mercredi 2 mars 2011

Les Raisins de la Mort (Pestizide) de Jean Rollin.


1978. France. 1h30. Avec Marie-Georges Pascal, Félix Marten, Serge Marquand, Mirella Rancelot , Patrice Valota , Patricia Cartier , Michel Herval, Brigitte Lahaie, Evelyne Thomas.

FILMOGRAPHIE: Jean Michel Rollin, Roth Le Gentil est un réalisateur, producteur et scénariste français, né le 3 novembre 1938 à Neuilly-sur-Seine (France). 1958 : Les Amours jaunes, 1961 : Ciel de cuivre, 1963 : L'Itinéraire marin, 1964 : Vivre en Espagne, 1965 : Les Pays loin, 1968 : Le Viol du vampire, 1969 : La Vampire nue, 1970 : Le Frisson des vampires, 1971 : Requiem pour un vampire, 1973 : La Rose de fer, 1974 : Les Démoniaques, 1975 : Lèvres de sang, 1978 : Les Raisins de la mort, 1979 : Fascination, 1980 : La Nuit des traquées, 1981 : Fugues mineures (Les Paumées du petit matin, 1981 : Le Lac des morts vivants (sous le pseudonyme de J. A. Lazer), 1982 : La Morte vivante, 1984 : Les Trottoirs de Bangkok, 1985 : Ne prends pas les poulets pour des pigeons (sous le pseudonyme de Michel Gentil), 1989 : Perdues dans New York, 1990 : La Griffe d'Horus (TV), 1991 : À la poursuite de Barbara, 1993 : Killing Car, 1997 : Les Deux Orphelines vampires, 2002 : La Fiancée de Dracula, 2007 : La Nuit des horloges, 2010 : Le Masque de la Méduse.

 
"Pesticides et putréfaction : la vendange Rollinienne "
Trois ans après Lèvres de sang (1975), Jean Rollin persiste et signe dans le fantastique et l’horreur, après quelques détours X pour renflouer son porte-monnaie. Le producteur Claude Guedj lui confie un récit d’épouvante à tendance catastrophiste, surfant sur la vague des succès américains des seventies : Zombie de Romero, La Tour infernale de GuillerminRollin accepte volontiers cette commande, greffe au mythe du mort-vivant un écho écolo piqué au Massacre des morts-vivants de Jorge Grau et bâtit une ossature « catastrophe ». 
 
Un vigneron expérimente un nouveau pesticide, mais le poison infecte tout le raisin et sème une épidémie. Pendant ce temps, Elisabeth et son amie voyagent en train pour rejoindre son compagnon, gérant d’un vignoble. Elles s’étonnent du wagon quasi désert, jusqu’à l’apparition d’un individu patibulaire, qui s’assoit tout contre Elisabeth. Peu à peu, le visage de l’inconnu se putréfie, boursouflé de pustules ! Pétrifiée, Elisabeth tire la sonnette d’alarme — mais à peine sortie du compartiment, elle découvre le cadavre de son amie dans le corridor. Paniquée, elle s’échappe du train près d’un pont et fuit à travers champs. Débute alors pour elle un cauchemar irrationnel, au cœur d’un village maudit. 

À partir de cette entrée en matière frappante, notre faiseur d’images érotico-poétiques ne révolutionne ni le mythe du zombie ni celui du film catastrophe. Mais il impose malgré tout sa patte : nature filmée dans une campagne écrasée de soleil, onirisme lancinant incarné par Lucie, jeune aveugle vêtue de blanc, errant parmi les rochers ; et bien sûr Brigitte Lahaie, chemise de nuit et chiens cerbères (clin d’œil au Masque du démon et à Barbara Steele), puis, plus tard, nue comme un ver, exposant une anatomie voluptueuse à la lueur d’une nuit hostile.

Entre ces séquences clés, le métrage déroule un chassé-croisé : Elisabeth croise deux inconnues, fuit un village où rôdent des paysans contaminés, zombies sans l’être tout à fait — vivants, mais rongés par une folie meurtrière. Leurs visages suppurants, leurs corps boursouflés de plaies, achèvent de planter une atmosphère d’étrangeté nocturne. On sourit de voir ces rustauds franchouillards se traîner comme des zombies amateurs, démarche traînante, grognements forcés. Quelques pointes de gore émaillent l’intrigue : mannequins décapités maladroitement, fourche plantée dans un ventre de paysanne — bricolages sommaires mais efficaces, grâce à un maquilleur français et à un spécialiste italien des trucages, convié pour l’occasion. 

 
Le rythme, sans être frénétique, tient la route : Elisabeth erre, fuit, croise et recroise la menace grandissante. Certaines scènes nocturnes, ces silhouettes furieuses surgissant de l’ombre, distillent une poésie macabre à laquelle s’ajoute une mélodie électro étrange, qui habille l’atmosphère de terroir gangréné. Les comédiens non professionnels font souvent sourire ; Marie-Georges Pascal, elle, s’en tire mieux que ses comparses. Quant à l’égérie du X, Brigitte Lahaie, elle rayonne pour son premier rôle « traditionnel ». On passera sur le jeu calamiteux de Félix Marten et Serge Marquand, duo de bras cassés achevant le film dans une pantalonnade digne d’un Pécas.


"Le jus du Diable".
Fort sympathique, atmosphérique, bancal mais si attachant, Les Raisins de la mort est une bisserie Z, tour à tour aimablement grotesque et macabre, qui altère un peu la singularité de Rollin, mais s’impose comme son film le plus plaisant et le plus tenu, au sein d’une filmographie inégale mais passionnante. Pour les inconditionnels du (petit) maître, les Raisins de la mort restera à jamais un incontournable.
 
*Bruno 

NOTE: Jean Rollin fait une apparition clin d'oeil durant le prologue.

Dédicace à Mathias Chaput et Jean Rollin qui nous a quitté Mercredi 15 Décembre.

30.11.10

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