mercredi 3 décembre 2025

Une fille nommée Loly Madonna / Lolly-Madonna XXX de Richard C. Sarafian. 1973. U.S.A. 1h45.

                     (Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives) 
 
"Lolly Madonna : la rage jaune des oubliés."
 
Il y a des films que l’on découvre grâce à une intuition, au gré d’une circonstance généreuse. Œuvre maudite s’il en est, invisible depuis des lustres malgré une réputation discrètement solide (notamment chez Jean-Baptiste Thoret dans Le Cinéma américain des années 1970), Une fille nommée Lolly Madonna est un choc thermique à la distribution prestigieuse. On y croise Rod Steiger (Amityville, le Docteur Jivago), Robert Ryan (les 12 Salopards, La Horde sauvage), Jeff Bridges (The Big Lebowski, Starman), Scott Wilson (Les flics ne dorment pas la nuit), Ed Lauter (Cujo, Le Justicier de New York), Randy Quaid (Bande de flics, Midnight Express), Gary Busey (Point Break, Peur bleue), Paul Koslo (Une Bible et un fusil, La Porte du paradis). Des charismes creusés, fatigués : de véritables gueules, peu recommandables, inspirant une marginalité désœuvrée et solitaire dans leur hiérarchie décervelée.

Réalisé en 1973 par Richard C. Sarafian (Point Limite Zéro, Le Convoi sauvage), Une fille nommée Lolly Madonna transpire les Seventies : un réalisme âpre, tributaire d’un western désenchanté que le film expose dans une lumière presque jaunie et un parti pris escarpé. Drame psychologique poisseux, désespéré, mélancolique et violemment régressif, ces deux portraits de familles se disputant un bout de terrain dans un no man’s land rural nous entraînent vers une descente aux enfers où les coups les plus viciés et les plus couards culminent en un bain de sang paroxystique.
 
 
Dans un climat de déréliction pesant, étouffé sous un soleil écrasant, Lolly Madonna devient une épreuve de force que le spectateur subit malgré lui, désarmé devant ces deux clans prêts à tout, notamment lorsqu’ils s’arrachent l’appât d’une jeune étrangère que l’un des fils aime en secret. D’une violence psychologique et physique profondément éprouvante (on peut notamment hélas déplorer une certaine maltraitance animale), le film instille une nonchalance dépressive au fil d’un cheminement moral dégénératif. Le spectateur redoute alors, avec une empathie involontaire, l’issue fataliste de ce conflit sordide orchestré par deux patriarches assoiffés d’orgueil, de revanche et de dignité, perdus dans leur ignorance brute.

Il en émane un morceau de cinéma maladif, à l'agonie, habité par des rednecks livrés à eux-mêmes, naufragés dans la violence primitive avec autant de regrets que de culpabilité enfouie. Un néo-western mortifère dont on ne sort pas indemne, qui persiste longtemps dans l’esprit par son intensité épineuse, dépressive, dénuée de toute illusion. Et c’est un film qu’il faut voir, absolument, ne serait-ce que pour sentir son souffle noir vous traverser.

— le cinéphile du cœur noir 🖤

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