Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com
de Lucio Fulci. 1969. Italie. 1h48. Avec Jean Sorel, Marisa Mell, Elsa Martinelli, Alberto de Mendoza, John Ireland, Riccardo Cucciolla, Bill Vanders, Franco Balducci, Giuseppe Addobbati...
Sortie en France le 21 Août 1970. U.S.A: Avril 1973.
FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Lucio Fulci est un réalisateur, scénariste et acteur italien, né le 17 juin 1927 à Rome où il est mort le 13 mars 1996. 1966: Le Temps du Massacre, 1969: Perversion Story, 1969 : Liens d'amour et de sang, 1971: Le Venin de la peur, 1972 : La Longue Nuit de l'exorcisme, 1973: Croc Blanc, 1974 : Le Retour de Croc Blanc, 1977 : L'Emmurée vivante, 1980: La Guerre des Gangs, 1980: Frayeurs, 1981: Le Chat noir 1981: L'Au-delà, 1981: La Maison près du cimetière, 1982: L'Éventreur de New York , 1983: Conquest, 1984: 2072, les mercenaires du futur, 1984: Murder Rock, 1986 : L'Enchainé 1986 : Le Miel du diable, 1987 : Aenigma, 1988 : Quando Alice ruppe lo specchio, 1988 : les Fantômes de Sodome, 1990 : Un chat dans le cerveau, 1990 : Demonia, 1991 : Voix Profondes, 1991 : Porte du silence (la), 1997 : M.D.C. - Maschera di cera.
"A l'orée de sa carrière, Fulci s'improvise Hitchcock dans un thriller érotique au suspense en crescendo après avoir habilement jonglé avec le faux-semblant."
Sorti la même année que l'infortunée Béatrice Cenci (son oeuvre la plus personnelle qu'il chérit ouvertement), Lucio Fulci s'éloigne du genre historique pour entreprendre un thriller érotique avec Perversion Story. Une seconde oeuvre également passée inaperçu et resté inédite dans nos contrées jusqu'à ce que l'éditeur Le Chat qui Fume décide de l'exhumer en format Blu-Ray. Le Pitch: Georges Dumurier est un médecin infidèle depuis qu'il courtise une jeune photographe de mode, Jane. Un jour, sa femme gravement malade et asthmatique meurt dans des conditions mystérieuses. Rapidement, les soupçons se portent sur lui si bien qu'une assurance vie d'un million de dollars doit lui être légué. Un soir, il se retrouve dans un cabaret en compagnie de Jane et fait la connaissance fortuite d'une étrange strip-teaseuse ressemblant comme deux gouttes d'eau à sa défunte épouse. A l'instar de Mario bava, Lucio Fulci n'aura jamais pu bénéficier de son vivant les honneurs d'une notoriété méritante. Car lorsque l'on revoit ou découvre des films comme Le Venin de la peur, Béatrice Cenci, Le Temps du Massacre, le Miel du Diable, La Longue nuit de l'Exorcisme ou encore ce Perversion Story, on se rend bien compte que le maître du macabre n'était pas uniquement surdoué pour historiser sur pellicule le zombie putréfié afin de concourir sur les traces d'un Romero en consécration. Ainsi, en empruntant la voie du thriller à suspense mâtiné d'érotisme polisson, il nous narre scrupuleusement une diabolique machination auquel un médecin infidèle plongera irrésistiblement dans un traquenard qu'il n'eut pu prévoir.
Séduit par une strip-teaseuse ressemblant à s'y méprendre à son épouse décédée, Georges Dumurier et son amante Jane vont tenter de démêler le vrai du faux, le couple étant persuadé que Susan n'est pas morte asphyxiée par son asthme mais qu'elle aurait été volontairement tué. Par qui et pour quelle raison ? Dès lors, leur suspicion se porte sur cette jeune danseuse, Monica Weston, aguicheuse chevronnée dans l'art et la manière de séduire les beaux mâles nantis. Ce qui nous vaudra d'ailleurs de superbes séquences de coucherie stylisées d'une sensualité inhabituelle de la part de l'esthète de la tripaille. Il faut dire qu'en terme de mise en scène, le réalisateur déploie ici une virtuosité inspirante et consciencieuse. Tant auprès de la beauté épurée des décors de cabaret, de ces cadrages alambiqués (avec entre autre l'emploi du split screen) ou d'une direction d'acteurs mieux dirigée que d'habitude chez le maestro ! Ainsi, avec une mécanique de suspense parfaitement rodé, l'intrigue pernicieuse de Perversion Story ne nous laisse peu de répit à travers son cheminement investigateur titillant lestement les nerfs du spectateur lors d'une ultime course contre la montre pour la survie. A savoir qui est le véritable coupable au sein de cet enjeu d'héritage compromis par l'adultère d'amants véreux, chafouins ou instables. Bref, une galerie de personnages peu recommandables à travers leur commune hypocrisie de feindre et de séduire par souci d'ego, d'autorité, de cupidité.
Niveau cast, la ravissante Marisa Mell insuffle avec provocation une sensualité torride de par sa posture sexy et ses déhanchements charnels afin d'interpréter un double rôle de femme équivoque au charme reptilien. Un jeu en demi-teinte de vamp blonde dévergondée et de brune aigrie dénigrant davantage un époux à la fois absent et trompeur. Le français Jean Sorel lui dispute sobrement la vedette, et de manière antipathique, un mari infidèle affublé d'un regard renfrogné, alors qu'un piège est sur le point de se refermer sur ses frêles épaules. Et ce sans pouvoir bénéficier de l'aide potentielle de son frère cadet (excellemment campé par Alberto De Mendoza) exerçant jalousement ses activités médicales au sein du même cabinet.
Servie d'une musique jazzy de Riz Ortolani stylisant une ambiance policière mêlée de séduction et d'étrangeté, Perversion Story est à nouveau une réussite méconnue de la part de Lucio Fulci fignolant son énigme Hitchcockienne à l'aide d'une science du suspense en crescendo (l'ultime demi-heure jouant remarquablement avec nos nerfs avant son revirement final ébouriffant). Réalisé à l'aube d'une riche carrière, Perversion Story démontrait donc déjà le talent prometteur de Lucio Fulci exploitant ici intelligemment le thriller érotique avec une pointe de dérive macabre (le cadavre putrescent de Susan que l'on observe à 2 reprises sur le brancard, tout du moins dans sa version intégrale).
*Eric Binford
19.01.22. vf
17.03.11. 595 v