Sortie salles France: 17 Mai 1995. U.S: 15 Décembre 1995 (Int - 17 ans)
FILMOGRAPHIE: Jean Pierre Jeunet est un réalisateur et scénariste français né le 3 Septembre 1953 à Roanne, Loire. 1978: l'Evasion (court), 1980: Le Manège (animation de marionnettes), 1981: Le Bunker de la dernière rafalle (court 26 mns coréalisé avec Marc Caro), 1984: Pas de repos pour Billy Brakko (court), 1989: Foutaises, 1991: Delicatessen (coréalisé avec Marc Caro), 1995: La Cité des Enfants perdues (coréalisé avec Marc Caro), 1997: Alien, la Résurrection, 2001: Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, 2004: Un Long Dimanche de Fiançailles, 2009: Micmacs à Tire-larigot. 2013: L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spive. 2022 : Big Bug (Netflix)
Spectacle hallucinant de virtuosité formelle, comme on n’en compte que sur les doigts d’une main dans le paysage (souvent trop imberbe) du cinéma français, La Cité des Enfants perdus est un chef-d’œuvre du fantastique auteurisant, doublé d’une expérience sensorielle capiteuse. Le genre d’écrin indémodable qui trône aux côtés des référentiels : La Belle et la Bête, Les Yeux sans Visage, Les Visiteurs du Soir, La Beauté du Diable, Les Doigts du Diable ou encore Orphée. L’un des films fantastiques les plus génialement décorés qui soient, à l’égal d’un Blade Runner, d’un The Crow ou du Brazil de Terry Gilliam.
À la revoyure, au-delà de sa facture aqueuse à damner un saint (on reste indubitablement hanté bien après le générique), ce qui stupéfie, c’est la synergie des genres que le duo alchimiste - euphémisme - Jeunet / Caro juxtapose avec une audace inconcevable aujourd’hui. Or qu’on ne s’y trompe pas : La Cité des Enfants perdus n’est en rien un spectacle « tous publics », contrairement à ce qu’osa, inexplicablement, sa sortie en salles française. Outre-Atlantique, il fut interdit aux moins de 17 ans ; outre-Manche, aux moins de 13. Et pour cause : la cruauté de certaines séquences, impliquant des enfants terrorisés jusqu’aux larmes, heurte de plein fouet par son réalisme glaçant - au point d’en oublier l’outil cinématographique lui-même.
Nos cinéastes, en pleine possession de leurs moyens démesurés, nous brodent un conte cauchemardesque d’une sidérante fulgurance formelle (j’insiste), technique et narrative. Une aventure indicible, impossible à absorber en un seul visionnage. L’ambiance irréelle - à la fois candide, féérique, malsaine, dérangeante, asphyxiante, déstabilisante - nous hypnotise les sens, tant les idées les plus folingues fusionnent sans répit, portées par des personnages lunaires surgis d’une quatrième dimension connectée aux rêves. Thématique centrale d’un récit métaphorique (irracontable !), déclaration d’amour à la chimère, à ce besoin irrépressible de rêver pour s’évader et rester en vie, doublé d’un hymne au fantastique que les auteurs impriment de leur talent inusité, avec une audace souvent saugrenue.
D’où cette étrange sensation, ce fascinant sentiment d’avoir traversé une expérience émotionnelle assez rigoureuse pour dépasser l’illusion cinématographique - avec une intensité transie d’émoi. Et dans ce maelstrom d’images, aussi ubuesques que dantesques (où se croisent Browning, Cocteau, Prévert, Gilliam, Lynch), on reste hanté, martelé, commotionné par cette odyssée fantasmagorique qui dépasse les limites de l’imagination la plus insolente.
Récompenses:
César 1996 : César des meilleurs décors pour Jean Rabasse.
Éditeurs de sons de films 1996 :
Prix de la bobine d'or du meilleur montage sonore dans un film en langue étrangère pour Vincent Arnardi, Pierre Excoffier et Laurent Kossayan.
Prix 20/20 (20/20 Awards) 2016 :
Felix du meilleur film en langue étrangère
Felix de la meilleure photographie pour Darius Khondji,
Felix des meilleurs costumes pour Jean-Paul Gaultier.