dimanche 27 février 2011

Anthropophagous / Anthropophagus / The Grim Reaper

         

de Joe d'Amato. Italie. 1980. 1h35. Avec Tisa Farrow, Saverio Vallone, Serena Grandi, Margaret Donnelly, Mark Bodin, Bob Larsen, Rubina Rey, Simone Baker, Mark Logan, George Eastman, Zora Kerova...

Sortie salle France: 20 janvier 1982Etats-Unis:  23 octobre 1981

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Joe d'Amato (né Aristide Massaccesi le 15 décembre 1936 à Rome, mort le 23 janvier 1999) est un réalisateur et scénariste italien. 1977 : Emanuelle in America, 1977 : Viol sous les tropiques, 1979: Buio Omega (Blue Holocaust), 1980: Anthropophagous, La Nuit Erotique des morts-vivants, Porno Holocaust, 1981: Horrible, 1982: 2020, Texas Gladiator, Caligula, la véritable histoire, Ator l'invincible, 1983: Le Gladiateur du futur.

"Je me rappelle avec un infini plaisir nostalgique la location de sa VHS chez mon meilleur ami Pascal (décédé depuis), un mercredi matin, alors que son père nous réprimandait vertement — on louait trop de films d’horreur, et lui les exécrait."

"L’Île aux morts : anatomie d’un cauchemar charognard".
En 1979, Joe D’Amato fonde sa propre société, Filmirage, pour produire Anthropophagous, un métrage fauché tourné en 16 mm, dont l’image sera ensuite gonflée en 35 pour son exploitation en salles. Pour l’élaboration du script, il partage la paternité avec son acteur fétiche, George Eastman (de son vrai nom Luigi Montefiori). Le film débarque en France le 20 janvier 1982, deux ans après sa sortie italienne, semant autant la stupeur que le scandale. Les critiques puritaines hurlent à la nausée, pendant que sa carrière lucrative en VHS renforce son aura de film maudit, à l’instar de son cousin cannibale, Cannibal Holocaust.

Le pitch :
Débarqués sur un archipel, un groupe de jeunes touristes tombe nez à nez avec un maniaque cannibale.

Réputé comme l’un des films les plus choquants des années 80, Anthropophagous doit sa légende noire à deux séquences proprement hallucinées : l’arrachage d’un fœtus encore vivant, dévoré sous nos yeux par l’anthropophage, et l’éventration de ce dernier, s’achevant dans une séquence d’autophagie barbare où il mastique ses propres entrailles. Délire pur, malsain, orgiaque — pour le plus grand plaisir des amateurs de pellicule faisandée. D’où cette tagline d’époque devenue mythique : « L’homme qui se mange lui-même ! »


Avec des moyens faméliques, un pitch linéaire et des comédiens limités (même si George Eastman et Tisa Farrow s’en sortent plus qu’honorablement), D’Amato mise tout sur une ambiance mortifère, tissée dans des décors malsains. Foyers blafards recelant des cadavres décrépis derrière des cloisons secrètes, forêts clairsemées vidées de toute faune, nécropoles nocturnes, caveaux reclus où se terre une aveugle dans un vieux tonneau. Même le repaire du tueur — un monument en ruines — est un sous-sol nécrosé, charnier silencieux, jonché d’ossements et de chairs en putréfaction. Pour amplifier cette déréliction, une partition dissonante, entre orgue funèbre et nappes électroniques stridentes, distille un malaise rampant. En matière d’atmosphère, D’Amato ne laisse pas de marbre, et même si l’intrigue minimaliste flirte avec le grotesque, elle renforce l’aspect ludique et dérangé du spectacle. En somme, six touristes jouent à cache-cache avec un ogre dégénéré sur une île moribonde, jusqu’à trouver refuge dans la maison familiale du monstre, sous le regard hagard de sa propre sœur. Le flash-back, lapidaire, nous dévoile la tragédie originelle ayant précipité cet homme dans la démence carnassière.


Provocateur impénitent, D’Amato n’éprouve aucun scrupule à exhiber ses effets chocs, vulgaires mais efficaces, multipliant les zooms crus sur les chairs suppliciées. Pourtant, Anthropophagous, aussi sanglant soit-il, n’est pas un festival de gore systématique : le cinéaste préfère miser sur l’étrangeté de son climat solaire (tout se déroule en plein jour), et sur la tension rampante à laquelle on adhère avec un plaisir presque masochiste. Le monstre — interprété par un George Eastman habité — surgit par touches, sa silhouette massive et son faciès lépreux imprégnant l’écran d’une terreur archaïque. Il évoque l’ogre de la forêt, celui qu’on murmure dans les contes au coin du feu, sous la menace du noir.


"L’homme qui se mange lui-même : mythe d’un ogre moderne".

Aussi maladroit qu’attachant, aussi bricolé qu’ensorcelant, Anthropophagous séduit par son irrévérence totale, son ambiance d’une noirceur malade et son esthétisme macabre de carte postale souillée. George Eastman est terrifiant, les décors suintent la mort, le score hypnotise, et les éclats gores parachèvent la mutation d’un produit Z en joyau putrescent, pure déviance italienne. Aujourd’hui, dans une époque ultra-conservatrice, aucun producteur ne prendrait le risque de pareille horreur. C’est dire à quel point cette bisserie demeure précieuse — vestige infect d’une époque révolue, où le cinéma osait cracher sur la bienséance et digérer ses propres tripes.
 
*Bruno
27.12.10
14.07.14
Octobre 2022. 4èx

La critique de Mathias Chaput:
Partant du gimmick culotté de "l'homme qui se mange lui même" (!) qui servira d'accroche au film et garant d'un immense succès suscité par la curiosité coupable des spectateurs, "Anthropophagous", outre un scénario qui tient à peu près la route, reste un monument dans le genre, déclinant effets gore nauséeux et atmosphère terrifiante !

George Eastman, de par son charisme, y est pour beaucoup dans la réussite du métrage, dont il a également écrit le scénario...

D'amato se fait plaisir et NOUS fait plaisir, le bougre se lâche, nous gratifiant de passages délirants et anxiogènes (la nuit de l'orage, la caverne du cannibale, les sous sols de la maison...) mais n'oublie jamais de prendre conscience du risque de l'impact que son film peut avoir...

Re(con)stituant une angoisse qui va crescendo, il met habilement en exergue des idées qui feront date (le miroir qui se brise, renfermant derrière lui une mini mausolée), l'exploitation de l'aura de l'archipel, comme un piège sournois qui enferme les pauvres gens ainsi que le spectateur, un microcosme glaçant et ultime où gravitent les "petites souris" avec le "chat", prédateur qui finira par les manger !

"Anthropophagous" est une gigantesque partie de cache-cache avec comme point d'orgue une issue salvatrice extrêmement gorasse, presque minimaliste !

Doté de trouvailles graphiques plus perverses et imaginatives les unes que les autres (le plan légendaire d'arrachage de foetus, fallait être fou pour oser un truc pareil !), se suivant avec attention et bénéficiant de rebondissements assez bienvenus dans son déroulement, "Anthropophagous" est un des piliers dans l'oeuvre de D'Amato et dans la continuité du cinéma gore italien, le bougre récidivant un an plus tard avec son "Rosso sangue" et allant encore plus loin dans le gore, celui ci étant un peu les prémices de son style...

Réservé à une poignée d'aficionados et pas du tout grand public, "Anthropophagous" ravira les cinéphages friands d'horreur déviante, les autres passeront leur chemin !

Le travail de BACH films sur le dvd est remarquable et les bonus avec l'immense Christophe Lemaire sont un pur régal !

Calibré pour une soirée pizza entre potes, "Anthropophagous" a le mérite de terrifier et de divertir en même temps, ce qui est louable !

Ne boudons pas notre plaisir et savourons ce film mythique !

Note : 8/10

2 commentaires:

  1. La première fois que j'ai vu film en vhs loué dans un vidéo club, je n'ai jamais réussi a voir le film en couleur :). Crois moi regarder Antropophagous en noir et blanc est une expérience un peu frustrante.

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  2. tres bon film in gore des tres bonne prise de vue sur le canibalisme et de mutilason merci Bruno Matéï pour ton pose sur le suger

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