vendredi 17 septembre 2021

Bac Nord

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Cédric Jimenez. 2021. France. 1h45. Avec Gilles Lellouche, Karim Leklou, François Civil, Adèle Exarchopoulos, Kenza Fortas, Cyril Lecomte, Michaël Abiteboul.

Sortie salles France: 18 Août 2021

FILMOGRAPHIE: Cédric Jimenez est un réalisateur, producteur et scénariste français né le 26 juin 1976 à Marseille. 2012 : Aux yeux de tous. 2014 : La French. 2017 : HHhH. 2021 : BAC Nord. 2022: Novembre. 

“On ne sert plus à rien... plus je fais mon métier, moins je le fais.”
Uppercut émotionnel à couper le souffle, Bac Nord est une épreuve morale comme peu de métrages ont sur le parfaire avec autant de réalisme documenté à travers sa délinquance urbaine aujourd'hui rendue incontrôlable (c'est peu de le dire et c'est du jamais vu dans le paysage français). Il faut d'ailleurs remonter à mon sens au percutant la Haine de Kassovitz (et non aux Misérables auquel j'émets quelques réserves) pour retrouver cette dimension dramatique malaisante, cette fulgurance rigoureuse parfois résolument terrifiante eu égard de la guerre sans merci que se livrent flics et voyous s'acharnant à monopoliser leur autorité dans un brouhaha suicidaire. C'est dire si l'efficacité de la mise en scène au cordeau de Cédric Jimenez rivalise avec les productions ricaines les plus musclées dans son sens du cadrage, dynamisme du montage, caméra portée à l'épaule, pour nous immerger de plein fouet dans l'hystérie collective de ces règlements de compte où le pire est sur le point d'éclater lors de tirades d'affolement communautaire. Certaines situations incongrues filmées dans l'urgence demeurant d'une tension paroxystique quant au sort précaire de nos policiers confrontés à l'arrogance des délinquants prêts à se sacrifier pour défendre leur territoire de deal coordonné dans une directive militaire. Tant et si bien que depuis des décennies, politique, justice et membres pédagogues semblent avoir démissionné de leur fonction impérieuse de par le sentiment d'affranchissement d'une délinquance mineure et majeure parvenant communément à imposer leur dictature au sein de leur fief ghettoïsé.   

Et de mémoire, à moins d'y avoir loupé une oeuvre référence, je ne connais aucun métrage ricain ayant su inscrire avec tel souffle belliqueux moult péripéties effrénées de par le vérisme frénétisé des acteurs aussi bien amateurs que professionnels s'affrontant physiquement / verbalement les nerfs à vif. Tous demeurant communément époustouflants de charisme névralgique dans leur fureur animale décomplexée. D'où l'incroyable sentiment d'immersion morale que procure le métrage traitant avec souci de véracité de la hiérarchie délinquante aussi coordonnée et studieuse que leur homologues policiers. Tant et si bien que la frontière entre le Bien et le Mal est rompue, et que certains flics à bout de nerfs dans leur posture humiliée, pour ne pas dire avilissante, finissent par perdre pied avec le sens des valeurs au point de se comporter comme leur rivaux haineux et d'adopter leur gestuelle, leur orgueil démesuré faute de cette violence primale fatalement contagieuse. Ainsi, à travers cette cacophonie désaxée où complices et indics se mêlent également à la partie du gendarme et voleur, Bac Nord jette un effrayant pavé dans la mare. Un effrayant constat d'amertume, de désillusion et de déroute auprès d'une corruption humaine déchue de leurs codes moraux. Et ce tout en romantisant la situation finalement désoeuvrée de ce trio de flics aussi véreux qu'héroïques (leurs burnes s'avèrent aussi grosses que des boules de billards à travers leurs risques encourus, leur course poursuite à bout de souffle et leur stoïcité radicale !) abandonné par leur propre confrère pour un enjeu de racket et de trafic de stupéfiants pas aussi préjudiciable que prévu. 


"Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. Si tu regardes longtemps dans l'abîme, l'abîme regarde aussi en toi."
Impulsé du véhément trio Gilles Lellouche, Karim Leklou et surtout François Civil (en fringant jeune loup fumeur de joint), accompagné du talent plus vrai que nature d'Adèle Exarchopoulos en jeune maman intuitive; Bac Nord met les nerfs à rude épreuve au coeur d'un western urbain en déliquescence séditieuse d'où perce l'animosité d'une jeunesse criminelle davantage azimutée, pour ne pas dire quasi invincible. Un constat d'échec évidemment effrayant car sans lueur d'espoir alors que la génération prochaine osera inévitablement relever le défi d'imposer leur loi avec plus de cran, d'autonomie et de bassesse. 

*Eric Binford

jeudi 16 septembre 2021

Candyman (2021)

                                  Photo empruntée sur Facebook par l'entremise de Thierry Spadino

de Nia DaCosta. 2021. U.S.A. 1h31. Avec Yahya Abdul-Mateen II, Teyonah Parris, Nathan Stewart-Jarrett, Colman Domingo, Vanessa A. Williams, Tony Todd, Rebecca Spence.

Sortie salles France: 29 Septembre 2021. U.S: 27 Août 2021

FILMOGRAPHIENia DaCosta est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 8 novembre 1989 à New York. 2018 : Little Woods (réalisation et scénario). 2021 : Candyman (réalisation et scénario). 2022 : The Marvels (réalisation). 


La corruption du Mal par la rancoeur. 
Sortir de la projo de Candyman 2021 n'est point une mince affaire de par sa vénéneuse noirceur et son nihilisme sociétal davantage déclinant. Vendu comme un Remake du chef-d'oeuvre de Bernard Rose, Candyman 2021 n'est nullement l'épigone réactualisé au goût du jour pour contenter le chaland en mal de sensations fortes. Tant et si bien que Candyman, LA SUITE, s'adresse avant tout à un public à la fois mature et responsable tant son climat austère, hermétique n'est pas à la merci de tous afin de l'approcher dans un strict premier degré (pas une once d'humour à relever à l'horizon). Rare pour ne pas le souligner en cette année catastrophique (selon moi évidemment) pour le genre horrifique réduit au produit de consommation. C'est dire si cette version résolument personnelle ne fera l'unanimité auprès du public peu habitué à fréquenter une oeuvre intime dénuée de fard puisque s'intéressant avant tout à nous caractériser une galerie de personnages afro-américains hantés par leur condition esclavagiste auprès d'une civilisation blanche incapable de s'extraire de la haine de l'étranger auprès des ignorants et extrémistes épeurés par la différence. Formellement stylisé à travers ses ombres chinoises, ses figures géométriques, ses tableaux picturaux et ses éclairages flashy compromis au baroque épuré, Candyman 2021 est un éblouissement esthétique en perpétuelle créativité. Et à ce niveau, on peut clamer le chef-d'oeuvre formel aussi moderne qu'atypique (certains plans évoquant par ailleurs une scénographie futuriste tout à fait appropriée et non conçu comme une fioriture de remplissage). 


Un parti-pris idoine d'y dénoncer en filigrane l'exploitation des noirs dans le domaine de l'art auprès de la suprématie blanche quand bien même les violences policières demeurent davantage factuelles si je me réfère à son final horrifique à la dramaturgie malaisante. On quitte donc l'épreuve horrifique avec un arrière goût de souffre et d'amertume dans la bouche eu égard de son dénouement mortifié militant pour une vendetta, faute de la fracture irréversible entre blancs et noirs d'où la communication est feinte faute de simulacre prodigué. Ainsi, derrière son contexte social amer, Candyman 2021 dégage une atmosphère d'angoisse sous-jacente quasi indicible au fil d'un cheminement moral indécis ponctué de bipolarité et de revirements fréquemment malaisants. Sans compter ses scènes de terreur sournoises, démoniales, acrimonieuses lorsque apparaît derrière la victime le croquemitaine appréhendant ses proies de manière éthérée. Sa présence souvent invisible (mais brièvement visible au fond du miroir par le spectateur !) provoquant chez nous une peur viscérale à la fois malsaine et étouffante d'y redouter l'inévitable, renforcée qui plus est d'un goût pour une certaine crudité sanguine à travers son réalisme gore littéralement cinglant. Quant aux interprètes hétéros (mais aussi gays pour y défendre leur cause plus qu'actuelle), quelle judicieuse idée d'avoir sélectionné des comédiens pour la plupart méconnus du public pour mieux se familiariser, s'impliquer dans leurs tourments moraux sous l'impulsion d'une rigueur dramatique (parfois trop) inconfortable. D'où l'aspect  régulièrement déconcertant, voir quelque peu antipathique de ce Candyman autonome n'adjurant nullement à être aimé et exploitant la trame de Bernard Rose avec une intelligence on ne peut mieux intègre, pour ne pas dire déférente. 


No Futur. 
Persuadé qu'un second visionnage permettra encore mieux d'apprivoiser cette séquelle difficile d'accès, mais lestement captivante (sans que l'on s'en aperçoive), Candyman 2021 demeure en tout état de cause une réelle surprise inattendue dans le paysage imberbe du remake aseptique souvent tributaire du copié-collé. Tant et si bien qu'ici c'est tout l'inverse qui se produit en mode (véritable)"séquelle" pour attirer le chaland et (surtout) le passionné du genre en manque de 1er degré. Et ce au point d'y rejoindre les meilleurs spécimens du genre parmi lesquels trônent probablement sur vos étagères fétichistes, The Thing, La Mouche, Maniac, L'Invasion des Profanateurs, La Colline a des Yeux, Le Cauchemar de Dracula, La Féline, Suspiria et quelques autres pépites... 
A découvrir avec précaution donc en étant averti du contenu à la fois opaque, cérébral, hermétique, au point de sortir de la projo avec une certaine gueule de bois... (je me demande d'ailleurs encore ce à quoi je viens d'assister ce soir là ! ?).

*Eric Binford. 

mardi 14 septembre 2021

Les Longs Manteaux

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site placedeslibraires

de Gilles Béhat. 1986. France/Argentine. 1h33. Avec Bernard Giraudeau, Claudia Ohana, Robert Charlebois, Federico Luppi

Sortie salles France: 19 Février 1986

FILMOGRAPHIEGilles Béhat (Gilles Marc Béat) est un réalisateur et acteur français, né le 3 Septembre 1949 à Lille (Nord). 1978: Haro. 1981: Putain d'histoire d'amour. 1984: Rue Barbare. 1985: Urgence. 1986: Charlie Dingo. 1986: Les Longs Manteaux. 1988: Le Manteau de Saint-Martin. 1990: Dancing Machine. 1994: Le Cavalier des nuages. 1997: Un Enfant au soleil. 2000: Une Mère en colère. 2009: Diamant 13.

Le Pitch: Loïc Murat, un géologue français, installe son campement dans la montagne bolivienne. Il y croise la route d'un groupe fasciste, Les Longs Manteaux, qui tentent d'assassiner un écrivain, Juan Mendez. Murat fait également la connaissance de Julia, la fille de Mendez.

Un sympathique récit d'aventures sur fond de western contestataire qui doit beaucoup à la force tranquille et de sureté de Bernard Giraudeau, un des meilleurs acteurs des années 80 plutôt omis de nos jours, et c'est fort dommage eu égard de son charisme magnétique aux yeux azurs. Accompagnée de la méconnue Claudia Ohana, cette charmante actrice brésilienne ne démérite pas dans sa posture de fille fragile mais résiliente à escompter la liberté de son père, écrivain emprisonné par son régime totalitaire 2 ans avant la nouvelle mise en place d'un gouvernement démocratique. Tourné en scope afin de transcender ses magnifiques paysages boliviens, Les Longs Manteaux est notamment ponctué de scènes d'actions aussi nerveuses que réussies, rare pour ne pas le souligner au sein de notre paysage français peu habitué à émuler celui du ciné ricain. Peut-être pas le haut du panier du divertissement musclé des années 80 mais un honnête spectacle conduit avec savoir-faire par Gilles Béhat, inoubliable auteur de Rue Barbare (déjà accompagné de Bernard Giraudeau), sous l'impulsion du superbe score de Jean-François Léon aussi entêtant qu'un tantinet langoureux.

*Eric Binford

lundi 13 septembre 2021

Malignant

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de James Wan. 2021. U.S.A. 1h52. Avec Annabelle Wallis, Jake Abel, George Young, Jacqueline McKenzie, Mckenna Grace, Maddie Hasson, Michole Briana White.

Sortie salles France: 1er Septembre 2021

FILMOGRAPHIE: James Wan est un producteur, réalisateur et scénariste australien né le 27 Février 1977 à Kuching (Malaisie), avant de déménager à Perth (Australie). 2004: Saw, 2007: Dead Silence, Death Sentence, 2010: Insidious. 2013: The Conjuring. 2013: Insidious 2. 2016: The Conjuring 2. 2021: Malignant. 


         Avertissement ! Sans toutefois spoiler, il est préférable d'avoir vu le film avant de lire ce qui        va suivre.

Quand James Wan se télescope à Bruno Mattei et Frank Henenlotter.
Peut-être lassé de s'adonner au film de Hantise (Conjuring / Insidious), James Wan détourne quelque peu le genre avec son nouveau métrage, Malignant transcendé d'un bouche à oreille plutôt euphorisant à défaut de rassembler les critiques assez partagées. Histoire de s'écarter des conventions du film de maison hantée commanditée d'un esprit frappeur, Malignant demeure donc efficacement troussé lors de sa première heure misant sur l'inquiétude (l'attente d'un éventuel danger, d'une menace incertaine), l'appréhension diffuse (via le silence) et l'expectative que le spectateur adoube avec une attention fureteuse quant à l'enjeu de cette énigme filiale. Le récit cumulant à rythme métronome quelques séquences chocs gratinées parmi le témoignage de Madison impuissante d'observer en direct des mises à mort surnaturelles que le tueur la contraint d'observer par télépathie (on peut aussi parler de téléportation de par l'invention de la mise en scène immersive substituant un décor domestique par un autre sans effet de coupe, sorte de fondu enchainé limpide). Alors que la police piétine, la soeur de Madison s'empare de l'enquête épineuse en se dirigeant dans l'ancienne clinique lorsque Madison fut sujette à diverses expérimentations médicales en 1993 (ce que nous suggérait le prologue déjà incongru lors de ses règlements de compte surnaturels). Celle-ci ayant été abdiquée par sa mère lors de sa naissance pour des motifs que nous ne connaîtrons que vers l'ultime étape apocalyptique. Ainsi, si le mode du thriller horrifique s'avère plutôt bien géré et formellement soigné 1 heure durant (à l'instar de son hallucinant plan séquence en surplomb dans une demeure ou de son onirisme macabre de l'extérieur d'une bâtisse ou d'un hôpital); la suite opte pour un virage à 180 degrés afin de relancer le mystère de cette vague de crimes à renfort de vendetta hyperbolique. 

Et c'est ainsi que Malignant dévoile tout son potentiel à la fois homérique et horrifique tout en rendant depuis le départ un sublime hommage au Giallo où plane l'ombre d'Argento. Et ce de la manière la plus épurée et saugrenue qui soit à travers le charisme iconique du tueur affublé d'un poignard en or massif. Le spectacle borderline, décérébré, décomplexé, frénétisé demeurant ultra jouissif auprès de ses affrontements dantesques entre le "diable" et nos héros déconcertés par une révélation aussi ubuesque qu'après tout bien réel. Bref, on marche à plein tube les yeux écarquillés en dépit de son concept totalement allumé, et c'est cela qui s'avère proprement jubilatoire. Car c'est justement ce qui fait que Malignant dégage une véritable puissance visuelle par sa folie improbable redoutablement adroite et percutante, notamment auprès de l'ultra dynamisme du montage, de l'agilité des plans s'enchainant sans répit. On peut également saluer à travers le jeu (bicéphale) de l'interprète très convaincant (dont je tairai le patronyme) sa manière éraillée de communiquer avec ses interlocuteurs par le biais du téléphone et de postes radios. Un tueur iconique donc infiniment fascinant auprès de son élégance hermétique alors que ses confrontations véloces techniquement soignées (j'insiste encore, c'est méritoire) auprès de l'inventivité des effets de caméra (parfois alambiqués) nous plaquent au siège de par son réalisme tranché. Quand bien même la jeune Annabelle Wallis dégage un véritable charme vénéneux aussi magnétique que fragilement sensuel en victime démunie tentant de s'extraire de sa prison mentale en concertation avec le tueur. Son attachante présence (quasi omniprésente) permettant notamment d'instaurer un certain suspense et une densité psychologique à travers ses fêlures morales frappées d'amnésie et de désir du dépassement de soi. Notamment pour la 1ère partie thérapeutique et ses rapports empathiques avec son entourage familial mais aussi policier (même si suspicieux du point de vue d'une lieutenant sur le qui vive quant à ses allégations farfelues). On peut enfin saluer ses crises d'hystéries horrifiées, ses hurlements stridents magnifiquement expressifs tant l'actrice insuffle un vénéneux charisme féminin de par sa tenue vestimentaire ténébreuse et son regard subtilement épeuré que Wan transfigure par la maestria de sa caméra scrupuleuse, à l'écoute de ses souffrances morales traduites dans l'impuissance. 


Basket Case.
A la fois efficacement étrange et inquiétant (en dépit de son classicisme liminaire pour autant maîtrisé avec savoir-faire comme de coutume chez Wan), puis complètement vrillé, singulier, alerte et incroyablement fascinant auprès de son imagerie horrifiante nous agressant les mirettes grâce au parti-pris décomplexé de Wan en totale roue libre (pour le plus grand bonheur des fans de Bis en ébullition), Malignant se décline en tour de montagne russe qu'il est impossible d'interrompre dès le rouage amorcé. James Wan parvenant comme par miracle par son degré de folie incorrigible à conjuguer délire saugrenu et réalisme brut de décoffrage à travers l'audace d'un twist anthologique érigé en bombe à retardement. Déjà culte, assurément, tout du moins chez les fans de délire insensé, qui plus est fier de l'être. 

*Bruno
27.08.22. 2èx

samedi 11 septembre 2021

L'alter Ego


Réalisé par Monsieur K, scénarisé par Näamlock. 2021. France. Bande dessinée éditée par ARTUS FILMS.

En exclusivité, je me permets aujourd'hui cet écart d'y chroniquer une bande-dessinée hexagonale. Les raisons premières ? Parce que le scénariste Näamlock est un proche ami que je côtoie via le réseau Facebook, parce que j'apprécie particulièrement la boite éditrice Artus Films et parce que je suis friand de BD horrifico-fantastique, tout du moins lorsque je parviens facilement à m'immerger dans l'aventure dépaysante. Tant et si bien que je suis loin d'être un spécialiste en la matière (à contrario de ma passion indéfectible pour le ciné), et que donc je tenterai ici de dévoiler mes petites impressions subjectives avec modestie, et ce en tenant compte de mon inculture pour la BD et l'architecture des dessins.


Sans trop déflorer l'intrigue, L'Alter Ego nous dépeint lors d'une scrupuleuse attention chronologique (chaque case est équivalente à la journée quotidienne de tel ou tel personnage), la nouvelle relation amoureuse entre Martin, fraîchement séparé, avec Alice rencontrée via le site de rencontres Meetic. Alors que celui-ci tente difficilement de monter le projet cinématographique d'un Giallo, Alice est peu à peu délaissée au moment d'y apprendre une triste nouvelle. Quand bien même, Hélène, fille de Martin, tente vainement de l'interpeller de par son absence paternelle. Ainsi, ce qui surprend fissa lors de la lecture monochrome de L'Alter Ego c'est le soin consciencieux imparti à sa structure narrative littéralement hypnotique. C'est simple, chaque case charpentée ne déborde jamais pour ce concentrer sur le développement de l'intrigue au moment de donner chair à ses personnages remarquablement dessinés. C'est aussi la grande force et l'intérêt du récit tentaculaire que d'y caractériser avec ambiguïté ce  triangle fragile lors de leurs relations humaines en perdition. Tant auprès de Martin toujours plus irritable à tenter d'approcher un producteur et parfaire son projet, d'Alice en détresse affective que de la jeune Hélène aussi délaissée, tendrement parlant. 


Ceux-ci ayant comme point commun une contrariété morale anxiogène à mi-chemin de la dépression. Et ce sans que cela nous soit dévoilé de manière explicite. Naamlock se motivant farouchement à les rendre énigmatique au fil d'un récit reptilien où plane les ombres de Nicolas Roeg, d'Hitchcock et de David Cronenberg. Car les références ciné sont plutôt nombreuses lors du cheminement imprévisible des personnages, à l'instar de la chambre de Martin ornementée d'affiches de classiques du Fantastique. Mais ce qui fascine et captive lors de ce récit à suspense effilé émane de son ambiance d'étrangeté sous-jacente alors qu'à d'autres moments on se confronte à des situations dérangeantes autrement explicites (Spoil ! je songe aux désagréments corporels ! Fin du Spoil). Le récit adoptant par ailleurs un revirement radical lors de sa seconde partie (nouvelle teinte monochrome en sus !) puisque établi cette fois ci du point de vue de la fille de Martin, Hélène en position d'investigatrice en herbe. Un 2è acte plus morbide, détaillé, frénétique et barré prouvant que l'ambition des auteurs (Naamlock et le dessinateur Monsieur K) était de nous plonger dans une sorte de vertige filandreux, un cauchemar moral assez perméable bien que ce soit par moments confus (notamment en y infiltrant le genre espionnage). 


Une allégorie de l'amour consumériste.
Perfectible, déstabilisant et déconcertant (car il manque un "je ne sais quoi" pour l'estampiller "incontournable" du genre), hypnotique, ombrageux et ramifié auprès de son scénario sournois soumis à la psychologie torturée de ses personnages, à l'instar du canard hallucinatoire que Martin perçoit lors de ses inquiétantes névroses, l'Alter Ego ne laisse indifférent le lecteur pris dans la tourmente d'une débâcle davantage malsaine, viscérale, persifleuse, nécrosée.

L'album est en vente à partir du 22 octobre 2021 au prix de 14.90 Euros. 

*Eric Binford

jeudi 9 septembre 2021

Borrower, le voleur de têtes

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site perdudansla5edimension.com

"The Borrower" de John Mc Naughton. 1991. U.S.A. 1h35. Avec Rae Dawn Chong, Don Gordon, Tom Towles, Antonio Fargas, Neil Giuntoli, Larry Pennell. 

Sortie salles U.S: 25 Mai 1991

FILMOGRAPHIE: John Mc Naughton est un réalisateur américain, né le 13 Janvier 1950 à Chicago. 1984: Dealers in Death. 1986: Henry, portrait d'un serial killer. 1991: Sex, drugs, Rock and Roll. 1991: The Borrower. 1993: Mad Dog and Glory. 1996: Normal Life. 1998: Sexcrimes. 2000: Condo Painting. 2001: Speaking of sex. 2004: Redliners. 2009: Backstabbers. 2013: The Harvest.


Inédit en salles chez nous, Borrower est une pochette surprise horrifique de la part de John Mc Naughton, réalisateur du mythique Henry, portrait d'un Serial-Killer. Autrement délirant, décalé et décomplexé, Borrower empreinte la satire sociale avec un réalisme cartoonesque vitriolé lorsqu'un extra-terrestre est condamné à errer sur terre après avoir été jugé de crimes par ses pairs. Mais contraint de changer de tête pour pouvoir rester en vie (à un moment donné, sa tête explose soudainement !) il doit donc décapiter ses victimes au fil de son cheminement initiatique sur terre. Alors que la jeune inspectrice Diana Pierce et son co-équipier Charles Krieger enquêtent sur cette série de crimes sauvages, un autre tueur (cette fois-ci terrien) échappé de l'hôpital est sur le point de se venger. Hélas, sur ce dernier point de digression, le réalisateur l'abandonne en cours de route si bien que l'on finit par omettre ce personnage trivial en dépit de sa réapparition soudaine cependant vite sacrifiée. Série B horrifique du Samedi soir, comme le souligne son prologue déjanté proche d'une série Z (la sentence juridique puis le corps à corps entre un E.T insecte et son prisonnier banni de chez lui), Borrower cumule les effets-chocs et rebondissements musclés à rythme métronome. 


Dans la mesure où notre E.T est contraint de s'approprier une nouvelle tête toutes les 10/15 minutes (le rythme s'accélérant progressivement au fil du récit davantage vrillé !), prétexte pour Mc Naughton à se défouler sur les séquences chocs particulièrement gorasses et convaincantes. Les FX et maquillages demeurant suffisamment crédibles pour croire sans peine à la nouvelle métamorphose de l'E.T que chaque acteur endosse avec une mine patibulaire infaillible dans leur posture marginale atone. Sorte de SDF insalubre dont personne ne prête attention à travers leur apparence de laissé-pour-compte. Et s'il faut un petit temps d'adaptation à se familiariser auprès des errances urbaines de notre E.T durant la 1ère demi-heure assez ordinaire, la suite s'avère plus intéressante et quelque peu captivante lorsque le réalisateur accorde beaucoup d'importance à la faune urbaine à la fois désaxée, décérébrée et incivilisée que côtoie l'étranger stellaire au sein d'une société de stupre sevrée à la pop-culture, au sexe, à la criminalité et à la drogue. Quand bien même Mc Naughton boucle son récit en suspens de manière à la fois (sciemment) bâclée et désordonnée en renouant avec l'exploitation d'une série B ludique à l'ambiance survoltée. 


Drôle de farce récréative donc que ce Borrower, voleur de tête que John Mc Naughton façonne avec une certaine efficacité (passée la 1ère demi-heure) en conjuguant l'horreur sociale et cartoonesque avec un esprit caustique assez probant. 

*Eric Binford
3èx

mardi 7 septembre 2021

Supergirl

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Jeannot Szwarc. 1984. U.S.A/Angleterre. 2h04. Avec Helen Slater, Faye Dunaway, Brenda Vaccaro, Peter Cook, Hart Bochner, Peter O'Toole, Mia Farrow, Simon Ward.

Sortie salles France: 10 Octobre 1984. U.S: 21 Novembre 1984

FILMOGRAPHIE: Jeannot Szwarc est un réalisateur français, né le 21 Novembre 1939 à Paris. 1973: Columbo: adorable mais dangereuse. 1975: Les Insectes de Feu. 1978: Les Dents de la Mer 2. 1980: Quelque part dans le temps. 1983: Enigma. 1984: Supergirl. 1985: Santa Claus. 1987: Grand Larceny. 1988: Honor Bound. 1990: Passez une bonne nuit. 1991: La Montagne de Diamants. 1994: La Vengeance d'une blonde. 1996: Hercule et Sherlock. 1997: Les Soeurs Soleil.


Pourquoi tant de haines ?
Massacré par la critique dès sa sortie et boudé par le public si bien qu'il se solda par un inévitable échec commercial, Supergirl ne méritait pas tant de mépris tous azimuts. Car s'il faut bien avouer que Jeannot Swarc a bel et bien conçu un nanar de luxe à savourer indubitablement au second degré, Supergirl demeure aujourd'hui beaucoup plus charmant, attachant, stimulant, pétillant à travers ses tentatives intègres de nous faire rêver en mode artisanal. A l'instar des premiers vols expérimentaux de notre super-héroïne blonde n'ayant rien à envier à ceux de son cousin Superman (que le désormais légendaire Christopher Lee marqua de son empreinte) tant le souffle féerique retranscrit à l'écran nous gratifie la vue. Alors, ok, du point de vue du récit ultra naïf se résumant à l'affrontement redondant entre une sorcière des temps modernes et Supergirl se disputant l'enjeu d'un prince charmant (un jeune jardinier touché par la flèche empoisonnée de Cupidon - ou plutôt de Selena ! -), Supergirl ne s'embarrasse guère de subtilité pour contenter avant tout un public jeune plus sensible à leurs crépages de chignon que leurs parents non dupes de tant de naïveté imbibée de romance à l'eau de rose et de bons sentiments. 


Pour autant, et raison pour laquelle Supergirl est à mon sens destiné à un public finalement FAMILIAL, le spectacle fantaisiste est scandé du dynamisme des scènes d'actions plutôt bien foutues avec ses FX tactiles, et de la spontanéité des personnages pleinement investis dans leur rôle respectif (au point parfois de jouer l'outrance pour certains d'entre eux). Mention majeure à l'illustre Faye Dunaway résolument habitée par son rôle de méchante tant l'actrice prend son rôle très au sérieux à travers l'artillerie de ses supers pouvoirs occultes qu'elle projette contre sa rivale 2h00 durant. Imperturbable et impassible, élégante et raffinée en mode démonial, Faye Dunaway vole donc effrontément la vedette à tout son entourage. Et ce en dépit de la néophyte Helen Slater que je trouve aussi convaincante à travers ses expression candides, ses interrogations morales de super-héroïne en herbe peu à peu motivée par le sens de la justice, de la bravoure et de l'initiation amoureuse. Quand bien même le charme qu'elle nous suscite innocemment à l'écran dépend aussi de la douceur de ses yeux bleus et de la blondeur de son brushing dans sa rutilante panoplie rouge et bleue. On n'en dira pas tant de la présence incongrue de Brenda Vaccaro en adjointe gouailleuse, alter-ego primaire de Selena faisant office de faire-valoir risible, bien que la pilule passe un peu auprès de sa bonne humeur expansive. Et je ne parle même pas du pauvre jardinier qu'Hart Bochner incarne avec une bonhomie puérile (c'est peu de le dire pour les séquences romantiques les plus nunuches !) dans sa fonction de victime intoxiquée par le sérum de l'amour. Mais on lui pardonne bien tant l'acteur atone se prête volontiers au jeu avec esprit bonnard. 


Un divertissement familial bonnard, entre naïveté attendrie, facéties candides et féerie salvatrice. 
Inévitablement maladroit, bancal et parfois ridicule sans toutefois jamais nous irriter ou nous blaser, Supergirl est un plaisir innocent comme on en voit très peu de nos jours. Un gros spectacle raté plein de charme, de fantaisies, d'actions et d'humour involontaire sous l'impulsion d'un casting hybride se prêtant au jeu de la bande dessinée live avec franchise décomplexée. Et rien que pour la présence de l'attachante Helen Slater très à l'aise en super-héroïne novice, Supergirl mérite qu'on y replonge,  nostalgie émotionnelle aidant faisant parfois éclore une féerie divine (ses 1ers vols aériens sur Terre, oui j'insiste !). 

*Eric Binford
3èx

lundi 6 septembre 2021

Time Walker

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Tom Kennedy. 1982. U.S.A. 1h25. Avec Ben Murphy, Nina Axelrod, Kevin Brophy, James Karen, Austin Stoker, Darwin Joston, Antoinette Bower 

Sortie salles France: ?. U.SA: 19 Novembre 1982

FILMOGRAPHIE: Tom Kennedy est un réalisateur américain décédé le 7 Décembre 2011 à West Hills, Los Angeles, California, USA. 1982: Time Walker. 


N'y allons pas par 4 chemins, et pour faire bref, Time Walker est un nanar oublié des années 80 d'un intérêt relativement limité, faute d'une poignée de personnages aussi stupides que puérils, d'un cheminement narratif tout tracé (une fausse momie doit récupérer 5 cristaux pour pouvoir retourner sur sa planète alors qu'un employé de l'université les a dérobé) et d'une réalisation approximative si bien qu'il s'agit de l'unique métrage de Tom Kennedy (décédé en 2011). Pour autant, et pour les fans indéfectibles de nanar, Time Walker est émaillé de moments involontairement cocasses ou amusants, notamment grâce à son doublage français outrancier faisant passer nos héros pour des pieds nickelés décervelés. Se laisse donc voir sans trop d'ennui, notamment en appréciant quelques scènes chocs lorsque les victimes sont contaminées par le champignon de la momie (une moisissure verdâtre qu'il ne faut surtout pas tripoter au risque d'y nécroser l'épiderme). Reste surtout en mémoire sa splendide affiche promotionnelle à l'onirisme crépusculaire. 


*Eric Binford
3èx

vendredi 3 septembre 2021

Beautiful Girls

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com  

de Ted Demme. 1996. U.S.A. 1h52. Avec Timothy Hutton, Matt Dillon, Michael Rapaport, Noah Emmerich, Uma Thurman, Natalie Portman, Max Perlich, Annabeth Gish.

Sortie salles France: Direct to Dvd. U.S: 9 Février 1996

FILMOGRAPHIE: Edward Kern Demme dit Ted Demme est un réalisateur et producteur américain, né le 26 octobre 1963 à New York (États-Unis), décédé d'un arrêt cardiaque le 13 janvier 2002 à Santa Monica. 1993 : Who's the Man? 1994 : Tel est pris qui croyait prendre. 1996 : Beautiful Girls. 1998 : La Loi du sang (Snitch / Monument Ave.). 1999 : Perpète (Life). 2001 : Blow. 2003 : A Decade Under the Influence (en) (documentaire, coréalisé avec Richard LaGravenese). 


Le bon vieux temps n'avait jamais semblé si bon !
 
Inédit en salles chez nous, Beautiful Girls fait parti des meilleures romcoms des années 90 selon mon jugement de valeur. Si bien qu'il laisse une empreinte en nous après plusieurs visionnages (j'en suis à ma 3è fois ce soir). Romance à l'eau de rose standard dénuée de personnalité ? Que nenni ! Beautiful Girls parvenant intelligemment à se démarquer de l'ombre du produit superficiel de par la prestance des illustres comédiens d'une sobre authenticité dans leur fonction de coeur à prendre ou a reconquérir. Il faut dire que son épatante distribution a de quoi aiguillonner le chaland lorsque Timothy Hutton, Matt Dillon, Michael Rapaport, Noah Emmerich, Uma Thurman, David Arquette, Lauren Holly et la juvénile Natalie Portman s'y succèdent à parts égales avec une tendre humilité. Leurs tranches de vie donnant lieu à des moments de tendresse et de drôlerie lestement dosés à travers un esprit de camaraderie faisant vibrer notre corde nostalgique auprès de leur crise trentenaire. Mais au-delà du jeu sans ambages de ces derniers vibrants d'humanité pour leur commun désagrément à tenter d'y consolider l'amour de leur vie, Ted Demme s'y entend pour les dessiner avec une fine attention en dépit de la simplicité de leurs situations intimistes. 


Des apartés et autres dissensions morales (et physiques) évoquant les traditionnels thèmes de la peur de l'engagement et de vieillir, de l'immaturité des hommes en éternels ados souvent trop fascinés par l'apparence des femmes, de la fragilité des hommes et des femmes trahis par l'adultère. Beautiful Girls se focalisant sur cette bande de copains réunis le temps de quelques jours afin de faire le point sur leur situation sentimentale. Timothy Hutton débarquant dans son ancienne ville dans sa modeste carrure d'amant contrarié ne cessant de douter de ses sentiments éprouvés pour Tracy. Quand bien même Umma Thurman débarque chez eux en invitée improvisée en éveillant chez ces messieurs ce goût euphorisant que l'on ressent lors des premières rencontres amoureuses. Quant à Nathalie Portman, elle explose l'écran du haut de ses 13 ans à trois reprises à travers ses ambigus rapports à la fois tendres et amiteux envers Willie (Timothy Hutton) allègrement perturbé par sa nature amoureuse d'une sincérité trouble pour son âge adolescent. Ces séquences intimistes bâties sur un jeu de séduction aussi amical que sentimental demeurant selon moi les moments les plus poignants et bouleversants grâce prioritairement à l'expressivité prude de Nathalie Portman hyper attendrissante en ado pressée de grandir afin de cueillir le véritable amour. Alors que Willie ose confier à l'un de ses acolytes qu'il serait prêt d'attendre ses 18 ans pour s'engager avec elle. Une réflexion à la fois outrée et lunaire, un questionnement presque immoral  que Willie se torture dans sa quête idéaliste d'y dénicher la perle rare. Mais tout rentrera dans l'ordre auprès de son initiation à la sagesse d'esprit et à la confiance en l'être aimé. 


Plein de charme et de tendresse en y alliant romcom et film de copains, Beautiful Girls sonne juste en toute simplicité à travers l'humanisme tourmenté de cette poignée de protagonistes d'une sensibilité louablement gratifiante pour y parfaire leur destin amoureux. Son casting quatre étoiles irréprochable parvenant à nous faire omettre leur stature starisée sous l'impulsion d'une commune émotivité solidaire.
Oubliez donc vos préjugés pour laisser sa chance à ce joli moment d'émotions servi par la superbe musique de David A. Stewart.

*Eric Binford
3èx

jeudi 2 septembre 2021

Les Envahisseurs sont parmi nous

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site thevintagetoyadvertiser.org

"Strange Invaders" de Michael Laughlin. 1983. U.S.A. 1h34. Avec Paul Le Mat, Nancy Allen, Diana Scarwid, Michael Lerner, Louise Fletcher, Wallace Shawn, Fiona Lewis

Sortie salles France: 23 Octobre 1985. U.S: 16 Septembre 1983.

FILMOGRAPHIEMichael Laughlin est un réalisateur, producteur et scénariste américain. 1981 : Strange Behavior. 1983 : Les envahisseurs sont parmi nous. 1986 : Mesmerized. 


Entre tous les univers, ils ont "hélas" choisi le notre... 
Il y a de p'tits métrages sans prétention qui parviennent à se bonifier avec le temps, et les Envahisseurs sont parmi nous fait parti de ceux là. Si bien qu'à l'époque de sa VHS locative (oh combien granuleuse !) je n'étais guère aussi enthousiaste et immergé qu'à ma revoyure actuelle. Car jouant la carte de la nostalgie à travers l'hommage naïf aux films d'extra-terrestres des années 50, cette pure série B fleurant bon l'innocence et la simplicité dégage un charme envoûtant auprès de sa trame somme toute classique mais attachante. Ainsi, de par ses maladresses constantes d'une réalisation perfectible mais oh combien sincère (Michael Laughlin est uniquement responsable de 3 métrages), et la bonhomie candide de ses comédiens de seconde zone (mention spéciale à l'inexpressif Paul Le Mat alors qu'il parvient miraculeusement à imposer une présence avenante en héros en herbe de dernier ressort), les Envahisseurs sont parmi nous parvient à nous plonger dans son univers surnaturel avec parfois un brin d'onirisme enchanteur (les sphères humaines fluorescentes voguant dans les airs). Pour ce faire, on reste plutôt surpris par la qualité artisanale des effets-spéciaux et maquillages parvenant à crédibiliser les métamorphoses des extra-terrestres alors que leur vaisseau spatial en forme de gros cigare se fige dans le ciel sous un horizon magnifiquement rosé (cachet féérique garanti !). 


Hommage assumé aux Envahisseurs créé par Larry Cohen et à cette pléthore de séries B bricolées parmi l'astuce de bouts de ficelle, les Envahisseurs sont parmi nous reprend le cheminement prosaïque du héros difficile à convaincre son entourage lorsque sa fille est retenue prisonnière de méchants E.T. Mais lors d'un concours de circonstances heureuses, et grâce à son investigation personnelle, Charles Bigelow s'entourera de mains secourables durant son périple. Tant auprès d'un témoin capital interné en psychiatrie, d'une journaliste (Nancy Allen toujours aussi charnelle) et d'une spécialiste d'études en OVNI, que de la présence subsidiaire de sa mystérieuse épouse disparaissant et apparaissant à sa guise. Mené sur un rythme soutenu, alors que certains évènements se précipitent un peu trop rapidement à travers son montage elliptique, le divertissement parvient agréablement à ranimer nos souvenirs d'antan lorsque nous étions fascinés, les yeux d'enfants pleins d'étoiles, par la Guerre des Mondes et les Envahisseurs de la Planète Rouge


Et si ce métrage plein de charme ne reste qu'un gentillet spectacle résolument mineur et inoffensif, l'amour, l'attention et l'intégrité que portent le réalisateur à ses personnages, à son histoire, à ses FX et à sa bourgade rurale (soigneusement photographiée qui plus est) parvient à redorer nos émotions enfantines avec un sens de fascination fantasmagorique. 

*Eric Binford
2èx

mercredi 1 septembre 2021

Psychose Meurtrière

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"The Vagrant" de Chris Walas. 1992. U.S.A/France. 1h31. Avec Bill Paxton, Michael Ironside, Marshall Bell, Marc McClure, Mitzi Kapture, Colleen Camp.

Sortie salles France: ?. U.S: 16 Mai 1992

FILMOGRAPHIE: Chris Walas est un réalisateur américain, né en 1955 à Chicago, Illinois, U.S.A. 1989: La Mouche 2. 1990: Les Contes de la Crypte (Série TV, épisode: Till Death). 1992: Psychose Meurtrière.


Street Trash.
Comédie horrifique oubliée des années 90, Psychose Meurtrière nous relate l'épreuve morale d'un cadre venant d'emménager dans sa nouvelle demeure auquel un invité surprise lui rendra la vie impossible. Celui-ci insalubre (c'est peu de le dire) n'étant autre que le SDF du coin ne cessant d'apparaître dans l'habitacle de sa demeure au point de rendre littéralement paranoïaque son propriétaire à deux doigts d'effleurer la folie monomane. Tant et si bien qu'une des voisines de la bourgade est un jour retrouvée découpée en morceaux ! Ainsi, la police dépêchée sur place suspecte rapidement l'attitude erratique de Graham Krakowski, cadre timoré incapable de s'opposer à l'impériosité de son patron sarcastique. Réalisé par Chris Walas, uniquement responsable du très honnête La Mouche 2, Psychose Meurtrière empreinte clairement la voie du cartoon live à travers son lot de séquences déjantées où chaque personnage lunaire ne cessera d'y martyriser ou de brocarder notre héros replié dans l'impuissance la plus préjudiciable. Chaque membre de son entourage, amical ou sentimental, n'accordant que peu de crédit à son malaise obsessionnel d'y fustiger le malheureux vagabond tentant de survivre sur les trottoirs après avoir été trahi par sa hiérarchie professionnelle. 


Psychose Meurtrière
jouant la carte de la satire semi-parodique contre le capitalisme, le matérialisme et la bureaucratie du point de vue d'un cadre servile réduit en esclavage pour y préserver sa place. A la fois débridé, cocasse, badin, puis quelque peu déconcertant quant à la tournure horrifico-cauchemardesque de sa trame vengeresse, Psychose Meurtrière inquiète et amuse tout en nous égarant un peu en cours de route auprès de son parti-pris d'y communier les genres avec une ironie sardonique autrement outrée par moments. Le spectateur en proie au doute se questionnant sur la moralité névrotique de Graham victime de persécutions et d'hallucinations (notamment auprès de ses crises de somnambulisme) auprès d'un SDF gouaillant le méchant tortionnaire. Et donc, en dépit de sautes d'humeur un tantinet déstabilisantes, Psychose Meurtrière détonne intelligemment en semant le doute sous l'impulsion d'un Bill Paxton davantage malaisant à travers son initiation à l'affirmation et à la révolte dans sa condition proscrite. On peut d'ailleurs parfois songer au cartoon survolté Mort sur le Grill, autre parodie vrillée concoctée avec amour, ferveur et astuces par le néophyte Sam Raimi motivé par l'hyperbole.


*Eric Binford. 
2èx

mardi 31 août 2021

L'Oeil du Tueur

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"White of the Eye" de Donald Cammell. 1987. Angleterre. 1h52. Avec David Keith, Cathy Moriarty, Alan Rosenberg, Art Evans, Michael Greene, Danielle Smith

Sortie salles France: 9 Mai 1987 (marché du film de Cannes). Angleterre: 19 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: Donald Cammell est un réalisateur, scénariste et acteur anglais né le 17 Janvier 1934 in Edinburgh, Scotland, UK, décédé 24 Avril 1996 à Hollywood, California, USA. 1999: The Argument (Short). 1999 U2: The Best of 1980-1990 (Video documentary) (video "Pride"). 1995 Wild Side (as Franklin Brauner). 1993 U2: Love Is Blindness (Video short). 1987 L'oeil du tueur. 1985 The Hooters: All You Zombies (Video short). 1984 U2: Unforgettable Fire (Documentary short) (video "Pride"). 1984 U2: Pride (In the Name of Love), Version 1 (Video short). 1977 Génération Proteus. 1970 Performance. 


"L'amour est un séducteur qui vous caresse, vous charme, vous aveugle en faisant briller à vos yeux une promesse de bonheur, et qui tout à coup vous perce le cœur et laisse le poignard dans la blessure, pour que la rouille du souvenir l'envenime et vous fasse périr d'une mort lente."
Exploité chez nous en Vhs sous la bannière de Warner Home Video, l'Oeil du Tueur est l'archétype idoine du prototype maudit de par son invisibilité et sa faible reconnaissance. Et ce bien qu'il me semble qu'à l'époque Mad Movies l'eut défendu dans sa rubrique video (à moins de vérifier dans les pages de son confrère l'Ecran Fantastique). Ayant eu l'opportunité de le louer à l'époque de mon adolescence, il me resta en mémoire surtout pour son ambiance hors-pair et ses séquences chocs (dont celle hallucinée où la victime est contrainte de se regarder agoniser face à un miroir !!!) en dépit de mes vagues réminiscences. Je me souviens également que l'animatrice Sangria en fit chaudement la promotion à travers son émission culte "Les Accords du Diables" en reprenant louablement son préambule meurtrier clippesque. Ainsi, à la revoyure ce soir, quelle ne fut pas ma stupeur de me confronter à un véritable "coup de coeur" si bien que ce psycho-killer omis de tous ne ressemble à rien de connu. On peut même d'ailleurs évoquer le terme "culte" tant le réalisateur british (créateur entre autre du fameux Generation Proteus !); s'efforce de rendre hétérodoxe son thriller horrifique à travers une réalisation à la fois alambiquée, autonome et stylisée. Car expérimental, bizzaroïde, envoûtant, créatif, équivoque et inquiétant, l'Oeil du Tueur s'extirpe de la convenance de son intrigue linéaire en privilégiant une atmosphère indicible littéralement magnétique. Et ce sous l'impulsion d'un score musical parfois planant esquissant une poignée de personnages contrariés confrontés à l'adultère. Ce qui m'a d'ailleurs évoqué à plusieurs reprises le 6è Sens de Michael Mann, tant pour son ambiance onirico-morbide, son thème sur la famille et l'amour du couple que pour sa photo esthétisante extrêmement chiadée si bien que selon une certaine source du net que j'ai pu entrevoir, la réalisateur aurait été autrefois peintre. 


Le récit somme toute simpliste décrivant avec force visuelle et détails ésotériques les exactions d'un mystérieux assassin s'en prenant à de jeunes femmes esseulées au sein de leur foyer en Arizona. La cadre naturel montagneux étant parfaitement exploité autour de villas huppées à l'architecture contemporaine. Donald Cammell usant et abusant de zooms agressifs, plans tarabiscotés et longs travellings afin d'enrichir sa mise en forme constamment inventive, de manière à rester sur le qui-vive de la future séquence impromptue à venir. On peut d'ailleurs penser au cinéma d'Argento bien que l'Oeil du Tueur parvient aisément à se dégager de l'ombre de l'épigone à travers sa personnalité de proposer au spectateur une sorte de voyage au bout de l'enfer mystique que l'on ne voit pas arriver. C'est d'ailleurs ce que nous confirme l'intrusion soudaine de sa seconde partie lorsque l'identité de l'assassin est subitement révélée (en me suscitant un profond malaise même si inévitablement on peut anticiper son véritable profil). Tant et si bien que l'aspect autrement jouissif du film marginal émane de son imprévisibilité à émailler le récit de séquences incongrues aussi stupéfiantes que déconcertantes. Comme le prouve à nouveau son final explosif confiné au coeur d'une carrière auquel les personnages lunaires révéleront un peu plus leur fêlure morale à travers leur frustration amoureuse et sexuelle. Et si l'Oeil du Tueur s'avère aussi captivant qu'étonnamment cosmique il le doit aussi largement à la qualité indiscutable de sa distribution (David Keith / Cathy Moriarty - sosie blonde de Karole Rocher - en tête !) communément impliquée dans leur fonction victimisée et/ou revancharde. Sur ce point essentiel les comédiens font le job sans jamais déborder si bien que l'on s'attache pleinement à eux, même auprès des plus névrosés, pour ne pas dire des plus psychotiques. Le cinéaste suscitant une réelle empathie auprès du thème du dépit sentimental tributaire d'un amour aveugle.


Bref, à travers son format de série B étonnamment maîtrisée (alors que le réal très discret est surtout connu d'avoir enfanté Generation Proteus !), l'Oeil du Tueur bouleverse les codes du psycho-killer avec autant d'intelligence que d'audaces en nous confrontant à une étrange confrontation cérébrale entre victime(s) et tueur (je ne peux pas en dire plus au risque d'ébruiter trop d'indices). Le tout baignant dans un esthétisme onirique franchement singulier de par la diversité harmonieuse des couleurs où rien n'est laissé au hasard du cadre (naturel ou domestique). A découvrir d'urgence alors qu'une multitude d'images iconiques et de visage marqués vous resteront imprimés dans l'encéphale.  

*Eric Binford
2èx 

vendredi 27 août 2021

Sweet Sixteen

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Jim Sotos. 1983. U.S.A. 1h28. Avec Bo Hopkins, Susan Strasberg, Don Stroud, Dana Kimmel, Aleisa Shirley, Glenn Withrow

Sortie salles U.S: 16 Septembre 1983. Inédit en salles en France.

FILMOGRAPHIE: Jim Sotos est un réalisateur et producteur américain. 2011: Darla Z Live from Las Vegas (TV Special). 1991 Little Scams on Golf (Video short). 1989 L'Héritier de Beverly Hills. 1984 Hot Moves. 1983 Sweet Sixteen. 1976 Viol sans issue. 1976 The Super Weapon (Documentary) (co-director). 


En pleine vague du psycho-killer, l'inconnu Jim Sotos exploite le filon en 1983 avec Sweet Sixteen  scandé d'une resplendissante affiche promotionnelle ! Un thriller horrifique donc, aussi méconnu que peu renommé, eu égard de son intrigue linéaire mollement dépeinte, et ce en dépit de son attachant casting de seconde zone (Bo Hopkins, Susan Strasberg, Don Stroud, Dana Kimmel) que Jim Sotos dirige hélas maladroitement (même si on a connu bien pire auprès de séries Z standards). A l'instar du jeu tacitement complexé de l'illustre Patrick Macnee peu à l'aise dans celui du père gentiment autoritaire auprès des mâles en rut osant courtiser sa fille mythomane. Aleisa Shirley endossant sans trop d'ambiguïté (en dépit de son goût pour le baratin afin d'attirer l'attention de l'entourage machiste) le rôle de Melissa avec une sensualité résolument érotisante. Il faut dire que l'actrice juvénile dégage un charme naturel spécialement concupiscent dans son petit corps fluet aussi torride que décomplexé (d'où le présence de plusieurs scènes de nu que le spectateur reluque sans se culpabiliser d'un certain voyeurisme). Bref, sa ténébreuse présence charnelle, ses petits yeux lestement aguicheurs portent parfois leurs fruits à travers certaines séquences d'intimité esseulée ou amoureuse que l'on observe avec modeste fascination. 


D'autre part, Sweet Sixteen dégage parfois un certain charme à travers son ambiance horrifique feutrée (notamment auprès des séquences de nuit se déroulant dans la nature forestière) et auprès de son microcosme rural auquel une poignée de citadins y résident dans la bonne humeur, l'entraide et la cordialité de par leur commune nativité régionale. Or, le gros problème de cette série B jamais habile réside dans la structure approximative d'une intrigue guère passionnante en dépit de quelques éclairs de violence. Des meurtres filmées en mode "Psychose" lorsque l'assassin décime ses victimes d'un point de vue subjectif. L'enquête mollement dirigée par le shérif du coin (l'attachant Bo Hopkins fait ce qu'il peut à travers ses mimiques avenantes ou autrement castratrices) demeurant peu convaincante quant aux maigres indices instillés parmi l'assistanat de ses propres enfants jouant aux détectives en herbe. Quand bien même pour y semer doute et suspicion auprès du cadre criminel (un ancien cimetière indien), on utilise le cliché du racisme lorsque les ivrognes du coin (Don Stroud est à sa place en grande gueule triviale) stigmatise la communauté indienne auprès d'un père et de son fils qui n'avaient rien demandé. 


En dépit de la bonne volonté du réalisateur à tenter de façonner un honnête psycho-killer, Sweet Sixteen est quelque peu plombé par la langueur de son intrigué guère captivante en dépit de ces aimables trognes qui se succèdent au cours de l'action et d'un final gentiment surprenant pour autant alourdi d'un ultime rebondissement éculé. On se réconforte tout de même sur son ambiance horrifique parfois magnétique et sur le charme envoutant de l'actrice Aleisa Shirley (bien que mal dessiné quant à sa caractérisation morale prémâchée) en y retenant avec amère mélancolie (de ce qu'aurait pu être le film s'il avait pu bénéficier d'une structure narrative plus solide !) l'entêtante chanson "Melissa" interprétée par Frank Sparks
Fréquentable toutefois pour les afficionados cléments...

Remerciement à Contrebande Vhs.

*Eric Binford