mercredi 6 novembre 2013

L'EXORCISTE 2, L'HERETIQUE (Exorcist 2: The Heretic)

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site daysarenumbers.net

de John Boorman. 1977. U.S.A. 1h58. Avec Linda Blair, Richard Burton, Louise Fletcher, Max Von Sydow, Kitty Winn, Paul Henreid, James Earl Jones, Ned Beatty.

Sortie salles France: 25 Janvier 1978. U.S: 17 Juin 1977

FILMOGRAPHIE: John Boorman est un réalisateur, producteur, scénariste et acteur américain, né le 18 Janvier 1933 à Shepperton (Royaume-Uni).
1965: Sauve qui peut. 1967: Le Point de non-retour. 1968: Duel dans le pacifique. 1970: Leo the last. 1972: Délivrance. 1974: Zardoz. 1977: L'Exorciste 2. 1981: Excalibur. 1985: La Forêt d'Emeraude. 1987: Hope and Glory. 1990: Tout pour réussir. 1995: Rangoon. 1998: Le Général. 2001: Le Tailleur de Panama. 2003: In my Country. 2006: The Tiger's Tail.


"J'ai trouvé particulièrement stimulante l'idée de faire un film qui s'appuyait sur l'attente d'un public préexistant. Chaque film exige un effort pour rejoindre son public et c'est pourquoi le cinéma est si souvent répétitif: la répétition est gage de succès. J'ai trouvé qu'il serait honnête de prendre en charge cette attente du public et de la remodeler, de l'aider à se réorienter, plutôt que de le satisfaire avec la réédition d'un produit familier". John Boorman

Quatre ans après le foudroyant traumatisme planétaire, l'Exorciste, John Boorman s'entreprend de réaliser une suite à contre-courant, dans le sens où il souhaite avant tout s'écarter du grand-guignol révulsif de son modèle. Echec commercial cinglant auquel le public s'attendait sans doute à une forme de remake encore plus horrifiant, le film est à nouveau boudé lorsque son réalisateur en modifie le montage (ainsi qu'un final plus spectaculaire) pour le réexploiter en salles. Enquêtant sur les circonstances troubles de la mort du père Merrin, le prêtre Amont décide de rentrer en contact avec la jeune Regan durant des séances d'hypnose synchronisées afin de rencontrer le démon Papuzu. 



Visuellement éblouissant durant le voyage initiatique entrepris en Afrique par le père Amont, l'Exorciste 2: l'hérétique, joue la carte du dépaysement vertigineux lorsque ce dernier doit par exemple, par hypnose synchronique, s'infiltrer à l'intérieur de crevasses d'une montagne pour témoigner d'un exorcisme commis sur l'enfant Kokumo. Réflexion métaphysique sur la nature du Mal, le film de John Boorman bouscule les règles de la convention et redouble d'originalité à tenter d'expliquer les fondements maléfiques du diable Papuzu sous l'apparence hostile d'une invasion de sauterelles. Avec audace, le réalisateur prend donc le risque de dérouter le spectateur avec son lot de séances d'hypnose récurrentes (mais parfaitement synchronisées !), auquel Amont et Regan, tentent de renouer contact (parfois même pas télépathie !) avec Papuzu. La seconde partie, plus ésotérique mais irrésistiblement captivante, nous entraîne vers l'expédition du père Amont, chargé de retrouver Kokumo afin de démystifier la présence du Mal. A grands renforts d'illusions spirituelles et de symboles tribaux, le film nous mêle notamment à un protocole sur la symbiose des sauterelles afin de déjouer leurs enjeux destructeurs. En prime, le climat tropical qui martèle cette contrée aride va venir amplifier l'aura mystérieuse qui y découle où l'écologie joue un rôle majeur.
En ce qui concerne le choix des comédiens, on est heureux de retrouver la jeune Regan du haut de ses 16 ans, ici plus affirmée à insuffler un jeu spontané sous l'entremise de l'illustre Linda Blair. Qui plus est, l'actrice photogénique dévoile un charme de sensualité en osmose avec certaines plages d'onirisme durant son cheminement synchronique (sa présence symbolique sur le toit de son immeuble parmi une nuée de colombes !). Si Richard Burton peut parfois prêter au cabotinage (le prologue au cours duquel une possédée s'immole devant sa posture exorbitée !), il réussit à monopoliser une présence transie d'émoi et de stupéfaction face à son dessein hasardeux. On aurait peut-être aimé une prestance un peu moins monolithique dans ses audaces stoïques mais l'acteur, imprégné d'inquiétude, insuffle malgré tout une densité humaine ensorcelante.


Plongée fascinante dans les tréfonds du Mal au rythme mélodique de l'inoubliable partition de Morricone, l'Exorciste 2 réfute la redite et peut donc se targuer d'être l'une des rares suites à avoir su tenir tête à un panthéon diabolique dans une autonomie auteurisante. Esthétiquement envoûtant dans ses nuances ocres, le film n'oublie pas de provoquer une vraie émotion face à la nouvelle destinée de Regan et de culminer vers un final apocalyptique faisant office d'anthologie (FX prodiges à l'appui !). Pour parachever, et comme le soulignait le journaliste de l'époque, Pierre-André Arène, il est temps de redécouvrir cette oeuvre complexe mais passionnante et profondément originale !

06.11.13. 3èx
Bruno Matéï

mardi 5 novembre 2013

Razorback

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviepostershop.com

de Russell Mulcahy. 1984. Australie. 1h35. Avec Gregory Harrison, Arkie Whiteley, Bill Kerr, Chris Haywood, David Argue, Judy Morris.

Sortie salles Australie: Avril 1984

FILMOGRAPHIE: Russell Mulcahy est un réalisateur australien, né le 23 Juin 1953 à Melbourne, dans l'état de Victoria. 1979: Derek and clive get the horn. 1984: Razorback. 1985: Arena. 1986: Highlander. 1991: Highlander 2. 1991: Ricochet. 1992: Blue Ice. 1993: l'Affaire Karen McCoy. 1994: The Shadow. 1996: Tireur en péril. 1998: La malédiction de la Momie. 1999: Resurrection. 2003: Swimming Upstream. 2007: Resident Evil: Extinction. 2008: Le Rois Scorpion 2. 2009: Fais leur vivre l'enfer, Malone !

 
"Dans la gueule du désert : Razorback".
À peine âgé de trente et un ans lorsqu’il met en chantier son second long-métrage, Russell Mulcahy ne laisse pas indifférent le jury d’Avoriaz, qui voit en ce solide artisan un nouveau prodige de la mise en scène — et ce, même si Razorback repart bredouille. Si, lors de sa sortie en salles, le succès reste timide auprès du grand public, c’est du côté des vidéophiles qu’il se taille peu à peu une réputation de série B culte. Mixant allègrement fantastique, aventure et horreur fangeuse pour croquer le portrait déviant d’un duo de rednecks, Mulcahy réinvente le bestiaire animalier pour hausser l’affrontement au rang de mythe. Mais deux portraits d’êtres meurtris se télescopent dans Razorback : celui de Carl, jeune homme exilé dans le désert australien pour retrouver la trace de sa femme disparue, Beth Winters, journaliste engagée pour la cause animale ; et celui de Jack, vieil homme esseulé, rongé par la vengeance après avoir perdu son petit-fils dans une attaque nocturne du sanglier. Chacun, avec sa faille, livre à sa façon une guerre impitoyable contre la bête, tandis que deux bouseux d’abattoir, violeurs en cavale, se retrouvent happés par cette traque implacable.
 

Spectacle baroque et furibond, où l’onirisme crépusculaire s’imbibe d’une nature solaire, clairsemée — la traversée hallucinée de Carl dans le désert aride ! — Razorback joue la carte de la singularité en ravivant des thèmes éculés du cinéma fantastique. Avec une ambition stylisée, Mulcahy sème des plages de poésie tout au long du cheminement, hasardeux et belliqueux, de ses justiciers hantés par le deuil. Dans la mouvance des Dents de la mer pour la démesure bestiale et de Massacre à la tronçonneuse pour le portrait de dégénérés sadiques — ces chasseurs de kangourous, aveuglés sous les projecteurs, traqués la nuit pour être torturés à loisir — Razorback hybride les genres et décuple l’intensité de l’aventure. Surtout, Mulcahy nous attache à ses personnages cabossés, où l’humanisme saigne d’écorchures intimes, et propulse ce bestiaire dans un survival sensoriel où des chasseurs faillibles, mais rebelles, affrontent le monstre. Une émotion poignante affleure dans la relation naissante entre Sarah, jeune assistante de Jack, et Carl, veuf inconsolable, qui grâce à elle, s’arrime de nouveau à la tendresse. Cette bribe de romantisme, qui infuse peu à peu le récit, trouve son écrin dans la superbe élégie musicale d’Iva Davies.

Quant à la carrure monstrueuse du Razorback, Mulcahy privilégie la suggestion, sans jamais céder à l’esbroufe : sans doute pour compenser un budget restreint, il use de gros plans, détaille la physionomie infernale, exalte la férocité. Avec un montage précis, une réalisation souvent inventive, Razorback accomplit le tour de force de rendre son monstre crédible, soutenu par une imagerie crépusculaire, littéralement — et inlassablement — ensorcelante. Déjà un chef-d’œuvre formel.


"Bestiaire baroque sous le soleil mort : Razorback".
Spectacle flamboyant, où l’onirisme baroque se dispute à une violence sèche, Razorback mêle les genres avec une efficacité et une pudeur d’émotion rares. Sa mise en scène, d’une audace inouïe, transcende la bête d’apocalypse et la pugnacité de pionniers que rien n’épuise. Un classique indépendant, incandescent, qui n’est pas près de s’éteindre.
 
*Bruno
22.12.24. 6èx. Vostf (comme si c'était la toute 1ère fois)
05.11.13. 5èx

lundi 4 novembre 2013

LES FANTOMES D'HALLOWEEN (Lady in White / La dame blanche)

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site forgottenflix.com

de Franck LaLoggia. 1988. U.S.A. 1h57 (version longue). Avec Lukas Haas, Len Cariou, Alex Rocco, Katherine Helmond, Jason Presson.

Sortie salles U.S: 22 Avril 1988. Angleterre: 16 Juin 1989

FILMOGRAPHIE: Franck La Loggia est un réalisateur, acteur, scénariste, producteur et compositeur américain, né le 12 Janvier 1954 à Rochester, New-York. 1981: Fear no Evil. 1988: Les Fantômes d'Halloween. 1995: Mother


Directement sorti en Vhs à la fin des années 80 et relativement passé inaperçu auprès des vidéophiles, Les Fantômes d'Halloween est une curieuse production d'un réalisateur méconnu puisque uniquement responsable de trois longs-métrages. Baignant dans le climat solaire d'une paisible bourgade ricaine, son prélude nous remémore inconsciemment l'esprit infantile de Spielberg lorsque des enfants farceurs batifolent dans leur quartier en toute insouciance. Mais un évènement dramatique va rapidement obscurcir cette impression de bonheur exaltant avec la réactualisation d'un fait divers crapuleux auquel le responsable n'eut jamais été réprimandé. Car 10 ans au plus tôt, une dizaine d'enfants fut lâchement exécutés par ce dangereux psychopathe. Suite à une mauvaise farce d'Halloween, un garçon embrigadé dans le sellier de son école se retrouve nez à nez avec l'apparition fantomatique d'une fillette. Précédemment violentée et assassinée, elle décide de rentrer en contact avec Frank afin qu'il puisse l'aider à retrouver la paix pour dévoiler au grand jour l'identité du meurtrier. Victime lui aussi d'une sauvage agression par ce même assassin, Frank va tenter de le démasquer avec l'entremise de son frère et d'une intrigante dame blanche. 


Ce qui au premier abord parait édénique avec les Fantômes d'Halloween, c'est son esprit de bonhomie hérité du conte fantastique si bien que les enfants en seront les principaux témoins. Particulièrement Frank, gosse docile élevé par un père prévenant mais bouleversé depuis la disparition de son épouse ! Et le jeune fils de se retrouver embarqué dans une situation improbable particulièrement alerte pour sa propre survie ! En confrontant l'amertume des fantômes plaintifs, l'innocence d'un gamin prude et les nouvelles stratégies horrifiques d'un criminel en fuite, les Fantômes d'Halloween oscille les genres parmi l'interférence de traits d'humour (les broutilles quotidiennes imparties aux grands parents de Frank depuis que l'aïeul consomme ses cigarettes en catimini). En prenant son temps pour structurer un cheminement narratif peu surprenant mais parfois cruel, le cinéaste fait également preuve d'une dramaturgie inattendue lorsqu'un présumé coupable est sur le point de retrouver sa liberté. En illustrant l'Amérique des années 60 corrompue par le racisme et la motivation expéditive d'une victime inconsolable, Frank Lallogia ternie à nouveau l'apparence aimable de cette bourgade que l'on s'était idéalisé au premier abord. Mais surtout, il met en exergue les affres d'un enfant fragile confronté à sa raison existentielle. Préalablement sauvé in extremis d'une mort certaine et opposé aux apparitions spirituelles des fantômes, Frank n'aura de cesse pour un si jeune âge d'affronter ses craintes afin de prêter main forte à une mère et une fille désunies ! En jouant sur la légende urbaine de la dame blanche, le réalisateur tente notamment d'agrémenter une petite énigme autour de ce symbole, ici redresseur de tort. Alors que le final ne manquera pas de provoquer une émotion poignante face au ton résolument féerique, libérateur de la situation.


Attachant et agréable à suivre mais néanmoins perfectible, Les Fantômes d'Halloween aurait pu être plus passionnant à travers ses sombres thématiques si la mise en scène chétive et une direction de seconds rôles parfois timorée eurent été plus maîtrisés. Pour autant, la beauté naturelle de certaines images, l'onirisme formel qui en découle tantôt, la bouille attachante du jeune Lukas Haas et surtout la volonté du réalisateur à ternir son récit emportent l'adhésion. 

Un grand merci à l'Univers Fantastique de la Science-fiction
04.11.13. 3èx
Bruno Matéï

jeudi 31 octobre 2013

Henry, portrait d'un serial-killer

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site gallerytheimage.com

"Henry: Portrait of a Serial Killer" de John Mc Naughton. 1986. U.S.A. 1h23. Avec Michael Rooker, Tom Towles, Tracy Arnold.

Sortie salles France: 6 Février 1991

FILMOGRAPHIE: John Mc Naughton est un réalisateur américain, né le 13 Janvier 1950 à Chicago. 1984: Dealers in Death. 1986: Henry, portrait d'un serial killer. 1991: Sex, drugs, Rock and Roll. 1991: The Borrower. 1993: Mad Dog and Glory. 1996: Normal Life. 1998: Sexcrimes. 2000: Condo Painting. 2001: Speaking of sex. 2004: Redliners. 2009: Backstabbers. 2013: The Harvest.


Ce film s'inspire de fait réels. Ce n'est pas une histoire vraie proprement dite. Les aveux d'un certain Henry ont servi à faire ce film. Aveux qu'il a niés, par la suite. Otis et Becky sont des personnages fictifs. 

Interdit en salles durant 4 ans par la censure américaine et estampillé X, Henry est le premier long-métrage du réalisateur John Mc Naughton. Inspiré du personnage d'Henry Lee Lucas, tueur en série responsable de plus de 199 meurtres, le film dépeint la dérive meurtrière d'un duo d'anciens taulards, des marginaux résolument reclus de leur condition miséreuse. D'un côté, Henry, le plus influent, est un tueur méthodique extériorisant sa rage sur les innocents depuis le traumatisme de son enfance galvaudée par une mère prostituée. De l'autre, Otis est un badaud écervelé facilement influencé par le vice et la perversion. A bord de leur véhicule, ils sillonnent les quartiers nocturnes afin d'assassiner au hasard d'une rue des citadins. Au coeur de ce duo indocile, la soeur d'Otis, Becky, tente de se faire une place dans leur appartement restreint et s'efforce à chercher un petit boulot de strip-teaseuse avant de tomber amoureuse d'Henry. Car épris d'empathie et d'identification pour ses confidences martyrs, Becky eut été préalablement victime d'une enfance incestueuse vis à vis de son géniteur. A travers le teint blafard d'une photo granuleuse ainsi que le souci documentaire d'une réalisation expérimentale,  John Mc Naughton nous immerge au sein d'un cauchemar urbain profondément glauque et crapuleux. Ainsi, le climat poisseux, particulièrement prégnant, s'avère si malsain qu'à la sortie de la projo nous nous sentions physiquement pollués par cette débauche où la saleté du sang et les cris d'agonie résonnent encore tel un écho !


Or, en autopsiant sans concession le portrait de deux assassins arriérés, littéralement vautrés dans le meurtre, Henry... constitue une épreuve de force morale toujours plus dérangeante de par sa gratuité profondément perverse. Car en position de voyeur, nous sommes contraints de témoigner de l'existence triviale du trio de chômeurs (Otis va vite abdiquer son poste de pompiste au fil de son cheminement meurtrier) et surtout d'espionner par l'oeil de la caméra leurs méfaits criminels par le truchement de leurs errances nocturnes. La contrainte de subir leur quotidienneté misérable et surtout d'assister à leurs exactions sanglantes provoquant un malaise viscéral tangible du fait de son traitement hyper réaliste. Ainsi, en évitant toute forme de racolage, John Mc Naughton filme de manière crue des meurtres brutaux à l'aide d'une caméra vhs qu'Otis se divertit à préserver en mémoire. Alors que du point de vue de Henry (l'être le moins licencieux car jamais assouvi de sadisme), les crimes sont souvent établis hors champs en nous proposant simplement d'en découvrir la résultante des mutilations. Qui plus est, les flash-back émis au son des hurlements des victimes rehaussent l'aspect cauchemardesque de l'esprit dérangé d'Henry, prisonnier de ses pulsions vengeresses et torturé par ces démons. On s'étonne d'ailleurs de lui éprouver un chouia d'empathie pour le rapport à la fois amical et affectueux entretenu avec Becky, et ce juste avant de renouer avec ses pulsions malades.


Incarné par des comédiens transis de vérité à travers leur dégénérescence immorale, Henry... provoque autant de fascination pour l'aspect reportage infligé à sa mise en scène que de dégoût pour la représentation radicale du duo de serial-killers irrécupérables. Glaçant et psychologiquement perturbant du fait de son épineuse intensité (telle ce massacre d'une famille filmé en mode "VHS" !), rarement un film d'horreur n'aura décrit avec autant de vérisme et véracité l'introspection pathétique de deux monstres humains. 
Pour public averti.

L'avis de Mathias Chaputhttp://horrordetox.blogspot.fr/2011/03/henry-portrait-of-serial-killer-de-john.html

*Bruno
31.10.13. 3èx


mardi 29 octobre 2013

IMPULSE (Pulsion Homicide)

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviescreenshots.blogspot.com

de Graham Baker. 1984. U.S.A. 1h31. Avec Meg Tilly,  Tim Matheson, Hume Cronyn, Bill Paxton, John Karlen, Claude Earl Jones.

Sortie salles U.S: 28 Septembre 1984

FILMOGRAPHIEGraham Baker est un réalisateur, producteur et scénariste américain.
1981: La Malédiction Finale. 1984: Impulse. 1988: Futur Immédiat, Los Angeles 1991. 1990: The Recruit. 1991: Ni dieu ni maître (Born to Ride). 1999: Beowulf


Trois ans après la Malédiction Finale et pour une seconde fois Graham Baker renoue avec la série B fantastique militant ici contre la pollution chimique. Dans une petite ville bucolique, suite à un séisme, leurs habitants sont soudainement épris d'accès de démence incontrôlée ! Série B modeste ayant connu son petit succès auprès des vidéos-clubs des années 80, Impulse est notamment une nouvelle occasion pour Meg Tilly de renouer avec le genre après s'être fait remarquée un an au préalable dans Une Nuit trop noire et Psychose 2. Avec un pitch de départ accrocheur digne d'un épisode de la 4è Dimension, Graham Baker ne manque pas d'audace pour illustrer la lente dégénérescence "schizo" de citadins contaminés par un produit toxique. Ainsi, c'est à travers le personnage de Jennifer que nous allons suivre cette folie collective après qu'elle eut reçu un appel de sa génitrice. Dans des propos incohérents extrêmement virulents, cette dernière s'en prend violemment à elle pour lui reprocher d'être responsable de sa dépression. Quelques minutes plus tard, la mégère se tire une balle dans la tête mais y survit in extremis ! Avec l'aide de son mari, Jennifer retourne dans sa région natale pour se rendre à l'hôpital auprès d'elle afin de tenter de saisir les motivations de son suicide. Au même moment, d'étranges évènements surviennent auprès de la population, les habitants semblant épris de pulsions immorales !


Avec cet argument prometteur décuplant nombre d'incidents débridés, Impulse dégage un parfum de souffre assez fascinant du point de vue des protagonistes renouant avec leurs bas instincts ! A l'image de ce médecin délibéré à couper le tube d'oxygène d'une patiente de façon irrégulière pour mieux observer ses instants d'agonie ! Alors qu'un peu plus tard, le shérif régional ne vas pas hésiter à abattre d'une balle dans le dos un adolescent suspecté de vol à l'étalage ! Cette succession d'accidents volontaires dénués de raisonnement nous confine donc dans un cauchemar halluciné où notre pauvre Jennifer (Meg Tilly dégage une belle fragilité émotionnelle) tentera de préserver sa famille en guise de survie. Rehaussé du climat champêtre d'un soleil écrasant, Impulse insuffle des sentiments troubles d'inquiétude et de rire nerveux lorsque les victimes intoxiquées sont incapables de pouvoir réfréner leur accès d'irascibilité ! Cette psychose collective n'épargnant aucun citadin, Jennifer semble de plus en plus compromise à protéger ses proches, à moins que la résolution de cette pandémie n'y soit enfin divulguée. Que nenni ! Graham Baker réfutant le happy end salvateur et enfonçant le clou du nihilisme lors d'une conclusion glaçante Spoiler ! où les autorités du gouvernement seront directement mises en cause afin d'étouffer l'affaire ! Fin du Spoil


Série B fantastique écolo non dénuée de maladresses de par sa réalisation parfois hésitante et auprès des réactions parfois incohérentes des personnages, Impulse joue la carte du délire incongrue à travers son thème alarmiste lié à la pollution, et ce afin de mieux nous surprendre. Le caractère attachant des protagonistes (comédiens de seconde zone au visage familier !), son climat versatile et surtout l'audace impartie à certains moments scabreux (les échanges de regards lubriques entre un adulte et une adolescente) renforcent la nature saugrenue de cet ovni injustement méconnu. 

Dédicace à Christophe Colpaert
29.10.13
Bruno Matéï


lundi 28 octobre 2013

L'HOMME AU MASQUE DE CIRE (House of Wax)

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site fearsforqueers.blogspot.com

d'André De Toth. 1953. U.S.A. 1h28. Avec Vincent Price, Paul Picerni, Frank Lovejoy, Phyllis Kirk, Carolyn Jones, Charles Bronson.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: André De Toth (Endre von Toth) est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, d'origine austro-hongroise, né le 15 Mai 1912 à Mako (Csongrad), décédé le 27 Octobre 2002 à Burbank (Californie). 1942: Le Livre de la Jungle (réalisation de 2è équipe). 1944: Dark Waters. 1947: Femme de feu. 1947: l'Orchidée Blanche. 1951: Le Cavalier de la mort. 1952: Les Conquérants de Carson City. 1953: L'Homme au Masque de cire. 1954: Chasse au gang. 1955: La Rivière de nos amours. 1959: La Chevauchée des bannis. 1960: Contre-espionnage. 1961: Les Mongols. 1963: l'Or des Césars. 1968: Enfants de salaud.


"L'un des plus beaux films en couleurs dans l'histoire du cinéma d'épouvante", à découvrir impérativement en HD !

Remake d'un petit classique oublié des années 30, l'homme au Masque de Cire va largement dépasser son modèle sous la houlette d'André De Toth, cinéaste plus habitué aux westerns traditionnels que de l'épouvante gothique. Pourvu d'un Technicolor resplendissant et de l'interprétation magnétique du monstre Vincent Price, ce chef-d'oeuvre inspiré du Fantôme de l'Opéra suscite toujours la même fascination, sans tenir compte du procédé 3D révolutionnaire de l'époque. Le PitchRégisseur d'un musée de cire, Henry Jarrod voue un amour immodéré pour ses mannequins de cire. Un soir, son associé cupide décide d'incendier l'établissement afin de toucher une prime d'assurance de 25 000 dollars. Porté disparu, Henry élabore une vengeance diabolique au sein de ses nouvelles créations. 


Ainsi, à travers la vengeance morbide d'un sculpteur entièrement voué à sa passion, André De Toth livre un classique d'épouvante d'une santé florissante auprès de sa réalisation alerte prenant soin de tailler une carrure à ses divers personnages. Que ce soit notre "monstre au masque" accompagné de sbires disciplinés (dont l'un d'eux est incarné par le tout jeune néophyte Charles Bronson !), l'investigatrice Sue Allen (très convaincante dans son rôle de limier scrupuleuse !) et son fidèle amant, ou encore les policiers fureteurs aux réparties sarcastiques. Chacun de ces protagonistes s'impliquant dans l'action avec intégrité pour faire progresser les évènements dans une notion de suspense habilement dosée. L'amour désespéré que porte Henry pour son (nouveau) modèle féminin et l'enquête suspicieuse menée par cette dernière (Sue Allen) demeurant les principaux moteurs émotionnels où leur confrontation s'avèrera toujours plus intense et risquée ! Outre l'esthétisme raffiné imparti à sa scénographie gothique du musée de cire, l'Homme au masque de cire est donc rehaussé d'une intrigue solide (même si classique) alternant rebondissements horrifiques, humour noir et étude policière. Au delà de la prestance sacrée de Vincent Price, artiste maudit féru d'amour pour sa "Marie Antoinette", la fascination exercée est notamment décuplée par les mannequins historiques qui jalonnent le musée dans une reconstitution minutieuse afin de mieux coller à la réalité des faits exposés. Cette aura fantastique sous jacente qui enveloppe le récit est d'autant plus trouble quand on sait que sous l'apparence étrangement humaine de ces figures encaustiques s'y planque un cadavre humain !


Au-delà de son attrait irrésistiblement ludique, son incroyable rutilance formelle et la densité des personnages, l'Homme au Masque de cire aborde en sous-texte une réflexion sur l'art perfectible, la quête du sensationnalisme au sein de l'entertainment (le public en quête d'émotions toujours plus intenses !) et surtout la passion dévorante allant à l'encontre de la raison. Or, sous l'allégeance indéfectible de Vincent Price et de ces fameux mannequins de cire, cette vengeance macabre s'est également immortalisée en classique inoxydable !

*Bruno
29.02.24. 6èx
28.10.13. 


samedi 26 octobre 2013

TOP SECRET !

                                          Photo empruntée sur Google appartenant au site fan-de-cinema.com

de Jim Abrahams, Jerry et David Zucker. 1984. U.S.A/Angleterre. 1h30. Avec Val Kilmer, Lucy Gutteridge, Billy J. Mitchell; Christopher Villiers, Michael Gough, Sydney Arnold, Jim Carter, Omar Sharif, Peter Cushing, Jeremy Kemp.

Sortie salles France: 26 Septembre 1984. U.S: 8 Juin 1984


FILMOGRAPHIE: David Zucker est un réalisateur, producteur, scénariste, acteur, cascadeur américain, né le 16 Octobre 1947 à Milwaukee, Wisconsin (Etats-Unis). 1980: Y'a t-il un pilote dans l'avion ? 1984: Top Secret. 1986: Y'a t-il quelqu'un pour tuer ma femme ? 1988: Y'a-t'il un flic pour sauver la reine. 1991: Y'a t'il un flic pour sauver le président ? 1993: For Goodness Sake. 1998: BASEketball. 2003: Mon boss, sa fille et moi. 2003: Scary Movie 3. 2006: Scary Movie 4. 2008: An American Carol.
Jim Abrahams est un scénariste, réalisateur, producteur et acteur américain, né le 10 Mai 1944 à Shorewood. 1980: Y'a t-il un pilote dans l'avion ? 1984: Top Secret. 1986: Y'a t-il quelqu'un pour tuer ma femme ? 1988: uand les jumelles s'emmêlent. 1990: Roxy est de retour. 1991: Hot Shots ! 1993: Hot Shots 2. 1997: Au risque de te perdre. 1998: Le Prince de Sicile.
Jerry Zucker est un producteur, réalisateur, scénariste et acteur américain, né le 11 Mars 1950 à Milwaukee, Wisconsin. 1979: Rock 'n' Roll Hgh School. 1980: Y'a t-il un pilote dans l'avion ? 1984: Top Secret. 1986: Y'a t-il quelqu'un pour tuer ma femme ? 1990: Ghost. 1995: Lancelot. 2001: Rat Race.


Quatre ans après le succès phénomène Y'a t'il un pilote dans l'avion ?, le trio Jim Abrahams, David et Jerry Zucker récidive dans la parodie afin de rendre hommage en l'occurrence à l'espionnage et l'action belliqueuse. Pour anecdote, l'apparition clin d'oeil d'Omar Sharif (franchement à l'aise dans un rôle aussi grotesque !) est d'ailleurs une note d'intention au film d'espionnage homonyme de Black Edwards réalisé en 1974. Comédie débridée au non-sens que n'aurait pas renié les Monty Python, Top Secret brasse tous azimuts les classiques vintage des années 40/50 (la Grande Evasion, le Magicien d'Oz, l'Homme qui en savait trop, Stalag 17) et les produits modestes des années 80, à l'instar de l'inénarrable le Lagon bleu, gros succès "fleur bleue" des années 80. A travers la simplicité d'un scénario improbable (avec l'aide de résistants, un chanteur de rock va tenter de faire évader un savant notoire emprisonné en Allemagne de l'Est pour l'achèvement d'une arme secrète), nos réalisateurs perpétuent leur tradition du pastiche cartoonesque avec toujours autant de verve impayable.


En comptant un gag visuel ou verbal toutes les 15 à 20 secondes, Top Secret ne peut pas concourir à la perfection de l'hilarité. Mais l'abattage des comédiens (Val Kilmer en tête, imitant spontanément Elvis Presley dans la peau de Nick Rivers !), les numéros musicaux chorégraphiés avec entrain et sa frénésie visuelle lorgnant vers le fantastique (la démarche et le langage verso du bibliothécaire incarné par Peter Cushing, la scénographie d'un saloon subitement régie sous la mer !) nous plongent dans un délire anarchique où l'absurdité est à son apogée. Si les éclats de rire ne sont pas aussi probants que leur indémodable premier chef-d'oeuvre, les ZAZ ont tout de même procréé l'objet culte d'une farce impétueuse !

26.10.13
Bruno Matéï



vendredi 25 octobre 2013

Les Révoltés de l'an 2000 / ¿Quién puede matar a un niño? / Who can kill a child ?

                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinaff.com

de Narciso Ibanez Serrador. 1976. Espagne. 1h50. Avec Lewis Fiander, Prunella Ransome, Antonio Iranzo, Miguel Narros, Maria Luisa Arias, Marisa Porcel, Juan Cazalilla.

Sortie salles France: 2 Février 1977. Espagne: 26 Avril 1976

FILMOGRAPHIE: Narciso Ibanez Serrador est un scénariste, producteur et réalisateur uruguayen, né le 4 Juillet 1935 à Montevideo (Uruguay).
1969: La Résidence. 1976: Les Révoltés de l'An 2000 

 
"Et l’enfant égorgea le monde".
Longtemps resté inédit en DVD/Blu-ray en France, Les Révoltés de l'an 2000 est une perle rare signée par un cinéaste discret, natif d’Espagne, qui avait déjà ébranlé les cinéphiles avec un premier chef-d'œuvre de perversité gothique : La Résidence. Sur une petite île, un couple de vacanciers doit affronter une ribambelle d’enfants tueurs. Cette trame, aussi linéaire qu’improbable, s’érige sous la caméra de Narciso Ibáñez Serrador en acmé d’effroi, par sa tension éprouvante, dénuée de toute concession.

La force incisive de ce cauchemar hermétique émane de son thème – l’enfance meurtrie – et d’une mise en scène alerte, qui rejette toute gaudriole grand-guignolesque. À l’image de son générique abominable, franchement insoutenable jusqu’aux larmes, où défilent des images d’archives de crimes de guerre perpétrés contre des enfants. Cette introduction, d’une brutalité extrême, illustre ce que l’humanité peut envisager de pire pour sa propre progéniture en cas de génocide. Passée cette turpitude, le film en extrait une fable contestataire, où des bambins passent à l’action du talion contre la cruauté des adultes.

Quoi de plus banal, après tout, qu’un garçonnet innocent batifolant avec ses camarades dans une ruelle ? Sauf qu’ici, leur environnement insulaire est épargné de toute présence parentale. Serrador tisse alors, avec un sens du suspense latent et un climat de mystère littéralement perméable, une toile d’araignée autour de ce couple désorienté, pris dans le mutisme pesant des citadins.

Et c’est à travers le témoignage de deux survivants qu’ils prendront la mesure du danger. Car ici, les bambins fripons à la bouille angélique tuent, sans la moindre hésitation, tout étranger majeur. Aucune justification n’est donnée pour leurs exactions vengeresses — si ce n’est l’hypothèse d’une haine transmise par télépathie. Ce refus d’explication rationnelle renforce d’autant plus le malaise diffus que perçoit le spectateur, happé dans une impuissance de plus en plus désespérée.

L’enjeu de survie auquel le couple est confronté devient alors d’autant plus malsain que la rigueur du récit les pousse à riposter par une violence intolérable. Mais que dire des enfants goguenards, capables d’exercer des sévices indécents contre l’étranger ? Le vieillard battu à mort à coups de bâton, le jeu de la serpe, la défunte déshabillée par des enfants ricanants, le lynchage du père provoqué par sa propre fille… Par son réalisme âpre et une dimension psychologique terrassante, Ibáñez Serrador orchestre une impitoyable descente aux enfers pour la frêle destinée de ses héros. À l’image de son final nihiliste, d’une intensité dramatique sans compromis, jusqu’au malaise moral.


"L’île aux enfants perdus".
Inquiétant et dérangeant, psychologiquement effrayant et d’une cruauté inouïe, Les Révoltés de l’an 2000 est une épreuve de force d’une rare puissance émotionnelle et d’évocation. À l’image insensée de ce fœtus exterminant, de l’intérieur de l’abdomen, sa propre génitrice — il fallait oser pareille idée tordue ! L’originalité burnée du scénario, la rigueur d’un climat d’étrangeté irrespirable et le jeu étrangement naturel des enfants n’ont jamais été aussi convaincants pour transcender la thématique de l’enfant tueur.

Et si un jour leur révolte avait lieu… serions-nous capables d’enrayer pareille menace planétaire ? Visionnaire au possible, cette date de l’horreur reste d’une maturité indéfectible.

Note : En raison de sa violence jugée insupportable, le film fut interdit en Finlande et en Islande.

RécompensePrix de la Critique à Avoriaz, 1977

*Bruno
23.07.24. 4èx. Version anglaise


jeudi 24 octobre 2013

Le Blob / The Blob

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site backtothemovieposters.blogspot.com

de Chuck Russel. 1988. U.S.A. 1h35. Avec Kevin Dillon, Shawnee Smith, Donovan Leitch, Ricky Paull Goldin, Jeffrey DeMunn, Candy Clark, Joe Seneca, Del Close.

Sortie salles U.S: 5 Août 1988. France: 1er Février 1989

FILMOGRAPHIE: Chuck Russel est un réalisateur, producteur, scénariste américain, né le 6 Août 1952 à Highland Park dans l'Illinois (Etats-Unis). 1987: Freddy 3. 1988: Le Blob. 1994: The Mask. 1996: l'Effaceur. 2000: l'Elue. 2002: Le Roi Scorpion. 2014: Arabian Nights.


Remake d'un petit classique des années 50 incarné par le tout jeune débutant Steve McQueen, Le Blob revient 30 ans plus tard sous la houlette du néophyte Chuck Russel. Après avoir succéder à Wes Craven  et Jack Sholder pour l'entreprise du 3è opus de Freddy, cet habile faiseur de série B élabore avec son second métrage une réactualisation beaucoup plus stimulante que son ancêtre. Si bien que grâce aux incroyables effets spéciaux conçus en partie par la société Dream Quest Images, le Blob redouble de punch, d'intensité, d'efficacité d'élaborer des séquences cinglantes aussi inventives que spectaculaires. Or, dans un esprit cartoonesque parfois épaulé d'une dose de dérision sardonique, les attaques récurrentes de la fameuse gélatine organique s'avèrent redoutablement jouissives lorsqu'elle s'attaque aux quidams pour les ingurgiter. A l'instar de ce pauvre clochard ayant osé toucher la masse visqueuse à l'aide d'un bâton après avoir été témoin du crash d'un météore. 


Ainsi donc, avec originalité et une surprenante maîtrise au niveau du dynamisme du montage et de sa réalisation avisée allant droit à l'essentiel, Chuck Russel rivalise d'audaces à piéger les victimes au sein d'endroits familiers lors des confrontations avec la chose. Que ce soit à l'intérieur d'une cabine téléphonique ou d'une voiture, dans une chambre d'hôpital ou sous la bouche d'un évier, au plafond d'un cinéma ou encore dans les sous-sols de conduits, le Blob se faufile et s'infiltre dans chaque recoin avec une sagacité redoutable ! Car plus elle ingurgite de victimes, plus sa masse protéiforme s'amplifie ! Néanmoins, cette germe tueuse venue de l'espace par la faute de l'homme possède une faille, celle de ne pas supporter la température extrême du froid. Alors qu'un couple d'adolescents à la fois attachants, réfléchis et débrouillards (une fois n'est pas coutume au sein du moule de la série B de Samedi soir !) tentera d'avertir les autorités et la population du danger exponentiel, une équipe de confinement biologique (des bactériologues véreux) tentera de préserver la chose pour l'asservir en arme de guerre au péril des citadins.


Attention au Blob, ça colle !
De par sa mise en scène rigoureusement nerveuse et son intrigue efficiente multipliant courses-poursuites, action explosive et scènes gores inventives sous le pilier d'un monstre d'un réalisme visqueux à couper au rasoir, le Blob parvient à divertir avec un savoir-faire artisanal débordant de générosité. A l'instar de ces remarquables trucages (j'insiste) adroitement peaufinés afin d'y caractériser l'horreur graphique ainsi que l'aspect dévastateur d'une gélatine rose d'une redoutable voracité. Enfin, le duo fraternel formé par les deux amants pugnaces (Kevin Dillon n'est autre que le frère de Matt Dillon dans une sobriété héroïque jamais outrée) contourne le stéréotype du teenager écervelé avec une dose d'humanité lestement intègre. Un modèle de série B n'ayant pas pris une ride (à 2/3 plans cheap près).

*Bruno
26.04.23. 4èx
24.10.13. 

mercredi 23 octobre 2013

Mother's Day

                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site backtothemovieposters.blogspot.com

de Charles Kaufman. 1980. 1h31. U.S.A. Avec Nancy Hendrickson, Deborah Luce, Tiana Pierce, Holden McGuire, Billy Ray McQuade, Robert Collins, Rose Ross.

Sortie salles U.S: Septembre 1980

FILMOGRAPHIE: Charles Kaufman est un réalisateur, producteur et scénariste américain. Il est le frère du producteur de la firme Troma. 1977: The Secret Dreams of Mona. 1980: Mother's Day. 1982: Ferocious Female Freedom Fighters? 1985: When Nature Calls. 1988: Jakarta.


"Mother’s Day : la tendresse crasse d’une mère indigne".
Hit vidéo des années 80, Mother’s Day fit les beaux jours des fantasticophiles friands de bandes horrifiques décomplexées. Et si aujourd’hui cette bisserie estampillée Troma a un peu sombré dans l’oubli, on se surprend encore de l’efficacité de ce concept familial soumis à un survival aussi brutal que sardonique.

Le pitch : trois amies célibataires s’offrent un week-end bucolique en camping sauvage. La nuit tombée, elles tombent sur une bande de rednecks affamés de violence. Surexcités par leurs trophées vivants, ces brutes les livrent aussitôt à leur génitrice.

D’entrée, le ton est donné : impossible d’oublier ce prologue goguenard, où un jeune couple paie le prix d’une panne simulée. À l’orée du sentier forestier, deux hommes masqués surgissent, les prennent en chasse : décapitation sèche du pauvre hère, passage à tabac de la fille sous nos yeux — et, face à cette tuerie, une mamie hilare applaudit, tout sourire, les exploits de ses rejetons. Fondu au noir : générique. Bienvenue chez Mother’s Day, dont le titre seul est déjà une blague de mauvais goût. Par le prisme du psycho-killer couplé au survival, Charles Kaufman orchestre une farce sanglante, bardée de clichés empruntés aux bandes déviantes seventies (Massacre à la Tronçonneuse, La Colline a des Yeux) et au phénomène Vendredi 13, sorti quatre mois plus tôt.

Si les personnages potaches (mais attachants) et les situations attendues foisonnent durant la première demi-heure, la suite bascule dans un spectacle cartoonesque, bête et méchant — pour ne pas dire jouissif. Héritier des séries B d’exploitation, Mother’s Day aligne viols, sévices et humiliations comme un calvaire grotesque pour nos trois héroïnes. Cloîtrées dans une bicoque infecte, noyée sous les télés, les déchets et la junk food, elles s’acharnent à s’évader, soudées par leur sororité. L’intrigue, classique, vaut surtout pour le portrait délirant du trio familial : deux crétins gavés de pub, de télé et de malbouffe, dressés à la dure par une rombière narcissique qui les mène à la baguette pour mieux sacrifier les égarés. Leur entraînement spartiate est d’ailleurs un sommet d’ironie crasse, quand ils rivalisent d’acrobaties sous l’œil humide de fierté maternelle.

Pour relancer le survival, Kaufman entremêle courses-poursuites dans les bois et bascule vers un rape and revenge émaillé de soubresauts empathiques (le sort tragique de l’une des victimes). À bout de nerfs et de chair, les filles organisent une vengeance d’une sauvagerie animale : hache dans les testicules, aiguille dans le cou, acide dans le gosier, téléviseur encastré dans la tronche, strangulation, charcutage au couteau électrique ! Autant dire que la cruauté fuse à un rythme de dessin animé furieux, jouant la catharsis à pleine puissance. Et dans ce déferlement, l’amitié brute, la rage sororale, la revanche viscérale se cristallisent en un dernier feu d’artifice de bestialité libératrice.


"Quand Maman applaudit le carnage".
Porté par sa folie potache inégalable, Mother’s Day se croque comme une sucrerie empoisonnée : l’humour noir du clan dégénéré, la cohésion éreintée de ses proies, la satire viciée d’une Amérique sous perfusion de pop culture en font un petit monument d’irrévérence, méchamment subversif et joyeusement immoral. On osera dire qu’il compte parmi les psycho-killers les plus finauds et inattendus de l’ère 80.
À réserver aux estomacs lestés.
 
Bruno
11/08/18. 6èx
23.10.13. 

Jaquette Vhs appartenant au site l'Antre de l'horreur

Gravity

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site comingsoon.net

de Alfonso Cuaro. 2013. U.S.A/Angleterre. 1h31. Avec Sandra Bullock, George Clooney, Ed Harris.

Sortie salles France: 23 Octobre 2013. U.S: 4 Octobre 2013

FILMOGRAPHIE: Alfonso Cuaro est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur mexicain, né le 28 Novembre 1961 à Mexico. 1991: Solo con tu pareja. 1995: Le Petite Princesse. 1998: De Grandes Espérances. 2001: Y tu mama tambien. 2004: Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban. 2006: Les Fils de l'Homme. 2013: Gravity.


Repoussant les limites du réalisme au cinéma, Gravity marque un nouvel échelon au sein du space opera dans une forme minimaliste réfutant la surenchère traditionnelle. Nous sommes donc ici à contre-emploi des blockbusters lucratifs conçus pour épater le public ado friand de batailles intergalactiques. Ici, c'est une invitation au voyage en apesanteur auquel nous participons de plein gré. Une contemplation de notre système stellaire tel que nous ne l'avions jamais observé auparavant ! Qui plus est, avec l'entremise du relief, ce procédé perfectible n'aura jamais été aussi inhérent afin de s'immiscer dans l'action où l'immensité de l'espace, la structure détaillée des navettes fissiles ainsi que les pluies fortuites de projectiles déploient une profondeur de champ irréelle !


Ainsi, à travers la survie d'une astronaute perdue au milieu de l'infini, sévèrement perturbée par moult incidents techniques et intempéries de particules, Alfonso Cuaro nous entraîne dans une dérive cauchemardesque où la tension s'avère toujours plus expressive ! Car 1h30 durant, nous sommes immergés dans la conscience fébrile de Ryan Stone, doctoresse préalablement meurtrie par le deuil accidentel de sa fille et prise de marasme lorsque le manque d'oxygène de sa combinaison s'y fait sentir. A travers son cheminement personnel partagé entre l'instinct de survie et le désir du sacrifice, le réalisateur célèbre le courage et le dépassement de soi. La capacité psychologique de pouvoir se relever en désespoir de cause et obstruer ses pensées les plus noires, notamment la dignité du baroud d'honneur pour la reconquête d'une vie terrestre. Bouleversante quand elle livre ses confidences morales face à notre témoignage ou devant son poste émetteur en guise de solitude, Sandra Bullock livre une interprétation viscérale à coeur ouvert. La puissance émotionnelle qui émane de son désespoir existentiel et sa volonté de déjouer son défaitisme nous accablant d'une manière d'autant plus intimiste que personne ne peut lui venir en aide au coeur de cet abyme mutique.


Alone
Prouesse technique et visuelle étourdissante de virtuosité à tel point que certaines images anthologiques confinent au vertige (les astronautes incessamment livrés au vide de l'apesanteur) ou à la claustration suffocante (l'intérieur des sas auquel Ryan est contrainte de se blottir), Gravity exalte le lyrisme poétique d'un cinéaste entièrement voué à l'humanité de son personnage. Confrontés à un enjeu de survie redoublant de vicissitudes mortelles, Alfonso Cuaro nous fait participer à une expérience cinématographique sensitive, nouveau langage expérimental établi via une caméra amovible. Et de porter à l'édifice un magnifique portrait de femme fragile où la dernière image, symbolique, nous déchire le coeur de par son onirisme naturaliste.  

23.10.13
Bruno Matéï

    

mardi 22 octobre 2013

Ne vous retournez pas / Don't look now

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site movieramblings.com

de Nicolas Roeg. 1973. Angleterre/Italie. 1h50. Avec Donald Sutherland, Julie Christie, Hilary Mason, Clelia Matania, Massimo Serato, Renato Scarpa.

Sortie salles France: 18 Septembre 1974

FILMOGRAPHIE: Nicolas Roeg est un réalisateur anglais et directeur de photo, né le 15 Août 1928 à Londres. 1970: Performance. 1971: La Randonnée. 1973: Ne vous retournez pas. 1976: l'Homme qui venait d'ailleurs. 1980: Enquête sur une passion. 1984: Eureka, 1985: Insignificance. 1986: Castaway. 1988: Track 29. 1990: Les Sorcières. 1991: Cold Heaven. 1995: Two Deaths. 2007: Puffball.


Pierre angulaire du fantastique cérébral, Ne Vous retournez pas est l'une des rares expériences cinématographiques à avoir su transcender l'inquiétude oppressante de manière éthérée si bien que nos sentiments troubles se laissent voguer au rythme d'une intrigue latente perpétuellement envoûtante. A contrario de son point d'orgue terrifiant culminant vers un meurtre graphique à la vision d'effroi, Nicolas Roeg brode une intrigue machiavélique où la (hantise de la) mort, le faux semblant et la prémonition s'avèrent les thèmes essentiels de cette excursion avec le mysticisme. Car par l'entremise du prélude traumatique auquel une fillette en manteau rouge vient de perdre la vie en se noyant dans une rivière, Ne vous retournez pas suit le cheminement des parents endeuillés au sein de la ville spectrale de Venise.


Ainsi, à travers une photo naturaliste, c'est un véritable voyage touristique que le réalisateur nous guide parmi la présence de citadins instinctivement craintifs de présence étrangère. Dans cette région mutique aux ruelles obscures, John et Laura Baxter établiront la connaissance de deux soeurs décaties dont l'une s'avère médium. Réfractaire à l'existence d'un au-delà alors qu'au moment de la mort de sa fille un présage inscrit sur une diapositive se révéla à lui, John se retrouve confronté à son scepticisme face au témoignage d'incidents alarmistes. De son côté, sa femme Laura se réconforte dans les bras de l'extralucide après avoir appris que sa fille se trouve en harmonie dans un au-delà serein. Néanmoins, un avertissement divinatoire les mettra en garde pour le sort de John. Tandis que ce dernier sera nouveau être témoin d'une étrange vision (sa propre femme vêtue de noir en compagnie des soeurs inséparables), un mystérieux tueur accoutré d'une capuche rouge perpétue ses crimes dans les parages.


La peur innée de la mort, notre questionnement sur l'existence d'un "ailleurs", la paranoïa s'insinuant dans notre fragilité lorsqu'un deuil familial vient de nous accabler, Nicolas Roeg traite ces thèmes avec un pouvoir de suggestion aussi trouble qu'hypnotique. Sa mise en scène avisée et expérimentale, exploitant à merveille le cadre touristique d'un Venise diaphane, s'enrichit d'un montage rigoureux afin de nous perturber les sens entre présent, passé et futur. Qui plus est, le jeu viscéral du couple Julie Christie / Donald Sutherland (à l'instar de leur étreinte charnelle où l'érotisme ne fut jamais aussi virginal à l'écran) agrémente un climat sensitif où nos facultés semblent délibérément s'abandonner à l'alchimie créatrice du cinéaste. Errance obsédante avec l'insolite d'une réalité indécise, balade crépusculaire avec la mort et ses prémonitions, Ne vous retournez pas s'accapare de notre psyché à la manière sensorielle du paternel rongé par son deuil filial. Ainsi, à travers son parcours introspectif (auquel il est aussi permis d'évoquer le rêve de sa culpabilité), Nicolas Roeg évoque une réflexion spirituelle sur l'angoisse de l'inconnu, sur l'illusion de notre réalité ("rien n'est ce qu'il semble être") et sur la force de l'intuition en interne d'un cauchemar insurmontable.

*Bruno
31.05.24. 4èx. Vostfr
22.10.13.