mardi 10 septembre 2013

Mad-Max: Au delà du Dome du Tonnerre / Mad Max: Beyond Thunderdome

Photo empruntée sur Google, appartenant au site lluviadeestrellasenlaloberia.blogspot.com

de Georges Miller et George Ogilvie. 1985. Australie/U.S.A. 1h47. Avec Mel Gibson, Tina Turner, Bruce Spence, Adam Cockburn, Frank Thring, Angelo Rossitto, Paul Larsson.

Sortie salles France: 25 Septembre 1985. U.S: 10 Juillet 1985

FILMOGRAPHIE: Georges Miller est un réalisateur, scénariste et producteur australien, né le 3 Mars 1945 à Chinchilla (Queensland). 1979: Mad-Max. 1981: Mad-Max 2. 1983: La 4è Dimension (dernier segment). 1985: Mad-Max : Au-delà du dôme du Tonnerre. 1987: Les Sorcières d'Eastwick. 1992: Lorenzo. 1997: 40 000 ans de rêve (documentaire). 1998: Babe 2. 2006: Happy Feet. 2011: Happy Feet 2. 2014: Mad Max 4; Fury Road. 

Avant-propos (du 24/05/23) : En espérant que, depuis la regrettable disparition de Tina Turner, ce magnifique opus humaniste soit enfin reconsidéré à sa juste valeur — avec une touche aujourd’hui autrement élégiaque.

Quatre ans après le phénomène planétaire Mad Max 2, George Miller rempile pour un troisième opus influencé par la notion humaniste de son héros déchu. Alors que des millions de fans espéraient un avatar aussi homérique que son modèle barbare, la déception fut rude pour une majorité d’aficionados. Or, avec lucidité — et le refus de remaker l’élite d’un western post-apo truffé de cascades ébouriffantes — Miller prend le risque de déconcerter son public avec ce troisième volet, autrement docile, assagi et optimiste que ses aînés. En jouant la carte du lyrisme et du dépaysement, Mad Max 3 nous dévoile cette fois un guerrier de la route apaisé, idéalisé par la candeur d’une escouade de sauvageons en quête d’apprentissage.

Pitch : Dans la cité de Trocpolis, où son véhicule vient d’être dérobé, Max est contraint de combattre vaillamment un adversaire colossal pour récupérer son bien et prendre le contrôle du monde souterrain. Épargnant in extremis son rival, il est condamné par leur leader au Goulag, vaste désert aride dénué de toute présence humaine. Ou presque. Car une tribu d’enfants pacifistes, gouvernée par la matriarche Savanah, va lui porter secours, persuadée que cet inconnu est le messie d’une ancienne prophétie : le Capitaine Walker. Une opportunité inespérée leur permettant d’envisager la réparation de leur Boeing accidenté et l’espoir d’amorcer un périple vers la contrée inexplorée d’une terre promise.

Œuvre maudite (euphémisme), tant elle fut dépréciée et conspuée par des puristes littéralement intransigeants, Mad Max 3 s’offre pourtant la subtilité de ne pas bêtement reproduire l’anthologie des cascades homériques sublimée dans les opus précédents. Influencé ici par le péplum (toute la première partie, trépidante, confinée autour du Dôme) et par le lyrisme exaltant de Lawrence d’Arabie (la traversée du désert de Max et sa confrérie), George Miller ne manque pas d’ambition pour nous transposer une flamboyante aventure humaine.

Un spectacle chargé de souffle romanesque, porté par un onirisme limpide et une quête initiatique de l’apprentissage. Sous l’égide d’une tribu d’enfants utopistes, Max réapprend à vivre, à renouer avec la cohésion fraternelle, en tentant d’exaucer une prophétie fantaisiste. Croire au rêve, croire en son destin : « Croyez en vos rêves et ils se réaliseront peut-être. Croyez en vous, et ils se réaliseront sûrement », disait Martin Luther King. Voilà, à mon sens, le message d’espoir qu’on peut déceler dans cette solidarité entre Max et sa troupe de bambins innocents, unis dans leur volonté de renouer avec civilisation et savoir.

Fort de ses décors éclectiques — aussi insolites (la cité de Trocpolis) qu’idylliques (l’oasis des enfants perdus) — Mad Max 3 renouvelle une fois encore sa scénographie post-apo, avec une ampleur singulière. Soin esthétique d’une photo ocre pour transcender l’urbanisation primitive en mutation, pureté opaline d’un désert clairsemé : George Miller nous fait partager, avec exaltation, un conte post-apo chargé d’optimisme, cristallisant l’horizon d’un avenir meilleur. Sans renier pour autant les fans d’action vrombissante, il renouvelle sa virtuosité technique et son imagination fertile — dans une première partie spectaculaire (toute l’action intense centrée à l’intérieur du Dôme, dont la conception s’avère d’un réalisme scrupuleux), et un point d’orgue frénétique qui renoue clairement avec l’esprit guerrier de Mad Max 2. À ce titre, la dernière course-poursuite, menée entre bolides erratiques et locomotive archaïque, culmine en une échappée aérienne à nous clouer au fauteuil.


A Tina...
Parmi l’apparition surprise de la chanteuse Tina Turner — surprenante de charisme animal, portée par le naturel d’un instinct belliqueux — et celle d’une tribu d’enfants dociles à l’aura presque féerique, Mad Max 3 réfute les conventions et la redite pour proposer un spectacle flamboyant, transi de lyrisme, de chaleur humaine et de poésie prude, tout en divertissant en bonne et due forme.

Scandé de l’inoubliable tube We Don’t Need Another Hero, ce troisième opus s’érige en magnifique odyssée humaine, dans la quête initiatique d’une terre nouvelle et la présence d’un héros quasi mystique. Un spectacle épique, d’une beauté immaculée, qu’il serait temps de réhabiliter — d’autant qu’il ne cherche jamais à se prendre au sérieux (l’humour malicieux étant omniprésent), tout en préservant, avec une grande sensibilité, une ambiance de quiétude, portée par une génération sacrifiée en voie de renaissance.

*Bruno
10.09.13. 4èx

Récompense: NAACP Image Award 1986: Meilleure Actrice pour Tina Turner.

La critique de Mad-Max 2http://brunomatei.blogspot.fr/…/mad-max-2-mad-max-2-road-wa…

Dédicace à Jean-Marc Micciche

lundi 9 septembre 2013

HEADHUNTERS (Hodejegerne)

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmosphere.com

de Morten Tyldum. 2011. Norvège/Allemagne. 1h40. Avec Aksel Hennie, Nikolaj Coster-Waldau, Synnove Macody Lund.

Sortie Dvd : 4 Septembre 2013

FILMOGRAPHIE: Mortem Tydum est un réalisateur et producteur. 2002: Folk flest bor i Kina (seghment "H"). 2003: Buddy. 2008: Varg Veum -Falne engler.  2011: Headhunters.


Amateurs de thriller roublard dénué de fioritures et mené sur un rythme alerte, Headhunters est conçu pour vous ! Injustement inédit en salles dans nos contrées, cette production venue de Norvège réfute à nous embarquer dans les situations balisées du divertissement policier grâce à un scénario saugrenu éblouissant de perspicacité ! Après avoir volé un tableau de grande valeur chez un ancien mercenaire, un cambrioleur va devoir user de stratagème pour sauver sa peau. Si la bonhomie de sa première demi-heure laisse craindre un polar conformiste, la suite des péripéties va redoubler de surprises et d'intensité pour mettre en exergue un survival implacable dans son esprit sardonique. Dans la lignée du protagoniste malchanceux de After Hours de ScorceseHeadhunters nous caractérise ici un antagoniste hétérodoxe dans sa petite posture (il mesure 1m 68 !) en cambrioleur rusé prochainement livré à la déveine. Par amour pour son élégante épouse avec qui il ne souhaite pas s'engager dans la paternité, Roger Brown cambriole des oeuvres d'art afin de pouvoir lui favoriser une vie luxueuse. Jaloux et possessif, notre chasseur de tête va bientôt se confronter à la rivalité d'un concurrent dragueur, Clas Greve, cadre supérieur autrefois mercenaire.



A partir d'un revirement banal inscrit dans l'adultère, le réalisateur Morten Tyldum va embarquer son anti-héros dans une dérive meurtrière aussi inopinée qu'improbable. Mais là où ce thriller retors frappe juste et fort, c'est dans sa manière de confronter nombre de vicissitudes avec réalisme et souci du détail alarmiste (à l'instar du jeu de regards monolithiques observé entre nos deux rivaux à travers une voiture accidentée) ! Par une succession de bévues aléatoires, Roger va donc devoir essayer de sauver sa peau contre un mercenaire opiniâtre mais aussi tenter d'effacer les preuves qu'il laisse derrière son chemin afin de masquer sa culpabilité ! La dextérité à laquelle Morten Tyldum fait preuve pour façonner une structure narrative incontrôlée ne cesse de nous surprendre pour mettre en valeur une chasse à l'homme ironiquement sanglante. Sévèrement malmené par ses rivaux hostiles et contraint de perpétrer des bravoures insensées pour sauver sa peau, Roger va se retrouver embarqué dans une odieuse machination où la cupidité règne en maître. En alternant les péripéties bondissantes totalement imprévisibles et l'empathie indécise confrontée au couple Adrian/Roger, le réalisateur peaufine un thriller frénétique rehaussé d'une poignante psychologie dans l'initiation du chasseur de tête. Car au-delà de l'aspect jouissif de cet intrépide survival, Headhunters peaufine notamment une histoire d'amour et de maturité dans la remise en question du malfrat infidèle, contraint de transcender sa jalousie et son manque de confiance par une bravoure exténuante.


Mis en scène avec une diabolique habileté et redoublant de revirements toujours plus insolents, Headhunters est le genre de petit thriller méconnu gagnant au fil du bouche à oreille son statut de perle du genre. Une oeuvre méchamment espiègle qui ne cesse de surprendre dans son florilège d'incidents meurtriers. Enfin, le duo infatigable formé par Aksel Hennie (au physique volontairement trivial) et Nikolaj Coster-Waldau (tout en virilité cynique !) véhicule une densité antinomique dans leur idéologie cupide. 

* Bruno
Dédicace à Cid Orlandu
09.09.13

vendredi 6 septembre 2013

Messe Noire / Evilspeak. Uncut Version

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site torrentbutler.eu

d'Eric Weston. 1982. U.S.A. 1h33. Avec Clint Howard, R.G Armstrong, Joseph Cortese, Claude Earl Jones, Haywood Nelson.

Sortie salle France: 26 Février 1982. U.S: 26 Février 1982

FILMOGRAPHIE: Eric Weston est un réalisateur, scénariste et producteur américain.
1981: Messe noire. 1983: Marvin and Tige. 1989: The Iron Triangle. 1992: To protect and serve. 2001: Pressure Point. 2002: Ambition Fatale. 2002: Hitters. 2011: Hyenas.


Pour une première oeuvre horrifique réalisée avec des bouts de ficelle, le débutant Eric Weston ébranla une génération de vidéophiles après qu'ils louèrent ce B movie au titre évocateur, Messe Noire, au sein de leur vidéo club. 

Le pitchDans une académie militaire, un souffre-douleur invoque les forces du mal via ordinateur pour se venger de ces camarades railleurs. 

A partir de cet argument simpliste (la vengeance sanglante d'un martyr au service du Mal) déjà évoqué dans le chef-d'oeuvre Carrie Eric Weston en tire un modèle d'efficacité dans son suspense exponentiel et l'ambiance délétère qui s'y dégage au sein d'une cave abritée par le malin. Reposant sur les épaules du jeune Clint Howard (délivrant ici son meilleur rôle dans toutes les mémoires), Messe Noire s'érige en fascinante descente aux enfers par l'entremise originale de l'ordinateur. Mais revenons d'abord sur l'interprétation sidérante de vérité de cet acteur de seconde zone car si ce divertissement sardonique réussit autant à captiver, c'est notamment en partie grâce à l'empathie accordée pour Coopersmith, étudiant maladroit incessamment molesté par ses camarades de classe.


Avec sa bonhomie somme toute naïve et son regard candide, Clint Howard réussit instinctivement à nous impliquer dans son désarroi quotidien et nous amène lentement à fréquenter le malin sous l'intervention d'Estaban. Un sorcier sataniste condamné plus tôt par l'église pour hérésie mais qui s'était juré de se venger des siècles plus tard. Toute l'intrigue se focalise donc sur les tentatives de Coopersmith à daigner invoquer une véritable messe noire par une démarche moderne, l'utilisation électronique de l'ordinateur ! Et quand vient la vengeance tant escomptée, on ne peut que comprendre (ou plutôt fantasmer) sa rancoeur à oser bafouer le fondement du Bien en commettant des méfaits criminels sous influence démoniaque. A cet égard, on peut dire que son point d'orgue apocalyptique déploie des séquences cinglantes où le gore craspec se dispute à l'horreur pure à travers des FX de choix ! Décapitations en série, éventration, démembrements, corps embrasés nous sont étalés sans concession dans un déluge de feu et de sang. Qui plus est, et avec une audace sarcastique, le carnage se confine dans le cadre religieux d'une chapelle auquel des porcs carnassiers s'y sont soudainement invités ! Au delà de son indéniable sens de l'efficacité et de sa force émotionnelle génialement fascinante, Messe Noire insuffle une ambiance lugubre du plus bel effet, renforcé par la chaleur d'une photo sépia. Tant en interne du sous-sol de la cave auquel Coopersmith pratique son rite ou dans le cadre religieux d'un oratoire. Avec rigueur et intégrité pour le genre, le réalisateur distille donc un climat pernicieux diffus en vantant les mérites d'une démonologie contemporaine.


Soutenu du superbe score religieux de Roger Kellaway faisant écho à La Malédiction de Donner, Messe Noire n'a point usurpé son statut de classique moderne du film sataniste en faisant preuve également lors de son dernier acte d'une violence barbare littéralement dantesque ! En apprenti sorcier sévèrement malmené, Clint Howard apporte une indéniable intensité humaine à travers sa revanche spectrale désespérément nihiliste ! Inoxydable. 

*Bruno
30.03.25. 6èx. Vost
06.09.13. 

jeudi 5 septembre 2013

LE FLIC DE BEVERLY HILLS. (Beverly Hills Cop)

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site hollywood80.com

de Martin Brest. 1984. U.S.A. 1h43. Avec Eddy Murphy, Judge Reinhold, John Ashton, Lisa Eilbacher, Ronny Cox, Steven Berkoff, James Russo, Jonathan Banks.

Sortie salles France: 27 Mars 1985. U.S: 5 Décembre 1984

FILMOGRAPHIE:  Martin Brest est un réalisateur, producteur, acteur, monteur et scénariste américain, né le 8 Août 1951 dans le Bronx de New-York.
1972: Hot Dogs for Gaugin. 1977: Hot Tomorrows. 1979: Going in Style. 1984: Le Flic de Beverly Hills. 1988: Midnight Run. 1992: Le Temps d'un Week-end. 1998: Rencontre avec Joe Black. 2003: Amours Troubles.


Enorme succès lors de sa sortie en salles (aux States, il était l'un des 10 plus grands hits commerciaux de tous les temps !), Le Flic de Beverlly Hills permis à Eddy Murphy d'accéder à la notoriété après s'être révélé dans 48 heures et Un Fauteuil pour deux. Comédie d'action menée tambour battant, cette production Bruckeimer doit sa renommée sur l'abattage de son acteur afro, ancien humoriste ayant préalablement fait ses preuves dans le célèbre show: Saturday Night LiveAprès l'assassinat de son ami, un flic de Détroit décide de mener sa propre enquête sans l'accord de son supérieur. Durant l'investigation, il découvre que son acolyte travaillait pour le compte d'un riche entrepreneur implanté à Beverly Hills. Ce dernier exerçant des malversations, il va tenter par la même occasion de démanteler un réseau de contrebande avec le soutien de deux inspecteurs studieux. 


Il y a des comédies lucratives conçues sur une idée somme toute sommaire mais construites avec une telle dextérité qu'elles dépassent le stade du produit aseptique. Reposant sur la bonhomie impayable d'un acteur extrêmement attachant, le Flic de Beverly Hills fait parti de ces petits miracles de cocasserie auquel Eddy Murphy va y apporter son potentiel comique dans sa "cool attitude" ! En insufflant une verve irrésistible, l'ancien humoriste réussit à extérioriser un jeu cabotin de facéties désinvoltes et d'imitations extravagantes. Avec la complicité de deux adjoints aussi attachants (Judge Reinhold et John Ashton forment un tandem avec une tendre bonhomie), le Flic de Beverly Hills distille un charme naturel comme peu de comédies familiales ont su le retransmettre. Au delà de la cocasserie impartie aux dialogues et au mimétisme de Murphy, le réalisateur Martin Brest y introduit une pincée d'action dans son prologue rocambolesque (carambolage en pagaille lors d'une poursuite entre un camion et des cars de flics) et son final pétaradant (les gunfight fusent tous azimuts dans le repère du mafieux Victor Maitland). Et pour parachever, je ne manquerai pas non plus d'évoquer le fameux tube entraînant interprété par Patti Labelle - Stir it up !


Entre action et drôlerie, Le Flic de Beverly Hills compte sur l'efficience d'une intrigue bien construite et surtout sur la présence d'un acteur expansif pour nous divertir sans prétention. A travers cette aventure diablement réjouissante émane la simplicité d'une comédie bonnard sous l'impulsion de seconds-rôles aussi sympathiques dans leur fonction de faire-valoir. Antidépressif, le Flic de Beverly Hills constitue au terme un bain de jouvence d'une fraîcheur aussi capiteuse qu'à l'époque de sa conception.

05.09.13. 3èx
B-M


mercredi 4 septembre 2013

30 Jours de Nuit / 30 Days of Night

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site necronomiblog.canalblog.com

de David Slade. 2007. U.S.A. 1h53. Avec Josh Hartnett, Melissa George, Danny Huston, Ben Foster, Mark Boone Jr, Mark Rendall.

Sortie salles France: 9 Janvier 2008. U.S: 19 Octobre 2007

FILMOGRAPHIE: David Slade est un réalisateur britannique, né le 26 Septembre 1969 au Royaume Uni. 2005: Hard Candy. 2007: 30 Jours de Nuit. 2010: Twilight - Chapitre 3: Hésitation. 2011: R.E.M (TV). 2012: The Last Voyager of Demeter. Daredevil reboot.


Plutôt méconnu, David Slade prouva son habile talent de metteur en scène avec son premier film, Hard Candy, thriller psychologique confiné dans un huis-clos éprouvant. Deux ans plus tard, il récidive qualitativement parlant pour peaufiner son potentiel artistique avec l'adaptation d'un comic créé par Steve Niles et Ben Templesmith. Déclaration d'amour au travail artisanal de John Carpenter (photogénie esthétisante d'un environnement aussi réfrigérant que reculé, charisme frappant des comédiens, photo immaculée encadrée au format scope, score métronome, atmosphère anxiogène palpable, ambiance angoissante envoûtante), 30 Jours de Nuit se réapproprie du thème vampirique avec un souci formel bluffant. Le pitchEpargnés du soleil durant 30 jours de nuit hivernale dans un village de l'Alaska, un shérif et une poignée de survivants vont tenter de déjouer la menace d'une horde de vampires assoiffés de sang. Ainsi, à partir de ce concept trivial, on ne peut pas dire que David Slade compte sur l'originalité d'une intrigue éprouvée avec son lot d'attaques impromptues auprès de victimes esseulées. D'autant plus que l'on a la gênante impression d'assister à une temporalité fallacieuse si bien que ces 30 nuits semblent se dérouler en un temps beaucoup plus restreint (à peine 2 ou 3 jours !) du point de vue des motivations des héros ! Mais avec une foi et un respect pour l'amour du genre, le réalisateur réussit à contrecarrer une narration aseptique pour sublimer de prime abord une atmosphère ténébreuse au sein d'un huis-clos réfrigérant.


Qui plus est, avec l'efficacité d'une action cinglante terriblement spectaculaire et d'un gore sanguinolent au réalisme saisissant, 30 Jours de Nuit frétille pour distiller un climat anxiogène diffus au fil d'affrontements intrépides perpétrés par des vampires erratiques. C'est simple, il y avait belle lurette que nous n'avions pu contempler face écran des goules aussi hargneuses et fétides de par leur morphologie taillée à la serpe. Vêtus en costard noir, David Slade est parvenu à donner chair à ces goules épouvantablement vicieuses à travers leurs exactions meurtrières (elles surveillent leurs proies du haut des toitures des maisons pour ensuite encercler certaines d'entre elles avec une vanité condescendante !). Il faut les voir se faufiler sous les chalets et se projeter à une vélocité vertigineuse sur les victimes pour les égorger avec une sauvagerie primitive ! Par conséquent, en jouant le plus souvent la carte du huis-clos oppressant, le réalisateur insuffle un suspense continuel pour l'épreuve de force impartis aux survivants contraints d'accéder d'un refuge à un autre pour se prémunir de la menace vampirique. La puissance visuelle de sa scénographie nocturne contrastant avec la clarté d'une neige endeuillée nous immergeant dans un environnement cauchemardesque particulièrement cinégénique. Au point d'orgue escompté, on pardonne l'aspect un tantinet décevant de son revirement héroïque (dès que leur leader est anéanti par l'un des survivants, la clique des vampires décide trop facilement de rebrousser chemin) et on se rattrape sur son épilogue désenchanté d'une beauté onirique poignante.


Sobrement dominé du caractère valeureux des protagonistes (Josh Hartnett et Melissa George forment un duo d'amants attachants dans leur reconversion sentimentale), 30 Jours de Nuit mise sur la fonction du divertissement efficace avec son lot d'action cinglante, de tension anxiogène et d'éclaboussures de sang ici dénuées de concession. Rehaussée d'une atmosphère cauchemardesque terriblement palpable, on reste surtout impressionné par l'aspect délétère de ces vampires contemporains incroyablement classieux dans leur morphologie démoniale. Et puis formellement, le cadre crépusculaire demeure  aussi hyper photogénique sous l'impulsion d'une violence tranchée que l'on a si peu coutume de voir dans une prod Hollywoodienne.   

*Bruno
05.03.24. 4èx vost
03.08.22. 
04.09.13. 

mardi 3 septembre 2013

Watchmen. Director's Cut

                                                                            Photo empruntée sur Google

de Zack Snyder. 2009. U.S.A. 3h06. Avec Patrick Wilson, Jackie Earle Haley, Malin Akerman, Billy Crudup, Matthew Goode, Jeffrey Dean Morgan, Carla Gugino, Stephen McHattie.

Sortie salles France: 4 Mars 2009. U.S: 6 Mars 2009

FILMOGRAPHIE: Zack Snyder est un réalisateur, scénariste et acteur américain né le 1er mars 1966 à Green Bay, Wisconsin (États-Unis). 2004 : L'Armée des morts (Dawn of the Dead). 2007 : 300. 2009 : Watchmen. 2010 : Le Royaume de Ga'hoole : La Légende des gardiens. 2011 : Sucker Punch. 2012 : Superman: Man of Steel.


Film fleuve d'une durée excessive de 3h06, Watchmen est l'adaptation du comic homonyme d'Alan Moore et Dave Gibson publiée entre 1986 et 1987. Situé dans une réalité alternative des années 80, le film nous décrit la résurgence d'une poignée de super-héros, délibérés à empêcher une 3è guerre mondiale provoquée entre les Etats-Unis et la Russie. Au même moment, alors qu'un mystérieux tueur s'en prend à ces justiciers masqués, une machination de grande ampleur est sur le point de converger au péril de la survie de millions d'innocents. Après l'entreprise de son habile remake, l'Armée des Morts et du peplum ultra stylisé, 300Zack Snyder redouble d'ambition pour reproduire en live une bande dessinée réputée inadaptable en s'interrogeant sur la notion du héros. Divertissement cérébral préconisé pour un public adulte, Watchmen nous établi avec flamboyance formelle l'état des lieux d'une terre en perdition, engluée dans les sempiternels conflits politiques entre dirigeants égotistes. 


Avec son ambiance crépusculaire terriblement pessimiste, Zack Snyder idéalise une somptueuse fresque où des héros désaxés sont ici sévèrement malmenés par leur hiérarchie héroïque, faute de leur tempérament contradictoire et d'une notoriété exubérante. A contre emploi du traditionnel super-héros fraternel et avenant, ces gardiens sont caractérisés comme des personnages sclérosés en quête existentielle, contrariés par un héroïsme dénué de signification. Puisqu'ici, l'infidélité, la manipulation, la trahison et le meurtre font parti de leur faille humaine et sont implicitement engendrés par un monde bestial toujours plus incivilisé. Confrontés à une morale déchue, ces gardiens passéistes vont tenter une seconde fois de renouer avec l'honneur de la bravoure pour prémunir le citoyen d'une 3è guerre mondiale et se racheter une conduite devant la souveraineté d'un divin en pleine dépression ! Dans une solide narration privilégiant l'étude caractérielle de ses marginaux parfois sanguinaires (les exactions vindicatives de Rorschach, la haine meurtrière du Comédien), volages (l'adultère du Hibou II entrepris avec le Spectre Soyeux II), voir même pervers (le viol du Comédien commis sur Sally Jupiter), Watchmen retransmet avec autant de souffle épique que de lyrisme leur indécise destinée avec une empathie moribonde. 


Tant qu'il y aura des hommes
Réflexion métaphysique, allégorie politique sur l'avilissement du pouvoir et l'instinct destructeur de l'homme, Watchmen propose un spectacle subversif d'une audace peu commune dans son alternance d'ultra violence et de défaillance existentielle. Mise en abîme de notre propre société en crise où l'insurrection du peuple s'avère toujours plus indisciplinée devant l'autorité. La rigueur de sa mise en scène stylisée, la bande son nostalgique d'une pop-rock rétro et surtout la dimension humaine impartie à ses anti-héros névrosés transcendent Watchmen au rang d'ovni hermétique, véritable pied de nez au rêve américain ! 

03.09.13. 2èx
Bruno Matéï

vendredi 30 août 2013

Wolf Creek

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site baranfilm27.org

de Greg McLean. 2005. Australie. 1h44. Avec Nathan Philipps, Cassandra Magrath, Kestie Morassi, John Jarratt.

Sortie salles France: 9 Août 2006. Australie: 3 Novembre 2005

FILMOGRAPHIE: Greg McLean est un réalisateur, scénariste et producteur australien.
2005: Wolf Creek. 2007: Solitaire


Chaque année, en Australie, 30 000 personnes sont portées disparues. 90 % d'entre elles sont retrouvées en l'espace d'un mois. Certaines disparaissent à jamais. 

K.O. et déprimé à la sortie de la projo de Wolf Creek. Et c’est lors d’un second visionnage que je confirme son impact émotionnel : littéralement fébrile, pour ne pas dire fulgurant. Pour une première œuvre, Greg McLean signe un coup de maître avec ce survival aride, saturé d’un climat d’insécurité permanent. Une véritable épreuve de force physique et morale, infligée à un trio d’étudiants malmenés par un tueur en série dans l’immensité brûlante du désert australien.

À partir d’un concept éculé, nourri des classiques des seventies — Massacre à la Tronçonneuse en tête, pour l’affliction hystérisée des victimes, la moiteur de son atmosphère et son authenticité malsaine — McLean renouvelle la terreur avec un esprit anti-ludique, refusant toute distraction facile pour mieux nous ébranler. Car Wolf Creek n’a rien du traditionnel “ouh, fais-moi peur” réconfortant, avec tueur décérébré courant après des proies ingénues. Non. Ici, il s’agit d’une expérience extrême, toujours plus éprouvante, refusant les compromis, la complaisance, la facilité — et exprimant une terreur crue, jusqu’au malaise.

Les victimes, enchaînées, hurlent de douleur ou d’impuissance face à la monstruosité d’un prédateur pervers, jouissant de ses pulsions dans un laps de temps indéfini. En toute liberté, au cœur d’un désert crépusculaire, ce tueur méthodique s’amuse à piéger des touristes dans un hangar rouillé, les torturant à sa guise dès que le goût du sordide lui revient. Une effroyable descente aux enfers d’une redoutable efficacité, que Greg McLean relate avec un souci glaçant de réalisme. Car Wolf Creek s’inspire librement d’un fait réel : le rapt de deux touristes par Bradley John Murdoch, condamné pour meurtre en 2005. En réalité, une seule victime fut retrouvée, et bien loin du fameux cratère : à plus de 2000 kilomètres…

Le tempo bourdonnant d’un score monocorde, la rigueur de la mise en scène exploitant l’hostilité sublime de ces paysages, la scrupuleuse radiographie de la détresse humaine — tout ici exacerbe un malaise si insidieux que le spectateur, pris de vertige, se retrouve piégé dans cette claustration étouffante. Jusqu’au-boutiste et sans concession : aucun échappatoire à l’horizon. Et si certaines tentatives d’évasion semblent audacieuses, la mort — brutale, lâche — les rattrape inexorablement.


Chef-d’œuvre du survival niant toute notion de divertissement facile, Wolf Creek nous prend aux tripes, pour nous plonger dans l’authenticité d’une horreur vécue. Celle de voyageurs malchanceux croisant un inconnu affable… alors qu’un monstre à visage humain s’apprête à tomber le masque pour infliger les sévices les plus crapuleux. On en ressort d’autant plus traumatisé que les comédiens, inconnus au bataillon mais criants de vérité, nous touchent avec une empathie à vif, profondément meurtrie.

30.08.13. 2èx
Bruno

La critique de Wolf Creek 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2014/04/wolf-creek-2.html




mercredi 28 août 2013

UN JUSTICIER DANS LA VILLE (Death Wish)

                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site silverferox.blogspot.fr

de Michael Winner. 1974. U.S.A. 1h33. Avec Charles Bronson, Hope Lange, Vincent Gardenia, Steven Keats, William Redfield, Stuart Margolin, Stephen Elliott.

Sortie salles France: 18 Octobre 1974. U.S: 24 Juillet 1974

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Michael Winner est un réalisateur britannique, né le 30 Octobre 1935 à Londres, décédé le 21 Janvier 2013.
1964: Dans les mailles du filet. 1967: Qu'arrivera-t-il après ? 1971: Les Collines de la Terreur. 1971: l'Homme de la Loi. 1971: Le Corrupteur. 1972: Le Flingueur. 1973: Le Cercle Noir. 1973: Scorpio. 1974: Un Justicier dans la Ville. 1976: Won Ton Ton, le chien qui sauva Hollywood. 1977: La Sentinelle des Maudits. 1978: Le Grand Sommeil. 1979: l'Arme au Poing. 1982: Un Justicier dans la Ville 2. 1983: La Dépravée. 1985: Le Justicier de New-York. 1988: Rendez vous avec la mort. 1990: Double Arnaque. 1993: Dirty Week-end.


Précurseur du Vigilante movie qui aura fait couler beaucoup d'encre lors de sa sortie, Un Justicier dans la Ville est notamment la révélation d'une égérie du cinéma d'action, l'imparable Charles Bronson ! D'après le roman Death Wish de Brian Garfield, ce polar brutal nous retrace l'expédition meurtrière d'un justicier, déterminé à nettoyer des quartiers malfamés les voyous arrogants.
Trois délinquants décident d'agresser une mère et sa fille au sein de leur domicile. Battue à mort, la femme succombera à ses blessures tandis que la fille violée se retrouvera internée dans un institut spécialisé pour démence traumatique. Rongé par la douleur du deuil et la rancoeur de constater l'impuissance policière laissant libre ces agresseurs, Paul Kersey décide de s'emparer d'une arme pour perpétrer une vendetta expéditive. 



Film choc à la violence froide et implacable où l'on s'étonne encore aujourd'hui de sa verdeur invoquée au prologue (la passage à tabac de deux femmes dans leur cocon familial), Un Justicier dans la Ville détonne par son aspect radical à illustrer une violence purement gratuite. Reflet d'une délinquance en recrudescence au milieu d'un contexte urbain en insécurité permanente. Si le film provoqua à son époque une telle polémique, c'est dans la dangerosité impartie à sa thématique réactionnaire puis au profil psychotique attribué à un adepte de l'auto-défense. Avec réalisme et lucidité, Michael Winner nous détaille de façon circonspecte la lente dégénérescence d'un architecte notoire, plongé dans une dérive meurtrière pour venger la mort de sa femme. Si son premier meurtre perpétré avec bravoure lui suscite une véritable répulsion (il ira jusqu'à vomir ses tripes dans les toilettes de son appartement !), ses exactions suivantes vont finalement lui tirer satisfaction et profit d'une notoriété grandissante grâce au taux de criminalité en régression. Devenu un phénomène sociétal dans les journaux, notre justicier va même influencer une certaine frange de la population décidant également de se rebeller par la force contre une délinquance permissive. De son côté, la police embarrassée, tente par tous les moyens de mettre un terme à la dérive sanglante du justicier, avant de se raviser, de peur d'embrigader un martyr aux yeux de la population et de renouer avec un taux de criminalité élevé. Avec une redoutable efficacité, Michael Winner nous brode donc un polar ultra violent émaillé de séquences d'action incisives sans jamais militer pour la justice individuelle. Puisqu'il ne fait que souligner l'aspect vénal d'un tueur radical, prenant goût à sa folie meurtrière addictive ! A l'image de son épilogue édifiant auquel Paul Kersey va, d'un geste manuel ironique, prendre un malin plaisir à prévenir ses futurs ravisseurs qu'ils seront dans sa ligne de mire !
Il ne s'agit donc pas pour le réalisateur de prôner vulgairement l'apologie d'une violence fascisante mais de rappeler à l'ordre les individus potentiellement fragiles que l'influence d'une vendetta personnelle demeure une inévitable dérive immorale.


En alternant l'investigation policière et l'action expéditive, Un Justicier dans la ville redouble d'efficience et d'audace à illustrer un polar brutal conçu sur une vengeance putassière. De manière évidente, Michael Winner s'interroge aussi sur le constat d'échec d'une police laxiste face à une criminalité galopante trop souvent impunie. Magnétique et impassible, Charles Bronson explose l'écran et iconise son rôle ambigu de justicier réac avec une éthique avilissante. 

28.08.13. 3èx
Bruno Matéï

mardi 27 août 2013

LE LABYRINTHE DE PAN (El laberinto del fauno)

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site locecine.info

de Guillermo Del Toro. 2006. Espagne/Mexique. 1h59. Avec Ivana Baquero, Doug Jones, Sergi Lopez, Maribel Verdu, Ariadna Gil, Alex Angulo.

Sortie salles France: 1er Novembre 2006. Espagne: 11 Octobre 2006. Cannes: 27 Mai 2006

Récompenses: Oscars de la meilleure Photographie, Meilleure Direction Artistique et Meilleurs Maquillages, 2006.
Meilleur Film et Meilleur Acteur (Sergi Lopez) à Fantasporto, 2007
Meilleur Film International, Meilleure jeune Actrice, Ivana Baquero, au Saturn Awards, 2007
Meilleur Film au NSFC Awards, 2007
Meilleur Long-métrage au Prix Hugo, 2007

FILMOGRAPHIE: Guillermo Del Toro est un réalisateur, scénariste, romancier et producteur américain, né le 9 Octobre 1964 à Guadalajara (Jalisco, Mexique).
1993: Cronos. 1997: Mimic. 2001: l'Echine du Diable. 2002: Blade 2. 2004: Hellboy. 2006: Le Labyrinthe de Pan. 2008: Hellboy 2. 2013: Pacific Rim.


Deux ans après l'adaptation du Comic Hellboy, Guillermo Del Toro renoue avec le fantastique intimiste qu'il avait préalablement abordé dans l'Echine du Diable sous un contexte politique franquiste. Conte onirique et drame de guerre ne cessent de se télescoper dans Le Labyrinthe de Pan avec une verdeur qui en aura brusqué plus d'un ! La faute en incombe notamment à l'aspect onirique de son affiche publicitaire suggérant une aventure fantastique éludée de violence acerbe. A contrario, Guillermo Del Toro n'y va pas avec le dos de la cuillère pour dénoncer les horreurs du fascisme durant la guerre d'Espagne à tel point que le film s'avère constamment éprouvant, surtout devant le témoignage d'une môme désabusée. A travers ses yeux de rêveuse et afin de fuir la violence qui l'entoure, le réalisateur nous évade dans son monde onirique avec l'entremise de créatures hybrides sorties des contes obscurs. Avec sa fille Ofelia, Carmen part rejoindre l'armée de son mari tyrannique, le capitaine Vidal. Pour fuir la réalité d'une guerre sanglante et impitoyable auquel des résistants tentent de pourchasser Vidal et en attendant que sa mère enceinte se rétablisse, Ofelia se réfugie dans les contes de fée sous l'entremise d'un insecte. Avec l'étrange compagnie d'un faune, elle va devoir tenter de retrouver le labyrinthe lui permettant de se réincarner en princesse. Mais la condition est rude, sacrifier la vie de son futur petit frère afin de pouvoir bénéficier de la vie éternelle dans le monde souterrain ! 


Avec originalité et ambition personnelle, Guillermo Del Toro juxtapose ici l'aventure onirico-spirituelle et le drame cruel des exactions belliqueuses afin d'établir un contraste entre la chimère du rêve et la réalité d'une guerre sanguinaire. Pourvu d'un esthétisme flamboyant (le monde souterrain, le bois insolite habitée par des créatures hétérogènes) et ténébreux (le campement forestier de Vidal et l'isolement des prisonniers régi au sein d'une grange), Le Labyrinthe de Pan fait appel à l'imaginaire d'une fillette candide, désespérément esseulée d'un monde tyrannique où le fascisme tente d'inculquer son éthique (l'inégalité des ethnies pour valoriser la prépondérance de leur état). Avec l'apparition inédite de créatures difformes étonnamment expressives, nous allons suivre son cheminement fantasque avec une émotion endeuillée. Dans le sens où Guillermo Del Toro s'attache à retranscrire en parallèle les horreurs de la guerre sous le témoignage de partisans sévèrement molestés et d'une mère enceinte en perdition. Sans faire preuve d'indulgence, il souhaite nous ébranler pour dénoncer la barbarie du fascisme devant l'attestation de la maternité et de l'enfance galvaudée. Les scènes de violence frontale ou de tortures infligées dérangent et incommodent le spectateur avec une véracité nauséeuse pour mettre en exergue l'iniquité du sacrifice impartie aux souffre-douleur de la résistance. Alors que dehors, non loin d'une forêt insolite, Ofélia tente de rejoindre un monde souterrain où toutes formes de souffrance et de douleur en ont été bannies. Il en émane une émotion bouleversante par tant de sévice infligée mais aussi un lyrisme désespéré à tenter de nous réconforter avec la destinée enchanteresse d'Ofelia. 


Soutenu par l'inoubliable partition élégiaque de Javier Navarrete, le Labyrinthe de Pan fait office de chef-d'oeuvre du fantastique transgressif par son alliage peu commun d'horreur pure et de fantaisie féerique. La puissance émotionnelle qui émane de son lyrisme désenchanté et la verdeur autorisée à sa cruauté intolérable nous laisse dans un état de collapse. Une oeuvre dure et inconfortable mais saisissante de beauté métaphorique, car contrebalancée par une poésie libératrice où le sens du sacrifice prend toute sa dignité. 

27.08.13. 2èx
Bruno Matéï


lundi 26 août 2013

UN ELEVE DOUE (Apt Pupil)

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site dl-more.eu

de Bryan Singer. 1998. U.S.A/France. 1h50. Avec Brad Renfro, Ian McKellen, David Schwimmer, Ann Dowd, Bruce Davison, Elias Koteas, Joe Morton.

Sortie salles France: 20 Janvier 1999. U.S: 23 Octobre 1998

FILMOGRAPHIE: Brian Singer est un réalisateur et producteur américain, né le 17 Septembre 1965 à New-York aux Etats-Unis.
1993: Ennemi Public. 1995: Usual Suspects. 1998: Un Elève Doué. 2000: X Men. 2003: X Men 2. 2006: Superman Returns. 2009: Walkyrie. 2013: Jack, le Chasseur de Géants. 2014: X Men: Days of Future Past.


Trois ans après Usual Suspect, Brian Singer s'entreprend d'adapter une nouvelle de Stephen King (Différentes Saisons) pour retracer l'itinéraire sulfureux d'un jeune adolescent, fasciné par le Mal chez un ancien criminel de guerre. Son échec commercial et les critiques mitigées lors de sa sortie sont sans doute à reporter sur l'ambiguïté de son scénario couillu, le rapport masochiste qu'entretiennent les deux antagonistes et le climat malsain que Brian Singer distille sans complexe autour de leurs faits et gestes. Qui plus est, pour renforcer le malaise diffus, il ne décide à aucun moment de les juger et ne fait qu'explorer leur cheminement d'une conscience vénale subordonnée à l'arrivisme et la prépondérance. En situation inconfortable, le spectateur se sent d'autant plus complice et voyeur d'un duel psychologique intimement partagé avec deux monstres érudits.


Thriller psychologique austère par le rendu de son ambiance implacable, Un Elève Doué nous fait partager l'intimité d'un ancien criminel nazi, Kurt Dussander, contraint de collaborer avec l'un de ses jeunes voisins pour lui dévoiler le détail de ses exactions meurtrières durant le génocide juif. Fasciné par le Mal et la mort, Todd est un brillant étudiant ayant réussi après moult investigations personnelles à débusquer le visage de cet authentique monstre nazi. Il décide donc de le faire chanter afin de mieux connaître l'idéologie du meurtre et de la cruauté.
Dominé par les prestations autoritaires de l'illustre Ian McKellen et du jeune Brad Renfro (au jeu naturel terrifiant d'impassibilité !), Un Elève Difficile traite donc de l'influence du Mal par l'entremise d'un ancien bourreau SS. Cette relation singulière que le jeune Todd va entretenir avec son ascendant va peu à peu le plonger dans les racines du Mal et le déshumaniser de son entourage (échec scolaire, repli sur lui même et relation sentimentale amorphe). Mais leur liaison bâtie sur le mensonge, le chantage, la trahison et la manipulation est surtout un jeu d'asservissement pour la quête d'une domination individuelle et au final, une prémunition pour leur culpabilité !


Né pour tuer
Hermétique par l'aura de souffre qui se dégage de son climat malsain et sa déviance psychologique, Un Elève Doué provoque un malaise tangible durant cette rivalité de perversion entre deux générations distinctes. Porté à bout de bras par le couple Ian McKellen / Brad Renfro, leur confrontation intense nous dirige vers une réflexion sur la contagion du Mal, le désir de soumission et l'instinct cruel régi par la mégalomanie de l'homme. 

26.08.13. 2èx
Bruno Matéï





vendredi 23 août 2013

The Conjuring

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site comingsoon.net

de James Wan. 2013. U.S.A. 1h52. Avec Vera Farmiga, Patrick Wilson, Lili Taylor, Ron Livingston, Mackenzie Foy, Shannon Kook-Chun, Joey King, Hayley McFarland.

Sortie salles France: 21 Août 2013. U.S: 19 Juillet 2013

FILMOGRAPHIEJames Wan est un producteur, réalisateur et scénariste australien né le 27 Février 1977 à Kuching (Malaisie), avant de déménager à Perth (Australie).
2004: Saw, 2007: Dead Silence, Death Sentence, 2010: Insidious. 2013: The Conjuring. 2013: Insidious 2.


"Possession à l’ancienne, peur à vif".
Trois ans après l’épatant Insidious, déclinaison à peine voilée de Poltergeist, James Wan renoue avec l’épouvante académique des esprits frappeurs et de la possession, en rendant hommage cette fois-ci à Amityville et L’Exorciste — foi catholique à l’appui, en bonne et due forme. Précédé d’une réputation flatteuse avant même sa sortie, The Conjuring s’érige sur un fait divers supposé, rapporté par les célèbres enquêteurs du surnaturel, Ed et Lorraine Warren. Ce couple de chasseurs de fantômes est cette fois appelé à la rescousse d’une famille en détresse : les Perron, emménagés dans une demeure poussiéreuse rongée par une entité diabolique.

Ce pitch archétypal, déclinaison directe du thème de la hantise, emprunte aux classiques du genre comme aux DTV les plus rances. Et pourtant. James Wan, passionné jusqu’au bout des ongles par les films de possession et de maisons maudites, s’évertue, avec intégrité et ferveur, à ressusciter la trouille sur grand écran. À l’instar du trépidant train fantôme qu’était Insidious, il ne recule pas devant l’usage de ficelles usées, mais les affine, les tend, les affûte, jusqu’à en faire des pièges redoutables.

Concoctée à partir d’une vieille formule — même l’époque se cale sur les seventies ! — cette nouvelle mouture fonctionne à tel point que l’on croit dur comme fer que la maison des Perron est infestée par le Diable lui-même. La peur du noir, une porte qui grince ou claque, un saut dans le vide, trois claps de mains, un placard mesquin, des volatiles suicidaires, une poupée sardonique, une cave mortuaire… et surtout, surtout, une entité maléfique dont on redoute la moindre résurgence. Et ça marche. À la perfection.

Pour asseoir son récit surnaturel, James Wan prend d’abord le temps d’humaniser ses protagonistes : il peaufine la vie conjugale des Perron, mais aussi celle des Warren. Il cultive une empathie viscérale pour cette famille harcelée par l’invisible, et creuse en parallèle les liens affectifs qui unissent le couple d’exorcistes. La sobriété des comédiens, empreints d’une fragilité contenue, confère à l’ensemble une humanité touchante — les enfants, notamment, sont admirables de justesse dans leur peur nue. À tel point qu’on en vient, au fil du récit, à éprouver une émotion poignante à l’idée de leur destin vacillant.

La crédibilité des personnages se double d’un volet quasi documentaire autour du couple Warren : James Wan crédibilise leur fonction avec force détails, mêlant images d’archives et foi catholique fervente. Leur manière de dissocier le vrai du faux, leur solidarité mutuelle face aux forces du Mal, leur connaissance des domaines occultes… tout cela renforce l’épaisseur de leur rôle. Jusqu’à cette pièce secrète, où s’entassent les objets maudits récoltés au fil des exorcismes — reliques du cauchemar ordinaire.

Si la première heure, parfois terrifiante, distille avec brio la suggestion d’une angoisse tapie dans l’ombre, la seconde bascule dans une intensité sensorielle presque insoutenable. La peur prend chair, se densifie, s’épanche dans un crescendo de visions d’effroi culminant lors d’un exorcisme fiévreux et désespéré.


"Panique sacrée".
Grâce à cette densité dramatique, James Wan signe avec The Conjuring un film d’épouvante d’une redoutable efficacité. Rigoureux, affolant, et d’une maîtrise technique éclatante (plan-séquence d’ouverture, travellings aériens, cadrages alambiqués), il exploite à merveille les recoins ténébreux d’une bâtisse gothique, tout en convoquant de véritables poussées d’angoisse — brutales, irrationnelles, jamais racoleuses. Car ici, on ne sait jamais d’où viendra l’attaque. Ni qui sera la prochaine proie.

Pensé comme un train fantôme en guise de déclaration d'amour au film de possession et de demeures hantées, The Conjuring ne se repose jamais sur une vacuité mercantile. Il tient ses promesses. Et provoque une peur panique comme le cinéma horrifique nous en offre trop rarement. Un électrochoc spectral, orchestré avec foi et frisson.

*Bruno

La Chronique de The Conjuring 2: http://brunomatei.blogspot.fr/…/conjuring-2-le-cas-endfield…

02.06.25. 3èx. 4K Vost
24.08.13 (232)
20.06.16