mardi 7 avril 2020

Paris, Texas. Palme d'Or, Cannes 84

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Pinterst.fr

de Wim Wenders. 1984. U.S.A. 2h25. Avec Harry Dean Stanton, Nastassja Kinski, Dean Stockwell, Aurore Clément, Hunter Carson, Sam Berr.

Sortie salles France: 19 Septembre 1984. U.S: 9 Novembre 1984

FILMOGRAPHIE: Wilhelm Ernst Wenders, dit Wim Wenders est un réalisateur, producteur, scénariste de cinéma et photographe allemand, né le 14 août 1945 à Düsseldorf. 1970 : Summer in the City. 1972 : L'Angoisse du gardien de but au moment du penalty. 1973 : La Lettre écarlate. 1974 : Alice dans les villes. 1975 : Faux Mouvement. 1976 : Au fil du temps. 1977 : L'Ami américain. 1982 : Hammett. 1982 : L'État des choses. 1984 : Paris, Texas. 1987 : Les Ailes du désir. 1991 : Jusqu'au bout du monde. 1993 : Si loin, si proche ! 1994 : Lisbonne Story. 1995 : Par-delà les nuages. 1995 : Les Lumière de Berlin. 1997 : The End of Violence. 2000 : The Million Dollar Hotel. 2004 : Land of Plenty. 2005 : Don't Come Knocking. 2008 : Rendez-vous à Palerme. 2015 : Every Thing Will Be Fine. 2016 : Les Beaux Jours d'Aranjuez. 2017 : Submergence. 2018 : The Miso Soup.


Chef-d'oeuvre épuré de Wim Wenders qui à mon sens n'est jamais parvenu à retrouver un tel degré d'authenticité à travers son cinéma vérité, Paris, Texas est un poème d'amour fou dont il est difficile d'en sortir indemne. D'une durée conséquente de 2h25, Wim Wenders nous fait partager le quotidien de Travis Henderson, fantôme errant au milieu du Texas que son frère Walter vient à la rescousse lors d'un concours de circonstances fructueuses. De prime abord mutique, hagard et décharné de par sa maigreur corporelle, Travis va réapprendre à s'humaniser et communiquer grâce à l'hospitalité de son frère, de l'épouse de celui-ci et surtout de son jeune fils qu'il a abandonné dès l'âge de 4 ans après s'être séparé de Jane, sa jeune femme. Parvenant peu à peu à retrouver la confiance de son fils Hunter, Travis décide de poursuivre sa route de la rédemption en sa compagnie afin de retrouver la trace de Jane dans une métropole tentaculaire. Road movie contemplatif sublimant les vastes cités urbaines comme celle, contradictoire, du désert du Texas (reflet de la désorientation de Travis à peine remis de sa démence), Paris, Texas est une invitation au voyage initiatique en compagnie d'un écorché vif et de son rejeton en quête identitaire. Radiographiant avec un humanisme infiniment prude les états d'âme de ces personnages en proie au questionnement, entre doute, crainte, remord et désespoir sur fond de catharsis, Paris, Texas nous bouleverse d'émotions candides de par l'humanisme fiévreux de ses derniers broyés par la mélancolie de l'échec, de la solitude et de la contrition, faute d'un passé galvaudé.


Car récit douloureux décortiquant lestement les conséquences dramatiques d'une passion dévorante (tant conjugale que paternelle) entachée par l'alcool, la possessivité et la jalousie, Paris, Texas finit par nous terrasser d'émotions à travers sa sensibilité aiguë que les comédiens retransmettent avec une expression d'amertume inscrite dans la retenue et la réservation. Car observant sans ambages les rapports du duo Travis/Jane lors d'un jeu de regards au miroir sans teint, Wim Wenders transfigure le portrait de ces amants maudits traumatisés par un passé aussi édénique qu'autodestructeur. Paris, Texas nous plongeant dans leur désoeuvrement avec une émotion lyrique emplie de sagesse, de regain d'amour et de tolérance après y avoir côtoyé la démence. Outre l'interprétation magistrale en second acte de Nastassja Kinski en hôtesse de peep-show scrupuleuse renouant sensiblement avec son instinct maternel, Harry Dean Stanton ensorcelle l'écran de par sa présence timorée en paternel déchu en quête ultime de rédemption. Son houleux parcours moral nous bouleversant avec mesure dépouillée de par le parti-pris si humble de l'auteur à diriger ses acteurs avec souci de vérité naturaliste (à l'instar de sa photo à la lumière naturelle tantôt onirique ou crépusculaire). On peut enfin souligner la justesse d'aplomb (si équilibrée) de Dean Stockwell en frère cadet à la fois attentionné et irrité de par le mystère entourant le passé torturé de Travis. Quand bien même le jeune Hunter Carson impose une stature infantile subtilement douce et fragile eu égard de sa fonction d'orphelin ballotté entre 2 parents depuis 4 ans.


"Seul l'amour peut garder quelqu'un vivant"
Film d'amour fou inconsolable électrisé par la guitare mélancolique de Ry Cooder, Paris Texas se réserve toutefois d'apaiser les fêlures et regrets afin d'y cicatriser les plaies de par la grâce de l'amour parental. Il y émane l'une des plus bouleversantes romances vues à l'écran à travers un souci de vérisme sensitif.  

*Bruno
3èx

Récompenses: Palme d'or, prix FIPRESCI, Prix du Jury œcuménique.
BAFTA 1985 du meilleur réalisateur.

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