The Mission de Roland Joffé. 1986. U.S.A./Angleterre. 2H05. Avec Robert De Niro, Jeremy Irons, Ray McAnally, Aidan Quinn, Cherie Lunghi, Ronald Pickup, Chuck Low, Liam Neeson, Bercelio Moya, Sigifredo Ismare...
Date de Sortie : France: 01 octobre 1986, U.S.A: 31 octobre 1986
FILMOGRAPHIE: Roland Joffé est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur né le 17 Novembre 1945 à Kensington (Angleterre).
La Déchirure (1984), Mission (1986), Les Maitres de l'ombre (1989), La Cité de la joie (1992), Super Mario Bros. (uncredited, 1993), les Amants du nouveau monde (1995), Goodbye Lover (1999), Vatel (2000), Captivity (2007), You and I (2010), There Be Dragons (2010), Singularity (2011)
"Et donc, Votre sainteté... vos prêtres sont morts... et moi... vivant. Mais à la vérité, c'est moi qui suis mort... tandis qu'ils sont vivants. Car il en va toujours ainsi, Votre sainteté. L'esprit des morts survit... dans la mémoire des vivants ". Cardinal Altamirano.
Deux après son chef-d'oeuvre La Déchirure, Roland Joffé s'accapare une fois de plus d'un contexte historique pour nous retracer la sanglante destinée d'un peuple indien, les Garanis, chassés de leur nouveau territoire par l'armée portugaise et espagnole.
Au 18è siècle, en Amérique du Sud, les jésuites tente de ramener la foi au peuple indien dans une mission divine et ainsi les protéger de l'intolérance brutale des colons portugais et espagnols.
Le prêtre Gabriel réussit à établir une confiance auprès de la tribu par une approche musicale.
Bientôt, il décide de convertir un ancien mercenaire, Mendoza, trafiquant d'esclave, rongé par le remord car responsable de la mort de son frère durant un duel pour une idylle amoureuse.
Ensemble, ils vont tenter d'apporter la paix commune et tenter de convaincre leurs autorités pernicieuses fermement décidées à combattre par le sang ces amérindiens s'ils ne quittent pas les lieux après leur fugace trêve.
Dès la séquence introductive, nous sommes interpellés par la beauté limpide d'images grandioses mises en exergue dans l'immensité d'une nature sauvage et hostile. Un jésuite est ligoté à la manière du Christ sur une croix de bois par les indiens pour le laisser naviguer contre son gré dans des eaux sauvages avant de s'écrouler dans les chutes d'Iguaçu. D'ailleurs, l'affiche symbolique du film va immortaliser cette grandiose scène-clef qui semble indiquer de manière allégorique la chute du pouvoir autoritaire de l'église, sitôt le final lapidaire clôt !
D'une beauté plastique pastel immaculée en accord avec la nature environnante et bercé par la docile mélodie du grand Ennio Morricone, Roland Joffé nous retrace avec souci de réalisme le combat légitime des jésuites voués à la cause des indiens considérés par l'empire colonial européen comme des esclaves, des incultes, tels des animaux sauvages qu'il faut envisager de bannir et éradiquer.
La religion manipulée et influencée par les hauts pouvoirs de l'état est ici pointée du doigt par la représentation peu flatteuse du cardinal espagnol Altamirano. Un homme de foi venu rendre visite au travail pacifiste accompli par Gabriel et ses disciples, observant avec intérêt la vie paisible des indiens qui n'ont rien d'hostile ou de répréhensible.
Mais l'accord établi entre les portugais et les espagnols pour le partage des terres oblige le cardinal à ordonner à ces confrères jésuites de quitter leur mission et demander aux indiens d'évacuer les environs.
S'ensuit alors une guerre sans merci entre une poignée de jésuites décidés à défendre l'autonomie indienne contre l'armée intransigeante à exterminer cette ethnie stigmatisée.
Le film remarquablement structuré dans une mise en scène sobre et épurée narre l'histoire de deux personnages impliqués dans la chrétienté mais qui vont devoir se retourner contre leur leader pour combattre l'injustice et l'oppression, revendiquée ici par le colonialisme totalitaire.
Jeremy Irons interprète à la perfection un personnage de l'église empli de sagesse et de raison équitable (de prime abord) dans sa quête pacifiste de reconvertir les indiens à la religion catholique.
Alors que sa foi spirituelle sera finalement sévèrement remise en doute par la cause infondée, tendancieuse d'un cardinal corrompu.
Gabriel, respectable catholique dubitatif, sera alors déprécié par sa profession bafouée, compromise par son gouvernement intolérant.
Robert De Niro apporte autant de conviction dans son personnage en demi-teinte de mercenaire repenti à la foi de la résolution. Une rédemption approuvée qui rachète son pêcher de marchand d'esclave et de criminel vindicatif dans son acte gratuit d'avoir causé la mort de son frère pour une romance jalousée.
L'acteur rebelle inscrit également en ultime baroud d'honneur une belle émotion poignante dans son exutoire à sauver la vie de ceux qu'ils combattaient dans sa vie antérieure galvaudée par le crime gratuit et l'intolérance. La posture moribonde, le regard escompté qu'il adresse envers Gabriel dans une expression dépitée et accablée font partis des séquences les plus fortes et émouvantes d'un film essentiel, rempli d'humilité pour le peuple indien destitué.
A travers le récit véridique d'une triste page de notre histoire fustigeant le pouvoir colonialiste espagnol et portugais négocié parmi les doctrines religieuses sous influence, Roland Joffé offre un hommage poignant à ces jésuites qui auront su faire preuve de courage et de morale légitime dans leur quête de redéfinir le sens de la justice, de l'honneur et de la tolérance. Dans leur chétif espoir de s'opposer contre l'armée pour défendre la vie de centaines d'innocents étrangers, condamnés à une mort certaine.
Son final opaque et peu glorieux envenime une profonde amertume quand à la conscience humaine davantage corrompue dans sa quête mesquine du pouvoir par l'occupation, la domination politique et l'exploitation économique d'un pays par un autre.
Un constat social éhonté d'autant plus nauséeux que de nos jours, les ethnies encore existantes ne survivent plus à cause de la déforestation liée à la société de consommation expansive par l'économie florissante d'un pays.
Récompenses: Palme d'or au festival de Cannes 1986
BAFTA Awards, 1987 Ennio Morricone, Jim Clark, Ray McAnally
Oscar de la meilleur photographie en 1987.
NOTE: Le film a en grande partie été tourné au Parc national d'Iguaçu en Argentine.
La plupart des membres de l'équipe ont contracté la dysenterie pendant le tournage. Robert De Niro est l'un des seuls à ne pas en avoir souffert.
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