mardi 6 mai 2014

DEVIATION MORTELLE (Roadgames)

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site kieranmasterton.tumblr.com

de Richard Franklin. 1981. 1h41 (version intégrale). Australie. Avec Stacy Keach, Jamie Lee Curtis, Marion Edward, Grant Page, Thaddeus Smith, Steve Millichamp.

FILMOGRAPHIE: Richard Franklin est réalisateur et producteur australien, né le 15 Juillet 1948 à Melbourne (Australie), décédé le 11 Juillet 2007.
1972: Belinda. 1973: Loveland. 1975: The True Story of Eskimi Nell. 1976: Fantasm. 1978: Patrick. 1981: Déviation Mortelle. 1983: Psychose 2. 1984: Cloak and dagger. 1986: Link. 1991: FX 2, effets très spéciaux. 1994: Un Agent très spécial (télé-film). 1995: Hotel Sorrento. 1996: Brillliant Lies. 1997: One way Ticket (Télé-film). 1999: Le monde perdu de Sir Arthur Conan Doyle: la découverte (télé-film). 2003: Visitors.


Réalisée entre Patrick et Psychose 2, Déviation Mortelle est une curieuse série B que Richard Franklin élabore à la manière d'un thriller mâtiné de cocasserie. Aujourd'hui sombré dans l'oubli, ce road movie surfe avec efficacité sur un suspense hitchcockien en suggérant les méfaits meurtriers d'un serial-killer sévissant sur les routes australiennes. Témoins de quelques éléments intrigants après s'être assoupi près d'un motel (un sac poubelle reniflé par son chien, une silhouette suspicieuse derrière un rideau), Patrick Quid, chauffeur livreur de viande, décide de suivre à la trace un mystérieux van dont le conducteur pourrait s'avérer le dépeceur d'une jeune fille.


Tout l'intérêt de l'intrigue se concentre donc sur les supputations du routier persuadé d'avoir campé près du lieu d'un crime et été témoin d'une présence hostile la veille de son voyage. Epaulé de son animal de compagnie, un dingo d'Australie à qui il s'adresse en bavassant, Patrick sillonne les contrés désertiques à bord de son camion afin de retrouver la trace d'un mystérieux véhicule de couleur bleue ! Durant son itinéraire, outre les rencontres impromptues avec des conducteurs zélés (ce qui nous vaut d'ailleurs quelques poursuites automobiles inconscientes) et les autorités de la police pour un contrôle de routine, il aborde notamment deux auto-stoppeuses dont une jeune fille imprudente (Jamie Lee Curtis, sobrement sexy et sensuelle à l'aube de ses 23 ans !). Emaillé de situations cocasses plutôt folichonnes, Richard Franklin joue notamment sur le caractère paranoïaque du chauffeur lorsque ce dernier se persuade d'avoir débusqué le vrai coupable. Jusqu'à la fin (exubérante dans son lot de rebondissements !), le cinéaste s'évertue notamment à semer le doute sur la culpabilité du conducteur de van, quand bien même les forces de police commencent à suspecter le comportement instable du camionneur ! Porté sur les épaules de Stacy Keach, l'acteur réussit pleinement à insuffler de la sympathie à son personnage de routier peu retors (il multiplie les gaffes lors de son périple) mais indéniablement courageux lorsqu'il s'agit d'alpaguer un tueur en série, d'autant que ce dernier se joue un malin plaisir à le faire accuser de ses sévices.


Mike Hammer et Laurie Strode en perdition !
Malgré le ton inapproprié d'un score musical aux accents westerniens (! ?), un humour parfois pataud et le côté prévisible de certaines situations, Déviation Mortelle se suit agréablement comme une sympathique curiosité, à l'instar de l'apparition inopinée de Stacy Keach, parfaitement à l'aise dans la peau d'un routier sur le qui-vive !

Un grand merci à l'Univers Fantastique de la Science-Fiction !
Bruno Matéï

lundi 5 mai 2014

SPIDER-MAN

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Sam Raimi. 2002. U.S.A. 2h01. Avec Tobey Maguire, Willem Dafoe, Kirsten Dunst, James Franco, Cliff Robertson, Rosemary Harris.

Sortie salles France: 12 Juin 2002

FILMOGRAPHIE: Sam Raimi est un réalisateur, acteur, producteur et scénariste américain, né le 23 Octobre 1959 à Franklin, Etats-Unis.
1981: Evil-Dead. 1985: Mort sur le Grill. 1987: Evil-Dead 2. 1990: Darkman. 1993: Evil-Dead 3. 1995: Mort ou Vif. 1998: Un Plan Simple. 1999: Pour l'amour du jeu. 2000: Intuitions. 2002: Spi-derman. 2004: Spider-man 2. 2007: Spider-man 3. 2009: Jusqu'en Enfer. 2013: Le Monde fantastique d'Oz.


Premier volet de la trilogie à succès de Sam Raimi, Spider-man peut enfin bénéficier d'une adaptation ciné à la hauteur de la bande dessinée de Stan Lee. A l'aide d'effets-spéciaux numériques prodigieux et de l'interprétation innée de Tobey Maguire (l'acteur extériorise un regard expansif dans sa nouvelle fonction héroïque et dégage beaucoup d'humanisme dans ses contrariétés !), Sam Raimi rend hommage au super-héros de notre enfance avec un sens homérique justifiable. Car ici, outre le côté vertigineux des séquences d'action à couper le souffle (à l'aide de ses jets de toiles d'araignées, le super-héros bondit d'immeubles en immeubles avec une incroyable vélocité !), Spider-man tire avant tout parti de la caractérisation de ses personnages superbement dessinés. 


Durant 2h00, le réalisateur s'attarde donc à dépeindre le cheminement moral de son super-héros, adolescent préalablement maladroit et timoré, mais aujourd'hui vaillant et reconnu comme un illustre sauveur de l'humanité ! Ses pouvoirs surhumains, il les doit à la morsure d'une araignée génétiquement modifiée ! Une nouvelle stature à double tranchant puisque plus tard la populace n'hésitera pas à le suspecter de complicité avec son plus haut rival (le Bouffon Vert !), quand bien même ce dernier lui proposera un pacte afin d'unifier leurs exploits ! Entre l'amour d'une fille qu'il chérit en secret et l'amitié qu'il partage avec son meilleur camarade de classe, Peter Parker doit faire face à la mort de son oncle qu'il décide de venger en endossant la combinaison de justicier masqué. Au cours de son parcours héroïque de redresseur de tort, il va rapidement se confronter au bouffon vert, un savant pernicieux délibéré lui aussi à se venger auprès de ses anciens patrons et à dicter sa loi sur la ville de New-York. D'un côté, la vengeance est un argument favorable lorsque l'unique ambition est de protéger les plus faibles contre la délinquance criminelle. De l'autre, elle est un vecteur d'aliénation quand un chercheur déchu de ses fonctions professionnelles se laisse gagner par la rancune et ses névroses psychotiques ! (Norman Osborn souffre de dédoublement de personnalité depuis l'échec de son expérience scientifique !). Alternant moments d'intimisme et bravoures spectaculaires, Spider-man réussit donc avec efficacité à nous retranscrire les états-d'âme du jeune Peter Parker contraint d'exercer une tache rigoureuse dans sa nouvelle existence d'ado au risque de compromettre son entourage. C'est donc au sens du sacrifice et à sa remise en question héroïque que doit se confronter Spider-man afin de mieux préserver la vie des siens et au risque de passer à côté de l'amour de Mary Jane ! Kirsten Dunst endosse ce rôle avec beaucoup de sensualité candide et une certaine naïveté puisque peu habile à discerner de prime abord les sentiments amoureux de son partenaire. 


En attendant un 2è opus beaucoup plus émotif, lyrique et ambitieux, Spider-man inaugure sa trilogie avec dignité pour la dimension humaine d'un héros en questionnement et déploie un savoir-faire technique vertigineux lorsqu'il s'agit de retranscrire ses envolées épiques ! Du grand spectacle calibré mais inscrit dans la mesure, l'action s'avérant toujours justifiée car au service des motivations contradictoires des protagonistes. 

La critique de Spider-man 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2015/01/spider-man-2.html

Dédicace à Carlina Zombiela
Bruno Matéï
2èx

vendredi 2 mai 2014

POLTERGEIST

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site discreetcharmsandobscureobjects.blogspot.co

de Tobe Hooper. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Heather O'Rourke, Craig T. Nelson, JoBeth Williams, Zelda Rubinstein, Dominique Dunne, Oliver Robins.

Sortie salles France: 20 Octobre 1982. U.S: 4 Juin 1982

FILMOGRAPHIE: Tobe Hooper est un réalisateur américain né le 25 Janvier 1943 à Austin (Texas)
1969: Eggshells, 1974: Massacre à la Tronçonneuse, 1977: Le Crocodile de la Mort, 1979: The Dark (non crédité), 1981: Massacre dans le Train Fantôme, 1982: Poltergeist, 1985: Lifeforce, 1986: l'Invasion vient de Mars, Massacre à la Tronçonneuse 2, 1990: Spontaneous Combustion, 1993: Night Terrors, 1995: The Manglers, 2000: Crocodile, 2004: Toolbox Murders, 2005: Mortuary, 2011: Roadmaster.


Grand classique des années 80, Poltergeist est la réunion inattendue de deux grands auteurs du cinéma fantastique, celui de Steven Spielberg attaché au poste de producteur, et celui de Tobe Hooper confié à la réalisation. Sans revenir sur la polémique qui entoura la véritable paternité du métrage, on sent bien que Steven Spielberg y a apporté une certaine contribution dans la caractérisation idéaliste d'une famille aisée cohabitant en harmonie et dans la peinture d'une paisible banlieue inscrite dans la bonhomie. Avec l'originalité d'un scénario structuré, Poltergeist perdure son pouvoir attractif dans son alliage d'onirisme, d'humour et d'horreur, quand bien même l'attachante complicité des comédiens nous immerge de plein pied dans leur désarroi. En insistant sur la cohésion de cette famille aujourd'hui désunie, Tobe Hooper attache une grande importance à décrire leur fragilité après que l'une de leur fille eut été enlevée par des esprits frappeurs. Et de quelle manière ! Retenue prisonnière via l'écran de télévision, Carol-Anne tentera de communiquer avec ses parents afin d'implorer leur aide. A travers cette idée judicieuse, on peut notamment y déceler une métaphore sur le pouvoir de l'image et notre accoutumance à rester river devant la TV ! (les parents Freeling s'endorment devant leur poste quand ils ne se disputent pas le choix d'une chaîne lorsque le voisin bénéficie d'une même télécommande !). 


Avec l'intervention de spécialistes en parapsychologie, cette famille subitement frappée par une cause surnaturelle va devoir compter sur leur soutien afin de débusquer leur fille de l'au-delà. Sous couvert de l'archétype de la maison hantée et des esprits frappeurs qui importunent cette aimable famille, le réalisateur met notamment en exergue une réflexion spirituelle sur la vie après la mort (non dénuée de poésie dans le discours réconfortant des matriarches clairvoyantes), tout en rendant hommage à nos défunts lorsque les cadavres y sont profanés. L'efficacité imparable de Poltergeist émane donc de cet habile dosage d'horreur spectaculaire (à l'instar de son point d'orgue paroxystique où les forces du Mal se déchaînent !), d'onirisme (certaines apparitions surnaturelles, la dimension incandescente de l'au-delà !), d'humour pittoresque (la première partie privilégie le comportement cocasse des parents face au spectacle des incidents inexpliqués) et de moments d'intimisme plein de pudeur (la Spielberg touch est passée par là et le score sensible de Goldsmith intensifie l'émotion fraternelle des protagonistes !). Qui plus est, la mise en scène avisée utilise habilement l'artillerie lourde des effets spéciaux sans jamais empiéter sur le fil narratif. Outre le charisme indéfectible alloué aux parents Freeling (Craig T. Nelson et JobBeth Williams forment un couple vertueux plein d'humilité !), le charme innocent de la petite Carol-Anne endossée par Heather O'Rourke et l'autorité maternelle de Tangina Barrons incarnée par Zelda Rubinstein apportent un supplément crédible face à cette situation de conflit paranormal ! 


Spectaculaire, impressionnant, drôle et parfois terrifiant, Poltergeist n'a pas volé sa réputation de grand spectacle horrifique sous couvert d'une satire sur le contrôle des médias (au final, la famille Freeling se débarrasse définitivement du téléviseur !). Pour parachever, le savoir-faire indiscutable de Tobe Hooper (et de Steven Spielberg ?) élève(nt) l'entreprise au modèle de mise en scène ! 

Bruno Matéï
5èx

jeudi 1 mai 2014

APOCALYPSE 2024 (A Boy and his Dog)

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site apocalypsezone.com

de L. Q. Jones. 1975. U.S.A. 1h31. Avec Don Johnson, Susanne Benton, Jason Robards, Tim McIntire, Alvy Moore, Helene Winston.

Sortie salles France: 21 Avril 1976. U.S: Novembre 1975

FILMOGRAPHIE: L. Q. Jones est un réalisateur, acteur, scénariste et producteur américain, né le 19 Août 1927 à Beaumont, Texas (Etats-Unis).
1964: The Devil's Bedroom. 1975: Apocalypse 2024. 1978: L'Incroyable Hulk (série T.V. 1 Episode: On the Line.


Authentique film culte peu connu du public et rarement diffusé à la TV, Apocalypse 2024 est notamment l'occasion de retrouver dans un tout jeune rôle le héros de Miami Vice: Don Johnson ! Quand à l'identité du réalisateur, plus connu en tant qu'acteur dans ses rôles de western, il est uniquement responsable de deux longs-métrages dont un premier essai resté inédit en France !
Récit post-apo décrivant les vicissitudes d'un survivant et de son chien, Apocalypse 2024 réussit de prime abord à retranscrire avec peu de moyens un univers de désolation après que la 4è guerre mondiale eut éclaté. Communiquant par télépathie avec son animal de compagnie, Vic tente de survivre dans un désert aride parmi l'hostilité de rescapés réduits à la famine. Alors qu'une autre population cohabite dans le monde souterrain, il va tenter d'y pénétrer par l'entremise d'une jeune inconnue qu'il souhaitait préalablement violer. Pendant leurs moments d'intimité et après s'être protégés de la horde des hurleurs, Quilla en profite pour le persuader de rejoindre l'autre monde contre l'avis du chien.


A travers les éléments de comédie noire et d'anticipation pessimiste, L. Q. Jones réalise ici un ovni aussi déroutant qu'attachant. D'abord par l'échange de conversations entretenues entre l'homme et son animal de compagnie doué ici de parole, sachant que ce dernier s'avère beaucoup plus lucide et érudit que son maître ! Ensuite par la dystopie assénée à deux univers distinctes, celui de la surface où tentent de survivre dans la sauvagerie les marginaux les plus défavorisés (on songe inévitablement à Mad-Max 2 !), et celui du monde souterrain où une société plus aisée s'efforce de trouver un fécondateur afin de favoriser leur procréation. Avec un humour plein de sarcasme (le chien Blood vole la vedette à tout le monde dans son sens de la répartie caustique mais aussi sa pudeur à respecter les mauvais choix de son maître !) et l'extravagance de personnages plutôt décalés (chaque habitant de Topeka est peinturluré d'un maquillage laiteux sur le visage !), Apocalypse 2024 mêle la farce satirique au post-nuke en soulignant le caractère dépendant de nos besoins sexuels (Vic est totalement tributaire de ses instincts lubriques !). Certaines mauvaises langues pourraient d'ailleurs reprocher le caractère misogyne de l'intrigue puisque la place de la femme est réduite ici à une fonction perfide et sournoise (sans parler d'objet de soumission dans sa 1ère partie !) afin de renverser le pouvoir et obtenir le trône ! A travers le cheminement indécis d'un rescapé machiste et maladroit, délibéré à épargner son chien pour accoster un monde meilleur, c'est également un récit initiatique que nous relate le réalisateur tout en mettant en évidence une solide histoire d'amitié.


Pittoresque et attachant, étrange et fascinant, Apocalypse 2024 réussit à sortir de la routine dans une tentative iconoclaste de dépoussiérer le genre avec audace, intelligence et ironie mordante (voir l'impensable épilogue confiné dans la farce macabre). La complicité amicale qu'entretiennent l'homme et son chien est une nouvelle fois l'occasion de souligner la fidélité indéfectible qui unissent le maître et l'animal. Une perle rare à faire connaître au plus grand nombre !

Bruno Matéï
3èx


mercredi 30 avril 2014

Predator

                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site futurefantastique.com

de John McTiernan. 1987. U.S.A. 1h47. Avec Arnold Schwarzenegger, Carl Weathers, Elpidia Carrillo, Bill Duke, Jesse Ventura, Sonny Landham, Richard Chaves.

Sortie salles France: 19 Août 1987. U.S: 12 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: John McTiernan est un réalisateur et producteur américain, né le 8 janvier 1951 à Albany à New-York. 1986: Nomads. 1987: Predator. 1988: Piège de Cristal. 1990: A la Poursuite d'Octobre Rouge. 1992: Medicine Man. 1993: Last Action Hero. 1995: Une Journée en Enfer. 1999: Le 13è Guerrier. 1999: Thomas Crown. 2002: Rollerball. 2003: Basic.


Remember, 1987, date à marquer d'une pierre blanche. John McTiernan accomplissant avec Predator un véritable coup de maître pour son second long reconnu depuis comme un classique incontesté. Sans doute inspiré par Terreur Extra-terrestre de Greydon Clark, série B culte au pitch similaire avec le même acteur du rôle-titre), mais aussi de Wolfen de Michael Wadleigh (pour la vision thermique de la créature), John Mc Tiernan opte pour le divertissement à grand spectacle en y combinant film de guerre en vogue (Rambo, Commando, Portés Disparus) et science-fiction rubigineuse (les référentiels Alien et sa suite, X Tro). Démarrant sur les chapeaux de roue avec la mission périlleuse d'un commando parti récupérer un éminent otage en pleine cambrousse, Predator frappe d'emblée par l'ampleur de sa mise en scène dont l'impact des scènes homériques nous laisse déjà le souffle coupé ! Cette petite mise en bouche déjà jouissive n'est rien comparée aux prochaines motivations prédatrices d'un extra-terrestre férue de trophées humains ! C'est donc ici une chasse à l'homme singulière que nous relate le réalisateur par l'intermédiaire d'un rapace redoutablement pernicieux car roi du camouflage et du plaisir de la traque !


Sur le papier, si le scénario peut s'avérer de prime abord risible et aurait sans doute sombré dans la gaudriole Z auprès d'un aimable tâcheron, John Mc Tiernan en extrait un opéra d'action et de violence au souffle primitif ! (voir l'incroyable point d'orgue au cours duquel s'affrontent sauvagement Dutch et le prédateur !). Porté sur les épaules de la montagne de muscles des années 80, Arnold Schwarzenegger  en impose d'ailleurs autant de sa posture saillante pour faire face à la stoïcité de son adversaire. Conçu par Stan Winston, le monstre au look rasta pourvu de gadgets meurtriers s'avère si impressionnant qu'il est depuis entré dans la légende du bestiaire fantastique afin d'égaler le xénomorphe Alien ! Mais avant ce duel homérique resté dans les annales par son ampleur formelle et sa férocité explosive, John Mc Tiernan nous aura peaufiné un redoutable survival lorsqu'une équipe d'élite se retrouve piégée par une présence hostile en interne d'une jungle. Incroyablement photogénique, ce milieu forestier semble véritablement se partager la vedette avec l'ennemi invisible tant le cinéaste exploite à merveille sa végétation très dense où la paranoïa de l'homme est notamment réduite à l'état de soumission. Ce sentiment d'insécurité permanent régi au coeur de la flore demeure d'autant plus palpable par l'anxiété des protagonistes en perdition, sachant que le prédateur se fond facilement à travers la végétation à l'aide d'une combinaison électronique pour mieux les alpaguer.


Véritable leçon de mise en scène exploitant à merveille l'immensité du décor naturel et la convoitise d'une créature protéiforme infiniment ensorcelante et démoniale, Predator marque également de son empreinte un duel au sommet géré entre le survivant et l'étranger, communément épris de rage de vaincre afin d'y asseoir leur suprématie. Chef-d'oeuvre formel baignant dans une dimension mythologique quand bien même la vigueur des combats et de la musique épique redoublent de fulgurance émotionnelle, Predator est probablement l'un des plus grands films d'action génialement combiné à une science-fiction horrifique en vogue qu'Alien(s) imprima de son empreinte liminaire. 

La Chronique de Predator 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/08/predator-2.html

*Bruno
4èx


                                                 

    mardi 29 avril 2014

    WOLF CREEK 2

                                                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site kinostar.com

    de Greg McLean. 2013. Australie. 1h47. Avec John Jarratt, Ryan Corr, Shannon Ashlyn, Philippe Klaus, Gerard Kennedy, Annie Byron.

    Sortie salles France: Prochainement...

    FILMOGRAPHIE: Greg McLean est un réalisateur, scénariste et producteur australien.
    2005: Wolf Creek. 2007: Solitaire. 2014: Wolf Creek 2.


    9 ans séparent Wolf Creek de cette séquelle et le moins que l'on puisse dire c'est que l'attente en valait la chandelle ! Non pas que je trépignais d'espérer une suite à un panthéon de l'horreur qui se suffisait à lui même, mais que ma curiosité emportait finalement le dessus à savoir si Greg Mclean allait habilement relever la tâche pour ne pas se laisser influencer par le produit standard !
    Ca débute fort avec une séquence d'ouverture donnant d'emblée le ton crapuleux ! Un duo de flics zélés s'en prend à notre tueur australien lors d'un simple contrôle de routine ! Bien entendu, les rapports de force vont s'affronter à coups de réparties provocatrices, juste avant de virer à une vendetta criminelle et inverser les rôles de soumission ! Avec ce prologue percutant n'épargnant aucune chance aux victimes, on reconnait bien la patte du réalisateur à illustrer de manière cruelle des mises à mort cinglantes car d'un réalisme quasi insupportable ! Si la suite nous laisse craindre qu'un couple de touristes allemands va à nouveau se retrouver pris en otage et subir les frais du tueur, Greg Mc Lean opte pour une autre orientation avec l'intervention d'un nouveau pèlerin isolé, témoin malgré lui. Ainsi, à partir d'une intrigue plutôt bien élaborée car oscillant efficacement l'action spectaculaire (un accrochage sur bitume rappelant les poursuites endiablées de Duel !), revirements inopinés et intervention aléatoire de protagonistes secondaires, le cinéaste reformule le mode du survival du point de vue d'un seul et unique survivant.


    Avec intensité et sens du suspense exponentiels pour la destinée de l'otage, Wolf Creek 2 renoue donc avec l'horreur hardcore tristement actuelle lorsqu'un serial-killer plus vrai que nature décide de nuire à autrui. Faisant preuve d'un humour noir terriblement inconfortable, Greg Mc Lean relance ensuite l'intérêt avec la nouvelle tâche du tueur suggérant à sa victime un défi. Celui de "questions pour un champion" ! Parodie sardonique à graver dans les annales ! Ces séquences de confrontation psychologique entretenues entre les deux rivaux suscitant une montée graduelle de la tension, dans la mesure où le survivant tentera en désespoir de cause et à multiples reprises de s'emparer d'un marteau avant qu'il ne devienne manchot ! Exploitant également les recoins caverneux de la tanière de l'ogre, véritable charnier de cadavres putrescents ou moribonds, la réalisateur continue de jouer avec nos nerfs de par son sens aiguisé d'une terreur abrupte pour la survie humaine. Une fois encore, si Wolf Creek 2 s'avère aussi tendu, extrême, hargneux et très malsain, il le doit à la maîtrise de sa réalisation, à la photogénie du désert australien (magnifiquement éclairé d'horizons crépusculaires) et à l'interprétation iconique de John Jarratt. L'acteur affichant avec le même enthousiasme goguenard un jeu de dominance entièrement conçu sur le sadisme pervers. 


    Terrifiant, anti ludique et terriblement éprouvant, Wolf Creek 2 ébranle à nouveau le spectateur sans anesthésie et évite l'écueil de la redite à travers un scénario diablotin redoublant d'efficacité pour la condition d'une victime en porte-à-faux. Une séquelle faisant donc honneur à son modèle car toujours opprimante et sans aucune échappatoire, mais beaucoup plus décomplexée à travers sa dérision débridée.  

    Bruno Matéï

    lundi 28 avril 2014

    Les Tueurs de l'Eclipse / Bloody Birthday

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

    de Ed Hunt. 1981. U.S.A. 1h24. Avec Susan Strasberg, José Ferrer, Lori Lethin, Melinda Cordell, Julie Brown, K.C. Martel, Elisabeth Hoy, Billy Jakoby

    Sortie salles France: 26 Mai 1982

    FILMOGRAPHIE: Ed Hunt est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né à Los Angeles.
    1973: Pleasure Palace, 1974: Diary of a Sinner, 1976: Point of no return. 1977: L'Invasion des Soucoupes Volantes. 1979: Plague. 1981: Les Tueurs de l'Eclipse. 1986: Alien Warrior. 1988: The Brain.


    Hit vidéo des années 80 paru sous la bannière d'Hollywood Video, Les Tueurs de l'Eclipse est une savoureuse bande d'exploitation fauchée qui doit son capital sympathie par la succession d'exactions meurtrières commises par de simples bambins. Le Pitch: Trois enfants sans point commun filial naissent le même jour lors d'une éclipse. A l'aube de leur 10 ans, et sans explication plausible, ils provoquent des incidents meurtriers envers les citadins de leur petite bourgade. En reprenant le thème de l'enfant tueur, Ed Hunt ne s'embarrasse ici ni de psychologie, ni de cohérence pour illustrer les méfaits de nos charmantes têtes blondes. Le scénario cumulant sans temps morts les stratégies criminelles qu'ils vont employer pour se débarrasser de leur entourage. Ainsi, de par sa réalisation classique, ses comédiens avenants, voirs parfois cabotins ou inexpressifs (mention à la jeune Lori Lethin dont la bouille s'avère si timorée qu'on ne sait jamais si elle exprime de la gaieté ou de la tristesse lors des épisodes dramatiques !) et ses dialogues élementaires, Les Tueurs de l'Eclipse  aurait pu facilement sombrer dans le navet s'il n'eut été sauvé par le charisme diabolique de ces trois marmots franchement convaincants.


    Si bien qu'avec leur bouille faussement innocente et leur regard étonnemment vicié, le trio s'avère génialement fascinant lorsqu'ils se lancent au défi d'y perpétrer les actes les plus crapuleux. Et donc, en jouant sur l'efficacité de leurs exactions, voire aussi de leur subterfuge afin de discréditer une rivale (la party d'anniversaire), le film insuffle un dynamisme réjouissant en se permettant notamment l'audace d'une violence brutale (coup de pelle, batte de base-ball ou balle reçu en pleine tête, flèche dans l'oeil). D'autant plus que ces bambins s'avèrent très jeunes (ils sont à peine âgés de 10/12 ans) pour commettre de tels actes si bien qu'ils rivalisent de sadisme et d'inventivité pour piéger leurs adversaires (le coup du skate board sur la rampe d'escalier ou celui de la fléchette derrière le trou du placard, l'arme factice échangée contre un vrai dans la ceinture du policier, le jeu du réfrigérateur dans la casse). Outre leur passe-temps favori à exterminer sans remord, ils s'invitent parfois à une partie de voyeurisme derrière le trou d'un placard lors de l'exhibition d'une potiche. Quand au final haletant, Ed Hunt intensifie l'action lors de la séquestration d'une baby-sitter et de son jeune frère communément contraints de se rebeller contre leur autorité anormalement criminelle.


    Bis dans l'âme que les fans savourent à chaque révision, Les Tueurs de l'Eclipse est une farce macabre transcendée de son irrésistible charme bonnard. De par le charisme sardonique du trio de gamins crevant l'écran à chacune de leurs apparitions et la vigueur du rythme fertile en séquences-chocs, ce réjouissant plaisir innocent ne cesse de divertir avec générosité grâce à l'attachante maladresse qu'Ed Hunt met en image avec sincère motivation. Un petit classique en somme n'ayant rien perdu de son efficacité, honorable prétendant pour trôner auprès des meilleurs films d'enfants meurtriers que les années 80 ont su choyer, sans prétention aucune.  

    * Bruno
    5èx

    jeudi 24 avril 2014

    UN TUEUR DANS LA FOULE (Two Minute Warning)

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Larry Peerce. 1976. U.S.A. 1h55. Avec Charlton Heston, John Cassavetes, Martin Balsam, Beau Bridges, Marilyn Hassett, David Janssen, Jack Klugman.

    Sortie salles France: 12 Novembre 1976

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Larry Peerce est un réalisateur américain, né le 19 Avril 1930 dans le Bronw, New-York.
    1973: Les Noces de cendre. 1976: Un tueur dans la foule. 1987: Queenie (télé-film). 1989: Wired. 1995: Mensonges et trahison (télé-film). 1999: Abus de confiance.


    En pleine expansion du genre catastrophe, le réalisateur méconnu Larry Peerce exploite le filon pour mettre en scène Un Tueur dans la foule. Le pitch s'avère toujours aussi limpide. Un tueur embusqué sur le toit d'un stade se prépare à commettre un carnage durant la retransmission d'un match de football. Déniché par la police, le capitaine Peter Holly tente de l'appréhender parmi l'ingérence d'une brigade spéciale. Avec sa réunion de stars notoires (Charlton Heston, Gena Rowlands, John Cassavetes, Martin BalsamBeau Bridges), Un Tueur dans la Foule n'échappe pas aux traditionnels clichés pour nous décrire les liaisons houleuses de couples amoureux. Le problème, c'est qu'une fois de plus, ces seconds rôles de faire-valoir s'avèrent dénués d'intérêt pour leur accorder une quelconque empathie face à leur souci d'argent ou d'infidélité. C'est donc du côté des rôles principaux, en particulier celui du capitaine Holly, incarné avec virilité par Charlton Heston, et celui du chef de la brigade spéciale, endossé avec pragmatisme par John Cassavetes, qu'Un Tueur dans la foule réussit à gagner notre enthousiasme. A eux deux, ils forment un tandem plutôt solide pour nous convaincre de leurs stratagèmes à tenter d'alpaguer le tueur.


    Si le début du film démarre en trombe avec l'acte crapuleux d'un homicide, le tueur exterminant lâchement au hasard d'une route un cycliste lambda, la suite peine quelque peu à insuffler de l'attention pour la représentation des seconds-rôles que j'ai précédemment reproché. Qui plus est, dès que le réalisateur pénètre sa caméra en interne du stade pour s'attarder sur le jeu des footballeurs et sur l'étude sportive des commentateurs, l'ennui se fait un peu pesant en attendant les prochains méfaits du tueur. C'est avec l'arrivée musclée de la brigade spéciale qu'Un Tueur dans la Foule peut enfin démarrer et y insuffler une certaine dose de suspense dans la manière dont elle va pouvoir l'appréhender. Le plus important n'est donc pas de savoir quand le tueur va pouvoir frapper et quels innocents seront ciblés, mais plutôt de comprendre de quelle manière la brigade va bien pouvoir accéder au toit du stade afin de le déjouer. Car positionné sur un abri bétonné, en amont de l'affiche des résultats, le meurtrier a trouvé la planque idéale afin de se prémunir des balles et tirer facilement sur ses proies. Une tension sous-jacente nous est donc retransmise avec l'attitude assidue des services de police à daigner grimper sur le toit, quand bien même un spectateur de la foule va lui aussi apercevoir sa fameuse planque à l'aide de ses jumelles ! Bien évidemment, la dernière partie du film, beaucoup plus intense et surtout spectaculaire, emprunte la voie de la catastrophe pour illustrer les exactions du criminel tirant au hasard de la foule ! Outre la violence cinglante assénée sur les innocents, les mouvements de foule en panique s'avèrent aussi impressionnants que réalistes par l'effectif de figurants déployés et leur désespoir d'échapper aux balles ! Quand aux motivations réelles de l'individu en question, le réalisateur préfère les occulter pour laisser sous entendre la folie d'un sociopathe !


    Hormis ses longueurs, ses situations rebattues et sa réalisation routinière, Un Tueur dans la Foule est suffisamment haletant et violemment spectaculaire pour se laisser gagner par son caractère diablement ludique. La présence solide des vétérans Charlton Heston et John Cassavetes ajoutent au charme vintage que le genre catastrophe marque de son empreinte en cette époque florissante des années 70.  

    Bruno Matéï
    3èx

    mercredi 23 avril 2014

    Soldat Bleu / Soldier Blue

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Ralph Nelson. 1970. U.S.A. 1h55. Avec Candice Bergen, Peter Strauss, Donald Pleasance, John Anderson, Jorge Rivero, Dana Elcar.

    Sortie salles: 23 Avril 1971

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Ralph Nelson est un réalisateur américain, né le 12 Août 1916 à New-York, décédé le 21 Décembre 1987 à Santa Monica. 1962: Requiem for a Heavyweight. 1965: Les Tueurs de San Francisco. 1966: La Bataille de la Vallée du Diable. 1968: Charly. 1970: Soldat Bleu. 1972: La Colère de Dieu. 1975: Le Vent de la Violence. 1976: Embryo. 1979: Christmas Lilies of the Field (télé-film).


    "Depuis l'aube de l'humanité, l'homme a écrit son histoire dans le sang. Mais il a aussi prouvé que l'étincelle divine existe en lui. Il y a dans l'âme humaine une part d'ombre qui date du jour ou Caïn a tué son frère. La fin du film montre, sans la moindre hypocrisie, les horreurs d'un combat où la folie sanguinaire triomphe de la raison. Les atrocités ne sont pas commises seulement contre l'ennemi, mais aussi contre des innocents, des femmes et des enfants. Horreur suprême: tout cela a bel et bien eu lieu".  
     
    "Sous l’uniforme, la honte".
    Western mythique, réputé pour sa subversion d’une violence insoutenable, Soldat Bleu ébranla une génération de cinéphiles à l’orée des années 70. Si, un an auparavant, Sam Peckinpah avait déjà offert un coup de fouet au genre par le truchement d’une ultra-violence chorégraphiée, Ralph Nelson pousse le curseur plus loin pour dénoncer l’horreur brute d’un massacre historique : celui des Cheyennes, survenu le 29 novembre 1864.

    Ce jour-là, une unité de cavalerie américaine — plus de 700 hommes — attaque un paisible village cheyenne à Sand Creek, dans le Colorado. Les Indiens déploient le drapeau américain et un drapeau blanc de reddition. Malgré cela, la charge est lancée, implacable. 500 morts, dont la moitié sont des femmes et des enfants. Scalps arrachés, corps démembrés, viols en série. Le général Nelson A. Miles, chef d’état-major de l’armée, déclarera que ce massacre fut "peut-être le crime le plus ignoble et le plus injuste de l’histoire des États-Unis".

    Ce bref monologue final, récit brut dicté à la toute fin du film, vient sceller le réel, confirmer l’authenticité du génocide indien orchestré par l’impérialisme ricain. 

    Segmenté en deux mouvements bien distincts, le film s’attache d’abord à explorer la relation houleuse d’un duo d’amants en discorde. Après une embuscade sanglante provoquée par les Indiens — coûtant la vie à 21 soldats — Honus Gent, soldat bleu, timoré et candide, croise le chemin de Cresta Lee, une Américaine jadis capturée par un chef indien et restée deux ans parmi les siens. Livrés à eux-mêmes, ils vont devoir survivre dans un désert hostile et rejoindre coûte que coûte le fort voisin.

    Incarnés par Peter Strauss et Candice Bergen, leur complicité à l’écran doit beaucoup au contraste savoureux de leurs esprits : lui discipliné, elle rebelle. Le cliché de la blonde potiche est ici inversé au profit d’une femme impudente, déterminée à faire entendre à la jeune recrue que son armée est coupable de crimes barbares, d’intolérance, de racisme. On est donc loin des poncifs du western lyrique cher à John Ford, avec ses gentils soldats défendant la civilisation contre les "sauvages" destructeurs de scalps.

    Qui plus est, l’usage d’une partition classique aux accents triomphants nous laisse ici un goût amer, dissonant, face au réalisme frontal des affrontements. À travers des ressorts de comédie et de romance, Ralph Nelson parvient à nous attacher à ces personnages, à suivre leur évolution humaine, cette lente domestication de l’autre par la survie partagée.

    Mais avec l’arrivée de la cavalerie, le ton bascule. Le vernis tombe. Et Soldat Bleu se fait tranchant, brutal, implacable. En un souffle, l’aventure tourne au cauchemar. Ce contraste saisissant imprimé sur les vingt-cinq dernières minutes agit comme un électrochoc. Le film nous colle au mur, dans une intensité dramatique où colère, dégoût, tristesse et malaise s’entrelacent jusqu’à l’écoeurement.

    Dans une violence crue, sans fard, Ralph Nelson filme l’horreur : décapitations, scalps, démembrements, viols, infanticides… Le spectateur endure cette fureur bestiale, impuissant, témoin d’une humanité absorbée par sa propre folie sadique. Ces séquences, innommables et inoubliables, hantent l’esprit longtemps après le générique. Elles marquent au fer rouge.  

     
    "Le sang des blés bleus".
    Soldat Bleu, c’est une réflexion sur la cruauté de la vengeance, une métaphore de la guerre du Vietnam, un réquisitoire contre la haine et la barbarie. L’un des westerns les plus crus, les plus intègres, que le cinéma ait osé perpétrer.

    Et si, de prime abord, la romance pittoresque nous avait tant réconfortés, l’horreur gratuite qui en brise la quiétude ne nous épargnera aucun repli.
    Inoubliable. Éprouvant. Avec le cœur meurtri.

    Public averti.

    * Bruno
    3èx


    mardi 22 avril 2014

    Cujo. Prix du Public, Fantasporto, 1987

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Devildead.com

    de Lewis Teague. 1983. U.S.A. 1h31. Avec Dee Wallace Stone, Danny Pintauro, Daniel Hugh Kelly, Christopher Stone, Ed Lauter, Kaiulani Lee.

    Sortie salles France: 10 Août 1983. U.S: 12 Août 1983

    FILMOGRAPHIE: Lewis Teague (né le 8 mars 1938 à Brooklyn, New-York, Etats-Unis) est un réalisateur, monteur, acteur et directeur de la photographie américain.
    1974: Dirty O'Neil. 1979: The Lady in red. 1980: L'Incroyable Alligator. 1982: Fighting Back. 1983: Cujo. 1985: Cat's Eye. 1985: Le Diamant du Nil. 1989: Collision Course. 1990: Navy Seals: les meilleurs. 1991: Wedlock.

     
    "Quand le monstre du placard bave au carreau".
    D'après le célèbre roman de Stephen King, Cujo est porté à l’écran en 1983 par l’habile faiseur de série B Lewis Teague. Succès commercial en salles et en vidéo, ce classique de tension horrifique reste d’une fulgurance intacte, quarante-deux ans après sa sortie.

    Pour rappel : à la suite d’une panne d’essence, une mère et son jeune fils se retrouvent piégés dans leur voiture, à la merci d’un Saint-Bernard rendu fou.
    De cette intrigue aussi simple qu’inattendue, Lewis Teague tire un modèle d’efficacité, jalonné de séquences d’agressions d’une maestria inouïe, devenues anthologies de terreur pure. En resserrant peu à peu l’étau autour d’une ferme isolée, puis de l’habitacle surchauffé d’un véhicule immobilisé en plein soleil, le réalisateur orchestre un huis clos suffocant : dehors, le monstre à quatre pattes rôde, prêt à bondir et déchiqueter tout espoir de fuite.
    Chaque assaut, chaque tentative du chien pour forcer l’habitacle, nous percute par son réalisme cru ; à l’intérieur, mère et enfant improvisent une défense dérisoire, tremblante, déroutée.

    Pour corser encore le cauchemar, le bambin suffoque, ses crises d’asthme épousant la fièvre de la fournaise. Lewis Teague joue nos nerfs jusqu’à la corde, dilate l’attente, libère la fureur en fulgurances de chair et de crocs. On reste interdit devant la performance du Saint-Bernard : masse baveuse, œil torve, fureur contagieuse, déclenchée au moindre son strident — comme ce téléphone dont la sonnerie prolongée déchire le silence pour mieux convoquer la bête. On se demande encore comment les dresseurs ont mis en scène ces pugilats bestiaux d’un réalisme si écorché.

    Dominé par la présence magnétique de Dee Wallace Stone — effondrée, épuisée, mais inébranlable — Cujo offre à son héroïne une terreur de tous les instants, qu’elle incarne avec une conviction presque douloureuse. Danny Pintauro, gamin terrifié jusqu’au sanglot, captive et émeut tant son effroi semble jaillir du ventre. Sa vulnérabilité achève de transmuter ce Saint-Bernard en croquemitaine, en ogre vorace, en monstre du placard incarné. 

    Satire amère sur la cellule conjugale fissurée (adultère, maltraitance, abus flottent dans l’air de la première partie), parabole sardonique sur l’enfance et ses peurs enfouies, Cujo explose littéralement dans ses quarante dernières minutes, suite ininterrompue de morsures et de hurlements à fleur de portière. Soutenu par une partition tantôt oppressante, tantôt furieusement tonitruante, par un jeu d’acteurs qui vit sa peur jusqu’au spasme, et par une mise en scène redoutable de tension, Cujo reste un cauchemar implacable : le plus grand film d’agression canine jamais tourné, encore inégalé à ce jour (avec, à ses côtés, le bouleversant Dressé pour tuer).
    Un monstre ? Non. Une bête foudroyée par le destin — et nous avec.

    *Bruno
    28.04.25. 5èx. VOST. 1h34.

    Récompense: Prix du Public au Festival du film Fantastique de Fantasporto, en 1987.

    Le DVD de Cujo sorti chez nous car édité par Mad Movies n'était pas le montage intégral (1h25, et donc 1h29 en 1080p).
    En revanche le Blu-ray sorti chez nous chez Carlotta l'est (1h35).
    La morsure de Cujo par la chauve souris est plus longue et détaillée. Dans le dvd Mad, la morsure est coupée plus tôt, on voit moins le sang qui coule sur le museau. Dans le blu-ray on insiste plus sur la dégradation physique de Cujo . La 1ère attaque de Cujo avec l'acolyte du garagiste est plus sale et prolongée (beaucoup plus d'éclaboussures de sang). La mort du garagiste est plus gore (morsure au cou en gros plan). La séquence dans la voiture est plus longue et intense (cujo tape plus sur les vitres, transpiration prolongée des protagonistes). Quand Donna sort de la voiture, les morsures sont plus graphiques. Quand Donna poignarde Cujo, c'est plus sanglant (il saigne plus abondamment). Et enfin pour l'épilogue, Donna serre Tad contre elle de manière plus longue pour renforcer l'émotion qui se dégage et le côté tranquille (avant l'estocade).


    lundi 21 avril 2014

    La Mort au Large / L'Ultimo Squala

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site ayay.co.uk

    de Enzo G. Castellari. 1981. Italie. 1h28. Avec James Franciscus, Vic Morrow, Joshua Sinclair, Giancarlo Prete, Micaela Pignatelli.

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Enzo G. Castellari est un réalisateur, scénariste, acteur, monteur et producteur italien, né le 29 Juillet 1938 à Rome (Italie).
    1967: Je vais, je tire et je reviens. 1968: Django porte sa croix. 1968: 7 Winchester pour un massacre. 1968: Tuez les tous... et revenez seul ! 1973: Le Témoin à abattre. 1976: Keoma. 1977: Une Poignée de salopards. 1977: Action Immédiate. 1979: La Diablesse. 1979: Les Chasseurs de Monstres. 1981: La Mort au Large. 1982: Les Nouveaux Barbares. 1982: Les Guerriers du Bronx. 1983: Les Guerriers du Bronx 2. 1987: Striker. 1987: Hammerhead. 1997: Le Désert de Feu.


    Profitant du filon commercial des 2 premiers opus des Dents de la mer, Enzo G. Castellari nous rend ici sa copie Z dans la pure tradition du Bis transalpin. Car reprenant le même schéma narratif que ces modèles, La Mort au Large illustre à nouveau les vicissitudes de touristes d'une station balnéaire pris à parti avec un dangereux requin ! Et pas des moindres puisqu'aux dires du chasseur Ron Hamer, il s'agirait du plus gros poisson jamais aperçu durant toute sa carrière. Lui et l'écrivain Peter Brenton décident donc d'entreprendre une traque en mer afin d'éradiquer l'animal, et ce depuis que le maire eut refusé l'annulation des festivités d'un concours de voiliers.


    Avec ses personnages ultra caricaturaux blablatant leurs répliques impayables dans une posture contractée, ses situations rebattues et son budget dérisoire, la Mort au large ne peut compter que sur l'efficacité du montage et de l'action récurrente pour stimuler le divertissement. Afin d'alpaguer le requin, c'est donc sur les stratégies de quelques protagonistes que le réalisateur compte focaliser son intrigue en l'émaillant de morts spectaculaires. De manière autonome, ils vont donc parcourir la mer à bord de leur bateau, quand bien même le maire de la ville décidera de le traquer en hélicoptère ! Ce qui nous vaut un bel effet gore assez spectaculaire et plutôt efficace dans son effet minimaliste (suspendu dans le vide car agrippé au patin de l'hélicoptère, l'homme se fera arracher les jambes par la mâchoire du squale !). Du côté des médias, un journaliste véreux au plus près de l'affaire profite également de l'évènement pour s'attirer la notoriété et en soudoyant un chasseur de requin un peu trop zélé (là encore, l'agression du requin laisse en exergue une mort grand-guignolesque du plus bel effet). Afin d'y pallier ses moyens dérisoires, Enzo G. Castellari utilise notamment le stock-shot traditionnel pour substituer les rares apparitions du faux requin, mais aussi la maquette pour certaines séquences aquatiques (comme celle du crash de l'hélicoptère ou lors du final explosif).


    Avec l'attachante bonhomie de comédiens de seconde zone au charisme viril (James Franciscus / Vic Morrow) et la fantaisie involontaire de situations de panique, La Mort au Large joue la carte de l'exploitation sous un format modeste de série B. A l'instar du savoir-faire rudimentaire de son auteur mais tout à fait appliqué à rendre une copie Z des plus divertissantes. Ajouter à cela un score entêtant suscitant la menace et vous obtenez la déclinaison la plus ludique de Jaws. Un divertissement aujourd'hui notoire qui fit d'ailleurs de l'ombre au futur projet des Dents de la mer 3 puisque ayant dépassé ses recettes commerciales en terme d'entrées ! 

    *Bruno
    4èx


    vendredi 18 avril 2014

    BRAINDEAD (Dead Alive). Grand Prix à Avoriaz, 1993.

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site kraders.wordpress.com

    de Peter Jackson. 1992. 1h44. Nouvelle Zélande. Avec Timothy Balme, Diana Penalver, Elizabeth Moody, Ian Watkin, Brenda Kendall.

    Sortie salles France: 27 Avril 1993

    FILMOGRAPHIE: Sir Peter Robert Jackson est un réalisateur, producteur et scénarise néo-zélandais, né le 31 Octobre 1961 à Pukerua Bay, North Island (Nouvelle-Zélande).
    1987: Bad Taste. 1989: Les Feebles. 1992: Braindead. 1994: Créatures Célestes. 1995: Forgotten Silver. 1996: Fantômes contre fantômes. 2001: Le Seigneur des Anneaux. 2002: Les Deux Tours. 2003: Le Retour du Roi. 2005: King-Kong. 2009: Lovely Bones. 2012: Le Hobbit: un voyage inattendu. 2013: Le Hobbit: la Désolation de Smaug. 2014: Le Hobbit: Histoire d'un aller et retour.


    Réputé comme le film le plus gore de tous les temps, Braindead se complaît toujours plus dans l'absurdité avec une fougue et un sens de l'invention débridés ! Après avoir été contaminée par un singe mutant ramené d'Indonésie, la mère de Lionel se transforme peu à peu en zombie et finit par transmettre son virus à d'autres habitants de la région. Souhaitant préserver sa vie, Lionel la planque à l'intérieur de sa cave parmi trois autres macchabées. Mais l'arrivée désinvolte de son oncle et d'une ribambelle d'invités vont semer la zizanie dans la maison quand ils vont tenter de se défendre contre ces zombies dopés aux stimulants ! Puisant son inspiration dans les comédies burlesques du temps du muet (celles de Buster KeatonLaurel et Hardy ou encore Charlie Chaplin pour la romance impartie au couple de héros) et des bobines trash déjantées des eighties (Evil-dead, Ré-animator, Street Trash, Frères de Sang, etc), Peter Jackson nous concocte un film hardgore nonsensique et semble avoir été dopé aux amphétamines pour nous avoir conçu autant de situations incongrues (le repas du pudding entre invités chez la mère de Lionel, le couple de zombies en coït procréant un mort-né vivant, la balade en poussette de ce dernier dans le parc familier, le pasteur expert en karaté pour démembrer les zombies du cimetière !). 


    Récompensé du dernier Grand Prix à Avoriaz en 1993, Braindead peut se targuer d'être le mastodonte du gore décomplexé où rire et action se disputent sans relâche. L'incroyable énergie qui se dégage de la mise en scène de Jackson (abus de cadrages obliques et de zooms grossiers afin d'accentuer son caractère grand-guignolesque !), l'extravagance des personnages erratiques et l'horreur déployée à grands renforts d'hectolitres de sang nous plongent dans un carnaval horrifique toujours plus frénétique. A l'instar de ces 35 dernières minutes, anthologie du carnage vomitif contrebalancé par une dérision aussi morbide que pittoresque. Sur ce point, comment oublier le massacre commis à la tondeuse à gazon que Lionel exécute avec une démesure infernale ! Et si aujourd'hui Braindead n'a rien perdu de sa vitalité dans son pouvoir récréatif, c'est notamment grâce à l'habileté d'effets-spéciaux artisanaux bluffants de réalisme ! Certaines séquences compilées en temps réel s'avèrent d'ailleurs si impressionnantes qu'on se demande comment les techniciens ont pu réussir à entreprendre de tels prodiges dans leur souci du détail gore !


    Le chant du cygne du gore à l'ancienne
    Jouissivement gore et délirant par son esprit cartoonesque, Braindead est le grand huit d'une horreur ricanante culminant son apogée dans une dernière orgie apocalyptique ! Le redécouvrir 20 ans après sa sortie prouve à quel point la mise en scène virtuose de l'insatiable Jackson était en avance sur son temps et que l'ère du numérique n'a pas encore surpassé cette bacchanale de tous les excès ! 

    Bruno Matéï
    3èx

    RécompensesGrand prix, Prix des Effets Spéciaux, Prix de la Critique au Festival du film fantastique d'Avoriaz 1993 
    Meilleurs effets spéciaux au Festival international du film de Catalogne en 1992.
    Silver Scream Award au Festival du film fantastique d'Amsterdam 1993.
    Meilleur film et meilleurs effets spéciaux à Fantasporto, 1993.
    Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur (Timothy Balme) et meilleur scénario aux New Zealand Film and TV Awards en 1993.