincer sa présumée coupable pour vaincre ses doutes. A eux deux, ils forment un duo commun particulièrement indocile dans leurs pulsions sexuelles incontrôlées. Leur affrontement perfide est une guerre cérébrale sans merci mise en exergue sur le jeu de manipulation et l'appât de séduction.


Pulsions

Thriller érotique transgressif entièrement bâti sur la psychologie névrosée de ses personnages, Basic Instinct est un jeu de perversité transcendant le portrait d'amants déchus par l'échec amoureux. La révélation Sharon Stone et l'aura sulfureuse qui émane de ses ébats sexuels nous ensorcelle avec une grâce vénéneuse et achemine l'oeuvre novatrice de Verhoeven au rang de chef d'oeuvre des années 90.

17.04.13. 3èx
Bruno Matéï 

mardi 16 avril 2013

King-Kong (1976)

                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site lescritiquesducritique.blogspot.com

de John Guillermin. 1976. U.S.A. 2h14. Avec Jeff Bridges, Jessica Lange, Charles Grodin, John Randolph, Rene Auberjonois, Julius W. Harris.

Sortie salles France: 8 Septembre 1976. U.S: 17 Décembre 1976

FILMOGRAPHIE: John Guillermin est un réalisateur, producteur et scénariste britannique, né le 11 Novembre 1925 à Londres (Royaume-Uni). 1950: Torment. 1959: La plus grand aventure de Tarzan. 1964: Les Canons de Batasi. 1965: La Fleur de l'âge. 1966: Le Crépuscule des aigles. 1968: Syndicat du meurtre. 1968: Un cri dans l'ombre. 1969: Le Pont de Remagen. 1970: El Condor. 1972: Alerte à la bombe. 1973: Shaft contre les trafiquants d'hommes. 1974: La Tour Infernale. 1976: King-Kong. 1978: Mort sur le Nil. 1980: Mr Patman. 1984: Sheena, reine de la jungle. 1986: King Kong 2. 1988: Poursuite en Arizona.


Avant-propos
"C'est dans les vieux pots que l'on fait les meilleures soupes".
Alors qu'à l'heure où j'écris ces lignes le pudding faisandé Kong vs Godzilla tente de se libérer de ses entraves chez les plateformes de téléchargement, faute de privation de salles chez nous; retour sur un classique mal aimé des années 70 si je me réfère à la critique snobinarde incapable de se défaire de la référence du duo Cooper / Schoedsack. Un Blockbuster de l'ancienne école aussi naïf et candide que profondément émouvant, haletant et spectaculaire. Si bien que King-Kong, version 76 découle d'une époque révolue (ou presque) où l'on était encore capable de réveiller l'enfant qui est en nous. 

Gros succès à sa sortie en salles (90 millions de dollars de recettes pour un budget estimé à 23 000 000) mais aussi à la télévision puisqu'au milieu des années 80 Dino De Laurentiis eut l'idée de proposer une suite après sa projection record sur une chaîne américaine, King-Kong est un remake plutôt audacieux et ambitieux d'oser concourir au chef-d'oeuvre de Schoedsack. Surfant sur la vague des films catastrophes entrepris par La Tour Infernale et les Dents de la mer, son producteur fit appel au spécialiste John Guillermin pour réactualiser un classique du monster movie réputé imputrescible. Epaulé d'habiles artisans des FX, Carlo Rambaldi et Rick Barker, et offrant le premier rôle d'une jeune actrice néophyte concernant Jessica Lange, ce King-Kong contemporain opte pour la démesure d'un spectacle exotique  mené sans temps mort 2h14 durant dont la réalisation ne manque ni d'aplomb, ni de brio, ni de fulgurance formelle. D'ailleurs, le redécouvrir aujourd'hui prouve à quel point cette énorme production se donna les moyens afin de crédibiliser les vicissitudes du plus célèbre gorille du 7è art. Et on marche à fond les yeux écarquillés en renouant avec nos souvenirs infantiles, les larmes aux yeux si je me réfère au splendide final élégiaque.   


Ainsi, avec l'aide d'habiles trucages confectionnés en animatronique ou à l'aide d'un simple costume en peau de primate, la plupart des séquences où le gorille apparaît demeure incroyablement persuasive et non exempt d'émotion prude de par sa complicité charnelle avec la Belle. Justement, sur ce point, il s'agit de la version la plus érotisée illustrant avec fébrilité des moments de tendresse comme le prouve cette séquence sulfureuse assez couillue du viol implicite de Dwan provoqué par la bête. Parmi la beauté sauvage de ses décors exotiques particulièrement grandioses (toute la partie confinée sur l'île du crane est esthétiquement flamboyante), King-Kong opte pour un spectacle ludique fertile en péripéties (la longue traque entamée par nos héros au sein de la jungle afin de retrouver Dwan, prisonnière de Kong, ou encore le combat de ce dernier contre un serpent géant - unique séquence ratée avouons-le faute de trucages risibles dignes d'une prod Toho -). La spontanéité des comédiens (mentions à Jeff Bridges en pélerin écolo et à Charles Grodin dans celui du pétrolier cupide) et surtout le charme lascif de Jessica Lange, littéralement lumineuse, accentuent l'empathie que l'on éprouve pour le destin tragique de la bête. Qui plus est, afin de contenter les amateurs d'action catastrophiste, la seconde partie déploie plusieurs séquences homériques assez impressionnantes (le crash ferroviaire, Kong se libérant de ses chaines sur la plate-forme externe devant une foule médusée et surtout sa traque fulgurante compromise au sommet des Twin Towers !) avant de nous chavirer vers un final prévisible étonnamment bouleversant.


Sans atteindre la magie, l'émotion et le souffle épique du chef-d'oeuvre de Cooper et Schoedsack, ce remake demeure pourtant extrêmement intègre, soigné, attentionné, divertissant et attachant pour nous offrir un spectacle haut en couleurs au cachet rétro bourré de charme. La prestance innocente de Jessica Lange (non exempt de dérision lors de ses réparties verbales infantiles) affectée par l'amour du gorille occasionnant des séquences poétiques particulièrement touchantes, voires mêmes émouvantes. Enfin, l'impact émotionnel alloué à la mort tragique de la bête (moment d'anthologie resté dans toutes les mémoires jusqu'au trauma pour les plus sensibles) nous ébranle bien au delà du générique de fin. D'ailleurs, à titre personnel, et à la revoyure d'une 4è projection en qualité 4K, je l'admire autant que la version de 33 si bien que je resterai à jamais dans l'incompréhension à saisir les raisons équitables d'une oeuvre mal aimée, voir même méprisée auprès des critiques les plus intransigeantes lui réfutant une quelconque légitimité artistique. A réhabiliter d'urgence donc, d'autant plus que la copie 4K, resplendissante, est à couper le souffle. 

*Bruno
16.04.14.
23.12.22. 4èx


lundi 15 avril 2013

L'Exorcisme d'Emilie Rose / The Exorcism of Emily Rose

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Scott Derrickson. 2005. U.S.A. 2h02. Avec Laura Linney, Tom Wilkinson, Campbell Scott, Jennifer Carpenter, Colm Feore, Joshua Close, Kenneth Welsh, Scott Derrickson.

Sortie salles France: 7 Décembre 2005

FILMOGRAPHIE:  Scott Derrickson est un réalisateur, producteur et scénariste américain.
1995: Love in the Ruins. 2000: Hellraiser 5: Inferno. 2005: l'Exorcisme d'Emilie Rose. 2008: Le Jour où la terre s'Arrêta. 2012: Sinister. 2013: Goliath. Prochainement: Deus Ex.


Avant-propos:
 Comme Emily l'avait prédit, son histoire a affecté de nombreuses personnes. Sa tombe est devenue un lieu de pèlerinage non officiel qui continue d'attirer des visiteurs du monde entier. Après le procès, le père Moore s'est mis à vivre en reclus, refusant de faire appel, et déclarant: "cette question concerne Dieu: les tribunaux de ce monde ne peuvent rendre de jugement sur elle". 
Erin Brune a communiqué son dossier a un expert médical et anthropologue dont les recherches et les travaux publiés sur la vie et la mort d'Emily Rose ont inspiré le film. 

Influencé par l'histoire d'Anneliese Michel, une jeune allemande décédée après une séance d'exorcisme dans les années 70, le film de Scott derrickson relate le calvaire d'Emily Rose, étudiante universitaire asservie par des forces démoniaques. Loin d'être un ersatz grossier de l'Exorciste de Friedkin ou d'un pseudo documenteur éculé, l'Exorcisme d'Emilie Rose s'en démarque lestement en opposant l'aspect médical d'un cas de possession (Emilie souffrirait potentiellement de trouble épileptique psychotique) avec son attrait surnaturel lié à la spiritualité.


Avec l'efficacité d'un suspense lattent, le réalisateur alterne séances de procès pour la culpabilité du père Richard Moore (il est accusé d'homicide par imprudence) avec quelques moments horrifiques parfois réellement terrifiants (les flash-back illustrant les premières manifestations surnaturelles infligées sur Emilie) ou impressionnants (la séance d'exorcisme confinée dans la grange). On sent bien que Scott Derrickson souhaite avant tout renforcer l'aspect crédible de son récit inspiré d'une authentique affaire de possession en juxtaposant les discours contradictoires des deux avocats. L'un préconisant une cause scientifique par le biais de la médecine, l'autre une foi divine. Ainsi donc, durant cette captivante session, le spectateur se pose donc en témoin, partagé entre l'explication rationnelle d'une grave pathologie, ou celle, irrationnelle, d'une existence démoniaque. Avec intelligence, le réalisateur ne prend pas parti sur ses théories antinomiques et nous laisse donc au final dans la suspicion, dans l'interrogation de notre propre foi et/ou morale. A savoir si une prescription médicale aurait pu influencer le décès d'Emilie ou s'il s'agissait d'un authentique cas de possession. Le débat argumenté accordant autant d'intérêt à la réflexion scientifique que mystique. En ce qui concerne la caractérisation interlope d'Emily, l'actrice Jennifer Carpenter réussit avec fébrilité à insuffler une dimension humaine dans son désespoir expressif et ses crises de folie natifs d'une démence satanique. Son désarroi nous est retransmis avec réalisme rigoureux quand celle-ci se retrouve sujette à des visions hallucinatoires, ou quand elle doit endurer (ou s'infliger) diverses agressions corporelles d'une entité invisible. Qui plus est, sa silhouette longiligne et son faciès étrange renforcent le malaise éprouvé à la vue de ces contractions difformes. Des séquences d'effroi incroyablement persuasives si bien que l'on perd pied avec notre réalité en y redoutant une quelconque entité démoniale au sein de notre cocon douillet. 


Avec intelligence et efficacité, l'Exorcisme d'Emilie Rose allie de manière fort originale le film de procès et l'épouvante pour mieux s'écarter des ficelles balisées du thème satanique. Sa réflexion spirituelle sur la foi catholique nous donnant à réfléchir sur nos croyances intrinsèques (que l'on soit athée, pratiquant ou agnostique, comme le souligne la morale indécise de l'avocate), sur nos doutes existentiels et surtout sur l'emprise chimérique du diable. Si bien que 20 ans après sa sortie, on peut enfin considérer  l'Exorcisme d'Emilie Rose comme un classique du genre proprement effrayant.

*Bruno
25.11.24. 4èx. Vost
15.04.13. 


La véritable Anneliese Michel  (source wikipedia)
Anneliese Michel (1951 - 1976) est une jeune Allemande célèbre pour avoir été prétendument possédée par des démons. Sa vie a servi de modèle pour les films L'Exorcisme d'Emily Rose (film de Scott Derrickson sorti en2005) et Requiem (film de Hans-Christian Schmid sorti en 2006).

BIOGRAPHIE:
Depuis sa naissance le 21 septembre 1952 à Leiblfing (Bavière), Anneliese Michel mena d'abord une vie normale, caractérisée seulement par une grande piété. Du jour au lendemain, sa vie bascula.

Un jour de 1968, elle commença à trembler violemment et à ne plus savoir contrôler son corps. Lors de ses crises, elle perdait sa voix, ne pouvait plus appeler à ses parents pour leur demander de l'aide. Un neurologue diagnostiqua qu'elle souffrait d'épilepsie et fut admise à l'hôpital pour un traitement.

Après ses premières attaques, elle crut voir des visages démoniaques en train de grimacer lors de sa prière quotidienne, elle avait aussi l'impression d'entendre des voix. Anneliese en parla aux médecins qui ne savaient plus comment l'aider.

Au début de l'année 1973, les parents d'Anneliese demandèrent à plusieurs prêtres d'exorciser leur fille, mais ils pensaient qu'il lui suffisait de continuer de prendre ses médicaments. De plus, pour pratiquer un exorcisme, il fallait que la personne possédée répondît à des caractéristiques bien spécifiques : parler une langue qu'elle n'avait jamais apprise, avoir des pouvoirs surnaturels et se sentir gênée par des objets religieux.

En 1974, un prêtre l'examina et accepta qu'on pratiquât un exorcisme, mais sa hiérarchie le lui interdit. Son état alors empira et les crises devinrent de plus en plus violentes. Elle insultait les membres de sa famille, les battait et les mordait.

Elle refusait de manger, prétendant que les démons ne lui permettaient pas de le faire. Elle dormait à même le sol. On pouvait l'entendre toute la journée en train de hurler, de briser les crucifix et de détruire des peintures représentant Jésus.

En 1975, après avoir vérifié l'état de sa possession, l'archevêché autorisa un exorcisme fondé sur le rituel romain. Le curé de sa paroisse considérait qu'Anneliese était possédée par plusieurs démons dont il fallait la libérer. À partir de 1975, on pratiqua un ou deux exorcismes sur elle chaque semaine. Parfois, les crises étaient tellement fortes qu'il fallait trois hommes pour la maîtriser si on ne l'enchaînait pas. Malgré cela, elle put reprendre un semblant de vie normale : retourner à l'école, participer à un concours….

Cependant, les crises ne cessèrent pas. De plus en plus souvent, elle se trouvait paralysée et inconsciente. Elle refusait complètement de manger. Ses nombreuses génuflexions (plus de 600 de suite), provoquèrent une rupture au niveau des genoux. Quarante cassettes audio furent enregistrées lors des exorcismes afin d'en conserver des détails.

Le dernier exorcisme eut lieu le 30 juin 1976. À ce stade, Anneliese souffrait d'une pneumonie. Elle avait le visage émacié et souffrait d'une grande fièvre. Elle était exténuée physiquement. Mais elle restait consciente de sa situation. Sa mère enregistra sa mort.

Un procureur fit alors une enquête à la suite de laquelle les deux prêtres exorcistes et les parents d'Anneliese furent inculpés de négligence ayant entraîné la mort, car les médecins affirmaient qu'elle était épileptique et psychotique.

Les prêtres exorcistes firent écouter des enregistrements des différents exorcismes qu'ils avaient pratiqués, au cours desquels ils affirmaient pouvoir distinguer la voix de deux démons en train de se disputer, se demandant lequel des deux quitterait le premier le corps d'Anneliese.

Les parents et les deux prêtres furent condamnés à 6 mois de prison.

Anneliese Michel est aujourd'hui enterrée au cimetière de Klingenberg am Main, sa mère va lui rendre visite chaque jour. C'est un lieu de pèlerinage sur lequel se rendent des personnes de différentes nationalités. Elle est considérée comme la femme qui a bravement combattu Lucifer et ses Démons.

samedi 13 avril 2013

THE DIVIDE

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site zoom.lk

de Xavier Gens. 2012. U.S.A. 1h57. Avec Lauren German, Michael Biehn, Milo Ventimiglia, Courtney B. Vance, Mickael Eklund, Ashton Holmes, Rosanna Arquette.

Sortie Dvd en France: 1er Juin 2012

FILMOGRAPHIE: Xavier Gens est un réalisateur, scénariste, producteur exécutif et acteur français, né le 27 Avril 1975 à Dunkerque. 2007: Hitman. 2008: Frontières. 2012: The Divide. 2012: The ABCs of death (un segment)


Pour son troisième long-métrage, Xavier Gens nous assène un véritable coup de poing à l'estomac avec ce huis-clos post-apo d'une intensité toujours plus éprouvante. A la suite d'une explosion nucléaire, une poignée de survivants se réfugie sous l'abri d'un bunker en attendant les retombées radioactives. Davantage reclus dans le désespoir et l'individualisme, ils vont devoir faire face à leurs pires névroses meurtrières. Film choc s'il en est, The Divide est une véritable descente aux enfers auquel une poignée de rescapés vont se retrouver confrontés à leur pire ennemi: l'homme ! Dans un climat irrespirable de claustration suintant l'insalubrité et la puanteur des excréments, nos antagonistes vont peu à peu céder à la panique du désespoir dans leur conflit de rivalité. Affamés et épuisés par la fatigue, les plus téméraires opposés à la hiérarchie d'un leader vont peu à peu se laisser motiver par la rancune dans une folie meurtrière irréversible. D'une violence abrupte jusqu'au-boutiste, Xavier Gens livre ici un constat implacable sur la nature primitive de l'homme quand celui-ci se retrouve privé de sa liberté et de son environnement familier.


En l'occurrence, lorsqu'il est contraint de co-habiter en réclusion parmi l'intrusion de quidams désoeuvrés. Avec une radicalité impassible inscrite sur la dégénérescence morale, le réalisateur traite de notre instinct meurtrier, de la contagion du mal et de l'esprit d'individualité où orgueil et rancoeur vont laisser libre court à  une haine incontrôlée. Notamment notre incapacité à pouvoir vivre en communauté lorsque la précarité, la peur de trépasser et la phobie de l'isolement nous écartent de la cohésion fraternelle. Durant plus de deux heures, nous nous sentons piégés en vase clos parmi l'incivisme de ses huit occupants dont chaque membre ne pourra compter que sur sa propre indépendance. Dans un déchaînement de violence émanant de leur déchéance autodestructrice, The Divide nous plonge au coeur d'un cauchemar claustrophobique où la notion de désespoir nous laisse en état de collapse. Quand au final nihiliste, il converge vers la folie paroxystique et enfonce encore le clou pour la destinée précaire de certains survivants, quand bien même dehors, la fin de la civilisation a déjà sonné le glas !

The End
Soutenu par la partition désenchantée de Jean-Pierre Taïeb, The Divide s'érige en tragédie humaine sous l'entremise d'antagonistes transis de haine (Milo Ventimiglia et Mickael Eklund vampirisent communément l'écran en tyrans sociopathes) ou de désoeuvrement (Rosanna Arquette se livre corps et âme dans la débauche sexuelle !). Une épreuve de force immorale, un cauchemar du néant laissant au final un sérieux goût de souffre dans la bouche par son aura malsaine. Le film est d'autant plus maîtrisé dans sa réalisation appliquée, parfaitement interprété et immersif en diable qu'il fut injustement banni de nos salles obscures.

Dédicace à Xavier Gens
13.04.13. 2èx
Bruno Matéï