vendredi 13 avril 2012

Creep


de Christopher Smith. 2004. Angleterre/Allemagne. 1h25. Avec Franka Potente, Vas Blackwood, Ken Campbell, Jeremy Sheffield, Paul Rattray, Kelly Scott, Sean Harris, Kathryn Gilfeather, Joe Anderson, Sean De Vrind.

Sortie salles France: 4 Mai 2005

FILMOGRAPHIE: Christopher Smith est un réalisateur et scénariste britannique, né le 16 Août 1970 à Bristol. 2004: Creep. 2006: Severance. 2009: Triangle. 2010: Black Death
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Pour le premier film d'un réalisateur anglais aujourd'hui reconnu, Creep possédait déjà suffisamment d'atouts pour convaincre l'amateur d'horreur avec ce survival cradingue illustrant les exactions d'un monstre réduit à l'état primitif. Dans la même veine que le Métro de la Mort de Gary Sherman, Creep reflète en outre une résonance sociale pour la caricature caustique d'une société individualiste dépréciant les laissés pour compte. Le PitchDans les sous-sols d'un métro de Londres, une jeune femme assoupie se retrouve seule après la fermeture des guichets. Alors qu'un train en circulation s'arrête sur une voie adjacente, l'un de ses collègues de travail y descend et tente de la violer. Mais une présence hostile tapie dans l'ombre s'en prend sauvagement à lui.
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Série B d'exploitation réalisée sans prétention avec un sens habile de l'angoisse diffuse, Creep tire sa force de par la verdeur d'une ambiance malsaine contrastant avec une photo criarde et le profil psychologique du tueur crapuleux, monstre de foire déshumanisé. D'un script éculé jalonné de situations rebattues, prétexte à scènes chocs cinglantes et suspense lattent, ce survival sardonique (le violeur débutant son acte sexuel alors que le tueur l'enverra ad patres sans restriction !) exploite pour autant à bon escient l'intérieur claustrophobique de ses décors opaques. Véritable dédale de vastes couloirs interminables, de bouches d'égout et conduits d'aération, le métro londonien s'avère ici un véritable piège à claustration pour nos survivants contraints de se planquer dans les endroits les plus étroits ou insalubres. 
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Emaillé de séquences terrifiantes (la 1ère apparition du tueur est un authentique moment d'effroi fortuit !) et agrémenté de séquences gores aussi acérées qu'explicites (le meurtre hors champ de la sdf se révèle pourtant insupportable auprès de sa crudité viscérale !), Creep transcende son scénario orthodoxe par sa manière habile à captiver le spectateur lors d'une mise en scène vigoureuse. Embrigadés dans les réseaux d'égout ou expérimentés sur le lit d'un labo médical rempli d'outils rubigineux, nos protagonistes sont contraints d'endurer une nuit d'effroi sous la tyrannie d'un tueur adepte de la torture sans anesthésie ! Si ce jeu du chat et de la souris se révèle haletant et davantage intense, c'est dans sa faculté à retranscrire un univers sordide régi par un tueur préalablement asservi d'un paternel sans vergogne, adepte de l'expérimentation chirurgicale. Un monstre impassible au regard stérile, contraint de se nourrir de chair humaine pour subvenir à ses besoins nutritifs. Ainsi, en jouant la carte du réalisme craspec, Christopher Smith s'efforce à nous authentifier cet être déshumanisé, truffé de tics convulsifs, couinant un cri laconique pour imposer sa hiérarchie autonome, déambulant d'une démarche dégingandée vers ses victimes déboussolées. Son corps meurtri lardé de contusions et cicatrices ainsi que son regard aigri dissimulant toutefois une forme de mélancolie évoquant donc le sentiment que ce monstre humilié et maltraité fut autrefois esclave d'un savant fou.
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Réalisé avec savoir-faire, parfois véritablement terrifiant et impressionnant de par ses effets-chocs révulsifs, Creep s'extrait du lot traditionnel du genre sous l'impulsion de son ambiance licencieuse et l'exploitation judicieuse de son décor ferroviaire. C'est également dans la caractérisation du tueur équivoque sans doute martyrisé par un passé tendancieux que Creep culmine son pouvoir morbide par le biais d'une misère humaine. Sans conteste, un des meilleurs films d'horreur des années 2000.

*Eric Binford
Un grand merci à dl4all.com
22.11.21. 
13.04.12
06.10.24. 4èx


jeudi 12 avril 2012

Alien, le 8è passager

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site zoom-cinema.fr

de Ridley Scott. 1979. U.S.A/Angleterre. 1h56. Avec Sigourney Weaver, Tom Skerritt, Veronica Cartwright, Harry Dean Stanton, John Hurt, Ian Holm, Yaphet Kotto, Bolaji Badejo, Helen Horton.

Sortie salles France: 12 Septembre 1979. U.S: 31 Octobre 2003

FILMOGRAPHIE (Info Wikipedia)Ridley Scott est un réalisateur et producteur britannique né le 30 Novembre 1937 à South Shields. 1977: Duellistes. 1979: Alien. 1982: Blade Runner. 1985: Legend. 1987: Traquée. 1989: Black Rain. 1991: Thelma et Louise. 1992: 1492: Christophe Colomb. 1995: Lame de fond. 1997: A Armes Egales. 2000: Gladiator. 2001: Hannibal. 2002: La Chute du faucon noir. 2003: Les Associés. 2005: Kingdom of heaven. 2006: Une Grande Année. 2007: American Gangster. 2008: Mensonges d'Etat. 2010: Robin des Bois. 2012: Prometheus.

 
"Dans l’ombre du Nostromo : Le Chant du Dragon Biomécanique".
1979 marque une année charnière dans le paysage de la science-fiction, quand un réalisateur novateur et avisé relève la gageure de réinterpréter l’icône du monstre mythologique. Influencé par La Planète des Vampires de Bava, Dark Star de Carpenter, et inspiré par le Ixtl — la créature du roman La Faune de l’espace d’A.E. Van Vogt Alien devient l’étendard d’un film d’anticipation à l’épouvante organique. Succès critique et public à sa sortie, ce chef-d’œuvre, au sens noble, fonde une saga illustre où ambitions formelles, techniques et narratives s’entrelacent au diapason.

Le pitch : à bord du Nostromo, une équipe de sept astronautes s’apprête à regagner la Terre. Mais leur ordinateur capte un signal inquiétant, les contraignant à se poser sur une planète hostile. Sur place, l’un d’eux est agressé par une forme organique inconnue. Cette créature, bâillonnée sur le visage de l’officier Kane, est ramenée à bord sous l’autorité d’Ash et contre l’avis du lieutenant Ellen L. Ripley. L’étrange parasite se libère, s’occulte dans les couloirs du Nostromo. Commence alors une traque implacable, sanglante, où les passagers se retrouvent persécutés par cette menace reproductive.


Dans l’espace, personne ne vous entend crier — tagline devenue culte — Ridley Scott s’engage dans la voie rare de l’anticipation horrifique, façonnant une créature atypique, gravée d’une pierre blanche. Avec un budget de 11 millions de dollars, il orchestre une armada de décors baroques sous la houlette de Michael Seymour. Souci du détail ornemental, effet documentaire : maître-mots d’un metteur en scène déterminé à traduire avec force et vérité un univers ombrageux sous l’architecture métallique d’une planète crépusculaire. Le pouvoir de fascination morose se concentre sur cet environnement anxiogène et l’aspect hybride du métamorphe reproductif — un monstre mesquin, pernicieux, traquant un à un les membres d’un équipage à bout de souffle, fuyant sous les conduits du vaisseau. Ainsi, angoisse palpable et sentiment d’impuissance se déploient dans le désarroi des protagonistes, démotivés par la facilité virulente de cette menace invisible. La mise en scène, tout entière au service de la suggestion, décuple le malaise dans les vastes recoins d’un dédale oppressant, labyrinthe de toutes les peurs.


Contrairement aux épisodes suivants, Alien se révèle un modèle d’intelligence dans son art du non-dit. Moins la créature est montrée, plus la menace grandit, palpable, latente. Les effets spéciaux et le design biomécanique de la créature, imaginés par H.R. Giger, forgent le caractère fascinant et singulier de cette œuvre. L’originalité réside dans la physionomie hétéroclite du mutant — pourtant peu présent à l’écran — et le décor sporadique d’une galaxie lointaine. Outre la partition évocatrice de Jerry Goldsmith, un bourdonnement récursif et un battement de cœur rythment à merveille l’appréhension feutrée au cœur du vaisseau, dominé par un dragon protéiforme.


"Le Passager de l’Angoisse : Naissance d’une Icône".
Jalonné de séquences anthologiques — l’humanoïde déchu de ses fonctions mécaniques, les mises à mort d’un vérisme cruel, l’alien jaillissant de l’estomac de John Hurt, traumatisme renforcé en 4K — Alien envoûte sans fioritures ni esbroufe. Sa rigueur formelle dessine un univers crédible, porté par des interprétations à la fois humaines et matures, tandis que Sigourney Weaver incarne l’héroïne en devenir, survivante pugnace, devenue icône.

*Bruno
19.08.24. Vostfr. 4k
12.04.12.


mercredi 11 avril 2012

ATROCIOUS

Photo empruntée sur Google, appartenant au site Cinemovies.fr
de Fernando Barreda Luna. Espagne/Mexique. 2010. 1h15. Avec Christian Valencia, Clara Moraleda, Chus Pereiro, Sergi Martin, Xavi Doz, Jose Masegosa

Sortie salles France: 17 Août 2011. 11 Avril 2012 (dvd et blu-ray)

FILMOGRAPHIE (Source IMDB)Fernando Barreda Luna est un réalisateur, scénariste, monteur, compositeur, né le 12 Juillet 1983 à Tampico, Tamaulipas, Mexique.
2009: Oscuridad
2010: Atrocius

Le found footage le plus nul de l'histoire du cinéma est ici !




mardi 10 avril 2012

Mondwest (Westworld)

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site www.cinemovies.fr

de Michael Chrichton. 1973. U.S.A. 1h29. Avec Yul Brynner, Richard Benjamin, James Brolin, Norman Bartold, Alan Oppenheimer, Victoria Shaw, Dick Van Patten, Linda Gaye Scott, Steve Franken.

Sortie salles France: 27 Février 1974. U.S: 21 Novembre 1973

FILMOGRAPHIE (source Wikipedia): Michael Chrichton est un écrivain, scénariste, producteur et réalisateur américain, né le 23 Octobre 1942, décédé le 4 Novembre 2008 à Los Angeles.
1972: Pursuit (télé-film inédit en France). 1973: Mondwest. 1978: Morts Suspectes. 1979: La Grande Attaque du Train d'or. 1981: Looker. 1984: Runaway, l'évadé du futur. 1989: Preuve à l'appui (Physical Evidence).
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Premier long-métrage du célèbre écrivain Michael Crichton, Mondwest s’impose en précurseur d’une lignée de blockbusters ricains : Génération Proteus, Terminator, Hardware, Robocop, Blade Runner... autant de rejetons légitimes. Récit d’anticipation fustigeant les dérives du progrès technologique, ce western hybride déploie son inquiétante étrangeté autour de la silhouette hiératique de l’illustre Yul Brynner

Le pitch : en villégiature, deux notables découvrent l’attraction inédite de Delos, un univers fantasmatique scindé en trois époques — Moyen Âge, Far West, Empire romain — reconstituées avec un réalisme scénique saisissant grâce à des humanoïdes plus vrais que nature. Mais alors que tout semblait réuni pour combler l'appétit d'exotisme de nos touristes rupins, les robots-figurants adoptent subitement un comportement vindicatif, échappant au contrôle de leurs créateurs....

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Qui n’a jamais fantasmé de séjourner dans une époque révolue pour s’immerger dans l’ordinaire d’un monde désormais obsolète ? Mondwest incarne l’utopie cinégénique de ces désirs ludiques les plus saugrenus. Pour divertir l’homme en mal de sensations nouvelles, Crichton imagine un parc révolutionnaire, où des vacanciers fortunés peuvent cohabiter avec des machines à visage humain. Dans des décors d’un réalisme troublant, il travestit les récits antiques en autant de péripéties homériques pour combler le touriste avide d’action : bagarres de saloon, évasions de prison, duels au pistolet et luxure tarifée. Mondwest se déguste alors comme une friandise acidulée avant de virer au cauchemar mécanique. Nos deux protagonistes machistes s’y enivrent d’un rêve d’enfant : incarner des cow-boys insolents basculant dans une marginalité criminelle, confrontés à un antagoniste de plus en plus arrogant. C’est dans cette armure glaciale que Yul Brynner crève l’écran — monolithique, impassible, déterminé à traquer, à éliminer, à éradiquer toute présence humaine dissimulée dans les recoins de Delos.
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Dans un premier temps, Crichton met en avant la jubilation régressive d’un monde sans conséquences, où l’homme peut assouvir ses fantasmes sans limites. Mais sous l’apparente innocuité des plaisirs mécaniques, il décortique la peur viscérale de l’homme confronté à un danger devenu tangible. Ces robots, simulacres de vie, brouillent les repères de nos héros désorientés, ivres d’orgueil et persuadés de leur suprématie. Leur vertige d’omnipotence les précipite dans une posture de criminels mégalomanes, avides d’une liberté factice. C’est alors que les androïdes, jusqu’ici serviles, décident de se rebeller, profitant d’une faille technologique inexpliquée. Le paradis artificiel se métamorphose en traque implacable. Et dans cet enfer débridé, un Terminator désaxé use de ruse et d'autonomie pour traquer, sans relâche, l’ultime survivant.

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Un monde où rien ne peut aller de tarvers
À la fois dépaysant et jouissif, mais insidieusement malsain, Mondwest se décline comme une bande dessinée vitriolée, où chaque péripétie excentrique autorise le spectateur complice à libérer son imaginaire baroudeur. À travers la lorgnette du cinéma d’anticipation, ce western baroque esquisse en filigrane les dangers d’une technologie incontrôlable, mise au service d’une élite consommatrice et arrogante. Transcendé par la prestance magnétique de Yul Brynner, Mondwest suscite un enthousiasme caustique, en même temps qu’un malaise persistant : le futur, ici, se trouve disqualifié par la promesse d’une perfection technique vouée à l’échec. Autrement dit, la perfection n’est pas pour demain...

Un grand merci à  www.cinemovies.fr 
10.04.12
Bruno Matéï

                                               

lundi 9 avril 2012

LIVIDE

Photo empruntée sur Google, appartenant au site critique-film.fr   
d'Alexandre Bustillo et Julien Maury. 2011. France. 1h28. Avec Loïc Berthezene, Serge Cabon, Chloé Coulloud, Béatrice Dalle, Catherine Jacob, Jérémy Kapone, Chloé Marcq, Félix Moati, Marie-Claude Pietragalla.

Sortie salles France: 7 Décembre 2011

FILMOGRAPHIE (Info Wikipedia): Alexandre Bustillo est un réalisateur et scénariste Français, né le 10 Août 1975 à Saint-cloud.
Julien Maury est un réalisateur et scénariste français.
2007: A l'Intérieur
2011: Livide
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Avertissement ! Cet hommage concerne l'avis subjectif d'un puriste amateur, amoureux de cinéma de genre, en toute indépendance. Il ne s'agit pas d'un plagiat. Toute analogie avec une critique d'un site spécifique ne serait que pure coïncidence.



Ca ne va pas faire plaisir à mon ami Bruno mais avec toute l'indulgence du monde, j'ai trouvé Livide pesant et ennuyeux. Fautes à une interprétation peu crédible et une structure narrative redondante (45 minutes pour illustrer de façon ombrageuse un cambriolage rébarbatif). Hormis une esthétique soignée découlant de certaines séquences d'une beauté macabre formelle et de la bonne intention des réalisateurs, Livide se morfond dans un cheminement ambitieux mais vain en tentant d'affilier le conte onirique et l'horreur grand-guignolesque (le délire final agrémenté d'Fx irréprochables tourne à vide par la cause d'un script maigrelet et de personnages jamais investis). A contrario, la séquence ultime se part d'un éclat gracile dans sa poésie féerique et la musique accordait aussi une tonalité appropriée ! 



Un grand merci à critique-film.fr
Bruno Matéï
09.04.12



jeudi 5 avril 2012

LES LOUBARDES (SWITCHBLADE SISTERS)

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmonpaper.com

de Jack Hill. 1975. U.S.A. 1h30. Avec Robbie Lee, Joanne Nail, Monica Gayle, Asher Brauner, Chase Newhart, Marlene Clark, Kitty Bruce, Janice Karman, Don Stark, Don Marino.

FILMOGRAPHIE (info wikipedia): Jack Hill est un réalisateur et scénariste américain, né le 28 Janvier 1933 à Los Angeles.
1959: The Wasp Woman. 1960: The Host. 1963: l'Halluciné. 1966: Mondo Keyhole. Blood Bath. 1968: Spider Baby. 1969: Pit Stop. 1970: Je suis une groupie. 1971: The big doll house. 1972: The bird bird cage. 1973: Coffy la panthère noire de Harlem. 1974: Foxy Brown. The Swinging Cheerleaders. 1975: Les Loubardes. 1982: Sorceress.
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Spécialiste du WIP et de la Blaxploitation, le vétéran Jack Hill réalise en 1975 un film d'action féministe dont les anti-héros se révèlent des lascardes effrontées, adeptes du maniement du couteau et des armes à feu. Pure bande dessinée décomplexée pour adultes, les Loubardes s'institue nanar fun volontairement primaire si bien que nos garçonnes opiniâtres crèvent l'écran dans leur conviction belliqueuse ! La guerre des clans fait rage entre une bande de garçons, les Silver Deb et un gang de filles, les Dagger Debs, dont leur nouvelle recrue, Maggie va venir s'interposer et semer la zizanie. Par la faute d'une duperie et d'une rancune compromise par Lace, la nouvelle égérie du groupe féministe se résout à enrôler une troupe de belligérantes afros pour combattre le clan des Silver Deb.
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Ca débute comme un WIP jalonné de combats de catch entre gardiennes et prisonnières coincées en interne de leur cellule et ça se termine par un règlement de compte sanglant où la cité urbaine, livrée à feu et à sang, est le cadre d'une guérilla sans merci entre bandes rivales ! Une forme de Justicier de New-York avant-gardiste avec l'armada de véhicule blindé, explosions dantesques et coups de mitraillettes pétaradants décimant trois antagonistes à la seconde ! La narration ultra simpliste n'est qu'un prétexte à étaler à intervalle régulier nombre d'affrontements frénétiques entre une bande de filles délurées et des machistes orgueilleux contrariés par leur insolence dissolue. Néanmoins, l'intrigue se focalise surtout sur la relation amicale puis tendue exercée par Lace et la nouvelle recrue, Maggie, experte en art de combattre l'adversaire au couteau ou à main nue. Par la cause perfide d'une comparse insidieuse et la mort du compagnon de Lace (chef des Silver Deb), Maggie va devoir s'opposer à l'autorité de son amie, déterminée à daigner l'assassiner. En prime, elle est contrainte de s'allier avec une troupe de femmes rebelles d'origine africaine pour combattre les mâles sévèrement brimés. Jack Hill, en habile faiseur d'action gentiment débridée nous façonne avec dérision une bisserie ultra caricaturale, transcendée par la prestance impertinente de comédiennes viriles pourvues de réparties corrosives !
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Fun, jouissif, coloré, terriblement niais et crétin, ce plaisir coupable ne laisse pas un instant de répit au spectateur embarqué dans une rixe où les femmes farouches ont le monopole de l'allégeance et les hommes violeurs sont réduits à des brutes antipathiques. On sera par contre surpris de la violence plus rigoureuse du final fortuit dans un combat exécuté à l'arme blanche par nos deux rivales indignées. Un affrontement particulièrement cru et sanglant résultant avec ironie vers une morale frondeuse dans son pied de nez gouailleur asséné aux forces de l'ordre. Pour tout amateur de nanar cartoonesque dédié au plaisir ludique de l'action échevelée, les Loubardes est un petit classique vintage rythmé au son de la Soul et du Funk.
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Dédicace à l'Antre du bis et de l'exploitation et un grand merci à Filmonpaper.com
Bruno Matéï
05.04.12



lundi 2 avril 2012

Billy the Kid vs Dracula


de William Beaudine. 1966. U.S.A. 1h13. Avec John Carradine, Chuck Courtney, Melinda Plowman, Virginia Christine, Walter Janovitz.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: William Beaudine est un acteur et réalisateur américain, né le 15 Janvier 1892 à New-York, décédé d'insuffisance rénale le 18 Mars 1970 à Canoga Park, en Californie. Il est surtout réputé pour ses films muets. 1960: Les 10 Audacieux. 1963: Lassie's Great Adventure. 1966: Jesse James contre Frankenstein. 1966: Billy the Kid versus Dracula. 1974: The Green Hornet. 1976: Fury of the Dragon. 


La même année que son inénarrable Jesse James contre Frankenstein, William Beaudine, spécialiste du cinémat muet (une centaine de titres à son effigie !), s'empare du mythe vampirique pour nous évoquer en l'occurrence la confrontation entre le célèbre bandit Billy the Kid et l'indéfectible Dracula, incarné ici par le vétéran John Carradine. Le PitchDans l'Ouest américain, Dracula a trouvé sa nouvelle proie auprès d'une ravissante fermière, propriétaire d'un ranch. Mais Billy The Kid, ancien bandit aujourd'hui reconverti dans la bienséance entend bien protéger sa dulcinée des griffes de l'intrépide chauve-souris ! Amateurs de séries Z impayables d'une niaiserie hallucinée, ce film est pour vous tant il procure durant son bref cheminement (1h13 !) moult situations risibles transcendées de la prestance cabotine d'interprètes désespérément persuasifs. Si bien qu'après avoir commis l'insensé Jesse James contre Frankenstein, William Beaudine s'intéresse au cas notable du vampire orgueilleux affublé de longues canines. Notre bon vieux Dracula parcourant aujourd'hui l'Ouest américain en y infligeant sur son chemin quelques morsures furtives à certains quidams imprudents. Ainsi, après avoir semé le désordre dans un camp indien, le prince des ténèbres s'installe dans la ville la plus proche après avoir entrevu le portrait d'une ravissante jeune blonde docile, propriétaire d'un ranch. Eperdument amoureux, il décide donc en guise d'alliance maritale d'en faire sa prochaine damnation et de l'isoler vers le refuge ténébreux d'une mine désaffectée afin d'y reposer en tranquillité.


La cocasserie de cette zèderie à la banalité accablante émane du soin apporté à la retranscription virile du western par des moyens techniques précaires néanmoins privilégiée de la photogénie de décors naturels bucoliques. Le caractère attachant des personnages, tous plus crétins les uns des autres (Billy le Kid est génialement altruiste dans sa posture loyale de cow-boy valeureux mais inculte et peu adroit !), les situations farfelues émanant de l'esprit bon enfant de protagonistes trouillards et l'interprétation saugrenue du génial John Carradine concourent de rendre l'aventure bougrement attractive pour tout amateur de délire infantile. Bourré d'incohérences et de non sens durant sa structure narrative sporadique, on se plait à suivre les vicissitudes de cette famille de paysans persécutés par un vampire particulièrement imbus ! Par conséquent, à l'instar d'un cartoon vintage au charme suranné, nous nous plaisons de suivre cette pantalonnade où tous les protagonistes davantage contrariés s'évertuent à s'inquiéter de la présence hostile du tyran mégalo. Car ici, Dracula en aristocrate dédaigneux se prétend tout permis pour s'approprier la propriété d'un ranch en créant la duperie et favoriser ainsi son ambition de vampiriser une godiche empotée. D'autant plus qu'il use régulièrement de façon finaude à se métamorphoser en chauve-souris (de pacotille) pour ainsi mieux éclipser sa présence sournoise face à ces adversaires. Qui plus est, le personnage de Billy le Kid doit aussi beaucoup au charme désuet qui émane de l'entreprise tant le comédien rivalise de naïveté et de bonhomie (il ne connaît pas la signification du mot "vampire" faute de n'avoir pu côtoyer les établissements scolaires !) à daigner combattre son antagoniste roublard.


En Dracula notoire, John Carradine se révèle impérial de ridicule tant il cabotine en diable pour tenter de nous terrifier par sa présence famélique, exacerbée d'un regard ahuri de yeux exorbitées ! Son tempérament vaniteux et sa désinvolture arrogante donnant lieu à des situations improbables irrésistibles d'ineptie. Il faut d'ailleurs le voir tenter imposer sa loi et sa ferme autorité face au désarroi de pauvres paysans, convaincus de son origine maléfique mais incapable de s'y mesurer par peur d'être mordus.

Con comme la lune mais sympathiquement chatouillant et visuellement dépaysant, Billy The Kid vs Dracula est un divertissement décomplexé à conseiller à l'inconditionnel de zéderie au charme rétro infaillible. Une curiosité davantage truculente décuplant ainsi de nos jours notre ferveur à découvrir un vaudeville foutraque pris entre deux genres académiques (western / épouvante). Une cocasserie aimablement séculaire avoisinant le looney-tunes de fond de classe. 

Dédicace à l'Antredubisetdel'exploitation
03.04.12
Bruno 



vendredi 30 mars 2012

LES LYONNAIS


d'Olivier Marchal. 2011. France. 1h42. Avec Gérard Lanvin, Tchéky Karyo, Daniel Duval, Dimitri Storoge, Patrick Catalifo, François Levantal, Francis Renaud, Lionnel Astier, Valeria Cavalli.

Sortie salles France: 30 Novembre 2011

FILMOGRAPHIE: Olivier Marchal est un acteur et réalisateur français, né le 14 Novembre 1958 à Talence (Gironde). Il est en outre le créateur des séries télévisées: Flics et Braquo.
2002: Gangsters
2004: Quai des Orfevres
2008: MR 73
2011: Les Lyonnais
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D'après l'oeuvre d'Edmond Vidal, ex membre du gang des lyonnais, Olivier Marchal s'inspire de son illustre autobiographie pour nous livrer avec Les Lyonnais un polar âpre et désenchanté. Une sombre fresque illustrant le portrait renfrogné de deux gangsters déchus, rattrapés par la frénésie d'un passé tendancieux. Edmond Vidal, ancien gangster à la retraite va renouer avec son passé galvaudé pour épauler son meilleur ami, Serge, récemment appréhendé par la police. Après une sanglante évasion, Edmond va se retrouver mêlé au chantage d'une bande de tueurs inflexibles, déterminés à retrouver son acolyte. En même temps, la police est plus que jamais circonspecte aux faites et gestes des deux repris de justice bien connus des services durant les années 70.
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Mis en scène avec le brio d'une virtuosité technique factuelle, le quatrième long-métrage d'Olivier Marchal est un polar tendu et brutal, noyé dans l'amertume du profil galvaudé de deux gangsters notoires, victimes de leur exactions sanguinaires perpétrées à une époque dissidente.
Durant leur jeunesse, à cause d'un simple vol de cageot de cerise, Edmond et serge vont être amenés à écoper une peine inéquitable de 6 mois ferme dans un établissement pénitentiaire. Cette sévère injustice sera le vecteur moteur pour les deux jeunes délinquants à se laisser appréhender par le grand banditisme après avoir endigué leur initiateur dans la région lyonnaise des années 70. En l'occurrence, Edmond est un sexagénaire coulant des jours ternes parmi la morosité d'une épouse distante, communément tiraillés par le remord d'une période révolue. Quand à Serge, il reste un gangster toujours en activité car n'ayant jamais abdiqué ses instincts délétères pour défier l'antagoniste et l'autorité répréhensible de la justice.


Entre passé et présent de flash-backs incessants, Olivier Marchal nous illustre avec lyrisme leur dérive autonome compromise par l'avilissement du Mal. Traversé d'éclairs de violence d'une verdeur cinglante mais jamais putassière et jalonné de plages intimistes inscrites dans la fraternité de l'amitié et la cohésion familiale, Les Lyonnais transcende la caractérisation bafouée de ces deux malfrats contraints de payer un lourd tribut. En parrain acariâtre, Gérard Lanvin assume avec sobriété un rôle majeur de gangster rongé par l'aigreur d'un passé vénal. Mais un homme déchu profondément meurtri par la soudaine révélation d'une intolérable trahison parce qu'entièrement subordonné à la loyauté de l'amitié. Sa posture rigide exacerbée par un regard austère noyé de rancoeur illumine son cheminement funeste, en attendant l'exutoire potentiel d'une repentance indécise. Son acolyte de toujours est campé par l'excellent Tchéky Karyo, malfaiteur tout aussi réputé, flegmatique mais implacable dans ses élans meurtriers impondérables. Un complice distant par son esprit taciturne quand il est contraint d'avouer à son comparse pour quelle véritable motivation il s'est retrouvé à fréquenter les cellules de prison.


Hormis le caractère prévisible de l'achèvement de nos deux protagonistes, Les Lyonnais est un excellent polar entièrement dédié au caractère fébrile de mafieux contrariés par l'intégrité désavouée de l'amitié. Superbement mis en scène, vigoureux dans sa narration indécise traversée  de brusques accès de violence et endossé par une galerie de trognes burinées plus vraies que nature, l'odyssée noire de Marchal renoue avec la désillusion flamboyante des grandes sagas mafieuses. 

30.03.12
Bruno Matéï

L'avis de mon ami Mathias Chaput

Réalisé avec un grand sens de la rigueur (aussi bien scénaristique que dans la restitution des décors ou des costumes), exempt d’anachronisme et violent comme un « film d’hommes », « Les Lyonnais » est un métrage exemplaire qui tient particulièrement bien la route !
Lanvin est impérial, il a un rôle taillé pour lui et sa personnalité de fonceur…
Karyo ne déroge pas à la règle dans son personnage d’enflure intégrale et même si vieillissant il s’en sort avec les honneurs !
La faune de la pègre lyonnaise comporte tous les stéréotypes surtout vers les années 70 (avec les filles soumises à leurs gangsters de maris, les caïds qui n’hésitent pas à frapper ou à flinguer fort, les casses et « braquo » -braquages- à pléthore, et la police le plus souvent dépassée –malgré une « rafle » dans un campement de gitans particulièrement millimétrée et efficace, et qui entrainera un procès fleuve !)…
Les gangsters ne reculent devant rien pour faire aboutir leurs desseins illégaux et font preuve d’une imagination hors normes et sans le moindre remords !
S’en prenant à des enfants ou des animaux, essayant par tous les moyens à faire régner leur diktat de corruption et de domination, et quiconque se mettra devant leur chemin, se verra froidement abattu !
Certains passages sont extrêmement violents et Marchal prend le parti pris pour une complaisance à minima, malgré un entêtement sidérant dans la tension et le stress (notamment lors des fuites de Momon et de sa femme, constamment harcelés !).

Film d’un grand professionnalisme et aux moyens ultra conséquents, « Les Lyonnais » s’entiche non seulement d’un scénar bien rôdé mais d’une restitution magistrale d’un domaine assez méconnu et peu exploité dans le cinéma hexagonal, pour au final projeter le spectateur sur un pan de la délinquance qui s’étale de 1970  à nos jours, le tout avec un talent indéniable !
Du très bon boulot pour un des meilleurs polars de ces dernières années, tous genres confondus !
Marchal frappe fort et l’impact de son œuvre trouve ici son aboutissement via peut être son chef d’œuvre !
A voir absolument pour la qualité du travail réalisé et pour son plaisir si on est adepte des polars français, un métrage qui fera date !

Note : 8.5/10


mercredi 28 mars 2012

U-TURN


d'Oliver Stone. 1997. U.S.A. 2h04. Avec Sean Penn, Nick Nolte, Jennifer Lopez, Powers Boothe, Claire Danes, Joaquim Phoenix, John Voight, Billy Bob Thornton, Abraham Benrubi, Richard Rutowski.

Sortie salles France: 14 Janvier 1998. U.S: 3 Octobre 1997

FILMOGRAPHIE: Oliver Stone (William Oliver Stone) est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 15 septembre 1946 à New-York.
1974: La Reine du Mal, 1981: La Main du Cauchemar, 1986: Salvador, Platoon, 1987: Wall Street, 1988: Talk Radio, 1989: Né un 4 Juillet, 1991: Les Doors, 1991: JFK, 1993: Entre ciel et Terre, 1994: Tueurs Nés, 1995: Nixon, 1997: U-turn, 1999: l'Enfer du Dimanche, 2003: Comandante (Doc), 2003: Persona non grata, 2004: Looking for Fidel (télé-film), 2004: Alexandre, 2006: World Trade Center, 2008: W.: l'Impossible Président, 2009: Soul of the Border, 2010: Wall Street: l'argent ne dort jamais. 2012. Savages.

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Deux ans après dépeint le portrait politique du président Richard Nixon, Oliver Stone emprunte le roman de John Ridley (Stray Dogs) pour nous livrer avec U-Turn un thriller décalé, caricature acide d'une Amérique profonde. Un looser solitaire se réfugie vers la contrée désertique de Superior pour fuir l'hostilité d'une bande de mafieux à qui il dû une forte somme d'argent. En attendant que sa voiture en panne croupisse chez un garagiste arrogant, il fait la connaissance de la sensuelle Grace, une femme indienne tributaire d'un mari violent et alcoolique. Cumulant la poisse au fil de ses rencontres impromptues et sans le moindre sou, Bobby sera confronté à un odieux marché financier lorsque Grace lui proposera de se débarrasser de son époux. Thriller aride mis en exergue sous un climat solaire écrasant, U Turn est un jubilatoire jeu de massacre savamment orchestré par un Oliver Stone plus gouailleur que jamais ! A l'instar d'After Hours de Martin ScorceseU-Turn nous décrit avec une verve caustique les vicissitudes d'un marginal besogneux confronté aux citadins les plus excentriques au sein du bled paumé de Superior, non loin de Las Vegas. Après avoir tenté d'échapper aux menaces d'un leader mafieux et à la suite d'une panne de voiture aléatoire, Bobby se retrouve embrigadé dans une bourgade clairsemée où la population inculte semble gagner par l'aberration. C'est d'abord son garagiste, arrogant et obtus qui le contraint de s'attarder plusieurs jours dans cette contrée désertique.
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Sur place, il fait ensuite les rencontres fortuites d'un vieil indien logicien atteint de cécité et d'un jeune couple ahuri dont l'amant irascible s'envenime à déclencher les rixes pour honorer sa potiche effrontée. En prime, après avoir côtoyé l'amabilité du shérif de la contrée, Bobby tombe sous le charme de Grace avant de s'apercevoir que la belle est asservie par un mari tyrannique, Jake. Séduit par la beauté sulfureuse de cette jeune indienne, Bobby va rapidement faire face au compromis d'une transaction machiavélique suggérée par les deux amants désunis. Avec un scénario habilement structuré multipliant les rebondissements perfides et les rencontres saugrenues de badauds susceptibles, Oliver Stone rivalise de mesquinerie à nous transfigurer une galerie de personnages tous plus désinvoltes et calamiteux les uns des autres. Hommage débridé au film noir enduit de vitriol, U-Turn demeure une odyssée tragico burlesque auprès d'un paumé incapable d'épingler l'amour, faute de sa déloyauté individualiste. En établissant également le portrait équivoque d'une femme molestée, avilie par la gente masculine, Oliver Stone nous dépeint sa vengeance méthodique et hautement sournoise. Sa haine inaltérable d'avoir été livrée à la débauche sexuelle d'un odieux personnage impliqué dans l'inceste, quand bien même ces multiples amants nappés de rancoeur, de jalousie et d'orgueil n'auront de cesse de se combattre afin d'obtenir un gain de cause lucratif.
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Dans la peau d'un looser invétéré, Sean Penn doit beaucoup au caractère ludique de cette hystérie collective de par sa prestance versatile tributaire d'infortune tant il accumule les calamités à un rythme frénétique. Dans celui du mari licencieux imbibé d'alcool, Nick Nolte impressionne à travers son cynisme d'époux torturé par ses agissements indécents. Dans le rôle de l'aguicheuse insidieuse, Jennifer Lopez s'en sort honorablement et réussit à s'imposer avec sobriété en veuve noire irréductible. L'unique victime martyrisée auquel on finit par éprouver une certaine empathie après avoir découvert son sombre passé infantile. Les autres seconds-rôles, quasi méconnaissables dans une posture excentrique (John Voight, Billy Bob Thornton, Claire Dance, Joaquim Phoenix, Powers Boothe), s'en donnent également à coeur joie dans la fourberie et l'arrogance pour laisser libre court à des inepties fébriles.
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Méchamment drôle de par son sarcasme récursif, violemment cruel et cauchemardesque, U-Turn est un jubilatoire jeu de massacre sur le machisme primaire et les effets pervers du dépit sentimental. Une farce corrosive déployant avec un humour semi parodique l'hypocrisie du rapport amoureux  naviguant entre allégeance et possessivité. Et à travers ces protagonistes stimulés par l'instinct du désir sexuel de nous livrer des numéros d'acteurs impayables !

*Bruno28.03.12.

vendredi 23 mars 2012

Les Tueurs fous / Le Sexe de la Violence / Lonely Killers / Quando il pensiero diventa crimine.


de Boris Szulzinger. 1972. France/Belgique. 1h14. Avec Dominique Rollin, Roland Maden, Georges Aminel, Christian Barbier, Patricia Cornelis, Georges Aubert, Marc Audier, Marc De Georgi, Jean Droze, Daniel Dury, Franz Gouvy.

FILMOGRAPHIE: Boris Szulzinger est un réalisateur et producteur belge.
1969: Nathalie après l'amour (pseudo: Michael B. Sanders). 1972: Les tueurs fous. 1975: Tarzoon, la Honte de la jungle (co-réalisé avec Picha). 1980: Mama Dracula

 
"Bruxelles pour cimetière".
Boris Szulzinger serait resté un cinéaste belge méconnu s’il n’avait co-réalisé le film d’animation égrillard Tarzoon, la Honte de la jungle, d’autant que sa carrière ne compte que quatre longs-métrages. Ainsi, en 1972, sort dans l’indifférence générale une œuvre choc, glaçante de réalisme, retraçant un fait divers sordide : l’équipée meurtrière de deux malfrats dans la grisaille bruxelloise. Les Tueurs Fous, aussi connu sous le titre Le Sexe de la Violence, s’impose comme une petite bande déviante, méconnue, mais à découvrir d’urgence tant elle ausculte la dérive d’un tandem marginal englué dans sa médiocrité.

Le pitch : deux jeunes délinquants prennent les armes et abattent quiconque croise leur route. Dans une quête libertaire amorale, Dominique et Roland fuient leur ennui en commettant leurs sales besognes entre deux rencontres hasardeuses avec des citadins résignés.

Dans la lignée de portraits abrupts de serial killers tristement notoires, et filmé à la manière d’un reportage sec, Les Tueurs Fous retrace froidement le parcours sanglant de deux marginaux profondément esseulés, incapables d’assumer leur homosexualité. Le film débute sur les chapeaux de roue : meurtre gratuit, rire nerveux, poursuite en mobylette, puis exécution à la carabine — une scène d’une brutalité désarmante, qui annonce la couleur blafarde de cette errance meurtrière à travers les nuits pluvieuses de Bruxelles.

Sans morale ni remords, ils décident soudainement de tuer, au hasard, des anonymes croisés au détour d’un trottoir. Entre deux crimes, ils errent dans des bars gays où défilent des travestis, rançonnent les honnêtes gens, cherchent le contact d’un soir avec des paumés, ou tentent d’éveiller une fragile amitié avec un homosexuel mutique. 

"Deux âmes mortes sous la pluie". 
Ces deux âmes mortes, sans parenté ni attaches, n’ont d’autre lien au monde que leur propre reflet. Leur seul élan d’empathie ? Un chat infirme, trouvé dans une voiture volée. Ce petit être fragile, silencieux, devient l’unique témoin d’une tendresse fugace. À ce moment-là, face caméra, leurs visages s’ouvrent — regard d’enfants perdus, dans un monde où l’amour leur a été refusé. En fuite, enragés de solitude, Dominique et Roland exorcisent leur sexualité refoulée et leur vide existentiel par le meurtre, faute d’avoir pu grandir sous un toit aimant. 

 
"L’ombre d’un chat infirme".
Dérangeant, malsain, immergé dans l’humidité grise d’un automne sans fin, renforcé par le jeu brut, presque documentaire, de comédiens à la posture puérile, Les Tueurs Fous dresse un constat terrifiant sur la marginalité des laissés-pour-compte. Sans voyeurisme, sans complaisance, le film tire sa force de son ancrage psychologique, de sa tristesse poisseuse, de cette sidérante impression que n’importe quel individu rejeté pourrait, un jour, sombrer dans la folie la plus lâche.

Oubliez son homonyme racoleur, Le Sexe de la Violence. Découvrez, sans réserve, cette pépite belge noyée dans la désillusion, qui risque bien de vous hanter longtemps après digestion.

Dédicace à Video Party Massacre
23.03.12
Bruno


lundi 19 mars 2012

Bellflower


de Evan Glodell. 2011. U.S.A. 1h46. Avec Evan Glodell, Jessie Wiseman, Tyler Dawson, Rebekah Brandes, Vincent Gradshaw, Zack Kraus, Keghan Hurst, Alexandra Boylan, Bradshaw Pruitt, Brian Thomas Evans.

Sortie salles France: 21 Mars 2012. U.S: 5 Août 2011

FILMOGRAPHIE: Evan Glodell est un réalisateur, acteur, monteur, producteur, directeur de la photographie, scénariste américain. 2005: La Forme à l'amour (Court-métrage. Co-directeur). 2011: Bellflower
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Avec un budget de 17 000 dollars, le néophyte Evan Glodell entreprend pour son premier long l'argument autobiographique d'une love story traitée de manière peu commune dans sa mise en scène hybride afin de mieux bousculer les attentes du spectateur. Le PitchDeux acolytes entreprennent de façonner un lance-flamme et un véhicule motorisé en guise d'ennui. Mais l'arrivée aléatoire d'une blonde aguicheuse compromet leurs ambitions pour faire sombrer l'un d'eux dans une déchéance suicidaire. Autant avertir de suite les amateurs d'esbroufe avides de pyrotechnie et donc séduits par son affiche prometteuse, Bellflower constitue l'antinomie du spectacle explosif conçu pour rassasier son public lambda. Si bien que cette production indépendante réalisée avec peu de moyens fait figure d'ovni intimiste dans sa douloureuse introspection d'un quidam noyé d'amertume suite à déboire amoureux. Traité de manière insolite auprès d'une réalisation anti conformiste oscillant les ruptures de ton, et formellement criard (saturation de teintes ocres et jaunes fluos), Evan Glodell nous oriente vers une fragile odyssée humaine sur fond d'éloignement existentiel. De prime abord, on se croit embarquer dans une comédie tendre et futile avec les flâneries récurrentes de deux amants communément épris d'amour. A l'instar d'un documentaire pris sur le vif, le réalisateur s'attachant à nous décrire avec humanité le destin aigri de ces deux comparses juvéniles en quête de reconnaissance.


Or, Woodrow et Aiden, chômeurs passionnés par la saga post-nuke de Mad-Max, en particulier du personnage asocial Humungus, fuient l'ennui de l'existence avec la construction d'un lance-flamme et d'une voiture vrombissante. En soirée festive, après une rencontre impromptue dans un bar, l'amour frappe à la porte de Woodrow. Depuis, l'homme ne jure que par la probité de son idylle naissante jusqu'au jour où toutes les meilleures choses ont une fin. Ainsi, durant une majeure partie du récit, on se demande alors où le réalisateur souhaite en venir avec cette idylle romanesque finalement mise en exergue sur le fiasco. Puis, de manière latente et avec l'originalité d'une mise en scène expérimentale, c'est le profil désemparé d'un quidam déchu trahi par l'adultère qui nous ait illustré dans une ambiance délétère davantage en chute libre. Et plus la déchéance déshumanisée de Woodrow se chemine vers la régression, plus le film s'aventure vers les sentiers ombrageux d'une errance nocturne vindicative. Il en ressort au final une oeuvre chétive, le sentiment peu commun d'avoir assister à une tragédie sentimentale profondément touchante à travers cette fuite désespérée. La quête existentielle de deux camarades fuyant la monotonie de leur réalité par l'utopie parce que songeurs d'horizons clairsemées.

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L'achèvement d'Humungus
A travers cette errance urbaine chancelante, le réalisateur Evan Glodell se réapproprie des conventions du genre pour transcender la love story éculée dans une mise en scène hétérodoxe. Avec une humanité vulnérable, Bellflower traite donc du deuil délicat, difficilement surmontable d'une rupture amoureuse, mais également des valeurs de l'amitié entre la fraternité de deux héros dépités et de leur quête autoritaire à retrouver une certaine virilité (d'où leur affection partagée avec le personnage redouté d'Humungus). L'intelligence et l'originalité de sa structure narrative, la bonhomie naturelle des personnages et l'esprit libertaire qui y émane en font une oeuvre forte où la rancoeur intrinsèque s'extériorise finalement parmi l'essence candide d'une rédemption. 

*Bruno
19.03.12