"La Parenthèse qui sauve."
Première découverte, alors qu’on m’en disait du bien depuis des lustres : Une vie volée m’a franchement surpris par son émotion pure, dénuée de fard et de tout pathos. Le film pâtit pourtant d’une affiche et d’un titre français trompeurs, alors que le titre initial - Girl, Interrupted - se révèle parfaitement idoine pour dépeindre l’interruption, la parenthèse d’une jeune femme placée de son plein gré en institut psychiatrique durant dix-huit mois. Une pause forcée, une dérive intérieure, un temps nécessaire pour suspendre le cours d’une existence douloureuse.
Le titre français en trahit le sens : il laisse imaginer une vie brisée par l’institution, alors que le séjour de Susanna (magnifiquement incarnée par Winona Ryder, mais j’y reviendrai) est relativement court et profondément fructueux. Elle n’est ni enfermée contre son gré, ni détruite par l’hôpital ; l’issue demeure apaisée. À l’inverse du chef-d’œuvre de Milos Forman - auquel on compare trop souvent le film, à tort selon moi - l’institution n’est pas filmée comme une machine inhumaine. Rien, dans le cheminement narratif, ne correspond à l’idée d’une vie "volée".
Première découverte, alors qu’on m’en disait du bien depuis des lustres : Une vie volée m’a franchement surpris par son émotion pure, dénuée de fard et de tout pathos. Le film pâtit pourtant d’une affiche et d’un titre français trompeurs, alors que le titre initial - Girl, Interrupted - se révèle parfaitement idoine pour dépeindre l’interruption, la parenthèse d’une jeune femme placée de son plein gré en institut psychiatrique durant dix-huit mois. Une pause forcée, une dérive intérieure, un temps nécessaire pour suspendre le cours d’une existence douloureuse.
Le titre français en trahit le sens : il laisse imaginer une vie brisée par l’institution, alors que le séjour de Susanna (magnifiquement incarnée par Winona Ryder, mais j’y reviendrai) est relativement court et profondément fructueux. Elle n’est ni enfermée contre son gré, ni détruite par l’hôpital ; l’issue demeure apaisée. À l’inverse du chef-d’œuvre de Milos Forman - auquel on compare trop souvent le film, à tort selon moi - l’institution n’est pas filmée comme une machine inhumaine. Rien, dans le cheminement narratif, ne correspond à l’idée d’une vie "volée".
Le film, remarquablement conté, prenant le temps de cerner la pudeur et la sensibilité dépouillée de ses protagonistes féminins, traite davantage de dépression, de confusion identitaire et du passage délicat à l’âge adulte. Susanna y apparaît en proie à un trouble dépressif, à une quête identitaire, à un doute existentiel tenace. Quant à Lisa, incarnation marginale, rebelle et menaçante d’Angelina Jolie - justement récompensée par six trophées, dont l’Oscar et le Golden Globe - elle demeure irréprochable dans ses expressivités martiales sur le fil du rasoir. Pourtant, Winona Ryder, à mes yeux, lui vole la vedette. Elle domine silencieusement une galerie de patientes attachantes et bouleversantes, chacune enfermée dans son désarroi moral, parfois jusqu’aux limites du suicidaire.
Winona connaissait d’ailleurs intimement la fragilité racontée ici, ayant elle-même séjourné brièvement en hôpital psychiatrique après sa rupture avec Johnny Depp en 1993. Elle dégage une aura rassurante, un regard noir sans hostilité, un naturel sensuel, trouble et fragile, mais déterminé à vaincre ses démons. Face à la brutalité gratuite de Lisa, elle cherche un sens à sa vie, à travers une évolution morale gagnée par l’amitié féminine, le besoin d’aimer et d’être aimée, d’être comprise avec une sincérité bouleversante. Sa présence fluette illumine le récit d’une empathie douce, presque chuchotée. Elle est belle, divine, elle déambule discrètement sans projecteurs.
Refusant de singer les grandes œuvres sur la folie institutionnelle, James Mangold choisit la pathologie dépressive et la cohésion féminine comme cœur battant de son film. Il en tire une fragile humanité, une sensibilité parfois écorchée vive, que ses comédiennes explorent avec une vérité dépouillée qui force le respect.
Un très beau portrait psychologique, donc, que ce Girl, Interrupted, transcendé par ses talents féminins et par une Winona Ryder irradiant l’écran clinique d’une pudeur réservée, chargée d’une chaude intensité. Et ce final d’adieux, illustré avec une tendresse distanciée, fait chavirer les émotions sans la moindre programmation.
— le cinéphile du cœur noir 🖤



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