(Crédit photo : image trouvée via Google, provenant du site Imdb. Utilisée ici à des fins non commerciales et illustratives)
"Les amants sous le regard des corbeaux."
Pour un premier visionnage (honte à moi), La Veuve Couderc est une ode poignante à la vie campagnarde, filmée avec une tendresse assassinée. Sous ses allures de chronique rurale presque documentée, le film se révèle un mélodrame d’une cruauté grave, fustigeant la jalousie, la rancune, l’ego et la vendetta de métayers rongés par leur médiocrité morale. Autour d’eux, le couple que l’on juge, que l’on épie, demeure pourtant plus humain, plus respectueux, malgré la tempête sentimentale qui les secoue lorsque Jean - qu’endosse Delon avec un naturel séducteur et une élégance rare gravée sur ses traits - s’éprend d’une jeune paysanne à la réputation souillée.
Un peu ridée par ses épreuves, Simone Signoret y livre un jeu bouleversant, criant de vérité démunie, brûlé d’un amour tu et secret, dont chaque silence invoque un désespoir à la fois maternel et conjugal. Sa douleur, retenue jusqu’à l’étranglement, nous émeut au plus profond sans crier gare. Et puis il y a la musique de Philippe Sarde, nappée de tendresse et de mélancolie, presque timorée, pour ne pas dire évanescente - comme un souffle suspendu au-dessus de ces êtres qui se débattent comme ils peuvent avec le destin.
Granier-Deferre excelle dans l’art du storytelling, magnifiant cette sombre histoire d’amour et de trio conjugal brisé par la bassesse humaine que symbolisent les voisins de la veuve Couderc, figures d’une méchanceté imbécile et sournoise. Superbement photographiée, la nature rurale transpire la vie - la tranquillité d’un monde révolu, en 1934 - et l’atmosphère de bien être nous enserre, tant il fait bon y demeurer auprès de ces amants à l’expressivité vibrante.
Grand Prix du cinéma français en 1972, couronné par plus de deux millions de spectateurs en salles, La Veuve Couderc est une œuvre magnifique qu’il serait temps de faire revivre, le cœur offert à ceux que l’on aime. Et retrouver le couple Delon / Signoret à l’écran - comme s’ils étaient encore vivants, traversant le temps avec la même intensité - libère une émotion nostalgique qui imprègne tout le récit, lui conférant une dimension cinématographique trouble et capiteuse, presque fragile.
— le cinéphile du cœur noir 🖤
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