jeudi 3 juin 2021

Trois jours et une vie

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Nicolas Boukhrief. 2019. France. 2h00. Avec Sandrine Bonnaire, Charles Berling, Jérémie Senez, Pablo Pauly, Philippe Torreton, Margot Bancilhon, Dimitri Storoge

Sortie salles France: 18 Septembre 2019

FILMOGRAPHIE: Nicolas Boukhrief est un réalisateur et scénariste français né le 4 juin 1963 à Antibes. 1995 : Va mourire. 1998 : Le Plaisir (et ses petits tracas). 2003 : Le Convoyeur. 2008 : Cortex. 2009 : Gardiens de l'ordre. 2015 : Made in France. 2016 : La Confession. 2017 : Un ciel radieux (téléfilm). 2019 : Trois jours et une vie. 

“On ne force pas le secret. Ou le secret vient comme de lui-même à soi, ou bien le secret vous est interdit.”
Ancien fondateur de la sacro-sainte revue Starfix, Nicolas Boukhrief n'en finit plus de me surprendre à travers sa passionnante filmographie même s'il n'est pas reconnu comme l'un des plus brillants cinéastes français faute probable de son incursion dans le cinéma des genres que les bien-pensants ont tendance à discréditer par leur côté trop ludique, marginal et accessible. Ainsi, Trois jours et une vie ne déroge pas à la règle d'y conjuguer (si) efficacement drame psychologique et film noir à travers la disparition brutale d'un enfant auquel l'assassin reste introuvable. Et ce sur une période temporelle épouvantablement prolixe. On a d'ailleurs l'impression d'assister à 2 oeuvres en une si bien que lors de sa seconde partie le film noir prend toujours un peu plus le pas sur le drame psychologique au gré d'un suspense irritable que l'on ne cesse de redouter tout en acceptant l'inévitable châtiment à venir. Toujours aussi inspiré et affectionné à travers sa mise en scène chiadée, Nicolas Boukhrief se passionne pour ce qu'il filme avec un amour immodéré du travail stylisé. Mais pas que car celui-ci s'avère également un excellent directeur d'acteurs (dénué de diction théâtrale qui plus est !) à travers un cast irréprochable faisant intervenir 2 générations distinctes. 


Tant et si bien que le méconnu Pablo Pauly demeure tout bonnement brillant d'ambiguïté à exprimer ses émotions taiseuses et autrement chaleureuses (ses rapports étroits avec sa mère que campe dignement la tendre Sandrine Bonnaire !) dans sa nouvelle fonction de praticien au passé lourd de secret. Quand bien même la ravissante Margot Bancilhon lui partage la vedette avec un naturel fraîchement spontané en compagne sentimental, autrefois amie d'enfance d'Antoine qu'il n'eut jamais pu conquérir. C'est donc un drame épouvantable qui s'esquisse sans esbroufe sous nos yeux au sein d'un petit village nordiste soudainement accablé par le chagrin et l'incompréhension d'une disparition infantile. Sachez toutefois qu'en l'occurrence l'intérêt ne réside pas à tenter de dénicher l'identité du meurtrier puisque Nicolas Boukhrief nous le dévoile ouvertement après 15 minutes de métrage. Son ambition demeurant auprès des profils psychologiques de l'entourage du coupable auquel son passé finira par le rattraper au fil de rebondissements assez solides. Ce qui converge à un final terriblement déconcertant et frustrant puisque amoral et irrésolu, notamment en y observant de manière particulièrement dérangeante la complicité (tacite ou factuelle) de l'entourage du meurtrier acceptant de préserver le silence pour leur propre intérêt professionnel, sentimental ou familial. Et ce en faisant preuve d'une clémence que l'on peut inévitablement juger discutable selon la réflexion éthique du spectateur impliqué dans une connivence assez malsaine. 


Hantise.
Remarquablement mené et interprété sans faille, Trois jours et une vie risque de faire grincer des dents à une frange du public pour son final anti-manichéen que certains rejetteront assurément de manière disgracieuse. Quoiqu'il en soit, le voyage amoral mérite largement le détour (à défaut de sa destination équivoque) tant le récit, infiniment insidieux et vénéneux, ne cesse de captiver lors d'une chronologie constamment tendue. Un dernier mot sur la séquence (brièvement) catastrophiste d'une météo tempétueuse que Nicolas Boukhrief dirige de main de maître avec un réalisme effarant d'intensité cauchemardesque. Une scène crépusculaire anthologique tributaire de l'intrigue dramatique, aussi concise soit-elle, comparable à une pyrotechnie ricaine, l'outrance en moins. 

*Bruno

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