Sortie salles France: 21 Octobre 2009
FILMOGRAPHIE: Karyn K. Kusama, née le 21 mars 1968 à Brooklyn, est une scénariste et réalisatrice américaine pour le cinéma et la télévision. 2000 : Girlfight. 2005 : Æon Flux. 2007 : The L Word (série télévisée) épisode 4-10 Little Boy Blue. 2009 : Jennifer's Body. 2015 : The Invitation. 2017 : XX pour le segment Her Only Living Son. 2018 : Destroyer.
Il m'aura suffit d'écouter les allégations optimistes d'une youtubeuse (reluquée en guise d'ennui, j'avoue) et d'y lire quelques articles US aussi convaincus issus du site Wikipedia (voir en fin de chronique) pour me laisser à nouveau tenter par la déception (ou plutôt le déceptif = trompeur) Jennifer's Body que tout le monde, ou presque, bouda lors de sa sortie, faute à une promotion biaisée uniquement bâtie sur le sex-appeal de la star bankable, Megan Fox. Ainsi donc, à la revoyure, et sans me laisser influencer par une démotivation défaitiste, quelle fut ma "réelle" surprise de me (re)plonger dans ce teen movie horrifique beaucoup plus profond, humain, intelligent et original qu'il n'y parait. Sans compter le talent commun de ces comédiens qui existent par eux mêmes sans se laisser piéger par l'ombre du stéréotype. Si bien que sous couvert de divertissement faussement consensuel (suffit de repérer une quantité de dialogues plutôt crus en prime d'être ciselés, inventifs, sarcastiques), la réalisatrice Karyn K. Kusama nous façonne les fascinants portraits de 2 lycéennes antinomiques en voie de rébellion contre la gente masculine. L'une étant une pétasse vaniteuse et superficielle, faute de son apparence élégamment torride, allumeuse n'ayant d'autre but que de plaire à tous prix au plus grand nombre. L'autre sa meilleure amie autrement réservée et timorée mais éprise de fascination pour celle que tous les garçons s'arrachent en guise de coucherie d'un soir au moment de découvrir la sexualité avec son petit ami. Esthétiquement soigné, pour ne pas dire alambiqué, à chaque plan, avec son lot de séquences étonnamment oniriques (on est parfois à la lisière du conte et de la féerie macabre), Jennifer's Body n'a aucune peine pour nous conter avec autant de sincérité que d'amour et d'attention un récit horrifique à suspense ponctué de séquences chocs redoutablement efficaces.
Tant auprès de la qualité numérique de ses FX saillants que de son gore à la fois baroque, érotisant et décomplexé (tout du moins dans la version Uncut rallongée de 5 minutes). Mais outre sa structure narrative soigneusement planifiée auquel nous nous immergeons facilement de par l'identification des personnages, on se passionne donc pour ses attachants profils de lycéennes torturées et revanchardes partagées entre malaise existentiel et peur de la sexualité (les thèmes du harcèlement sexuel et du viol adoptant aujourd'hui un écho beaucoup plus amer par son actualité contemporaine faisant écho au mouvement Me Too) en dépit de leur langage grossier à se prétendre autrement provocatrices aux yeux des mâles. Le récit accordant autant d'intérêt à la conversion de Megan Fox en succube punitive que de passion pour la fragilité attendrie de la modeste Anita (Amanda Seyfried) en proie à une remise en question finale inopinément subversive, pour ne pas dire immorale. Megan Fox demeurant sobrement convaincante en démone de l'enfer lestement habitée par ses pulsions sexuelles dévastatrices alors qu'au préalable elle cultiva un flegme autrement séducteur pour réconforter ses proies et les dévorer. En tout état de cause, l'actrice se fond personnellement dans l'auto-dérision avec un franc naturel parfois même troublant ou autrement fulgurant, notamment auprès de séquences de lévitation magnifiquement réalistes pour nous plonger dans son introspection sataniste métaphorique. Quand bien même Amanda Seyfried fait preuve de recul et de maturité pour sa sagesse humaniste au moment de se laisser vaincre par sa curiosité, sa remise en question morale, ses interrogations à reconsidérer sa meilleure amie de par son humanisme à la fois fébrile, contrariée eu égard de son témoignage prescient d'assister aux éléments dévastateurs d'un surnaturel épuré.
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