mercredi 22 juillet 2015

SPEED

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

de Jan De Bont. 1994. U.S.A. 1h56. Avec Keanu Reeves, Dennis Hopper, Sandra Bullock, James DuMont, Joe Morton, Jeff Daniels.

Sortie salles France: 24 Août 1994. U.S: 10 Juin 1994

FILMOGRAPHIE: Jan De Bont est un réalisateur, directeur de photo et producteur néerlandais, né le 22 Octobre 1943 à Eindhoven, Pays-Bas.
1994: Speed. 1996: Twister. 1997: Speed 2. 1999: Hantise. 2003: Lara Croft, le berceau de la vie.


Immense succès planétaire lors de sa sortie, Speed n'a pas usurpé sa réputation de modèle du film d'action tant Jan De Bont redouble d'efficacité à relancer les enjeux de survie parmi l'efficacité de stratagèmes d'attaques et de défense, et vice-versa ! Par l'entremise d'un concept aussi retors que redoutablement pernicieux (un bus est contraint de dépasser la vitesse de 50 miles à l'heure pour éviter de faire exploser ses passagers à tous moments !), Speed puise sa vigueur dans la métronomie de séquences d'action ébouriffantes sachant que le véhicule pris en otage à distance est incessamment contraint de rouler à vive allure afin d'éviter le crash.


En empruntant le schéma du cinéma catastrophe, l'intrigue alerte s'agence autour t'intimidations et retournements de situations d'un jeu avec la peur compromis entre bons et méchant. A ces rapports de force concertés à distance vont découler dommages accidentels (véhicules et balises fauchés dans les centres urbains) et incidents techniques (fuite de carburant, crevaison de pneu !) par le biais d'une interminable course-poursuite sur bitume ! Si certaines situations à risque relèvent de l'improbabilité (le vol plané du bus à partir d'une parcelle manquante de l'autoroute, Jack réfugié sous le car afin de désamorcer la bombe ou de prendre la fuite sur une planche de métal parmi sa compagne, et enfin son audace de dernier ressort en interne d'un compartiment ferroviaire !), la perfection des effets spéciaux, la rigueur de ces cascades épiques et surtout le sens du détail imparti aux solutions de survie parviennent à crédibiliser ces tours de force vertigineux ! Epaulé de la prestance sarcastique du diablotin Dennis Hopper (sorte de "Jocker" moderne féru de cynisme dans son propos orgueilleux de nuire aux otages et ridiculiser le jeune héros redresseur de tort !) et du duo communément pugnace que forment Keanu Reeves et la pétillante Sandra Bullock, Speed parvient à captiver le spectateur dans une série d'épreuves de force érigées autour d'une cage d'ascenseur, d'un autobus infernal et (pour parachever) d'un train.


Conçu à la manière d'un tour de montagne russe où l'action incessante est entièrement impartie au cheminement intrépide d'une intrigue fertile en péripéties, Speed peut sans rougir accéder au panthéon des plus grands films d'action des années 90. Si la mise en scène avisée de Jan De Bont, l'originalité du pitch et le réalisme des effets spéciaux nous plaquent au fauteuil dans le quotient de son intensité émotionnelle, la complicité attachante formée par le couple Keanu Reeves/Sandra Bullock et la présence roublarde de Dennis Hopper décuplent l'effervescence dans leur inimitié infatigable. 

Bruno Matéï
3èx

Récompenses: Oscars 1995:
Oscar du meilleur son
Oscar du meilleur montage sonore
BAFTA Awards 1995
Meilleur montage
MTV Movie Awards 1995
Meilleure actrice pour Sandra Bullock
Meilleur duo pour Keanu Reeves et Sandra Bullock
Meilleur méchant pour Dennis Hopper
Meilleure scène d'action pour l'échappée du bus et l'explosion de l'avion.
Saturn Awards
Meilleure actrice pour Sandra Bullock

La critique de Mathias Chaput: 
« Speed » est un modèle du genre, mélange entre film d’action, polar et film catastrophe, ce métrage est un pur régal !
Certes, on a du mal à y croire, mais le talent de Jan de Bont parvient à faire admettre, même au spectateur le plus blasé, l’iréel !
Des plans incroyables (comme la scène de l’ascenseur au début) et le filin accroché à une poutre sur le toit de la tour qui retient le câble de l’ascenseur, l’explosion du bus (vide) qui vient s’encastrer sur un avion long courrier et surtout le coup magistral de Jack allongé sur le dos sur une planche à roulettes parvenant à passer sous le bus en essayant de désamorcer la bombe, le tout à grande vitesse !
Des séquences de folie pure qui font redoubler le stress vécu par le spectateur jusqu’à une issue salvatrice clôturée par un happy end un peu nunuche, reconnaissons le ! mais ici on est à Hollywood !
Dennis Hopper est magistral et nous régale d’une composition dont seul lui a le secret, il est génial en terroriste déjanté et expert en explosifs !
Keanu Reeves est rempli de testostérone et livre un combat sans merci pour éradiquer le mal et faire triompher la justice !
Sandra Bullock ajoute un charme et sa féminité est bienvenue au milieu de cet univers de mâles…
Le passage de la « poussette » vaut son pesant de cacahuètes et respire la déstabilisation, parfaitement bien rôdée et amenée dans le déroulement du métrage, accentuant une nouvelle fois le stress chez le spectateur, déjà particulièrement éprouvé !
La décapitation sur le toit de la rame du métro est également bien vue !
Un excellent film, « Speed » est un concentré d’action, un florilège de scènes dynamiques où cela n’arrête pratiquement jamais une seule seconde ! (la remise des médailles est le seul temps mort du film, tout le restant n’est qu’action pure à 200 à l’heure !).
A voir et revoir avec le même plaisir !
9/10

mardi 21 juillet 2015

The American Way. Prix du Jury, Prix de la Critique, Prix Antenne d'Or, Avoriaz 1987.

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Riders of the Storm" de Maurice Phillips. 1986. Angleterre/U.S.A. 1h45. Avec Dennis Hopper, Michael J. Pollard, Eugène Lipinski, James Aubrey, Al Matthews, William Armstrong.

Sortie salles France: 27 Mai 1987. U.S: 7 Mai 1988.

FILMOGRAPHIE: Maurice Phillips est un réalisateur, acteur et scénariste américain, né le
1986: American Way. 1990: Un cadavre sur les bras. 1991: Another You. 1996: The Vanishing Man (télé-film). 2000: Second Sight: Parasomnia (télé-film). 2003: Dr Jekyll et My Hyde (télé-film). 2006: Losing Gemma (télé-film).

 
Satire féroce de la guerre du Vietnam, du fanatisme religieux et d’un corps politique gangréné — notamment par l’extrême droite — The American Way emprunte les atours d’une série B décomplexée pour vilipender l’Amérique puritaine, où l’apparence n’est que duperie destinée à mieux manipuler un peuple de masse lobotomisé.
  
Le Pitch: À bord d’un avion rafistolé, une poignée d’anciens vétérans du Vietnam survolent les États-Unis pour pirater les ondes hertziennes du petit écran. En prime, afin de saboter l’ascension d’une candidate conservatrice aux prochaines présidentielles, ils orchestrent des attentats symboliques lors de ses apparitions télévisées. Mais à l’instant même où ils s’apprêtent à démasquer son imposture corporelle, cette dernière ordonne à l’armée de l’air de pulvériser leur appareil au moyen de missiles nucléaires.


Ovni improbable, où l’étiquette “culte” reprend enfin tout son sens, The American Way s’érige en vilain petit canard du cinéma : une production mal élevée, un premier film se vautrant dans le politiquement incorrect avec une insolence ravageuse. Porté par l’iconographie débridée d’insurgés jubilant dans leurs pitreries anarchistes et défiances anti-gouvernementales, le récit enchaîne provocations verbales et visuelles sans jamais lever le pied. Vêtus de défroques militaires qui évoquent les anti-héros de BD underground, ces justiciers de fortune font de leur rébellion une parade pop, grotesque et jubilatoire. Véritable bras d’honneur au consensus médiatique, aux lobbies rampants et aux discours démagos, Maurice Phillips raille sa république avec une verve délirante — jusqu’à transformer, une candidate, mais chut... Émaillé de rebondissements explosifs, de rencontres improbables avec des mafieux burlesques et un E.T blafard, The American Way insuffle un vent de liberté euphorisant, porté par des vétérans hédonistes, alcoolisés, drogués, rock'n'roll jusqu’à la moelle, galvanisés par une bande-son démoniaque.


Hymne à l’indépendance d’esprit, à la sous-culture, à l’éthique du “fuck the system”, The American Way transfigure sa diatribe déchaînée contre la guerre, la soumission, le totalitarisme et l’intégrisme. Et si l’intrigue rocambolesque et la réalisation chancelante manquent parfois de rigueur dans leur construction rythmique, l’éloquence survitaminée des comédiens emporte tout sur son passage, dans un élan aussi héroïque que dévergondé. De la graine de comédie culte, subversive et transgressive, pour le plus grand bonheur du cinéphile frondeur !

Bruno Matéï
4èx

lundi 20 juillet 2015

GOODNIGHT MOMMY. Prix du Jury Syfy, Prix du Jury Jeunes, Gerardmer 2015.

                                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Ich seh Ich seh" de Severin Fiala et Veronika Franz. 2014. Autriche. 1h40. Avec Susanne Wuest, Elias Schwarz, Lukas Schwarz, Hans Escher, Elfriede Schatz, Karl Purker.

Sortie salles France: 13 Mai 2015. Autriche: Janvier 2015

FILMOGRAPHIE: Severin Fiala est un réalisateur, scénariste, acteur producteur autrichien. Veronika Franz est une réalisatrice et scénariste autrichienne. 
2014: Goodnight Mommy


Expérience hermétique avec l'insolite, de par son environnement high-tech aussi épuré que baroque, son cheminement dramatique abrupt et surtout la posture interlope des protagonistes en phase de questionnement, Goodnight Mommy déroute et dérange jusqu'au malaise d'une dernière partie surfant avec la torture physique. Sans fioriture et avec une volonté de bousculer les habitudes du spectateur, ce huis-clos nous fait suivre le chemin de croix d'une mère molestée par ses progénitures, deux frères jumeaux incapables de l'identifier depuis son opération chirurgicale. Car défigurée, distante et castratrice, cette dernière adopte une posture antipathique à leurs égards au point de leur remettre en doute son identité maternelle. Toujours plus suspicieux, les enfants décident de l'emprisonner dans sa chambre pour mieux l'interroger et tenter d'y démasquer l'éventuelle imposture


Dans la lignée du cinéma de Lynch et de Haneke, Goodnight Mommy réfute le divertissement conventionnel, le film empruntant les genres du drame et de l'horreur avec réalisme clinique et climat d'étrangeté que le mutisme des personnages renforce sans sourciller. Esthétiquement avisé et nanti d'un onirisme crépusculaire parfois envoûtant, cet étonnant jeu de pouvoir entre la candeur de l'enfance et l'autorité de leur génitrice ne provoque aucune empathie pour leur étude caractérielle destituée de béatitude. Privilégiant notamment le non-dit et le nonsensique dans leur comportement hétérodoxe (notamment ce goût singulier pour la passion des cafards !), Severin Fiala et Veronika Franz distillent autour d'eux une froide atmosphère feutrée parmi l'architecture moderne d'une résidence ornée de silhouettes diaphanes (le design baroque imparti aux ombres chinoises des portraits du salon). Sans faire preuve d'outrance et de trivialité, le film évolue vers une direction toujours plus malsaine quant à l'entêtement des enfants réduits en bourreaux malgré eux, mais sans que l'un d'eux ne cède au plaisir pervers pour leurs exactions punitives. Si l'intrigue linéaire peut laisser perplexe au premier abord dans la motivation des personnages et le sens de leur démarche, les cinq dernières minutes viennent tout remettre en question sur ce que nous venons d'assister afin d'élucider Spoiler !!! une réflexion sur le deuil, l'incapacité d'en assumer le fardeau et l'influence dépressive qu'il peut engendrer sur notre inconscient vis à vis des thèmes du double, du traumatisme et de la gémellité. Fin du Spoiler.


Langoureux par la monotonie de son rythme et donc difficile d'accès pour certains, Goodnight Mommy n'est pas conçu pour plaire au public de masse tant cette épreuve psychologique monopolise le climat d'inquiétude et la posture équivoque des personnages avec une singularité auteurisante.
Pour public averti.

Bruno Matéï
La critique de Audrey Jeamart: http://scopophilia.fr/goodnight-mommy-conte-cruel-de-la-jeunesse/

RécompensesFestival international du film de Catalogne 2014 : « Official Fantàstic Panorama Selection » - Grand prix du film fantastique européen en argent
Festival international du film de Thessalonique 2014 : « International Competition » - Prix FIPRESCI
Festival international du film fantastique de Gérardmer 2015 : Prix du Jury Syfy et Prix du Jury Jeunes
Festival Hallucinations Collectives 2015 : Grand prix du festival (prix du public)


lundi 13 juillet 2015

KAMIKAZE

                                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site forums.resistance.tk

de Didier Grousset. 1986. France. 1h29. Avec Richard Bohringer, Michel Galabru, Dominique Lavanant, Romane Bohringer, Etienne Chicot, Harry Cleven, Riton Liebman.

FILMOGRAPHIE: Didier Grousset est un réalisateur français.
1986: Kamikaze. 1990: Rendez-vous au tas de sable. 1994: Eclats de Famille (télé-film). 1995: Le Fils de Paul (télé-film). 2000: Le Coup du Lapin (télé-film). Dans la gueule du loup (télé-film). 2001: Permission Moisson (télé-film). 2003: Il court, il court le furet (télé-film). 2003: Retour aux Sources (télé-film). 2005: Confession d'un menteur (télé-film). 2006: Le Chapeau du P'tit Jésus (télé-film). 2006: Mariés... ou presque ! (télé-film). 2007: Un Crime très populaire (télé-film). 2008: Il faut sauver Saïd (télé-film). 2009: Sur le chemin de Compostelle (télé-film)/ 2012: La Smala s'en mêle (télé-film).


Produit et co-scénarisé par Luc Besson, Kamikaze est un petit ovni oublié des années 80, le premier long-métrage de Didier Grousset, ancien assistant réalisateur de Subway. Partant d'un concept d'anticipation particulièrement débridé (tuer à distance les speakerines de la TV par le biais d'une arme électronique), Kamikaze privilégie la dérision sardonique lorsqu'un savant limogé décide de se venger de la société en façonnant une machine révolutionnaire. Satire du milieu des médias pour la caricature grotesque impartie aux speakerines, cette comédie noire doit beaucoup de son attrait à l'audace d'un humour au vitriol, comme le souligne la posture extravagante du grand Michel Galabru, surjouant un misanthrope habité par la haine depuis son licenciement abusif. Fuyant son ennui devant son poste de téléviseur mais toujours plus irrité par la vulgarité des émissions présentées par des speakerines aseptiques, il décide de se convertir en exterminateur afin de démontrer toute l'étendue de son génie. Sans surprise mais efficace, l'intrigue linéaire repose ensuite sur l'investigation ardue de l'inspecteur Pascot (campé avec aisance autorité par l'excellent Richard Borhinger), délibéré à déjouer les nouvelles exactions criminelles d'Albert (savant-fou davantage compromis par sa déchéance meurtrière !), et s'efforçant de lui tendre un piège par le biais de son invention électromagnétique. Outre le caractère délirant d'une situation aussi saugrenue (supprimer les présentateurs TV les plus importuns à travers l'écran du tube cathodique et à distance d'une arme électronique), le film distille un climat parfois dérangeant dans la manière outrancière dont Galabru dessine son personnage, entre verve insolente et irascibilité sans vergogne (à l'instar du sort tragique alloué à deux protagonistes lors de la dernière partie). L'atmosphère insolite et décalée baignant dans un style ravageur d'humour noir, d'action sanguinolente (scènes-chocs hilarantes à l'appui lorsque l'estomac des speakerines explosent de manière aussi furtive qu'inopinée !) et de suspense gentiment fonctionnel, le tout rythmé sur l'onirisme d'un score envoûtant d'Eric Serra !


Hormis quelques scènes inutiles (la relation paternelle de Pascot avec sa fille, sa fausse idylle avec sa collègue Laure Frontenac) et la négligence de certains seconds-rôles (Kim Massee peine un peu à convaincre dans la peau d'une nièce d'une bonhomie excessive), Kamikaze assure le sympathique divertissement d'une curiosité hybride parmi l'excentricité d'un Michel Galabru aussi grotesque qu'étrangement délétère. A réserver en priorité aux cinéphiles nostalgiques !

Bruno Matéï
2èx

vendredi 10 juillet 2015

La Guerre des Mondes / War of the Worlds

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site war-ofthe-worlds.co.uk

de Steven Spielberg. 2005. U.S.A. 1h56. Avec Tom Cruise, Dakota Fanning, Justin Chatwin, Henry Jane Watson, Miranda Otto, Tim Robbins, Rick Gonzales.

Sortie salles France: 6 Juillet 2005. U.S: 29 Juin 2005

FILMOGRAPHIE: Steven Allan Spielberg, Chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur est un réalisateur, producteur, scénariste, producteur exécutif, producteur délégué et créateur américain, né le 18 décembre 1946 à Cincinnati (Ohio, États-Unis).
1971: Duel , 1972: La Chose (télé-film). 1974: Sugarland Express, 1975: Les Dents de la mer, 1977: Rencontres du troisième type, 1979: 1941, 1981: les Aventuriers de l'Arche Perdue, 1982: E.T. l'extra-terrestre , 1983: La Quatrième Dimension (2è épisode), 1984: Indiana Jones et le Temple maudit, 1985: La Couleur pourpre, 1987: Empire du soleil, 1989: Indiana Jones et la Dernière Croisade, Always, 1991: Hook, 1993: Jurassic Park, La Liste de Schindler, 1997: Le Monde Perdu, Amistad, 1998: Il faut sauver le soldat Ryan Saving Private Ryan, 2001: A.I., 2002: Minority Report, Arrête-moi si tu peux, 2004: Le Terminal , 2005: La Guerre des Mondes, 2006: Munich, 2008: Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal, 2011: Les Aventures de Tintin, cheval de guerre. 2012: Lincoln. 2015: Le Pont des Espions.


Spectacle pyrotechnique à couper le souffle, de par les moyens dantesques mis en oeuvre pour l'ampleur de séquences catastrophes aux FX numériques ahurissants de réalisme, La Guerre des Mondes s'impose comme une relecture du fameux roman de H.G Wells déjà adapté à l'écran par Byron Haskin en 1953. Reprenant le concept éculé d'une invasion extra-terrestre délibéré à éradiquer notre planète pour mieux s'y implanter, Steven Spielberg parvient à réinventer le genre grâce à la virtuosité de sa mise en scène multipliant les séquences anthologiques au service d'une narration simple mais efficace. En se focalisant sur les tentatives de survie d'un père divorcé et de ses deux enfants, pris à parti avec la menace extra-terrestre d'engins destructeurs, Steven Spielberg parvient à cultiver l'intérêt de leurs pérégrinations au sein d'un monde réduit au chaos. Souvent spectaculaire et inventif dans les séquences de destructions massives (à l'instar de son prélude catastrophiste !), La Guerre des Mondes en profite pour souligner l'instinct ingrat de notre civilisation lorsque nous sommes confrontés à une situation apocalyptique échappant à notre contrôle. Parmi ces foules humaines en panique, des centaines de survivants tentent d'embarquer à bord d'un paquebot après avoir tenté de dérober un véhicule au mépris de la vie de ces occupants. 


A travers leur comportement individualiste surmené par la peur de l'inconnu et de trépasser à tous moments, Spielberg intensifie le réalisme d'un climat ténébreux lorsqu'ils parcourent les plaines d'un environnement belliqueux. Face à cette hécatombe humaine engendrée par les tripodes avides de mégalomanie, on peut peut-être y percevoir une métaphore sur le génocide juif au vu de leur éradication expéditive, les extra-terrestres se substituant aux spectres du nazisme dans leur ambition totalitaire. Si la Guerre des Mondes parvient à fasciner et provoquer une terreur psychologique, il le doit également à la prestance humaine des comédiens totalement impliqués dans leur fonction de survie et de bravoure. Spielberg accordant notamment un intérêt majeur sur la relation de discorde qu'un père divorcé tente de négocier parmi la rébellion infantile. Leur cheminement ardu de survie et épreuves de séparation s'avérant une initiation à la réconciliation après avoir vaincu leur peur de trépasser et celle de l'abandon. Dans celui du père rejeté, Tom Cruise adopte la juste mesure du héros combatif avec la dignité d'un paternel en requête d'amour, de confiance et de rédemption. La petite Dakota Fanning lui partageant la vedette avec une indéniable empathie pour sa fragilité naturelle, sa terreur viscérale de témoigner malgré elle d'une guerre dévastatrice. Enfin, dans la peau de l'adolescent en quête identitaire, Justin Chatwin endosse la carrure du rebelle volontairement provocateur afin de mesurer le sentiment de confiance, l'autorité régressive de son géniteur, puis de se prouver à lui même sa faculté de se prendre en main dans un baroud héroïque.  


Pur spectacle d'anticipation belliciste, La Guerre des Mondes est une expérience visuelle étourdissante de réalisme dans son lot de scènes catastrophes d'une rare intensité épique et dans la structure démesurée des machines extra-terrestres plus vraies que nature. Si le scénario avait mérité à être plus original et inventif, on peut aussi se réconforter auprès de l'étude caractérielle de notre trio familial formé par Tom Cruise, Justin Chatwin et Dakota Fanning

*Bruno
3èx. 4K. Vost

jeudi 9 juillet 2015

UNE NUIT EN ENFER

                                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site nerdreactor.com

"From dusk till dawn" de Robert Rodriguez. 1996. U.S.A. 1h48. Avec Quentin Tarantino, George Clooney, Harvey Keitel, Juliette Lewis, Ernest Liu, Salma Hayek, Cheech Marin, Danny Trejo, Tom Savini, Fred Williamson

Sortie salles France: 26 Juin 1996. U.S: 19 Janvier 1996

FILMOGRAPHIERobert Rodriguez est un réalisateur et musicien américain, d'origine mexicaine, né le 20 Juin 1968 à San Antonio, Texas, Etats-Unis. 1992: El Mariachi. 1993: Roadtracers (télé-film). 1995: Desperado. 1995: Groom Service (Four Rooms, segment: The Misbehavers). 1996: Une Nuit en Enfer. 1998: The Faculty. 2001: Spy Kids. 2002: Spy Kids 2. 2003: Spy Kids 3. 2003: Desperado 2. 2005: Sin City. 2005: Les Aventures de Shark Boy et Lava Girl. 2007: Planète Terror. 2009: Shorts. 2010: Machete (co-réalisé avec Ethan Maniquis). 2011: Spy Kids 4. 2013: Machete Kills. 2014: Sin City: j'ai tué pour elle. 2014: From dusk till Daw: The Series (épis 1,2 et 4).


Avertissement: Il est préférable de ne pas lire cette chronique pour ceux ignorant le retournement de situation de l'épicentre horrifique !

Fruit de l'association Rodriguez/Tarantino, Une Nuit en Enfer se présente comme un hommage référentiel aux films gores des années 80, particulièrement les classiques notoires Evil-Dead, Brain Dread ou Ré-animator ayant su combiner avec efficacité humour noir et horreur. Fort d'un concept aussi original qu'audacieux, Quentin Tarantino juxtapose dans le même métrage deux genres distincts, le polar ultra violent et le film d'horreur gore afin de surprendre le spectateur embarqué dans une virée meurtrière à l'aura exotique. La première partie s'attarde sur les exactions criminelles de deux éminents gangsters, les frères Gesko dont l'un s'avère un redoutable psychopathe à la gâchette facile. Dans un rôle aussi excentrique que cynique, Tarantino himself se prend un malin plaisir à se parodier dans sa fonction secondaire de criminel sans vergogne tributaire de ses pulsions sexuelles et sadiques. Le prélude débutant par leur braquage d'une épicerie annonce la couleur (sardonique) dans le spectacle imparti à ses gunfights chorégraphiés, sa violence volontairement grand-guignolesque et son humour débridé rehaussé de réparties percutantes (on reconnait bien la verve ciselée des dialogues de Tarantino attitré au poste de scénariste !).


Après leur prise d'otage tragique auprès d'une caissière, nos deux malfrats décident de s'en prendre à un veuf catholique propriétaire d'un camping-car et accompagné de ses deux chérubins. Une stratégie d'évasion afin de rejoindre la frontière mexicaine et d'attendre l'arrivée d'un auxiliaire au Titty Twister, un pub salace dont la clientèle est uniquement constituée de motards et camionneurs férus de fornication. Après quelques échauffourées musclés avec quelques marginaux irascibles et l'entracte d'une danse lascive chorégraphiée par une effeuilleuse (la plantureuse Salma Hayek se prête au jeu torride avec une élégance sulfureuse !), place au défouloir des règlements de compte d'un style nouveau. Le Titty Twister s'avérant finalement le repère d'un nid de vampires mexicains assoiffés de sang auprès de leur clientèle éméchée. Avec une inventivité vertigineuse dans les stratégies d'attaques et de défense que nos héros doivent rapidement négociés, et un sens débridé de leurs affrontements homériques contre des créatures hybrides (vampires reptiliens, créatures animalières et goules décaties !), Robert Rodriguez accumule les séquences horrifiques sur un rythme échevelé et parmi l'appui d'FX décomplexés (en dépit de certains effets grossiers en CGI). Renforcé des aimables caméos que forment Tom Savini et Fred Williamson, ces derniers s'en donnent à coeur joie pour prêter main forte à nos héros avec un sens de dérision burlesque. Qui plus est, avec une véritable ambition formelle, Rodriguez transfigure l'architecture gothique de l'antre mexicain du Titty Twister par le biais d'une flamboyante photo sépia, tout en exploitant habilement les recoins subsidiaires de couloirs et sous-sols caverneux. Le tout rythmé au son endiablé d'un rock mexicain oscillant avec le classicisme d'une musique funèbre.


Jouissif et trépidant, Une Nuit en Enfer transcende la forme d'une série B cartoonesque pour le bonheur des fantasticophiles ayant été bercés par les classiques gores de leur adolescence. Bougrement inventif pour les affrontements épiques maniés avec l'artillerie d'armes customisées, et motivé par la chaude complicité de comédiens en roue libre, ce train fantôme vertigineux se permet notamment de rendre hommage au cinéma fantastique mexicain imprégné de mysticisme (la rédemption du père mécréant et son influence spirituelle sur son groupe de survivants). Ce qui nous conduit au baroud d'honneur lorsque des goules faméliques arpentent scrupuleusement les couloirs étroits de la crypte pour y affronter nos rescapés, bien avant de nous dévoiler l'envers du décor du Titty Twister !

Bruno Matéï
4èx


mercredi 8 juillet 2015

MADMAN

                                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site projectdeadpost.com

de Joe Giannone. 1982. U.S.A. 1h28. Avec Gaylen Ross, Tony Fish, Harriet Bass, Seth Jones, Jan Claire, Alexander Murphy Jr, Tom Candela, Frederick Neumann.

Sortie salles U.S: 1er Janvier 1982

FILMOGRAPHIE: Joe Giannone est un réalisateur, producteur et scénariste américain né le 17 Novembre 1946, décédé le 10 Décembre 2006.
1982: Madman.


Slasher forestier inédit en France, Madman s'estampille ersatz Z de Vendredi 13 tant le réalisateur inexpérimenté (il s'agira d'ailleurs de son unique réalisation) peine à plagier son modèle avec une maladresse inexcusable. Reprenant le concept linéaire du classique (surestimé) de Cunningham, Madman ne se contente que d'illustrer la partie de cache-cache improvisée entre une poignée de vacanciers (inexpressifs au possible !) et un tueur aussi bêta que ces victimes inlassablement traquées. Le prologue ressassant la légende urbaine du monstre de la forêt contée autour du feu de camp annonce déjà la couleur de la redite avec une banalité affligeante. Prénommé "Mars le dément" (!!! ???), ce bûcheron tapi dans l'ombre des bosquets attend impatiemment sa revanche après avoir été pendu par des villageois depuis l'assassinat de sa famille perpétré à la hache. Un par un, ces touristes dont on éprouve aucune empathie dans leur fonction de chair à pâtée vont devoir user de vigilance et d'endurance afin d'éviter les coups de hache violemment perpétrés par un ogre clamant des grognements préhistoriques ! On peut également souligner la carrure bedonnante du psychopathe râblé s'efforçant avec une expressivité ahurie à provoquer la peur dans sa posture arriérée. Si quelques altercations gores s'avèrent gentiment attrayantes, la manière stérile dont le réalisateur anticipe l'expectative du coup porté désamorce tout effet de suspense, faute d'un montage elliptique et de la prestance cabotine de seconds-rôles clamant et gesticulant leur affolement outre-mesure. Ennuyeux au possible car lassant à force de suivre les mêmes péripéties de courses-poursuites (apathiques) entre le tueur et les victimes, le film parvient parfois à provoquer le (sou)rire involontaire lors d'idées assez délirantes (à l'instar de cette tête encastrée sous le capot d'une voiture) ou lors de situations proprement excentriques (afin d'échapper au monstre, l'une des vacancières décide de se planquer à l'intérieur d'un frigo !!!).


Bref, vous l'aurez compris, il n'y a quasiment rien à sauver dans ce slasher parodique terriblement fossilisé, faute d'une mise en scène apprentie, d'un casting bovin dénué du moindre charisme et d'une absence de suspense ou d'intensité dans les poursuites et masssacres en règle. A sauver peut-être quelques jolis éclairages en clair-obscur, un humour involontaire éveillant notre indolence (la baignade des deux amants dans le jakusi filmée en prise de vue panoramique) et deux/trois agressions gores timidement spectaculaires. 

Bruno Matéï

mardi 7 juillet 2015

BOUND. Prix du Jury, Deauville, 96.

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site movieposter.com

des frères Wachowski. 1996. 1h48. Avec Gina Gershon, Jennifer Tilly, Joe Pantoliano, John P. Ryan, Barry Kivel, Christopher Meloni, Richard C. Sarafian.

Sortie salles France: 6 Novembre 1996. U.S: 4 Octobre 1996

Récompenses: Prix du Jury, Deauville 1996.
Meilleurs réalisateurs au National of Review Awards, 1996
Prix du Meilleur Film et de la Meilleure Actrice (Jennifer Tilly), Fantasporto 1997
Meilleur Film aux GLAAD Media Awards, 1997

FILMOGRAPHIE: Lana Wachowski, née le 21 Juin 1965 à Chicago, et Andy Wachowski, né le 29 Décembre 1967 à Chicago sont des réalisateurs américains.
1996: Bound. 1999: Matrix. 2003: Matrix Reloaded. 2003: Matrix Revolutions. 2008: Speed Racer. 2012: Cloud Atlas. 2015: Jupiter: le Destin de l'Univers.


Première réalisation des Frères Wachowski célébré en grande pompe aux festivals de Deauville (Prix du Jury) et de Fantasporto (Prix du Meilleur Film), Bound exploite à merveille un scénario tarantinesque sans doute inspiré de Reservoir Dogs (pour le jeu de massacre imparti entre criminels), notamment par l'épure d'un esthétisme stylisé où les teintes du noir et blanc contrastent avec le rouge sang des victimes. Violet, maîtresse d'un truand, s'éprend d'affection pour sa voisine de palier, une locataire saphique ancienne détenue en liberté provisoire. Eprise d'un coup de foudre, elle propose à sa nouvelle amante de dérober l'argent de son concubin, une valise contenant la somme de 2 millions de dollars que le parrain Gino Marzzone doit venir empocher. Malgré l'habileté de leur plan machiavélique, rien ne se déroulera comme prévu....


Polar noir et rouge d'une rigueur affûtée dans l'ossature d'un scénario perfide faisant fuiter quelques éclairs de violence brute (le passage à tabac d'un transfuge et sa torture du doigt coupé au sécateur !), Bound fait clairement appel au suspense Hitchcockien dans la tension d'une intrigue criminelle bourrée de rebondissements et bévues impromptues. Nanti du design stylisé d'un appartement classieux, les Wachowski accordent un soin méticuleux à enjoliver la scénographie de leur huis-clos où chaque pièce peut occulter un cadavre pour tenir lieu de survie. Vénéneux, sardonique et cruel, Bound ne cesse de relancer ses ressorts dramatiques dans les échanges tendus impartis entre une communauté mafieuse, faute d'une stratégie cupide entamée par deux lesbiennes audacieuses. Dominé par le duo ténébreux Gina Gershon / Jennifer Tilly, le film adopte en prélude un jeu de séduction torride entres les actrices parmi deux étreintes sexuelles à l'aura charnelle. Bien qu'en retrait dans la seconde partie, Gina Gershon s'efface au profit de son adjointe, la plantureuse et faussement timorée Jennifer Tilly, redoublant ici de vigilance puis de dérobade pour tromper son macro mafieux (Joe Pantoliano s'avérant saisissant d'autorité mesquine dans son sang froid à feindre la vérité contre ses supérieurs). Jubilatoire dans la manière documentée dont Ceasar tente de se dépêtrer de la déveine (convaincre ses sbires qu'il possède toujours les 2 millions de dollars dans la mallette), l'intrigue ne cesse de le mesurer aux conditions de danger (notamment cette intervention hitchcockienne de la police !) pour l'enjeu de sa survie, quand bien même Violet assiste impuissante à sa potentielle faillite. En parallèle, le jeu de ruse et de suspicion partagés entre Caesar et Violet décuple une tension addictive afin de savoir qui emportera la mise lors de cette impitoyable guerre des sexes, quand bien même sa complice Corky se porte témoin auditive à travers les murs de l'immeuble.


Jouissif et irrésistiblement trépidant dans son intrigue criminelle fertile en suspense, et endossé par le charisme insidieux d'interprètes en roue libre, Bound est également transcendé par la virtuosité d'une mise en scène aussi inventive qu'alambiquée ! Un polar sardonique étourdissant de roublardise dans son jubilatoire jeu de duperie 

Bruno Matéï
3èx

    lundi 6 juillet 2015

    Freddy 5, l'Enfant du Cauchemar. Prix de la Critique, Fantasporto 1990.

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site movieposter.com

    "A Nightmare on Elm Street 5: The Dream Childde Stephen Hopkins. 1988. U.S.A. 1h29. Avec Robert Englund, Lisa Wilcox, Kelly Jo Minter, Erika Anderson, Danny Hassel.

    Sortie salles France: 5 Août 1990. U.S: 11 Août 1989

    FILMOGRAPHIE: Stephen Hopkins est un réalisateur américain né en 1958 en Jamaïque. 
    1987: Dangerous Game. 1989: Freddy 5. 1990: Predator 2. 1993: La Nuit du Jugement. 1994: Blown Away. 1996: L'Ombre et la Proie. 1998: Perdus dans l'Espace. 2000: Suspicion. 2004: Moi, Peter Sellers. 2007: Les Châtiments. 2016: Race.


    Cinquième volet d’une saga lucrative, Freddy 5 : L’Enfant du Cauchemar tire parti d’un scénario plus original que certains opus précédents et d’un esthétisme gothique que personne n’attendait. Il s’abandonne à une scénographie onirique, aussi ténébreuse que cauchemardesque.

    Synopsis : rescapée du précédent épisode, Alice doit de nouveau affronter l’arrogance nécrosée de Freddy, qui, pour parfaire sa résurrection, s’en prend cette fois… à son enfant à naître. Par une stratégie insolite — infiltrer les songes d’un fœtus pour atteindre les vivants, et s’abreuver de leurs âmes pour mieux renaître — le croquemitaine déploie son emprise jusqu’à contaminer l’entourage d’Alice, pris au piège dans leurs propres rêves. Pour protéger son futur enfant, ses amis, et anéantir Freddy, Alice s’unit à Amanda Krueger dans un ultime combat contre l’ombre.

    Réalisateur prolifique des années 90 (Predator 2, Blown Away, Les Châtiments), Stephen Hopkins orchestre ici un divertissement certes classique dans sa trame, mais d’une efficacité indéniable, et surtout animé d’une inspiration visuelle singulière. Avec un soin particulier accordé à la fusion d’une ambiance gothique sépulcrale et de scènes horrifiques gorgées de rebondissements et de cruautés sardoniques, Hopkins ranime l’esprit fiévreux du cauchemar.


    Et si le scénario n’aligne qu’une succession de confrontations héroïco-sanglantes entre Freddy et une poignée d’adolescents, ces séquences, nerveusement emballées, s’avèrent franchement inventives, immersives — presque sensitives. Car le rêve y devient matière vivante, malléable, transfigurée par un onirisme gothique littéralement renversant. Appuyé par une photo rutilante et des décors rigoureusement ciselés, le film dégage un pouvoir fascinatoire plus sombre, plus glauque, plus premier degré que ses prédécesseurs, embrassant sans ironie le vertige macabre de l’univers Krueger.

    Certaines idées fortes — comme la coalition salvatrice d’Amanda et de Jacob pour déjouer les plans du démon — raniment la vigueur des confrontations, jusqu’à un acte final d’une démesure baroque. Si les seconds rôles juvéniles demeurent stéréotypés, Lisa Wilcox impose une présence forte et habitée, incarnant une maternité combative, lucide, rigoureusement pugnace. À mi-parcours, l’arrivée du jeune Whitby Hertford, étrange silhouette candide baignée de mélancolie, ajoute un souffle trouble, presque spectral. Son regard d’enfant trop grave insuffle à la trame une résonance fragile, inattendue, touchante d'une certaine manière.


    "Les Songes Déviés de l’Enfant Maudit"
    Malgré son (inévitable) air de déjà-vu et la simplicité de son canevas, compensée par quelques fulgurances — comme l’idée osée de prendre en otage l’esprit d’un fœtus pour perpétuer les exactions de Freddy — Freddy 5 : L’Enfant du Cauchemar s’impose comme une réussite singulière, à la fois efficace, soignée, ludique et fascinante. Les FX débridés demeurent d’une tenue remarquable. Stephen Hopkins y imprime une patte personnelle, traversée d’une ambition crépusculaire, renouant par moments avec l’angoisse adulte du premier opus. À réhabiliter d’urgence. À mes yeux, et au 6è visionnage, il est aujourd’hui devenu le plus fascinant de la saga après le chef-d’œuvre de Craven.

    *Bruno Matéï
    28.05.25. 6èx. Vost. 
    30.12.21.

    vendredi 3 juillet 2015

    L'Armée des Morts / Dawn of the Dead

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site yellmagazine.com
     
    de Zack Snyder. 2004. U.S.A. 1h49 (version intégrale). Avec Sarah Polley, Ving Rhames, Jake Weber, Mekhi Phifer, Ty Burrell, Inna Korobkina, Michael Kelly, Ken Foree, Tom Savini.

    Sortie salles France: 30 Juin 2004. U.S: 19 Mars 2004

    FILMOGRAPHIE: Zack Snyder est un réalisateur, scénariste et acteur américain né le 1er mars 1966 à Green Bay, Wisconsin (États-Unis). 2004 : L'Armée des morts (Dawn of the Dead). 2007 : 300. 2009 : Watchmen. 2010 : Le Royaume de Ga'hoole : La Légende des gardiens. 2011 : Sucker Punch. 2012 : Superman: Man of Steel. 2016: Batman v Superman: l'Aube de la Justice.
     
     
    "Snyder éventre Romero".
    Remake modernisé du mastodonte Zombie de Romero, L’Armée des Morts joue la carte d’une série B survitaminée, concentré d’horreur et d’action habilement conjugués. Sans céder à la tentation de l’esbroufe gratuite, Zack Snyder se démarque de son modèle inégalable par un dosage savant des genres : l’action, aussi explosive soit-elle, reste au service d’une narration fertile en rebondissements et en bévues humaines. On est d’ailleurs déjà soufflé par un prologue halluciné : un couple au foyer pris à partie dans l’intimité de leur chambre par la sauvagerie de la fille des voisins. La séquence, vorace, où la gamine infectée se jette sur la gorge de l’homme pour l’arracher à pleines dents, vrille les nerfs par la violence des corps, l’urgence des tentatives d’évasion, l’orage de sang hyperréaliste et la frénésie du montage, dopé par l’épouse affolée !

    Le décor migre ensuite vers un mall où la mère rescapée et une poignée de survivants ratissent les galeries pour y établir leur bastion. L’Armée des Morts profite de la prestance charismatique de comédiens qui, vaillants ou couards, s’échinent à contenir l’ennemi : l’héroïne pugnace que Sarah Polley campe avec un naturel confondant, Jake Weber, présence secondaire mais humanité à fleur de peau, touchant jusque dans ses hésitations.


    Exploité comme un labyrinthe de verre et de couloirs, le huis clos commercial expose d’abord nos survivants à un trio de réactionnaires assoiffés d’autorité. Passées les échauffourées, l’intrigue les replonge dans un quotidien précaire où le danger peut surgir du moindre recoin. Car l’intérieur lui-même se contamine : chaque morsure infecte, chaque infiltration coûte un morceau de chair. À l’extérieur, une horde d’infectés cerne la barricade, pressant de toutes parts pour la fracturer. Entre stratégies de défense et contre-attaques improvisées, d’autres rescapés s’invitent pour relancer la dynamique de groupe. Avec malice, Snyder corse l’épreuve : un quidam réfugié sur le toit d’un magasin d’en face leur adresse sa détresse à coups de pancartes — il faudra le secourir ou l’abandonner. Enfin, quand l’évasion devient ultime, le film décuple l’action épique et le gore exultant, dans une cavalcade à pied ou en camions bricolés, cap sur une île paradisiaque — clin d’œil sardonique au Jour des Morts-vivants.


    "Zombies sous amphétamines, barricades sous tension".
    Sans singer platement son aîné, Snyder insuffle à L’Armée des Morts un souffle neuf : un alliage nerveux d’action et de sang qui tâche, toujours au service du récit. Derrière l’intensité de ses rebondissements homériques, le film pulse aussi grâce à la virilité cabossée de comédiens trempés dans l’acier, opposant leur carcasse à des zombies sous amphétamines — un choix audacieux, relancé après 28 Jours Plus Tard de Boyle, qui hérissera peut-être le poil des puristes. Qu’importe : ce remake retors est un divertissement de haute volée, un ballet d’action intermittente, de sang festif et de concertation humaine, jusqu’à l’ultime escapade de tous les dangers.

    Bruno 
    3èx

    jeudi 2 juillet 2015

    TERREUR SUR LA LAGUNE

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site caveofcult.co.uk

    "Solamente Nero / The Bloodstained Shadow" de Antonio Bido. 1978. Italie. 1h50. Lino Capolicchio, Stefania Casini, Craig Hill, Massimo Serato, Juliette Mayniel.

    FILMOGRAPHIE: Antonio Bido est un réalisateur et scénariste italien né le 8 Janvier 1949
    1977: Il gatto dagli occhi di giada. 1978: Terreur sur la Lagune. 1984: Barcamenandoci. 1987: Mak P 100. 1989: Aquile (télé-film). 1991: Blue Tornado. 2000: Battaglione San Marco.


    Giallo sous-estimé préalablement découvert en VHS par les cinéphiles des années 80 sous l'étendard d'Hollywood Video, Terreur sur la Lagune se réapproprie des codes du genre avec une maladresse tout à fait attachante. Le réalisateur prenant soin de dupliquer le travail stylisé de Dario Argento avec motivation, que ce soit au niveau de l'ossature d'une narration machiavélique, de la mise en scène clippesque des meurtres ou des éclairages blêmes d'un Venise feutré préfigurant l'esthétisme pastel de Ténèbres. Un professeur, Stéphano, rend visite à son frère pasteur dans un hameau de Venise. Ayant préalablement sympathisé avec une jeune peintre durant son voyage ferroviaire, il reste fasciné par l'un de ces tableaux religieux illustrant la mort d'une fille par un démon. Au même moment, un mystérieux tueur s'en prend aux riverains pendant que le prêtre est sujet à un morbide chantage. 


    Ersatz du genre aussi naïf que sympathique pour son intrigue à rebondissements compromise aux digressions, puis dans la bonhomie du couple de héros témoins malgré eux d'une succession d'assassinats quand bien même nombre de seconds-rôles peu recommandables font office de mine suspecte, Terreur sur la Lagune tire parti de son capital sympathie pour la sincérité du cinéaste à façonner un giallo dans sa noble tradition. L'ombre des Frissons de l'Angoisse planant d'ailleurs sur les épaules du professeur exposé au trauma infantile et curieux d'élucider l'énigme d'un tableau d'art sous icone catholique. Prenant pour cadre la cité littorale de Venise, Antonio Bido parvient à insuffler un sentiment envoûtant d'étrangeté éthérée, à l'instar des poursuites horrifiques ou de la déambulation des (rares) riverains suspectant avec vigilance l'étranger. Si les 2/3 tiers du film se concentrent sur la récurrente dérive criminelle du tueur masqué, le cinéaste prend soin de peaufiner la forme dans l'exploitation inventive de ces décors naturels (sépulture, presbytère, bâtisse gothique, berge, église) auquel victimes et assassin servent de figuration au spectacle gothico-baroque (notamment l'épure livide des éclairages urbains inscrits dans une architecture onirique). Rehaussé de la partition éclectique de Stelvio Cipriani, le film adopte la même sonorité entraînante des Goblin afin d'intensifier les situations d'appréhension et d'altercation dans une métronomie haletante et avant que n'intervienne la modestie des cruautés meurtrières. Quant à sa dernière partie multipliant avec efficacité les rebondissements et levant le voile sur une machination à tiroirs, l'intrigue s'avère suffisamment bien pensée pour s'y laisser berner et comprendre les aboutissants du tueur Spoiler ! tout en égratignant au passage la corruption religieuse Fin du Spoiler.


    Si la plupart des interprètes cabotins surjouent modestement leur stature de victime ou de présumé coupable, l'indéniable empathie accordée au couple de héros et au prêtre de la paroisse permet de s'immerger dans une investigation criminelle éculée de prime abord mais assez surprenante dans le dénouement de sa dernière demi-heure fertile en péripéties et contrecoups. Un sympathique giallo donc tout à fait fréquentable, notamment pour son charme onirico-macabre imparti à sa confection argentesque !

    Remerciement à Contrebande VHS
    Bruno Matéï

                                           

    mercredi 1 juillet 2015

    IL ETAIT UNE FOIS UN MEURTRE. Prix du Jury au Festival du film Policier de Beaune, 2011

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site bloody-disgusting.com

    "Das letzte Schweigen / The Silence" de Baran bo Odar. 2010. Allemagne. 1h55. Avec Ulrich Thomsen, Wotan Wilke Möhring, Sebastian Blomberg, Katrin Sab, Burghart Klaubner.

    Sortie salles France: 27 Avril 2011. U.S: 8 Mars 2013. Allemagne: 1 Juillet 2010

    FILMOGRAPHIE: Baran bo Odar est un réalisateur suisse né le 18 Avril 1978. 
    2006: Sous le soleil. 2010: Il était une fois un meurtre. 2014: Who Am I: Kein System ist sicher


    Production allemande récompensée du Prix du Jury au Festival du film policier de Beaune, Le silence (titre beaucoup mieux subtil et approprié que son homologue français quant à l'issue de l'intrigue !) allie drame psychologique et thriller sous couvert d'un tabou brûlant, le trouble mental de la pédophilie. Le 8 juillet 1986, un pédophile circulant en voiture kidnappe une adolescente au moment où cette dernière emprunte un sentier bucolique à bicyclette. Le passager du véhicule observe impuissant au viol et à la strangulation de la fillette par son acolyte. 23 ans plus tard, le même jour estival, et sur les lieux du précédent homicide, une autre fille circulant à bicyclette est portée disparue. Persuadé qu'il s'agit du même agresseur, la police rouvre l'enquête quand bien même le coupable oculaire de l'affaire précédente tente de retrouver la trace de son compagnon meurtrier. 


    Thriller psychologique au suspense perpétuellement tendu, notamment grâce à la sobriété sentencieuse des comédiens, le Silence préconise l'investigation policière de longue haleine afin d'élucider une affaire criminelle de pédophilie vieille d'un quart de siècle. On peut d'ailleurs saluer la pudeur dont le cinéaste fait preuve pour illustrer sans racolage quelques séquences difficiles par le biais d'un réalisme rugueux et de la conviction d'interprètes taillés sur mesure pour extérioriser face à l'écran des pulsions de déviance sexuelle. En parallèle d'une enquête émaillée d'indices et de rebondissements alertes, Baran bo Odar privilégie l'étude caractérielle du second pédophile, ancien témoin oculaire aujourd'hui époux et père de deux enfants mais contraint en l'occurrence de faire resurgir sa responsabilité d'un passé crapuleux. Par sa posture désespérée à tenter de découvrir l'auteur de cette nouvelle disparition et par sa difficulté ardue à refréner ses pulsions perverses, l'intrigue dilue un climat anxiogène particulièrement malsain lorsque le spectateur est contraint d'observer sa culpabilité existentielle en perdition. Pour renforcer l'acuité du contexte singulier, la narration est également impartie au portrait plus délétère du criminel pédophile, concierge d'immeuble vivant reclus dans un appartement parmi le fétichisme de ces fantasmes pédopornographiques. Enfin, en alternant le deuil insurmontable des parents de la première disparue avec la détresse des nouveaux parents redoutant une issue morbide pour le sort de leur fille, Le Silence allie suspense et ressort dramatique modéré afin d'escompter un dénouement potentiellement optimiste. 


    Captivant et haletant dans l'ossature studieuse d'une investigation sordide, et donc éprouvant par le climat pervers régi autour des profils pédophiles, Le Silence se permet également de dénoncer le rôle (racoleur) des médias anticipant la résolution d'une affaire crapuleuse sans preuves tangibles, et la fonction expéditive d'une hiérarchie policière incapable d'élucider les auteurs d'infanticides. Un sombre thriller constamment sur le fil du rasoir dans sa narration indécise qu'une interprétation sans faille rehausse d'intensité dans leur fardeau moral, mais dont l'audace incongrue du dénouement risque d'en dérouter plus ! 

    Remerciement à Pascal Frezzato
    Bruno Matéï

    mardi 30 juin 2015

    Les Proies / The Beguiled

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site northwestchicagofilmsociety.org

    de Don Siegel. 1971. U.S.A. 1h44. Avec Clint Eastwood, Geraldine Page, Elizabeth Hartman, Jo Ann Harris, Darleen Carr, Mae Mercer.

    Sortie salles France: 18 Août 1971. U.S: 31 Mars 1971

    FILMOGRAPHIE: Don Siegel (Donald Siegel) est un réalisateur et producteur américain, né le 26 Octobre 1912 à Chicago en Illinois, décédé le 20 Avril 1991 à Nipoma, en Californie.
    1956: l'Invasion des Profanateurs de Sépultures. 1962: l'Enfer est pour les Héros. 1964: A bout portant. 1968: Police sur la ville. 1968: Un Shérif à New-York. 1970: Sierra Torride. 1971: Les Proies. 1971: l'Inspecteur Harry. 1973: Tuez Charley Varrick ! 1974: Contre une poignée de diamants. 1976: Le Dernier des Géants. 1977: Un Espion de trop. 1979: l'Evadé d'Alcatraz. 1980: Le Lion sort ses griffes. 1982: Jinxed.

      
    "Clint Eastwood dans la toile : quand la luxure mène au supplice".
    Sorti la même année que L'Inspecteur Harry, fer de lance du film d'auto-défense, Les Proies emprunte un chemin plus intimiste : celui du drame psychologique teinté d’un suspense vénéneux, explorant les rapports de force entre une ligue féminine recluse et un soldat nordiste. Grièvement blessé, le caporal McBurney est recueilli au sein d’un pensionnat sudiste que la rigide Martha Farnsworth dirige d’une main ferme, malgré les tensions de la guerre. Pour survivre — et espérer fuir — le blessé s’adonne à la séduction, jouant de ses charmes auprès de plusieurs pensionnaires durant la convalescence de sa jambe estropiée. Mais la jalousie latente de la directrice et de deux internes attise bientôt des passions meurtrières au sein d’une rivalité sexuelle et viciée.

    En dépit de ses affiches — française comme américaine — qui promettent un western classique, Les Proies détourne les conventions du genre pour glisser vers un huis clos trouble, où le malaise suinte à chaque regard. Isolé au cœur de cette sororité confinée, McBurney devient lentement l’objet d’un piège dont la tension monte en spirale. Guerre des sexes inégale (l’élément perturbateur est ici seul contre toutes), le film dévoile, à travers le regard féminin, la montée d’une défiance sourde, puis d’une trahison foudroyante. Don Siegel y explore avec une finesse venimeuse les thèmes du désir et de l’éveil sexuel, de la jalousie et de la possession, de l’infidélité et de la manipulation — autant de passions fondées sur l’illusion, et condamnées à dégénérer. La descente aux enfers de McBurney devient alors la juste conséquence d’une stratégie de survie fondée sur la flatterie, la luxure, l’avidité sensuelle.


    Dans ce jeu de séduction et de duperie, où les jeunes pensionnaires, victimes et prédatrices, libèrent leurs pulsions avant de s’effondrer sous le poids de la rancune, Siegel insuffle un malaise persistant. Tous ici sont marqués par une chute morale : le passé incestueux de Martha avec son frère, la tentative de séduction d’une fillette de 12 ans par McBurney (qu’il embrasse sur la bouche !), l’esclavage et le viol tapis dans le passé de la domestique… Autant de failles qui nourrissent une vendetta sanglante, irrespirable, où l’amour trahi devient poison, et la tendresse, arme blanche.

    "Le soldat et la meute : chronique d’un massacre sensuel".
     Porté par un Clint Eastwood imprévu dans ce rôle de charmeur piégé par son propre venin, Les Proies transcende le simple drame psychologique pour flirter avec l’horreur psychique. Don Siegel laisse remonter à la surface les instincts les plus sombres d’un groupe féminin en ébullition, habité par la vengeance, la jalousie et le désir de justice sauvage. Un film incandescent, asphyxiant, qui gratte la plaie jusqu’à l’os.

    Bruno
    4èx